Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : RH c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2025 TSS 219

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision relative à une demande de
permission de faire appel

Partie demanderesse : R. H.
Représentante ou représentant : O. E.
Partie défenderesse : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 27 janvier 2025 (GE-24-3642)

Membre du Tribunal : Glenn Betteridge
Date de la décision : Le 12 mars 2025
Numéro de dossier : AD-25-156

Sur cette page

Décision

[1] La permission de faire appel est refusée. L’appel n’ira pas de l’avant.

Aperçu

[2] R. H. est la prestataire dans cette affaire.

[3] Elle demande la permission de faire appel d’une décision de la division générale. La division générale a décidé qu’elle n’était pas admissible aux prestations parce qu’elle n’avait pas démontré qu’elle était disponible pour travailler à l’été 2022Note de bas de page 1.

[4] Deux articles de la Loi sur l’assurance-emploi prévoient que pour recevoir des prestations régulières, une personne doit démontrer qu’elle cherche un emploi convenable de façon active et continue et qu’elle est prête à accepter cet emploiNote de bas de page 2.

[5] La prestataire affirme que la division générale a commis les quatre types d’erreurs que la loi me permet de prendre en considération.

[6] Je peux donner la permission de faire appel de la décision de la division générale si l’appel a une chance raisonnable de succès. Malheureusement, ce n’est pas le cas dans cette affaire.

Question préliminaire : je prolonge le délai dont dispose la prestataire pour présenter sa demande

[7] La prestataire affirme avoir reçu la décision de la division générale le 28 janvier 2025Note de bas de page 3. Le Tribunal de la sécurité sociale considère qu’elle a reçu la décision le lendemain (le 29 janvier) parce qu’il la lui a envoyée par courrielNote de bas de page 4.

[8] Le délai de 30 jours pour déposer sa demande d’appel se terminait donc le 28 février 2025. La date de réception de la demande d’appel qui a été consignée par le Tribunal est le 3 mars 2025. Je n’ai aucune raison d’en douter.

[9] Cet élément de preuve m’indique que la demande d’appel était en retard.

[10] Je n’accepte pas l’argument de la prestataire selon lequel elle n’était pas en retard parce que son représentant n’avait pas vu le courriel avant le 1er février 2025Note de bas de page 5. Selon les règles du Tribunal, elle a reçu le courriel le 29 janvier 2025. C’est à ce moment-là que le délai de 30 jours a commencé. Il s’agissait de son appel, et non de celui de son représentant.

[11] La prestataire a expliqué que son représentant n’avait pas vu le courriel du Tribunal comprenant la décision avant le 1er février 2025, parce qu’il a dit qu’il était malade. C’est une explication raisonnable dans les circonstancesNote de bas de page 6. La prestataire semble compter sur son représentant pour lui traduire et lui expliquer les documents.

[12] Je prolonge le délai dont dispose la prestataire jusqu’au 3 mars 2025, soit la date à laquelle elle a déposé sa demande.

[13] Je vais maintenant examiner si son appel a une chance raisonnable de succès.

Question en litige

[14] L’appel a-t-il une chance raisonnable de succès?

Je refuse la permission de faire appel

[15] J’ai lu la demande d’appel de la prestataireNote de bas de page 7. J’ai aussi lu la décision de la division générale. De plus, j’ai examiné les documents dans le dossier de la division généraleNote de bas de page 8. J’ai ensuite rendu ma décision.

[16] La prestataire était responsable de démontrer qu’elle était disponible pour travailler à l’été 2022. La division générale a décidé qu’elle ne l’avait pas démontré.

[17] Il est dommage que la prestataire ait choisi une audience par écrit à la division générale. La disponibilité pour le travail est une question de fait. Ainsi, la division générale devait appliquer le droit établi aux faits. Si la prestataire avait témoigné sous serment, elle aurait peut-être ajouté des éléments de preuve crédibles et fiables à l’appui de son appel.

[18] La prestataire a choisi le type d’audience qu’elle préférait. Elle a aussi choisi son représentant. Et c’était à elle de lui donner les instructions nécessaires.

[19] Même si la division générale a fait des erreurs dans sa décision, l’appel de la prestataire n’a aucune chance raisonnable de succès. Pour les motifs que je vais présenter ci-dessous, je refuse la permission de faire appel.

Le critère relatif à la permission de faire appel exclut tout appel qui n’a aucune chance raisonnable de succèsNote de bas de page 9

[20] Je peux accorder la permission de faire appel seulement si l’appel a une chance raisonnable de succèsNote de bas de page 10. Autrement dit, la prestataire doit présenter un moyen d’appel défendable selon lequel son appel a une chance d’être accueilliNote de bas de page 11.

[21] Je peux tenir compte des quatre erreurs possibles suivantes, qui sont des moyens d’appelNote de bas de page 12 :

  • la division générale a eu recours à une procédure inéquitable ou n’a pas été impartiale (erreur d’équité procédurale);
  • elle n’a pas bien utilisé son pouvoir décisionnel (erreur de compétence);
  • elle a commis une erreur de droit;
  • elle a commis une erreur de fait importante.

[22] Les motifs d’appel de la prestataire exposent les questions clés et les arguments principaux que je dois examinerNote de bas de page 13. La prestataire soutient que la division générale a commis les quatre types d’erreurs que la loi me permet de prendre en considération.

[23] Lorsqu’une personne n’explique ou ne précise pas une erreur alléguée, son moyen d’appel n’a aucune chance raisonnable de succèsNote de bas de page 14. Les arguments de la prestataire au sujet des erreurs de compétence et d’équité procédurale ne montrent pas qu’il est possible de soutenir que la division générale a commis une erreur. En effet, la prestataire n’a pas précisé ses allégations en la matière.

Même si l’analyse de la division générale fondée sur l’article 50(8) est incorrecte, l’appel n’a pas plus de chance raisonnable de succès

[24] L’article 50(8) de la Loi sur l’assurance-emploi prévoit que la Commission peut exiger qu’une personne prouve qu’elle fait des démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi convenable. Autrement dit, lorsque la Commission le demande, la personne est responsable de prouver qu’elle fait de telles démarches.

[25] Cependant, la division d’appel a déjà déclaré dans deux décisions que la Commission doit demander à la personne visée une preuve de ses démarches de recherche d’emploi avant de pouvoir lui refuser des prestations au titre de l’article 50(8)Note de bas de page 15. De plus, la Commission doit expliquer à la personne le type de preuve qu’elle veut. Le Tribunal doit interpréter la Loi sur l’assurance-emploi de façon uniforme selon son expertise et le rôle que lui a confié le ParlementNote de bas de page 16. Les deux décisions de la division d’appel auxquelles je fais référence sont bien étayées, et la division générale devrait les suivre. La division générale les a déjà suivies dans de nombreuses affairesNote de bas de page 17.

[26] Dans l’appel de la prestataire, la division générale a soupesé la preuve et a conclu que « selon la prépondérance des probabilités, la Commission n’a pas demandé à l’appelante de fournir des renseignements sur sa recherche d’emploi » (paragraphe 45 [sic]).

[27] Il est donc possible de soutenir que la prestataire n’a pas eu l’occasion de prouver qu’elle était disponible au titre de l’article 50(8) et que la Commission ne pouvait pas la déclarer inadmissible en vertu de cet article. Autrement dit, la disponibilité selon cet article n’était pas une question que la division générale avait le pouvoir de trancher. Mais la division générale a quand même tranché la question. Elle a décidé que la Commission n’avait pas prouvé que la prestataire avait omis de faire des démarches habituelles et raisonnables pour trouver du travail (paragraphe 46).

[28] Même si la division générale avait eu le pouvoir de trancher cette question, on peut voir qu’elle a utilisé le mauvais critère juridique. Elle semble avoir inversé le fardeau de la preuve lorsqu’elle a écrit « la Commission n’a pas prouvé » (paragraphe 46 [sic]). Selon l’article 50(8), ce sont les prestataires qui doivent prouver leur disponibilité.

[29] On peut donc soutenir que la division générale a tranché une question qu’elle n’avait pas le pouvoir de trancher ou qu’elle a commis une erreur de droit lorsqu’elle a inversé le fardeau de la preuve.

[30] Cependant, aucune de ces erreurs ne donne à l’appel une chance raisonnable d’être accueilli. La prestataire devait démontrer qu’elle était disponible pour travailler au titre de l’article 18(1)(a) de la Loi sur l’assurance-emploi. La division générale a conclu qu’elle n’avait pas démontré sa disponibilité selon cet article. Et comme je vais l’expliquer ci-dessous, la division générale n’a pas fondé cette conclusion sur une erreur de droit ou une erreur de fait importante.

On ne peut pas soutenir que la division générale a commis une erreur de droit

[31] La prestataire a coché la case comme quoi la division générale a commis une erreur de droit. Elle fait valoir que la division générale a [traduction] « commis une erreur de droit en refusant d’accepter de reconnaître les démarches de recherche d’emploi clairement décrites au paragraphe [34] comme étant ce que la loi exige pour confirmer des démarchesNote de bas de page 18 ».

[32] Je ne retiens pas l’argument de la prestataire. L’application inappropriée du droit établi aux faits est une erreur mixte de fait et de droit, et non une erreur de droitNote de bas de page 19. La loi ne me permet pas d’accorder la permission de faire appel en raison d’une erreur mixte.

[33] La division générale commet une erreur de droit lorsqu’elle ignore un argument qu’elle doit prendre en considération, qu’elle ne justifie pas bien sa décision, qu’elle interprète mal une loi, qu’elle applique le mauvais critère juridique ou qu’elle ne suit pas une décision judiciaire qu’elle doit suivre.

[34] La division générale n’avait pas à accepter l’argument de la prestataire selon lequel elle répondait au critère juridique de disponibilité. La division générale a établi le bon critère juridique pour évaluer la disponibilité au titre de l’article 18(1)(a) de la Loi sur l’assurance-emploi, en fonction des décisions judiciaires qu’elle devait suivre (paragraphes 24, 48 et 49). Elle a ensuite appliqué ce critère (paragraphes 50 à 76).

[35] La prestataire n’a pas démontré que l’on peut soutenir que la division générale a commis une erreur de droit.

On ne peut pas soutenir que la division générale a commis une erreur de fait importante

[36] La prestataire a coché la case comme quoi la division générale a commis une erreur de fait importante.

[37] La division générale commet une erreur de fait importante si elle fonde sa décision sur une conclusion de fait qu’elle a tirée après avoir ignoré ou mal interprété un élément de preuve pertinentNote de bas de page 20. « Pertinent » ici veut dire un élément clé selon les critères juridiques que la division générale devait appliquer. La loi prévoit aussi que je peux présumer que la division générale a examiné tous les éléments de preuve même si elle n’est pas obligée de tous les mentionnerNote de bas de page 21.

On ne peut pas considérer la preuve de la prestataire comme un témoignage sous serment, et la division générale ne peut pas obliger la Commission à transmettre des documents

[38] La prestataire affirme que la division générale a ignoré un [traduction] « témoignage par affidavitNote de bas de page 22 ». Le représentant de la prestataire ne comprend pas bien ce qu’est un affidavit. Dans ce que le représentant appelle « affidavit », il manque l’approbation officielle d’une personne ayant un pouvoir légalNote de bas de page 23. Rien ne montre que la prestataire a fait ses déclarations en présence d’une personne qui avait ce pouvoir légal.

[39] La prestataire soutient que la division générale aurait dû juger négativement le fait que la Commission n’a pas envoyé une capture d’écran claire d’une liste de courriels, de transcriptions d’appels téléphoniques ou de télécopies qu’elle dit avoir envoyéesNote de bas de page 24.

[40] Lorsque la division générale n’a pas tiré de conclusion négative sur ce point, ce n’était pas une erreur de fait importante (ou de droit). La division générale n’a pas à utiliser les règles officielles de la preuve. Elle n’a pas le pouvoir d’obliger la Commission à transmettre des documents, si l’on suppose qu’ils existent et que la Commission les a en sa possession. La procédure devant la division générale était l’occasion pour la prestataire de présenter tous ses arguments. D’ailleurs, la division générale lui a donné une occasion réelle et équitable de le faire, comme lorsqu’elle lui a envoyé une lettre pour lui poser des questionsNote de bas de page 25. La prestataire a répondu par écrit à cette lettre, puis a répondu aux observations supplémentaires de la CommissionNote de bas de page 26.

[41] Malheureusement pour la prestataire, ses arguments écrits sont axés sur des problèmes de communication ou des malentendus avec la Commission. La division générale examine les décisions de la Commission au sujet des prestations. Elle ne surveille pas la façon dont la Commission traite ou évalue les demandes. Je comprends que la prestataire était fâchée en raison des malentendus et des problèmes de communication. Cependant, la division générale n’avait pas le pouvoir d’accueillir son appel en raison d’un problème de communication ou d’un malentendu avec la Commission.

La division générale n’a pas ignoré la preuve de la prestataire concernant les malentendus avec la Commission

[42] La prestataire affirme que la division générale a ignoré sa preuve concernant ses échanges avec la Commission, les tentatives de la Commission de communiquer avec elle par téléphone et par courriel, et sa tentative de télécopier à la Commission ses documents de recherche d’emploi. Elle fait remarquer que cette preuve montre deux choses. Premièrement, la Commission a déformé la preuve concernant les appels téléphoniques de son personnel. Deuxièmement, elle n’a pas agi de façon judiciaire lorsqu’elle a réexaminé la demande.

[43] La division générale a examiné l’explication de la Commission sur ce qui l’a amenée à réexaminer la demande, ainsi que la preuve à l’appui (paragraphes 14 et 29). C’est la division générale qui doit examiner et soupeser la preuveNote de bas de page 27. Je ne peux pas réévaluer la preuve ou poser un nouveau regard sur les faits ou la crédibilité de la preuve.

[44] La division générale n’a pas ignoré ou mal compris la preuve de la prestataire au sujet des malentendus avec la Commission concernant sa recherche d’emploi. Elle a examiné la preuve de la Commission et de la prestataire (paragraphes 34 et 41 à 43). Elle a conclu que la Commission n’avait pas demandé à la prestataire de fournir des renseignements sur sa recherche d’emploi et que cette dernière n’en avait pas fourni en août 2024 (paragraphe 45).

La division générale n’a pas ignoré ou mal compris la preuve de la prestataire lorsqu’elle a décidé que celle-ci n’avait pas démontré sa disponibilité

[45] La division générale n’a pas ignoré ou mal compris la preuve de la prestataire en appliquant le critère sur la disponibilité qui provient de l’article 18(1)(a).

[46] La division générale a examiné la preuve de la prestataire et de la Commission au sujet de la volonté de retourner travailler (paragraphes 52 à 56). Puis elle a soupesé la preuve de la prestataire à la lumière de celle de la Commission. Elle a conclu que la preuve de la prestataire n’était pas crédible et a donné des motifs à l’appui (paragraphes 57 à 60).

[47] La division générale a examiné la preuve de la prestataire concernant ses démarches de recherche d’emploi (paragraphes 63 à 65).

[48] Elle a examiné la preuve de la prestataire et l’argument de la Commission au sujet de toute restriction personnelle de sa disponibilité (paragraphes 70, 71 et 73).

[49] Il n’était pas important que la Commission ait tous les éléments de preuve de la prestataire lorsqu’elle a décidé de sa disponibilité. La division générale a le pouvoir d’examiner la preuve des parties et de rendre la décision que la Commission aurait dû rendre. Et c’est ce qu’elle a fait, sans ignorer ni mal comprendre la preuve de la prestataire. Elle n’avait pas à accepter ses éléments de preuve ou ses arguments; elle devait les examiner, et c’est ce qu’elle a fait.

[50] Par conséquent, on ne peut pas soutenir que la division générale a commis une erreur de fait importante.

Conclusion

[51] La prestataire n’a pas montré qu’il est possible de soutenir que la division générale a commis une erreur qui pourrait changer l’issue de son appel. Et je n’ai trouvé aucun argument défendable en ce sens.

[52] Par conséquent, son appel n’a aucune chance raisonnable de succès. Je ne peux pas lui donner la permission de faire appel de la décision de la division générale.

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