[TRADUCTION]
Citation : JA c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2025 TSS 346
Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel
Décision relative à une demande de
permission de faire appel
Partie demanderesse : | J. A. |
Partie défenderesse : | Commission de l’assurance-emploi du Canada |
Décision portée en appel : | Décision rendue par la division générale le 27 janvier 2025 (GE-24-4119) |
Membre du Tribunal : | Glenn Betteridge |
Date de la décision : | Le 9 avril 2025 |
Numéro de dossier : | AD-25-151 |
Sur cette page
- Décision
- Aperçu
- Question en litige
- Je n’accorde pas au prestataire la permission de faire appel
- Conclusion
Décision
[1] La permission de faire appel est refusée. L’appel n’ira pas de l’avant.
Aperçu
[2] J. A. est le prestataire dans la présente affaire. Il veut la permission de faire appel d’une décision de la division générale. Je peux lui accorder la permission si son appel a une chance raisonnable de succès.
[3] Il était enseignant dans un collège commercial. Il a enseigné en ligne. Il a enseigné deux fois, sur une période de deux jours. Il a ensuite quitté son emploi.
[4] La division générale a décidé qu’il avait quitté volontairement son emploi (démissionné), mais qu’il y avait d’autres solutions raisonnables qui s’offraient à lui à ce moment-là. Il aurait pu parler à la vice-directrice des problèmes qu’il avait. Comme il n’était pas fondé à quitter son emploi, il ne pouvait pas recevoir de prestationsNote de bas de page 1.
[5] Le prestataire soutient que la division générale a commis des erreurs de droit et des erreurs de fait importantes.
[6] Malheureusement pour le prestataire, son appel n’a aucune chance raisonnable de succès. Je ne peux donc pas lui donner la permission de faire appel.
Question en litige
[7] L’appel du prestataire a-t-il une chance raisonnable de succès?
Je n’accorde pas au prestataire la permission de faire appel
[8] J’ai lu les demandes d’appel du prestataire (sa demande initiale et celle qu’il a envoyée après que j’ai demandé plus de détailsNote de bas de page 2). J’ai lu la décision de la division générale. J’ai examiné les documents au dossier de la division généraleNote de bas de page 3 et j’ai écouté l’enregistrement de l’audienceNote de bas de page 4. J’ai ensuite rendu ma décision.
[9] Pour les motifs ci-dessous, je n’accorde pas au prestataire la permission de faire appel.
Le critère de la permission de faire appel exclut les appels qui n’ont aucune chance raisonnable de succèsNote de bas de page 5
[10] Je peux donner au prestataire la permission de faire appel si son appel a une chance raisonnable de succèsNote de bas de page 6. Cela signifie qu’il doit soulever un moyen d’appel défendable qui pourrait permettre à son appel d’être accueilliNote de bas de page 7.
[11] Je peux examiner quatre moyens d’appel, que j’appelle des erreursNote de bas de page 8. La division générale a :
- eu recours à une procédure inéquitable ou n’a pas été impartiale (erreur d’équité procédurale);
- utilisé son pouvoir décisionnel incorrectement (erreur de compétence);
- commis une erreur de droit;
- commis une erreur de fait importante.
[12] Les motifs d’appel du prestataire établissent les questions clés et les principaux arguments que je dois examinerNote de bas de page 9. Comme le prestataire se représente lui-même, je vais aussi aller au-delà de ses arguments lorsque j’appliquerai le critère de la permission de faire appelNote de bas de page 10.
Il est impossible de soutenir que la division générale a commis une erreur de droit
[13] Le prestataire a coché la case disant que la division générale a commis une erreur de droitNote de bas de page 11.
[14] La division générale commet une erreur de droit lorsqu’elle ignore un argument qu’elle doit prendre en considération, qu’elle ne fournit pas des motifs adéquats pour sa décision, qu’elle interprète mal une loi, qu’elle utilise un critère juridique erroné ou qu’elle ne suit pas une décision de justice qu’elle doit suivre.
Le prestataire n’a pas expliqué ni donné de raisons pour appuyer ses arguments
[15] Sous la première rubrique [traduction] « erreur de droit » du prestataire, il fait référence à de nombreux paragraphes de la décision de la division générale, disant que le membre a [traduction] « reconnu » ou [traduction] « énoncé » un faitNote de bas de page 12. Cependant, il n’explique pas pourquoi la division générale a commis une erreur de droit dans l’un ou l’autre de ces paragraphes.
[16] Il semble qu’il plaide de nouveau sa cause en fonction des parties de la décision qu’il aime ou avec lesquelles il est d’accord. Cependant, il n’a pas démontré que la division générale a commis une erreur de droit dans les paragraphes auxquels il fait référence.
La division générale n’avait pas à utiliser le droit de la santé et de la sécurité au travail
[17] Le prestataire soutient que la division générale a commis une erreur de droit parce qu’elle aurait dû utiliser la Loi sur la santé et la sécurité au travail de l’OntarioNote de bas de page 13. Il affirme que la loi lui donne le droit de refuser un travail dangereux et malsain. Il dit qu’il s’agit d’un exemple d’erreur que la division générale a commise en appliquant la Loi sur l’assurance-emploi, mais pas l’autre loi.
[18] Je ne retiens pas l’argument du prestataire. Il ne démontre pas qu’il est possible de soutenir que la division générale a commis une erreur de droit ou que son appel a une chance raisonnable de succès, et ce, pour cinq raisons.
- Premièrement, aux termes de l’article 29(c) de la Loi sur l’assurance-emploi, la division générale devait examiner la preuve concernant sa situation. C’est ce qu’elle a fait (paragraphes 24 à 35). Elle devait ensuite tirer des conclusions de fait au sujet des circonstances qui existaient au moment où il a démissionné. Elle a fait cela (paragraphe 41). Enfin, elle devait décider si le départ était la seule solution raisonnable dans ces circonstances. Elle a fait cela (paragraphes 42 à 48).
- Deuxièmement, la division générale a examiné si ses conditions de travail constituaient un danger pour sa santé ou sa sécurité (paragraphes 30, 46 et 47Note de bas de page 14). Elle a conclu qu’il n’avait pas démontré que la situation était si mauvaise qu’il ne pouvait pas continuer à travailler (paragraphe 46).
- Troisièmement, il s’agit d’un nouvel argument. À la division générale, le prestataire n’a pas fait valoir son [traduction]« droit de refuser un travail dangereux » dans son argument lié à la Loi sur la santé et la sécurité au travail. Par conséquent, la division générale n’a pas commis d’erreur de droit en ne tenant pas compte de cet argument. Elle n’avait pas à examiner un argument qu’il n’avait pas présenté.
- Quatrièmement, même si la Loi sur la santé et la sécurité au travail prévoit le droit de refuser de faire un travail dangereux, la loi établit une procédure qu’une personne doit suivre lorsqu’elle refuse de faire un travail dangereux. Il n’y avait aucune preuve à ce sujet à la division générale. Autrement dit, il n’y avait aucune preuve qu’il s’était prévalu de ce droit.
- Cinquièmement, le droit de refuser de travailler est précisément ce droit : celui de refuser de travailler tant que la personne est confrontée à des circonstances dangereuses. Il ne s’agit pas du droit de démissionner. Cela ne démontre pas automatiquement que la personne était justifiée de démissionner et de mettre fin à sa relation d’emploi au titre de la Loi sur l’assurance-emploi. Par conséquent, même si le prestataire avait démontré qu’il avait le droit de refuser de travailler, la division générale devait tout de même examiner s’il avait une autre solution raisonnable que de démissionner. Et il l’a fait. Il aurait pu discuter de ces questions avec la vice-directriceNote de bas de page 15.
[19] J’ai examiné la décision de la division générale. Celle-ci a établi les bons critères juridiques pour le départ volontaire et pour la justification (paragraphes 13 et 21 à 23). Elle a ensuite utilisé ces critères, et ses motifs sont adéquats.
Résumé
[20] Le prestataire n’a pas démontré qu’il existe un argument défendable selon lequel la division générale a commis une erreur de droit. Et je n’ai trouvé aucun argument défendable.
Il est impossible de soutenir que la division générale a commis une erreur de fait importante
[21] Le prestataire a coché la case disant que la division générale a commis une erreur de fait importante.
[22] La division générale commet une erreur de fait importante si elle fonde sa décision sur une conclusion de fait qu’elle a tirée en ignorant ou en interprétant incorrectement des éléments de preuve pertinentsNote de bas de page 16. Je peux présumer que la division générale a examiné tous les éléments de preuve. Elle n’a pas à faire référence à chacun d’entre euxNote de bas de page 17.
La division générale n’a pas ignoré la preuve montrant que le prestataire a fait l’objet d’agressions à caractère raciste
[23] Le prestataire affirme que la division générale a commis une erreur au paragraphe 29 lorsqu’elle a écrit : « De plus, l’appelant dit que les étudiantes et les étudiants avaient un comportement abusif envers lui. Ils lui criaient après, refusaient de l’écouter et lui manquaient de respect de façon générale. » Il dit que ce n’est pas exact parce qu’il a déclaré : [traduction] « J’ai fait l’objet d’agressions à caractère raciste de la part d’une étudianteNote de bas de page 18 ».
[24] Je ne peux pas accepter l’argument du prestataire. Il n’existe pas de cause défendable selon laquelle la division générale aurait ignoré ou mal interprété la preuve du prestataire.
[25] Le prestataire n’a jamais utilisé l’expression « agression à caractère raciste ». Voici son témoignage sous serment sur le comportement problématique d’une étudiante :
[traduction]
J’ai l’impression d’avoir été traité de façon irrespectueuse à bien des égards. Elle n’arrêtait pas… elle a comme un peu fait allusion à la race et à différentes choses, et a dit que je n’étais pas qualifié pour enseigner, et qu’elle ne comprenait pas comment je pouvais même être un enseignant, ce genre de chosesNote de bas de page 19.
[26] C’est la seule fois où il a parlé de race (ou de racisme) dans son témoignage. Et il n’a rien dit à ce sujet dans sa demande de révision ni dans ses motifs d’appelNote de bas de page 20.
[27] Je présume que la division générale était au courant de ces éléments de preuve lorsqu’elle a exposé et soupesé la preuve du prestataire au sujet des mauvais comportements des étudiantes et des étudiants (paragraphes 5, 29 et 46). La division générale utilise les mots « abusif » et « irrespectueux ». Elle a aussi admis que les étudiantes et les étudiants traitaient mal le prestataire (paragraphe 41).
[28] Le fait que la division générale n’ait pas utilisé le mot « race » dans sa décision ne démontre pas que l’appel du prestataire a une chance raisonnable de succès. Cela ne me fait pas douter de la conclusion de la division générale selon laquelle il était raisonnable pour lui de parler du comportement des étudiantes et des étudiants avec la vice-directrice plutôt que de démissionner après avoir enseigné deux cours en ligne.
Les autres arguments du prestataire ne démontrent pas que la division générale a ignoré ou mal compris sa preuve
[29] Le prestataire affirme que la division générale n’a pas reconnu les éléments suivants :
- Le collège communiquait avec lui seulement par courriel, sauf pour son entrevue.
- Il a perdu l’espoir que l’employeur réglerait ses problèmes.
- La vice-directrice aurait peut-être pu l’aider.
- Il estimait que la vice-directrice aurait dû assumer une plus grande responsabilité dans son courriel puisque celui-ci disait seulement qu’elle l’invitait à discuter des problèmes auxquels il était confronté, et qu’elle voulait savoir si son courriel signifiait qu’il ne travaillait plus pour eux.
- La vice-directrice a mentionné la possibilité de démissionner dans son courriel, alors il a eu l’impression qu’elle souhaitait qu’il démissionne, mais son intention initiale n’était pas de démissionner.
[30] La division générale n’a pas ignoré que la vice-directrice a mentionné la possibilité de démissionner dans son courriel et lui a demandé de confirmer s’il démissionnait. Elle a reconnu cette preuve (paragraphe 16) et ne l’a pas mal comprise.
[31] Le fait bien plus pertinent est que le prestataire a confirmé qu’il démissionnait, ce qui montre qu’il a choisi de démissionner (paragraphes 17 et 18).
[32] Les autres éléments de preuve soulevés par le prestataire sont hypothétiques, sans rapport avec le critère juridique ou les deux. Et aucun des arguments du prestataire ne me fait douter des deux conclusions clés de la division générale. Elle a conclu que le prestataire avait démissionné. Elle a conclu qu’une autre solution raisonnable s’offrait à lui dans les circonstances. Autrement dit, au titre de la Loi sur l’assurance-emploi, il avait la responsabilité d’accepter l’offre de la vice-directrice de parler au téléphone pour tenter de régler les problèmes qu’il avait soulevés, plutôt que de démissionner quand il l’a faitNote de bas de page 21.
[33] J’ai examiné les documents présentés à la division générale et écouté l’audience. La preuve appuie la décision de la division générale. Aucun élément de preuve ne contredit directement l’une ou l’autre des principales conclusions de la division générale.
Résumé
[34] Le prestataire n’a pas démontré qu’il était possible de soutenir que la division générale a fondé sa décision sur une erreur de fait. Et je n’ai trouvé aucun argument défendable.
Conclusion
[35] Le prestataire n’a pas démontré que la division générale avait commis une erreur défendable qui pourrait modifier l’issue de son appel. Et je n’ai trouvé aucun argument défendable.
[36] Cela m’indique que son appel n’a aucune chance raisonnable de succès. Je ne peux donc pas lui donner la permission de faire appel de la décision de la division générale.