[TRADUCTION]
Citation : NZ c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2025 TSS 396
Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi
Décision
Partie appelante : | N. Z. |
Représentante ou représentant : | A. Z. |
Partie intimée : | Commission de l’assurance-emploi du Canada |
Décision portée en appel : | Décision de révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (686918) datée du 20 novembre 2024 (communiquée par Service Canada) |
Membre du Tribunal : | John Rattray |
Mode d’audience : | Vidéoconférence |
Date de l’audience : | Le 6 janvier 2025 |
Personnes présentes à l’audience : | Appelant Représentante de l’appelant |
Date de la décision : | Le 13 janvier 2025 |
Numéro de dossier : | GE-24-3951 |
Sur cette page
Décision
[1] L’appel est rejeté. Je ne suis pas d’accord avec l’appelant.
[2] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a prouvé que l’appelant a perdu son emploi en raison d’une inconduite (autrement dit, parce qu’il a fait quelque chose qui lui a fait perdre son emploi). Par conséquent, l’appelant est exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploiNote de bas de page 1.
Aperçu
[3] L’appelant a perdu son emploi. Selon l’employeur, l’appelant a été congédié parce qu’il a manqué plus de trois quarts de travail (l’employeur estime qu’il a abandonné son emploi).
[4] L’appelant ne conteste pas ce qui s’est passé. Il affirme qu’il faisait l’objet d’une ordonnance de non-communication au moment où il a croisé son ex-conjointe par hasard. Cela a mené à son incarcération, et ensuite à son assignation à résidence.
[5] La Commission a accepté la raison du congédiement fournie par l’employeur. Elle a conclu que l’appelant avait perdu son emploi en raison d’une inconduite. Pour cette raison, la Commission a décidé qu’il était exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.
Questions que je dois examiner en premier
Je vais instruire les deux appels ensemble
[6] L’appelant a fait appel de deux décisions sur des questions différentes qui portent sur les mêmes circonstances. Le présent appel porte sur la question de savoir si l’appelant a perdu son emploi en raison de son inconduite. L’autre appel porte sur la question de savoir si l’appelant était disponible pour travaillerNote de bas de page 2. Comme les appels sont liés, j’ai décidé de les instruire ensemble parce qu’ils portent sur les mêmes circonstances et que cela ne causera aucun préjudice à l’une ou l’autre des parties.
[7] Toutefois, je vais fournir des motifs distincts pour chaque appel parce que les questions juridiques sont différentes.
J’accepte les documents envoyés après l’audience
[8] Au cours de l’audience, l’appelant a déclaré qu’il avait des documents pertinents pour les questions en litige. Je lui ai dit que j’accepterais ces documents après l’audience s’ils étaient déposés sans tarder. Il l’a fait rapidement, donc j’accepte ces documentsNote de bas de page 3.
Question en litige
[9] L’appelant a-t-il perdu son emploi en raison d’une inconduite?
Analyse
[10] Pour répondre à la question de savoir si l’appelant a perdu son emploi en raison d’une inconduite, je dois décider deux choses. D’abord, je dois décider pourquoi l’appelant a perdu son emploi. Ensuite, je dois décider si la loi considère ce motif comme une inconduite.
Pourquoi l’appelant a-t-il perdu son emploi?
[11] J’estime que l’appelant a perdu son emploi parce qu’il a manqué plus de trois quarts de travail lorsqu’il était incarcéré, puis assigné à résidence. Par conséquent, il n’a pas été en mesure de remplir une condition essentielle de son contrat de travail, soit d’aller travailler.
[12] Les parties conviennent que l’appelant a perdu son emploi en raison de son incarcération et de son assignation à résidence. Je ne vois aucune preuve du contraire. Je conclus que l’appelant a perdu son emploi en raison de son incarcération et de son assignation à résidence.
La raison du congédiement de l’appelant est-elle une inconduite au sens de la loi?
[13] La raison du congédiement de l’appelant est une inconduite au sens de la loi.
[14] Pour être considérée comme une inconduite au sens de la loi, la conduite doit être délibérée. Cela signifie que la conduite était consciente, voulue ou intentionnelleNote de bas de page 4. L’inconduite comprend aussi une conduite qui est si insouciante qu’elle est presque délibéréeNote de bas de page 5. Pour qu’il y ait inconduite au sens de la loi, il n’est pas nécessaire que l’appelant ait eu une intention coupable (c’est-à-dire qu’il ait voulu faire quelque chose de mal)Note de bas de page 6.
[15] Il y a inconduite si l’appelant savait ou aurait dû savoir que sa conduite pouvait l’empêcher de remplir ses obligations envers son employeur et qu’il y avait une réelle possibilité qu’il soit congédié pour cette raisonNote de bas de page 7.
[16] La Commission doit prouver que l’appelant a perdu son emploi en raison d’une inconduite. Elle doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’elle doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable que l’appelant a perdu son emploi en raison de son inconduiteNote de bas de page 8.
[17] La Commission affirme qu’il y a eu inconduite parce que l’appelant connaissait l’obligation d’être disponible pour travailler et savait que s’il manquait trois quarts de travail, il pouvait être congédié. Elle affirme que l’appelant savait que s’il enfreignait une des conditions de sa mise en liberté sous caution (en l’occurrence celle de rester éloigné de son ex-conjointe), il pourrait être incarcéré et assigné à résidence, ce qui l’empêcherait de travailler.
[18] L’appelant affirme que son employeur a tenté de garder son emploi pour lui. Il l’avait déjà fait lorsqu’il a été incarcéré du 18 mars au 19 avril 2024. Il a dit qu’il avait épuisé les congés payés qui lui étaient offerts pour maintenir sa relation d’emploi.
[19] L’appelant a été arrêté le 9 juin 2024 et incarcéré jusqu’au 26 juin 2024, date à laquelle il a été mis en liberté et assigné à résidence. Il a déclaré qu’il connaissait les conditions de sa mise en liberté sous caution et qu’il en avait enfreint une, soit celle voulant qu’il reste éloigné de son ex-conjointe. Il dit qu’il l’a croisée près de chez lui.
[20] L’appelant a déclaré que les problèmes qu’il a eus avec son ex-conjointe et le non-respect des conditions de mise en liberté sous caution sont liés à des problèmes de santé mentale. Il avait déjà eu recours au programme d’aide aux employés de son employeur. Il affirme également que son ex-conjointe a saboté sa relation d’emploi en faisant en sorte qu’il soit arrêté.
[21] En août 2024, soit après son congédiement, l’appelant a été arrêté pour avoir enfreint les conditions de son assignation à résidence et placé en observation pendant trois jours à l’hôpital pour des raisons de santé mentale. Il a ensuite été transféré à la prison où il est demeuré incarcéré jusqu’au 25 novembre 2024. Il a plaidé coupable d’avoir enfreint les conditions de son assignation à résidence.
[22] Je conclus que la Commission a prouvé qu’il y a eu inconduite pour les raisons suivantes :
- L’appelant savait qu’être incarcéré ou assigné à résidence l’empêcherait d’aller travailler.
- Il savait que le fait de manquer plus de trois quarts de travail pouvait entraîner son congédiement.
- L’une des conditions essentielles de son emploi était qu’il soit disponible pour travailler.
- Il devait travailler sur place.
- Il savait que tout manquement à ses conditions de mise en liberté sous caution pouvait entraîner son incarcération.
- Il savait que l’une des conditions de sa mise en liberté sous caution était de rester éloigné de son ex-conjointe.
- Il a décidé d’essayer de se réconcilier avec son ex-conjointe sans obtenir de modification de ses conditions de mise en liberté sous caution.
- Il a contacté son ex-conjointe le 9 juin 2024. Ce faisant, il a violé ses conditions de libération sous caution, ce qui a mené à son incarcération et à son assignation à résidence.
[23] Je conclus également que la preuve établit que la conduite de l’appelant en juin 2024 – c’est-à-dire, la violation de ses conditions de mise en liberté sous caution – était délibérée, consciente et insouciante. Il n’a fourni aucun document médical pour appuyer sa déclaration selon laquelle il n’était pas au courant des conséquences de ses actes ou selon laquelle ses actes de juin 2024 n’étaient pas délibérés, conscients ou intentionnels. La conduite de l’appelant en juin a mené à son incarcération et à son assignation à résidence, ce qui a entraîné sa perte d’emploi.
[24] Je trouve crédible le témoignage de l’appelant et de sa représentante selon lequel il avait des problèmes de santé mentale pour lesquels il a demandé de l’aide du programme d’aide aux employés de l’employeur. Cependant, après avoir été arrêté en juin, il n’a pas été détenu parce qu’il était en observation pour des raisons de santé mentale.
[25] Je reconnais qu’il a été placé en observation pour des raisons de santé mentale en août 2024, lorsqu’il a enfreint les conditions de sa probation. Bien que cela ne soit pas directement lié à la perte de son emploi le 4 juillet 2024, il a par la suite plaidé coupable d’avoir enfreint les conditions de sa probation. D’ailleurs, même à ce moment-là, il n’a pas soutenu qu’il n’était pas responsable de ses actes. Cela concorde avec ma conclusion selon laquelle la conduite qui a mené à sa perte d’emploi en juillet 2024 était délibérée.
Alors, l’appelant a-t-il perdu son emploi en raison d’une inconduite?
[26] À la lumière de mes conclusions précédentes, je conclus que l’appelant a perdu son emploi en raison d’une inconduite.
[27] Il est louable que l’appelant ait exprimé le désir sincère de passer à autre chose après son incarcération, de recevoir des services de consultation et de trouver un emploi. Cependant, la loi ne me permet pas d’ignorer son inconduite.
Conclusion
[28] La Commission a prouvé que l’appelant a perdu son emploi en raison d’une inconduite. Pour cette raison, il est exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.
[29] Par conséquent, l’appel est rejeté.