Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : JA c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2025 TSS 347

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelant : J. A.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (700689) datée du 3 décembre 2024 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Gary Conrad
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience : Le 21 janvier 2025
Personne présente à l’audience : Appelant
Date de la décision : Le 27 janvier 2025
Numéro de dossier : GE-24-4119

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté.

[2] L’appelant n’a pas démontré qu’il était fondé (c’est-à-dire qu’il avait une raison acceptable selon la loi) à quitter son emploi quand il l’a fait. Il n’était pas fondé à quitter son emploi parce que son départ n’était pas la seule solution raisonnable dans son cas. Par conséquent, il est exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

Aperçu

[3] L’appelant a quitté son emploi, mais il affirme qu’il n’a pas démissionné.

[4] L’appelant affirme qu’il a été embauché pour donner un cours, mais qu’on ne lui a pas fourni tout le matériel dont il avait besoin pour enseigner, ce qui a rendu son travail très difficile.

[5] De plus, les étudiantes et les étudiants de sa classe avaient un comportement abusif envers lui et cela lui causait des problèmes de santé mentale.

[6] Il dit avoir essayé de parler à plusieurs personnes à l’école, mais personne n’a vraiment rien fait pour l’aider.

[7] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a examiné les raisons pour lesquelles l’appelant a quitté son emploi. Elle a décidé qu’il avait quitté volontairement son emploi (c’est-à-dire qu’il avait choisi de quitter son emploi) sans justification. Elle ne peut donc pas lui verser de prestations.

[8] La Commission affirme que l’appelant aurait pu travailler avec son employeur pour régler les problèmes qu’il avait puisqu’il a travaillé seulement deux jours et que son employeur lui a offert de lui parler.

Questions en litige

[9] L’appelant a-t-il quitté volontairement son emploi?

[10] Dans l’affirmative, était-il fondé à le faire?

Analyse

Départ volontaire

[11] L’appelant affirme qu’il n’a pas démissionné.

[12] Il dit avoir parlé à la vice-directrice de l’école et l’avoir informée que, pour diverses raisons, il ne pouvait pas continuer à travailler. Il dit que la vice-directrice a interprété cela comme un départ, alors en réalité, il a été congédié.

[13] Pour établir si l’appelant a quitté volontairement son emploi, la question qu’il faut se poser est simple : avait-il le choix de rester ou de partirNote de bas de page 1?

[14] Je conclus que l’appelant a quitté volontairement son emploi parce qu’il a démissionné et qu’il aurait pu continuer à travailler s’il avait choisi de ne pas démissionner. Autrement dit, il avait le choix de rester ou de partir.

[15] Le 13 août 2024, l’appelant a envoyé un courriel à la vice-directrice de l’école dans lequel il énumère les nombreux problèmes qu’il éprouvait. Il a terminé le courriel en disant qu’il estimait que ce n’était pas l’idéal pour son bien-être mental de continuer à donner le cours qui lui avait été assignéNote de bas de page 2.

[16] La vice-directrice a répondu plus tard dans la journée en disant qu’elle était reconnaissante que l’appelant ait attiré son attention sur ces préoccupations et qu’elle était prête à l’appeler pour en discuter plus en détail. Cependant, elle a dit qu’en raison de la façon dont son courriel était écrit, elle a eu l’impression qu’il démissionnait, alors elle lui a demandé de confirmer s’il démissionnait effectivementNote de bas de page 3.

[17] L’appelant a répondu le lendemain matin que la vice-directrice devrait traiter son courriel précédent comme étant sa démission et a confirmé qu’il ne souhaitait plus travailler pour l’employeurNote de bas de page 4.

[18] J’estime que cet échange de courriels démontre que c’est l’appelant qui a choisi de mettre fin à sa relation de travail et qu’il aurait pu continuer à travailler pour son employeur s’il avait choisi de ne pas démissionner.

[19] Il avait le choix de rester ou de partir. Il n’avait pas été congédié, il avait toujours son emploi et rien ne prouve qu’il n’aurait pas pu continuer à travailler s’il avait choisi de ne pas démissionner.

[20] Par conséquent, comme il avait le choix de rester ou de partir, son départ était volontaire.

Justification du départ

[21] La loi prévoit que l’appelant est exclu du bénéfice des prestations s’il a quitté volontairement son emploi et qu’il n’était pas fondé à le faireNote de bas de page 5. Il ne suffit pas d’avoir une bonne raison de quitter un emploi pour prouver que l’on était fondé à le faire.

[22] La loi explique ce que signifie « être fondé à ». Elle prévoit que l’appelant sera fondé à quitter son emploi s’il n’avait pas d’autre solution raisonnable que de démissionner au moment où il l’a fait.

[23] C’est à l’appelant de prouver qu’il était fondé à quitter volontairement son emploiNote de bas de page 6. Il doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’il doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable que quitter son emploi était la seule solution raisonnable dans son cas. Pour décider si l’appelant était fondé à quitter son emploi, je dois examiner toutes les circonstances entourant son départ.

Ce que dit l’appelant

[24] L’appelant affirme que son cours a commencé le 12 août 2024, mais que le matériel dont il avait besoin pour enseigner lui a seulement été fourni le 8 août 2024, alors il a eu très peu de temps pour se préparer.

[25] Alors, il n’a pas été payé pour le temps de préparation, et il était au courant de cela, mais c’est parce qu’on lui a dit qu’il n’aurait pas à préparer quoi que ce soit, que tout serait fait pour lui.

[26] Malheureusement, les documents qui lui ont été donnés pour le cours ne correspondaient pas au plan de cours. On y parlait de devoirs, de documents à distribuer et de lectures dans des livres qui n’étaient pas à sa disposition.

[27] Il a tenté de communiquer avec plusieurs personnes au sujet de ce problème, mais aucune d’entre elles ne lui a donné une solution.

[28] Il a dit que cela rendait l’enseignement très difficile, car les étudiantes et les étudiants étaient frustrés de voir que les documents auxquels on faisait référence n’étaient pas ceux qu’ils avaient.

[29] De plus, l’appelant dit que les étudiantes et les étudiants avaient un comportement abusif envers lui. Ils lui criaient après, refusaient de l’écouter et lui manquaient de respect de façon générale.

[30] Il affirme que ce comportement abusif lui causait des problèmes de santé mentale, en plus du fait qu’il s’occupait de son père qui est atteint d’un cancer et qui est mourant.

[31] Il dit que le stress l’a amené à faire une crise cardiaque en décembre 2024.

[32] Il affirme avoir parlé de tout cela avec la vice-directrice et, même s’il a tenté de la joindre à plusieurs reprises, il n’a jamais été en mesure de lui parler directement.

[33] Enfin, l’appelant affirme qu’il avait un autre emploi lorsqu’il a démissionné, car il travaillait au conseil scolaire catholique comme enseignant en approvisionnement et enseignant dans une académie.

Ce que dit la Commission

[34] La Commission affirme qu’une solution raisonnable aurait été de discuter de ses problèmes avec la vice-directrice, comme elle l’avait proposé.

[35] La Commission affirme également que l’appelant a seulement travaillé à cet emploi deux jours et qu’il n’a pas donné suffisamment de temps à l’employeur pour tenter de corriger les problèmes qu’il a soulevés.

Mes conclusions sur la justification

[36] Je conclus que l’appelant n’était pas fondé à quitter son emploi parce qu’il n’avait pas l’assurance raisonnable d’un autre emploi dans un avenir immédiat au moment où il a quitté son emploi.

[37] Il a déclaré avoir cessé d’enseigner à l’académie en avril 2024 en raison d’un manque de travail. Comme il a quitté son employeur dans le présent appel en août 2024, il était clair qu’il ne travaillait pas à l’académie à ce moment-là.

[38] Quant au Conseil des écoles catholiques, il a quitté l’employeur dans le présent appel en août 2024 et l’école catholique était fermée pour l’été. Elle a repris ses activités en septembre 2024.

[39] De plus, il était enseignant suppléant, ce qui signifie qu’il remplaçait les personnes qui étaient en congé. Il n’avait donc aucune garantie de travailler, alors il ne pouvait même pas savoir quand, ni si, il travaillerait pour le conseil scolaire.

[40] Par conséquent, pour ces motifs, je conclus que l’appelant n’avait aucune assurance raisonnable d’emploi dans un avenir immédiat lorsqu’il a quitté son emploi en août 2024. Il créait un risque de chômage en quittant cet emploi puisqu’il avait seulement la possibilité de travailler pour le Conseil des écoles catholiques et que cette possibilité serait dans le futur, et non au moment où il a démissionné.

[41] Pour ce qui est de toutes les raisons pour lesquelles l’appelant a déclaré avoir quitté l’emploi en lien avec le présent appel :

  • Je reconnais que les documents fournis à l’appelant pour donner le cours ne correspondaient pas à ce qui était prévu dans le plan de cours.
  • Je reconnais qu’il a communiqué avec quelques personnes pour essayer de résoudre ce qu’il estimait être les problèmes liés au matériel qui lui était fourni et qui ne correspondait pas au plan de cours.
  • Je reconnais qu’il n’a pas été en mesure de joindre la personne qui était censée être responsable du matériel d’apprentissageNote de bas de page 7.
  • Je reconnais qu’il n’a pas été payé pour le temps de préparation.
  • Je reconnais que les étudiantes et les étudiants le traitaient mal.

[42] Cependant, même si j’accepte toutes ces choses, je juge qu’il aurait quand même été raisonnable de parler à la vice-directrice plutôt que de démissionner.

[43] Premièrement, il savait qu’il ne serait pas payé pour le temps de préparation et il a quand même accepté l’emploiNote de bas de page 8. Il ne peut pas maintenant dire qu’une condition qu’il a acceptée est la cause de son départ.

[44] Deuxièmement, je comprends tous les problèmes qu’il avait, mais la vice-directrice a dit qu’elle était prête à lui parler de tous ses problèmes, et elle a même dit qu’elle avait communiqué avec la personne responsable de fournir le matériel d’enseignement.

[45] Il aurait été raisonnable pour l’appelant de parler à la vice-directrice et de voir ce qu’il pouvait faire pour régler les problèmes qu’il éprouvait puisqu’il s’agissait littéralement de sa deuxième journée, et peut-être que la vice-directrice aurait pu l’aider. Peut-être qu’elle n’aurait pas pu, mais comme il n’a jamais eu cette conversation avec elle, nous ne le saurons jamais.

[46] Troisièmement, même si je peux comprendre qu’il serait contrariant que les étudiantes et les étudiants le traitent de façon irrespectueuse, l’appelant n’a pas prouvé que la situation était si grave qu’elle a engendré une crise de santé mentale qui a fait en sorte qu’il ne pouvait pas continuer à travailler. Il aurait également été raisonnable d’en parler à la vice-directrice comme elle l’avait proposé.

[47] De plus, même si je peux accepter que ce soit le stress qui a causé sa crise cardiaque en décembre 2024, c’était des mois après qu’il a quitté son emploi, et je peux seulement prendre en considération les problèmes qui existaient au moment où il a quitté son emploi pour établir s’il était fondé à le faireNote de bas de page 9.

[48] Par conséquent, comme j’ai conclu que l’appelant avait d’autres solutions raisonnables qui s’offraient à lui au moment où il a quitté son emploi, cela signifie qu’il n’était pas fondé à quitter son emploi et qu’il est donc exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

Conclusion

[49] L’appel est rejeté.

[50] L’appelant n’était pas fondé à quitter son emploi parce qu’il avait une autre solution raisonnable qui s’offrait à lui.

[51] Comme l’appelant n’était pas fondé à quitter son emploi, cela signifie qu’il est exclu du bénéfice des prestations.

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