Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : RL c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2025 TSS 387

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision relative à une demande de
permission de faire appel

Partie demanderesse : R. L.
Représentante : T. S.
Partie défenderesse : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 5 mars 2025 (GE-25-333)

Membre du Tribunal : Glenn Betteridge
Date de la décision : Le 14 avril 2025
Numéro de dossier : AD-25-255

Sur cette page

Décision

[1] La permission de faire appel est refusée. L’appel n’ira pas de l’avant.

Aperçu

[2] R. L. est le prestataire dans cet appel. Il souhaite faire appel d’une décision de la division générale. Je peux lui accorder la permission de faire appel si son appel a une chance raisonnable de succès.

[3] La division générale a décidé qu’il avait perdu son emploi pour une raison qui constitue une inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploiNote de bas de page 1. Elle a conclu que son employeur l’avait congédié pour avoir enfreint sa politique en ayant de l’alcool au travail. Elle a estimé que ce manquement était insouciant parce qu’il connaissait la politique de son employeur et savait qu’il pouvait être congédié. La division générale l’a donc exclu du bénéfice des prestations.

[4] Le prestataire soutient que la division générale a commis les quatre erreurs que la loi m’autorise à prendre en considération.

[5] Malheureusement, son appel n’a aucune chance raisonnable de succès. Par conséquent, je ne peux pas lui accorder la permission de faire appel.

Question en litige

[6] L’appel du prestataire a-t-il une chance raisonnable de succès?

Je n’accorde pas au prestataire la permission de faire appel

[7] J’ai lu la demande d’appel du prestataireNote de bas de page 2. J’ai aussi lu la décision de la division générale et examiné les documents de son dossierNote de bas de page 3. Enfin, j’ai écouté l’enregistrement audio de l’audienceNote de bas de page 4, puis j’ai rendu ma décision.

[8] Le prestataire a intenté une action en justice contre son employeur après son congédiement. Il a réglé sa cause. Dans le cadre de ce règlement, son employeur a modifié son relevé d’emploi.

[9] Le prestataire semble avoir supposé à tort qu’il serait admissible aux prestations en raison du règlement et du relevé d’emploi modifié. Un relevé d’emploi et un accord de règlement sont des éléments de preuve que la division générale peut prendre en considération. Le prestataire n’a pas déposé l’accord de règlement en preuve.

[10] La division générale a seulement tranché la question qu’elle devait trancher en appliquant le droit établi en matière d’inconduite. De plus, j’estime que son processus était équitable. La représentante du prestataire a accepté le processus proposé par la division générale. Il n’a donc pas démontré qu’il était possible de soutenir que la division générale avait commis une erreur.

[11] Pour ces raisons et celles qui suivent, je n’accorde pas au prestataire la permission de faire appel.

Le critère de la permission de faire appel exclut les appels qui n’ont aucune chance raisonnable de succèsNote de bas de page 5

[12] Je peux accorder au prestataire la permission de faire appel si son appel a une chance raisonnable de succèsNote de bas de page 6. Cela signifie qu’il doit démontrer qu’il existe un moyen d’appel défendable qui pourrait permettre à l’appel d’être accueilliNote de bas de page 7.

[13] Je peux examiner quatre moyens d’appel, que j’appellerai des erreursNote de bas de page 8. Le prestataire doit démontrer que la division générale :

  • n’a pas assuré l’équité du processus ou n’a pas été impartiale (erreur d’équité procédurale);
  • n’a pas exercé correctement son pouvoir décisionnel (erreur de compétence);
  • a commis une erreur de droit;
  • a commis une erreur de fait importante.

[14] Les motifs d’appel du prestataire exposent les questions clés et les arguments principaux que je dois examinerNote de bas de page 9.

[15] Lorsqu’une personne ne donne pas d’explications ou de détails sur une prétendue erreur, ce moyen d’appel n’a aucune chance raisonnable de succèsNote de bas de page 10. Le prestataire n’a pas expliqué l’erreur qu’il reproche à la division générale. Il a coché la case indiquant qu’elle avait commis une erreur de fait importante, mais n’a pas expliqué en quoi celle-ci consistait. Il n’a donc pas démontré qu’il était possible de soutenir que la division générale a commis cette erreur.

Il est impossible de soutenir que le processus de la division générale était inéquitable ou qu’elle a commis une erreur de droit

[16] La division générale commet une erreur si elle n’assure pas l’équité du processus. Il s’agit alors d’erreurs d’équité procédurale et de justice naturelle. La question est de savoir si une personne connaissait la preuve à réfuter, si elle a une occasion complète et équitable de présenter ses arguments et si une personne impartiale a examiné sa preuveNote de bas de page 11.

[17] Le prestataire n’a pas soutenu que la membre de la division générale n’était pas impartiale. Il affirme que le processus de la division générale était inéquitable pour deux raisons.

[18] Premièrement, le prestataire soutient que même si sa représentante a demandé un ajournement, la division générale est allée de l’avant avec l’audience. Le prestataire affirme que la division générale a manqué à l’équité procédurale en refusant l’ajournement, parce que sa représentante et lui n’ont reçu les documents que trois jours ouvrables avant l’audience.

[19] Je ne peux pas accepter cet argument pour trois raisons.

  • La représentante du prestataire a renoncé à son objection quant au caractère inéquitable du processus en acceptant d’aller de l’avant avec l’audience comme proposé par la division générale. La division générale a proposé que son client témoigne à l’audience, ce qu’elle a accepté. Elle disposerait ensuite de sept jours après l’audience pour envoyer ses observationsNote de bas de page 12. La représentante a donné son accord à deux reprises, dont une fois après s’être entretenue en privé avec son client, alors qu’elle aurait pu obtenir des instructions pour aller de l’avant comme la division générale l’avait proposéNote de bas de page 13. Elle ne peut pas dire maintenant que le processus qu’elle (et vraisemblablement son client) a accepté sans objection était injuste pour celui-ci.
  • Le prestataire n’a pas démontré que la division générale l’avait empêché de connaître la preuve à réfuter. De plus, il n’a pas démontré que la division générale l’a privé d’une occasion pleine et équitable de présenter ses arguments en gérant le processus comme elle l’a fait. Il a eu la possibilité de transmettre des éléments de preuve avant l’audience, de présenter des éléments de preuve à l’audience et de faire valoir des arguments juridiques après l’audience.
  • La division générale a traité cette question de manière adéquate dans sa décision (paragraphes 7 et 8).

[20] Deuxièmement, le prestataire affirme que le processus la division générale était inéquitable parce qu’elle s’est appuyée sur une jurisprudence fictive que la Commission a citée dans ses arguments écrits (document GD4). Le prestataire soutient que les points de droit soulevés dans ces affaires n’ont pas pu être vérifiés. Il dit également que la division générale a commis une erreur de droit lorsqu’elle s’est fondée sur les points de droit [traduction] « provenant d’affaires fictives ».

[21] Je ne peux pas accepter ces arguments pour trois raisons.

  • La division générale n’avait aucune obligation procédurale ou substantielle de s’assurer que les arguments de la Commission étaient exacts. Son processus est contradictoire. Il incombait à la représentante du prestataire de présenter des arguments sur la jurisprudence fictive, ce qu’elle a faitNote de bas de page 14.
  • La division générale ne s’est pas appuyée sur une jurisprudence fictive (paragraphe 6). La membre a souligné à juste titre ce qui suit : « Cependant, le fait que les citations n’étaient pas exactes ne signifie pas nécessairement que la Commission ait mal interprété le droit. Cela signifie toutefois que je ne peux pas me fier à ces décisions comme faisant autorité. »
  • La division générale a utilisé le bon critère juridique pour évaluer l’inconduite, y compris le droit applicable concernant les accords de règlement (paragraphes 10, 15 à 17 et 24). La jurisprudence en matière d’inconduite est bien établie, d’autant plus que les cours fédérales ont rendu 30 décisions dans des dossiers d’inconduite liés à la vaccination contre la COVID-19 confirmant et clarifiant le droit sur la question de l’inconduite. La représentante du prestataire n’était peut-être pas consciente de l’importance de la jurisprudence, mais la division générale l’était.

[22] Par conséquent, le prestataire n’a pas démontré qu’il est possible de soutenir que le processus ou l’audience de la division générale était inéquitable ou que la division générale a commis une erreur de droit.

Il est impossible de soutenir que la division générale a commis une erreur de compétence ou une erreur de droit en n’analysant pas la politique de l’employeur

[23] Le prestataire soutient que la division générale a commis une erreur de compétence lorsqu’elle a déclaré qu’elle ne pouvait pas décider si la politique de l’employeur était raisonnable ou si l’employeur l’avait appliquée de manière adéquate. Les cours fédérales ont abordé cette question lorsqu’elles ont clarifié le critère juridique de l’inconduite. Par conséquent, l’argument du prestataire pourrait aussi avoir trait à une erreur de droit.

[24] La division générale commet une erreur de compétence si elle tranche une question qu’elle n’a pas le pouvoir de trancher ou si elle ne tranche pas une question qu’elle doit trancher. La division générale commet une erreur de droit lorsqu’elle interprète mal ou ne respecte pas un critère juridique ou une décision judiciaire qu’elle doit respecter.

[25] Il n’est pas possible de soutenir que la division générale a commis une erreur de droit ou de compétence lorsqu’elle a décidé qu’elle n’avait pas compétence pour examiner si la politique de l’employeur était raisonnable ou si celui-ci l’avait appliquée de manière équitable envers le prestataire (paragraphe 23). Selon la jurisprudence, cela ne fait pas partie du critère juridique de l’inconduite.

[26] La Cour d’appel fédérale a récemment résumé le droit sur la question de l’inconduite comme suit :

[traduction]

La Loi sur l’assurance-emploi régit la relation entre une personne sans emploi et son éventuelle admissibilité aux prestations, et non son contrat de travail. […] La Loi elle-même ne définit pas la notion d’inconduite; cette question a été laissée au Tribunal de la sécurité sociale et à la Cour, qui a estimé qu’il y a inconduite lorsqu’une personne adopte une conduite de nature à entraver l’exécution de ses obligations […] Par conséquent, la seule question est de savoir si la personne connaissait ou aurait dû connaître la politique de l’employeur, les conséquences de son non-respect et si elle a adopté une conduite qui, objectivement, pouvait entraîner la perte de son emploi. Des questions telles que le caractère inéquitable ou injuste du congédiement, le bien-fondé de la politique, l’existence d’autres options que le congédiement ainsi que la conformité de la politique et du congédiement avec la convention collective ne sont pas pertinentes pour déterminer si la personne est admissible à des prestations [Passages omis]Note de bas de page 15.

[27] La division générale a rejeté l’argument du prestataire en se basant sur deux décisions judiciaires mentionnées dans la citation (paragraphe 23). En d’autres termes, la division générale a bien interprété et appliqué le droit en vigueur, y compris les décisions judiciaires contraignantes.

[28] Le prestataire n’a pas démontré que la division générale avait commis une erreur susceptible de modifier l’issue de son appel.

[29] J’en déduis que son appel n’a aucune chance raisonnable de succès. Je ne peux pas non plus lui accorder la permission de faire appel de la décision de la division générale.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.