[TRADUCTION]
Citation : QI c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2025 TSS 394
Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi
Décision
Partie appelante : | Q. I. |
Partie intimée : | Commission de l’assurance-emploi du Canada |
Décision portée en appel : | Décision de révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (635873) datée du 17 janvier 2024 (communiquée par Service Canada) |
Membre du Tribunal : | Marc St-Jules |
Date de la décision : | Le 4 avril 2025 |
Numéro de dossier : | GE-25-634 |
Sur cette page
Décision
[1] Q. I. est l’appelant dans la présente affaire. Son appel à la division générale du Tribunal de la sécurité sociale n’ira pas de l’avant parce qu’il n’a pas été déposé à temps.
Aperçu
[2] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a refusé de verser des prestations à l’appelant. Elle a décidé qu’il avait quitté volontairement son emploi sans justification. L’appelant a demandé une révision de cette décision.
[3] Après révision, la Commission a maintenu sa décision. Cette décision a été communiquée verbalement à l’appelant le 16 janvier 2024Note de bas de page 1. Une lettre a ensuite été envoyée le 17 janvier 2024Note de bas de page 2. Cette décision a été rendue en application de l’article 112 de la Loi sur l’assurance-emploi. Le Tribunal a reçu l’appel de cette décision le 28 février 2025Note de bas de page 3.
[4] Selon l’article 52(2) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, une partie appelante ne peut en aucun cas déposer un appel à la division générale du Tribunal plus d’un an après que la décision de révision lui a été communiquée.
[5] Le Tribunal doit décider si l’appel a été déposé à temps.
Question que je dois examiner en premier
J’ai décidé de garder les deux appels séparés
[6] Je suis saisi de deux appels. J’ai décidé de les garder séparés. Le présent appel porte sur une exclusion pour départ volontaire. L’autre appel porte sur une demande d’antidatation que la Commission a rejetée.
[7] Les Règles de procédure du Tribunal de la sécurité sociale prévoient que le Tribunal peut joindre des appels s’ils portent sur une question commune et que le fait de les joindre ne crée pas d’injustice pour les partiesNote de bas de page 4.
[8] J’estime que le fait de garder les appels séparés ne cause aucun préjudice à l’appelant. Il y a plusieurs raisons à cela.
- Les appels portent sur des questions sans rapport les unes avec les autres.
- En rendant deux décisions, chacune d’entre elles est plus concise.
[9] La principale raison pour laquelle je n’ai pas joint les appels est qu’ils portent sur des questions sans rapport les unes avec les autres. Ils traitent de différents articles de loi. De plus, le présent appel a été reçu par le Tribunal bien plus de 30 jours après que la décision de révision a été communiquée à l’appelant. L’autre appel a été déposé dans les 30 jours suivant la décision de révision.
[10] L’appel n’ira pas de l’avant.
Une conférence préparatoire a été tenue
[11] Une conférence préparatoire a été tenue le 12 mars 2025. Elle n’a pas été fixée en fonction du présent appel. Au moment où elle a été fixée, je n’étais pas au courant de son existence. Ce n’est qu’au début de la conférence préparatoire que j’ai appris l’existence de l’appel.
[12] Au cours de la conférence préparatoire, il a été question de l’autre appel et des ressources disponibles pour trouver une représentante ou un représentant. La fixation d’une audience a également été abordée.
[13] En tant que membre du Tribunal, je n’ai pas pu discuter du présent appel au cours de la conférence préparatoire. Il ne m’avait pas été attribué et je ne pouvais donc pas l’examiner. De plus, je n’étais pas au courant de la question en litige et je ne m’étais pas familiarisé avec l’appel.
[14] Comme l’appel n’a pas été examiné, l’enregistrement audio de la conférence préparatoire n’a pas été ajouté au dossier d’appel. De plus, le résumé de la conférence préparatoire n’a pas été inclus dans le dossier d’appel.
Analyse
[15] Le Tribunal conclut que la décision de révision de la Commission a été communiquée plus d’un an avant le 28 février 2025. L’appel n’ira pas de l’avant. Mon analyse se trouve dans les paragraphes suivants.
[16] La Commission a fourni un compte rendu d’un appel téléphonique avec l’appelant le 16 janvier 2024Note de bas de page 5. La discussion a porté sur les raisons pour lesquelles il a démissionné de son emploi en septembre 2023. La Commission a indiqué qu’elle avait informé l’appelant qu’elle maintenait sa décision, c’est-à-dire qu’elle lui refusait des prestations parce qu’il avait quitté volontairement son emploi sans justification.
[17] Le compte rendu de la Commission révèle également qu’à la fin de l’appel téléphonique du 16 janvier 2024, l’appelant a été informé de son droit de faire appel au Tribunal dans un délai de 30 jours.
[18] Une lettre a été envoyée à l’appelant le lendemainNote de bas de page 6. Le Tribunal fait remarquer que cette lettre informe l’appelant qu’il disposait de 30 jours suivant la réception de l’avis de décision pour faire appel au Tribunal. Le numéro de téléphone du Tribunal figure dans cette lettre.
[19] L’appelant a bel et bien fourni une raison pour expliquer son retardNote de bas de page 7. Il a écrit qu’au moment où il a reçu l’avis de décision, il travaillait déjà pour son prochain employeur.
[20] J’ai envoyé une lettre à l’appelant le 17 mars 2025Note de bas de page 8 pour lui demander plus d’information sur son retard entre janvier 2024 et le 28 février 2025.
[21] L’appelant a réponduNote de bas de page 9. Voici le contenu de sa réponse :
- L’appelant reconnaît avoir parlé à une personne travaillant pour la Commission, mais ne se souvient pas de la date ou du mois exacts. Il ne se souvient pas de tous les détails de la discussion. L’appelant affirme également que cette personne a tenté de le manipuler.
- L’appelante soutient que recevoir des prestations d’assurance-emploi n’était pas sa priorité. Sa priorité était de bâtir sa carrière. C’est pourquoi il n’a pas présenté d’appel tout de suite, car il travaillait.
- L’appelant dit aussi avoir pris le temps d’analyser la manipulation qu’il a subie de la part du personnel de la Commission de l’assurance-emploi.
- L’appelant a confirmé que son adresse n’avait pas changé depuis décembre 2021. L’adresse utilisée pour la lettre datée du 17 janvier 2024 était correcte.
- L’appelant ne se souvient pas de la date exacte à laquelle il a reçu la lettre. Il estime qu’il l’a reçue le 28 février 2024 ou plus tard. Il pense également avoir ouvert la lettre au plus tard le 10 mars 2024.
- L’appelant a ajouté qu’il ne se souvient pas de la date exacte à laquelle il a reçu la lettre, mais qu’il avait estimé qu’il l’avait reçue le 28 février 2024 parce que c’était [traduction] « la date la plus proche à laquelle il pouvait penser ».
- L’appelant croit également que la lettre n’a pas été livrée avant le 28 février 2024 parce que le courrier à son adresse est parfois acheminé vers un autre immeuble qui ressemble beaucoup au sienNote de bas de page 10.
Communication verbale
[22] J’estime que l’appelant a été informé verbalement de la décision de révision le 16 janvier 2024. La Commission a documenté cette conversation et l’a sauvegardée en temps opportun. L’appelant ne se souvient pas de la date ou du mois où il a parlé à la Commission. Pour cette raison, je conclus que je dois admettre que cette conversation a eu lieu le 16 janvier 2024. Aucun élément de preuve ne contredit cette affirmation.
Communication écrite
[23] Je n’aborderai que la question de la date de réception de la lettre, puisque l’appelant reconnaît l’avoir reçue. Je dois donc déterminer la date à laquelle on lui a communiqué le contenu de la lettre.
[24] Je conclus que la lettre a été communiquée à l’appelant au plus tard le 31 janvier 2024. Postes Canada affirme qu’elle livre le courrier dans un délai de quatre jours ouvrables partout au CanadaNote de bas de page 11. J’ai pris en compte un délai 10 jours ouvrables pour couvrir de possibles retardsNote de bas de page 12.
[25] Je ne suis pas convaincu par l’argument de l’appelant selon lequel il a reçu la lettre le 28 février 2024. Il y a plusieurs raisons à cela.
- La première est qu’il a fait cette déclaration environ un an après les faits.
- Le deuxième concerne les termes utilisés par l’appelant. Il dit qu’il avait estimé qu’il avait reçu la lettre le 28 février 2024 parce que c’était la date la plus proche à laquelle il avait pu [traduction] « penser ». Ce ne sont pas des termes convaincants.
- L’appelant a écrit qu’il ne se souvenait pas du jour ou du mois où il s’était entretenu avec la Commission au sujet de la décision de révision. Cependant, il se souvient qu’il a reçu une lettre datée du 17 janvier 2024 le 28 février 2024. Encore une fois, le fait qu’il se souvienne d’une date, mais pas d’une autre n’est pas très convaincant.
[26] Je reconnais que l’appelant affirme qu’il y a des problèmes de courrier dans son quartier. Cela ne me convainc pas. La lettre est datée du 17 janvier 2024. J’estime qu’il est improbable qu’une lettre ait été mal acheminée pendant si longtemps. Il y a aussi le fait que l’appelant a accès à la lettre par l’intermédiaire de son compte Mon dossier Service Canada. Cela n’a cependant joué qu’un très faible rôle dans ma décision. En effet, je ne sais pas quand l’appelant s’est connecté à son compte.
[27] Je conclus que le Tribunal a reçu l’appel le 28 février 2025. Le document GD2 est estampillé comme ayant été reçu le 28 février 2025. Je n’ai aucune raison de mettre en doute cette date. Je reconnais que l’appelant a envoyé son appel par le poste plus tôt. J’estime que l’on peut aussi tenir compte d’un délai de 10 jours ouvrables pour l’envoi de courrier au Tribunal. Ainsi, même en admettant un délai de 10 jours ouvrables, l’appelant a envoyé son appel le 13 février 2025Note de bas de page 13.
[28] Je conclus que la décision a été communiquée verbalement à l’appelant le 16 janvier 2024. Je juge que la décision écrite lui a été communiquée au plus tard le 31 janvier 2024. Je conclus que le Tribunal a reçu son appel le 28 février 2025. Je reconnais que l’appelant l’a peut-être envoyé plus tôt, mais même en tenant compte d’un délai de 10 jours ouvrables, il ne l’a fait que plus d’un après qu’on lui a communiqué la décision de révision.
[29] Le Tribunal doit appliquer l’article 52(2) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, qui prévoit clairement qu’une partie appelante ne peut en aucun cas déposer un appel plus d’un an après que la décision de révision lui a été communiquée.
Conclusion
[30] L’appel de l’appelant a été reçu plus d’un an après que la décision de révision lui a été communiquée. Il est donc trop tard pour faire appel de la décision au Tribunal.
[31] Par conséquent, l’appel n’ira pas de l’avant.