Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : KD c Commission de l’assurance‑emploi du Canada, 2025 TSS 406

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale – Section de l’assurance-emploi

Décision

Appelante : K. D.
Représentante : A. D.
Intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de révision (441085) datée du 7 décembre 2021 rendue par la Commission de l’assurance-emploi du Canada (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Bret Edwards
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience : Le 8 avril 2025
Personne présente à l’audience : Représentante de l’appelante
Date de la décision : Le 22 avril 2025
Numéro de dossier : GE-25-605

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est accueilli. Je suis d’accord avec l’appelante.

[2] L’appelante a démontré qu’elle était disponible pour travailler pendant ses études, plus précisément entre le 29 novembre 2020 et le 29 juin 2021. Elle n’est donc pas inadmissible au bénéfice des prestations d’assurance-emploi (AE) pour cette période.

[3] Comme l’appelante a déjà reçu des prestations d’AE durant la période susmentionnée, elle n’a pas à les rembourser.

Aperçu

[4] L’appelante a présenté une demande de prestations d’AE le 9 novembre 2020. Elle a reçu des prestations par suite de cette demandeNote de bas de page 1.

[5] En octobre 2021, la Commission de l’assurance-emploi du Canada (Commission) a décidé de réexaminer l’admissibilité de l’appelante aux prestations qui lui avaient été versées. Au terme de son réexamen, la Commission a décidé que l’appelante était inadmissible au bénéfice des prestations reçues à partir du 29 novembre 2020 parce qu’elle n’était pas disponible pour travailler pendant ses étudesNote de bas de page 2.

[6] Après ce nouvel examen, la Commission a maintenu sa décision initialeNote de bas de page 3.

[7] L’appelante a ensuite interjeté appel, auprès de la division générale (DG) du Tribunal, de la décision de révision rendue par la Commission.

[8] Au moment où la DG a été saisie de l’appel, l’appelante a décidé de présenter une contestation fondée sur la Charte, qui a été rejetée par la DG. La division d’appel (DA) du Tribunal a ensuite rejeté l’appel interjeté par l’appelante contre la décision de la DG de ne pas faire droit à sa contestation fondée sur la Charte.

[9] Après le rejet de la contestation fondée sur la Charte par la DG et la DA, la DG s’est penchée sur l’appel interjeté par l’appelante de la décision de révision rendue par la Commission. La DG a accueilli l’appel et conclu que la Commission n’avait pas fait preuve d’équité en décidant de réexaminer la demande de l’appelante.

[10] La Commission a interjeté appel de la décision de la DG devant la DA. La DA a fait droit à l’appel, a conclu que la Commission avait fait preuve d’équité en décidant de réexaminer la demande de l’appelante et a renvoyé l’appel à la DG pour que celle-ci statue sur la question de la disponibilité de l’appelante pour travailler.

[11] Pour bénéficier de prestations régulières d’AE, la personne doit être disponible pour travailler. La disponibilité est une exigence continue, c’est-à-dire que la personne doit être à la recherche d’un emploi.

[12] Il me faut établir si l’appelante a démontré qu’elle était disponible pour travailler. L’appelante doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Autrement dit, l’appelante doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable qu’elle était disponible pour travailler.

[13] Selon la Commission, l’appelante n’était pas disponible pour travailler parce qu’elle n’a pas réfuté la présomption de non-disponibilité pendant les études secondaires et qu’elle n’aurait pas pu trouver un emploi convenable pendant cette période.

[14] L’appelante affirme qu’elle a réfuté la présomption de non-disponibilité pendant ses études secondaires et qu’elle était disponible pour occuper un emploi convenable pendant cette période.

Questions que je dois examiner en premier lieu

L’appelante n’était pas présente à l’audience

[15] L’appelante n’était pas présente à l’audience.

[16] L’audience peut avoir lieu en l’absence de la partie appelante si celle-ci a été avisée de la tenue de l’audienceNote de bas de page 4.

[17] Je crois que l’appelante a reçu l’avis d’audience parce que sa représentante a accepté de recevoir des communications par courrielNote de bas de page 5 et l’avis lui a été envoyé par courriel le 31 mars 2025Note de bas de page 6.

[18] En outre, la représentante de l’appelante a confirmé à l’audience que l’appelante ne pouvait y participer, car elle avait un examen final à passer dans un de ses cours à l’université.

[19] L’audience a donc eu lieu au moment prévu, mais en l’absence de l’appelante.

La représentante de l’appelante était présente à l’audience

[20] La représentante de l’appelante (sa mère) était présente à l’audience. Elle a fait une déclaration sous serment au début de l’audience. Elle a ensuite fourni des renseignements au nom de l’appelante pendant l’audience.

Je ne peux me pencher sur la décision de la Commission de réexaminer la demande de l’appelante

[21] En l’espèce, la Commission a versé des prestations à l’appelante et a décidé ultérieurement de réexaminer la demande. Au terme de ce réexamen, la Commission a déterminé que l’appelante était inadmissible au bénéfice des prestations parce qu’elle n’était pas disponible pour travailler.

[22] La DG a accueilli l’appel interjeté par l’appelante de la décision de révision rendue par la Commission. La DG a conclu que la Commission n’avait pas fait preuve d’équité lorsqu’elle a décidé de procéder au réexamen de la demande de l’appelanteNote de bas de page 7.

[23] Mais la Commission a interjeté appel de la décision de la DG devant la DA, et la DA a conclu que la Commission avait fait preuve d’équité en décidant de réexaminer la demande de l’appelante et que l’appel devait être renvoyé à la DG pour que celle-ci statue sur la question de la disponibilité de l’appelante pour travaillerNote de bas de page 8.

[24] Puisque la DA a infirmé la décision de la DG sur la question du réexamen de la demande de l’appelante par la Commission, je ne peux pas me pencher de nouveau sur cette question dans la présente procédure. Ella a déjà été tranchée par la DA.

[25] Je dois donc m’attarder uniquement à la décision rendue par la Commission au terme de son nouvel examen de la demande de l’appelante, précisément à la question de la disponibilité de cette dernière pour travailler. La DA n’a pas tranché cette question et m’a plutôt demandé (à la DG) de me pencher sur celle-ci.

La Commission convient maintenant que l’appelante a prouvé sa disponibilité à partir du 30 juin 2021

[26] La Commission avait d’abord décidé que l’appelante n’était pas disponible pour travailler à compter du 29 novembre 2020Note de bas de page 9.

[27] Mais la Commission affirme maintenant n’avoir [traduction] « aucun problème » avec la disponibilité de l’appelante [traduction] « dans la période suivant la fin de ses études secondaires, d’après les renseignements figurant au dossier »Note de bas de page 10.

[28] La Commission mentionne également que l’appelante n’a toujours pas prouvé qu’elle était disponible pendant qu’elle fréquentait l’école secondaire, plus précisément entre le 29 novembre 2020 et le 29 juin 2021Note de bas de page 11.

[29] Compte tenu de ce qui précède, j’estime que la Commission convient maintenant que l’appelante a prouvé sa disponibilité à compter du 30 juin 2021. S’il en était autrement, on peut raisonnablement penser que la Commission n’aurait pas affirmé n’avoir [traduction] « aucun problème » avec la disponibilité de l’appelante après ses études secondaires.

[30] Par conséquent, je n’ai pas besoin d’examiner si l’appelante était disponible pour travailler à compter du 30 juin 2021 puisque la Commission convient maintenant que l’appelante a prouvé sa disponibilité pendant cette période. La seule question qu’il me faut examiner est celle de savoir si l’appelante était disponible pour travailler entre le 29 novembre 2020 et le 29 juin 2021, qui est le point de désaccord qui subsiste entre l’appelante et la Commission.

J’ai accepté les documents présentés par l’appelante après l’audience

[31] La représentante de l’appelante a transmis un document au Tribunal après l’audienceNote de bas de page 12. J’ai admis le document dans la mesure où il concerne les arguments soulevés par la représentante de l’appelante au regard de la disponibilité de cette dernière.

Question en litige

[32] L’appelante était-elle disponible pour travailler du 29 novembre 2020 au 29 juin 2021?

Analyse

[33] Pour bénéficier de prestations régulières d’AE, certaines conditions doivent être remplies. L’une d’elles consiste à prouver sa disponibilité pour travailler pendant la période visée par la demande de prestations.

[34] Deux articles différents de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi sur l’AE) exigent que la disponibilité pour travailler soit démontrée.

[35] Dans un premier temps, la Loi sur l’AE prévoit qu’un prestataire doit prouver qu’il fait « des démarches habituelles et raisonnables » pour trouver un emploi convenableNote de bas de page 13. Si on demande au prestataire de fournir cette preuve, il ne pourra recevoir les prestations tant qu’il ne l’aura pas présentéeNote de bas de page 14.

[36] Dans un deuxième temps, la Loi sur l’AE prévoit que le prestataire doit être « capable de travailler et disponible à cette fin », mais incapable d’obtenir un emploi convenableNote de bas de page 15.

[37] Selon la Commission, l’appelante ne peut obtenir de prestations parce qu’elle n’a pas prouvé qu’elle était disponible pour travailler conformément à ces deux dispositions de la Loi sur l’AENote de bas de page 16.

[38] Mais la DA a affirmé que la Commission ne peut refuser de verser des prestations à une personne parce qu’elle n’a pas prouvé qu’elle avait fait des démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi si la Commission ne lui a pas d’abord demandé de fournir une preuve de sa recherche d’emploi et expliqué quel type de preuve permettrait de satisfaire à la norme des « démarches habituelles et raisonnables »Note de bas de page 17.

[39] Même si je ne suis pas lié par la décision de la DA dans la présente affaire, je vais la respecter car j’estime que le raisonnement sous-jacent est convaincant.

[40] Je juge que le dossier ne renferme pas suffisamment d’éléments de preuve indiquant que la Commission a demandé à l’appelante de prouver qu’elle avait fait des démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi à compter du 29 novembre 2020. Si la Commission semble avoir d’abord demandé à l’appelante de rassembler de l’information sur sa recherche d’emploiNote de bas de page 18, j’estime qu’elle a ultérieurement fait marche arrière lorsqu’elle a dit à l’appelante : [traduction] « vous n’en aurez peut-être pas besoinNote de bas de page 19 ». Si la Commission semble avoir mentionné à l’appelante, en termes très généraux, ce que devraient comprendre les renseignements sur sa recherche d’emploiNote de bas de page 20, rien n’indique que la Commission a, à un moment ou à un autre, expressément expliqué à l’appelante quel type de preuve permettrait de satisfaire à la norme des « démarches habituelles et raisonnables ».

[41] Je suis donc d’avis que la deuxième partie de la Loi sur l’AE ne s’applique pas dans les circonstances.

[42] Ainsi, je ne tiendrai compte que de la première partie de la Loi sur l’AE, c’est-à-dire la question de savoir si l’appelante était capable de travailler et disponible à cette fin entre le 29 novembre 2020 et le 29 juin 2021.

[43] Mais avant tout, je dois me pencher sur une autre question, à savoir si on peut présumer que l’appelante n’était pas disponible pour travailler pendant qu’elle fréquentait l’école au cours de la période susmentionnée.

Peut-on présumer que l’appelante n’était pas disponible pour travailler pendant qu’elle fréquentait l’école, entre le 29 novembre 2020 et le 29 juin 2021?

[44] Non. J’estime qu’on ne peut pas présumer que l’appelante n’était pas disponible pour travailler pendant qu’elle fréquentait l’école, entre le 29 novembre 2020 et le 29 juin 2021. Voici mes motifs.

[45] L’appelante était aux études au cours de la période susmentionnée. La Cour d’appel fédérale (Cour) affirme qu’on présume que les étudiants à temps plein ne sont pas disponibles pour travaillerNote de bas de page 21. C’est ce qu’on appelle la « présomption de non-disponibilité ». Je peux donc présumer que les étudiants ne sont pas disponibles pour travailler si la preuve indique qu’ils sont aux études à temps plein.

[46] Mais on peut également réfuter la présomption selon laquelle un étudiant à temps plein n’est pas disponible pour travailler.

[47] Par conséquent, je dois d’abord déterminer si l’appelante était aux études à temps plein. Si c’est le cas, il me faudra ensuite décider si elle a réfuté la présomption de non-disponibilité.

[48] J’estime que l’appelante était à l’école à temps plein entre le 29 novembre 2020 et le 29 juin 2021.

[49] Je constate que les parties ne semblent pas contester le fait que l’appelante fréquentait l’école à temps plein. Selon la représentante de l’appelante, cette dernière était à l’école du lundi au vendredi et l’horaire de cours avait été modifié en raison de la pandémie de COVID-19Note de bas de page 22. Dans tous les questionnaires sur les cours de formation, l’appelante a indiqué qu’elle était aux études à temps plein pendant cette périodeNote de bas de page 23.

[50] Puisque l’appelante fréquentait l’école à temps plein, je dois maintenant déterminer si elle a réfuté la présomption de non-disponibilité.

[51] Selon une décision de la Cour rendue récemment, il me faut effectuer une analyse contextuelle lorsqu’il s’agit de déterminer si un étudiant à temps plein a réfuté la présomption de non-disponibilitéNote de bas de page 24. Je dois donc me pencher sur les circonstances particulières de l’étudiant. Dans la suite de mes motifs, je ferai référence à cette décision en parlant de la « décision Page ».

[52] Dans la décision Page, la Cour fait mention de différents dossiers factuels où la présomption a été réfutée, notamment celui d’un prestataire disposé à abandonner ses études pour accepter un emploi ou ayant démontré qu’il avait régulièrement occupé un emploi pendant ses études à temps plein et en cherchait un offrant la possibilité de travailler selon un horaire semblable à son emploi antérieur. Il se peut que d’autres considérations soient pertinentes, notamment la possibilité que le prestataire puisse suivre ses cours en ligne aux heures qui lui conviennentNote de bas de page 25.

[53] La Commission affirme que l’appelante n’a pas réfuté la présomption de non-disponibilité pendant qu’elle fréquentait l’école secondaire parce qu’on ne peut pas dire qu’elle a « régulièrement » occupé un emploi pendant ses études. Elle a plutôt eu une brève expérience de travail qu’on pourrait [traduction] « au mieux [...] décrire comme occasionnelleNote de bas de page 26 », car elle a travaillé 160 heures au total, réparties entre deux emplois, sur une période de 72 jours allant du 19 septembre 2020 au 29 novembre 2020Note de bas de page 27.

[54] La Commission affirme également que la décision Page renvoie à une autre décision (la « décision Lalonde »), dans laquelle la Cour souscrit à une autre décision (la « décision Loder »), dans laquelle il a été conclu qu’ [traduction] « un historique de deux mois serait insuffisant » pour qu’une personne puisse prouver qu’elle a [traduction] « occupé un emploi régulièrement tandis qu’elle était aux études »Note de bas de page 28.

[55] Selon la représentante de l’appelante, cette dernière a réfuté la présomption de non-disponibilité pendant ses études secondaires parce que son régime de travail pendant cette période était [traduction] « ferme, sérieux et authentique » et non occasionnel ou intermittentNote de bas de page 29.

[56] La représentante de l’appelante affirme également que l’appelante occupait deux emplois réguliers à temps partiel : elle travaillait au restaurant « B » comme hôtesse et pour « G », où elle aidait à l’ouverture d’un magasin. Elle effectuait 2 ou 3 quarts de travail à temps partiel en semaine, l’après-midi ou le soir, et travaillait au moins une journée complète la fin de semaine. L’appelante a également mentionné qu’après avoir perdu ces emplois, elle a continué de chercher un emploi offrant un horaire semblable qu’elle pourrait occuper tout en poursuivant ses étudesNote de bas de page 30.

[57] Après avoir moi-même examiné les éléments de preuve, j’estime que l’appelante a réfuté la présomption de non-disponibilité. Contrairement à ce qu’affirme la Commission, elle a régulièrement occupé un emploi pendant ses études secondaires et elle a continué de chercher un emploi offrant la possibilité de travailler selon un horaire semblable à ses emplois antérieurs.

[58] Plus précisément, j’estime que le régime de travail de l’appelante entre le 19 septembre 2020 et le 29 novembre 2020 peut être décrit comme étant régulier plutôt qu’occasionnel ou intermittent. Je parviens à cette conclusion parce que je suis convaincu que l’appelante a occupé des emplois stables pendant plus de deux mois pendant qu’elle était aux études à temps plein, car elle avait un horaire de travail régulier chaque semaine (2 ou 3 quarts de travail en semaine, l’après-midi ou le soir, et un quart de travail la fin de semaine, répartis entre ses deux emplois) au cours de cette période. À mon avis, cela signifie sans équivoque qu’elle a régulièrement occupé un emploi, et non qu’elle a des antécédents de travail irréguliers.

[59] J’aurais peut-être tiré une conclusion différente si l’appelante avait eu un horaire de travail qui variait considérablement d’une semaine à l’autre. Bien que les relevés d’emploi pour son emploi à B et son emploi à G font état d’une certaine variabilité des heures de travailNote de bas de page 31, je ne suis pas convaincu que ces variations sont suffisamment importantes pour m’amener à douter du fait qu’elle travaillait entre 2 et 4 quarts de travail par semaine, répartis entre ces deux emplois.

[60] Autrement dit, je juge que les relevés d’emploi ne suffisent pas à démontrer que l’appelante n’a pas occupé régulièrement un emploi. Pour cette raison, je leur accorde peu de poids en l’espèce.

[61] J’estime également que l’appelante a continué de chercher un emploi offrant la possibilité de travailler selon un horaire semblable à ses emplois antérieurs. La représentante de l’appelante l’a confirmé et j’admets que les démarches de l’appelante pour trouver un emploi étaient sincères et suffisantes, comme il en sera question plus en détail dans la prochaine section.

[62] Je reconnais que c’est la représentante de l’appelante, et non l’appelante elle-même, qui a fourni les renseignements sur l’horaire de travail de cette dernière et sur les démarches qu’elle a effectuées pour trouver du travail.

[63] Mais je crois qu’on peut raisonnablement croire que, puisque la représentante de l’appelante est sa mère, elle est probablement plus au fait que quiconque de l’horaire de travail de l’appelante et des efforts qu’elle a déployés pour trouver du travail. De plus, après avoir parlé à la représentante de l’appelante à l’audience, je ne vois pas de raison de mettre en doute les renseignements qu’elle a fournis, d’autant plus qu’elle a présenté à plusieurs reprises les mêmes arguments par écrit avant l’audienceNote de bas de page 32.

[64] Pour ces raisons, j’accorde un poids important à l’ensemble des renseignements fournis par la représentante de l’appelante en l’espèce.

[65] Je reconnais que la période d’emploi de l’appelante pendant ses études secondaires a été inférieure à trois mois.

[66] Mais à la lumière de la situation de l’appelante, j’estime que cette dernière a régulièrement occupé un emploi malgré le fait qu’elle a travaillé moins de trois mois pendant ses études secondaires.

[67] À l’audience, la représentante de l’appelante a déclaré que les deux emplois qu’avait occupés l’appelante entre septembre 2020 et novembre 2020 étaient ses premiers emplois. Elle était danseuse de compétition et elle partageait son temps entre cette activité et l’école. Mais elle avait décidé de commencer à travailler pour essayer d’économiser en vue de ses études universitaires l’année suivante.

[68] À mon avis, l’appelante ne peut être pénalisée parce qu’elle ne travaillait pas depuis plus longtemps. Elle était en 12e année (et donc encore adolescente) au moment où elle a occupé les deux emplois en question. D’après moi, il est rare que des personnes se trouvant dans la même situation que l’appelante aient déjà commencé à travailler, encore plus rare qu’elles aient décroché deux emplois à temps partiel auprès de deux employeurs différents. Je reconnais aussi qu’avant d’obtenir ces emplois, l’appelante était une danseuse de compétition, ce qui occupait vraisemblablement une grande partie de son temps libre et ne lui permettait probablement pas de travailler tout en fréquentant l’école. Pour ces raisons, je ne crois pas que les antécédents de travail précis de l’appelante puissent être retenus contre elle.

[69] Autrement dit, compte tenu du jeune âge de l’appelante et des autres circonstances de sa vie, je dois me concentrer sur la fréquence à laquelle elle travaillait quand elle travaillait et non sur la période pendant laquelle elle a travaillé. Il m’apparaît alors évident que l’appelante a régulièrement occupé un emploi pendant qu’elle fréquentait l’école secondaire.

[70] J’admets que la Commission a affirmé que, dans la décision Lalonde, la Cour renvoie à une autre décision (la décision Loder) dans laquelle il a été conclu qu’ [traduction] « un historique de deux mois serait insuffisant » pour qu’une personne puisse prouver qu’elle a [traduction] « occupé un emploi régulièrement tandis qu’elle était aux études »Note de bas de page 33.

[71] J’estime toutefois que l’argument de la Commission ne change rien aux conclusions que j’ai formulées ci-dessus.

[72] Bien que je reconnaisse les conclusions tirées dans la décision Lalonde, je constate que la décision Page est plus récente et que la Cour se livre dans celle-ci à une analyse plus exhaustive et nuancée de la question de savoir si les étudiants peuvent être considérés comme disponibles pour travailler au sens de la Loi sur l’AE.

[73] Comme il a été expliqué précédemment, suivant la décision Page, il faut effectuer une analyse contextuelle lorsqu’il s’agit de déterminer si un étudiant à temps plein a réfuté la présomption de non-disponibilité, ce qui signifie qu’il faut se pencher sur les circonstances particulières de l’étudiant. Dans la décision Page, la Cour fait aussi mention de différents dossiers factuels où la présomption a été réfutée, notamment celui où un prestataire a démontré qu’il avait régulièrement occupé un emploi pendant ses études à temps plein et en cherchait un offrant la possibilité de travailler selon un horaire semblable à son emploi antérieur. La Cour affirme également qu’il n’est pas nécessaire que l’étudiant ait travaillé à temps plein pendant ses études.

[74] En d’autres termes, je suis d’avis que la décision Page fait fond sur d’autres affaires dont la Cour a été saisie dans le passé concernant la question de la disponibilité d’un étudiant pour travailler et son admissibilité aux prestations d’AE, et qu’elle vient approfondir ces analyses antérieures. Et j’accorde plus de poids à cette décision qu’aux décisions précédentes de la Cour qui abordaient la même question.

[75] Par conséquent, pour les raisons exposées précédemment, si je m’appuie sur les indications qu’offre la décision Page et que j’effectue une analyse en contexte de la situation de l’appelante, je juge que cette dernière a occupé régulièrement un emploi pendant qu’elle fréquentait l’école secondaire et qu’elle a cherché un emploi offrant la possibilité de travailler selon un horaire semblable à ses emplois précédents.

[76] Ainsi, l’appelante est parvenue à réfuter la présomption de non-disponibilité pendant qu’elle fréquentait l’école secondaire.

[77] Ayant conclu que la présomption de non-disponibilité ne s’applique pas à l’appelante, je dois maintenant poursuivre mon analyse et déterminer si la première partie de la Loi sur l’AE qui concerne la disponibilité (abordée précédemment) s’applique à l’appelante, en particulier déterminer si elle était capable de travailler et disponible à cette fin pendant ses études secondaires, entre le 29 novembre 2020 et le 29 juin 2021. Je me pencherai sur cette question ci-dessous.

L’appelante était-elle capable de travailler et disponible à cette fin entre le 29 novembre 2020 et le 29 juin 2021?

[78] Oui. Je suis d’avis que l’appelante était capable de travailler et disponible à cette fin entre Ie 29 novembre 2020 et le 29 juin 2021.

[79] Comme il en a été question précédemment, la partie de la Loi sur l’AE sur laquelle je dois me pencher prévoit qu’un prestataire doit prouver qu’il était capable de travailler et disponible à cette fin, mais qu’il était incapable d’obtenir un emploi convenableNote de bas de page 34.

[80] D’une part, j’estime que l’appelante était capable de travailler pendant ses études secondaires. Les parties ne contestent pas le fait que l’appelante était en mesure de travailler à ce moment-là.

[81] Mais, comme il a été expliqué précédemment, il ne suffit pas qu’une personne prouve qu’elle est capable de travailler; elle doit aussi prouver qu’elle est disponible pour travailler.

[82] Selon la jurisprudence (autrement dit, les décisions des tribunaux), une personne doit prouver trois choses pour démontrer qu’elle est disponible pour travailler :

  1. a) Elle souhaite retourner sur le marché du travail aussitôt qu’un emploi convenable lui est offert.
  2. b) Elle a fait des efforts suffisants pour se trouver un emploi convenable.
  3. c) Elle n’a pas établi de conditions personnelles pouvant limiter indûment (c.-à-d. excessivement) ses chances de retour sur le marché du travail.

[83] Ces trois éléments sont communément appelés les facteurs FaucherNote de bas de page 35.

[84] L’appelante doit prouver qu’elle a satisfait aux trois facteurs Faucher pour que je puisse conclure qu’elle était disponible pour travailler.

[85] Lorsque je détermine si l’appelante a satisfait aux facteurs Faucher, je dois m’attarder à l’attitude de l’appelante et à ce qu’elle a fait ou n’a pas fait pour se rendre disponible pour travaillerNote de bas de page 36.

[86] En l’espèce, j’estime que l’appelante a satisfait aux trois facteurs Faucher pendant sa période d’inadmissibilité, du 29 novembre 2020 au 29 juin 2021, c’est-à-dire qu’elle est parvenue à démontrer qu’elle était disponible pour travailler pendant qu’elle fréquentait l’école secondaire.

[87] Voici mon analyse de chacun des facteurs Faucher.

Désir de retourner sur le marché du travail

[88] Je juge que l’appelante a démontré qu’elle souhaitait retourner sur le marché du travail entre le 29 novembre 2020 et le 29 juin 2021.

[89] À l’audience, la représentante de l’appelante a affirmé que cette dernière voulait travailler pendant ses études secondaires. Elle était hôtesse au restaurant B, mais elle a perdu cet emploi à la fin de novembre 2020 en raison des mesures de confinement imposées en Ontario dans le contexte de la COVID-19 qui limitaient les rassemblements en personne. Immédiatement après avoir perdu son emploi, elle a régulièrement communiqué avec B pour savoir à quel moment le restaurant allait rouvrir. Elle pensait au départ que les mesures de confinement seraient levées après la période des Fêtes. Après l’annonce de la prolongation des mesures, au début de janvier 2021, elle a commencé à chercher un autre emploi.

[90] Je reconnais que l’appelante n’était pas présente à l’audience pour livrer son propre témoignage. Mais j’ai déjà conclu que j’accordais un poids important aux renseignements transmis par la représentante de l’appelante à propos de la disponibilité de cette dernière.

[91] Par ailleurs, je ne vois aucun élément de preuve qui pourrait m’amener à douter des renseignements provenant de la représentante de l’appelante à propos du désir de cette dernière de travailler pendant ses études secondaires. J’ai déjà conclu que j’accordais un poids important à tous les renseignements que la représentante de l’appelante a fournis en l’espèce.

[92] À la lumière des éléments de preuve disponibles, je suis convaincu que l’attitude et les actions de l’appelante démontrent qu’elle voulait travailler pendant sa période d’inadmissibilité.

[93] Ainsi, l’appelante satisfait au premier facteur Faucher.

Efforts pour trouver un emploi convenable

[94] J’estime que l’appelante a déployé des efforts suffisants pour trouver un emploi convenable entre le 29 novembre 2020 et le 29 juin 2021.

[95] Comme il a été mentionné précédemment, la représentante de l’appelante a déclaré à l’audience que l’appelante était hôtesse au restaurant B, mais qu’elle avait perdu cet emploi à la fin de novembre 2020 en raison des mesures de confinement imposées en Ontario dans le contexte de la COVID-19 qui limitaient les rassemblements en personne. Par la suite, elle a régulièrement communiqué avec B pour savoir à quel moment le restaurant allait rouvrir. Elle pensait au départ que les mesures de confinement seraient levées après la période des Fêtes. Après l’annonce de la prolongation des mesures, au début de janvier 2021, elle a commencé à chercher un autre emploi.

[96] La représentante de l’appelante a aussi mentionné ce qui suit à propos des démarches de recherche d’emploi entreprises par l’appelante :

  • L’appelante a régulièrement cherché un emploi à compter de janvier 2021, après avoir compris que B ne rouvrirait pas ses portes dans un avenir rapproché.
  • L’appelante a cherché un emploi dans les commerces de détail (parce qu’elle pensait que ces employeurs embaucheraient peut-être des mineurs, comme elle) et dans les restaurants (industrie au sein de laquelle elle avait déjà travaillé, dans le cadre de son emploi à B).
  • L’appelante s’est rendue dans les centres d’achats (lorsqu’ils étaient ouverts entre les périodes de confinement) pour remettre en personne son curriculum vitæ à des employeurs potentiels et elle a aussi cherché un emploi en ligne.
  • L’appelante a consacré une ou deux journées par semaine à chercher du travail en personne; les autres jours, elle effectuait des recherches en ligne.
  • La plupart des employeurs ont répondu à l’appelante qu’ils vivaient une période difficile parce que les heures étaient réduites et qu’ils ne pouvaient pas l’embaucher pour le moment parce qu’ils n’avaient même pas assez de travail pour occuper leurs employés actuels.
  • Foot Locker a fait passer une entrevue à l’appelante, mais l’employeur lui a dit qu’il ne pouvait pas l’embaucher sur-le-champ en raison du confinement.
  • L’appelante a aussi fait appel à son réseau (amis et famille) pour dénicher des occasions d’emploi potentielles.

[97] À la lumière de ce qui précède, j’estime que les emplois convenables pour l’appelante pendant ses études secondaires étaient ceux de même nature que ses emplois récents, c’est-à-dire le travail dans les restaurants et les commerces de détail. Puisqu’elle avait déjà travaillé dans un restaurant (B), je pense qu’on peut raisonnablement croire qu’elle était apte à accepter un emploi semblable. J’estime également qu’il est raisonnable de croire que les employeurs du secteur de la vente au détail ont pu, de façon générale, considérer sa candidature comme étant acceptable malgré le jeune âge de l’appelante, car la plupart des employés de cet âge occupent des postes de premier échelon et obtiennent une rémunération proche du salaire minimum. Bien que je reconnaisse que l’appelante n’était pas présente à l’audience pour témoigner elle-même à ce sujet, j’ai déjà conclu que j’accordais un poids important aux renseignements fournis par sa représentante en son absence.

[98] Je suis par ailleurs d’avis que l’appelante a déployé suffisamment d’efforts pour trouver un emploi entre le 29 novembre 2020 et le début de janvier 2021. Elle attendait de voir si B la rappellerait au travail.

[99] Dans la décision Page, la Cour a affirmé qu’il est raisonnable d’accorder à une personne un délai raisonnable pour voir si elle sera rappelée au travailNote de bas de page 37.

[100] J’estime que cet élément de la décision Page s’applique en l’espèce, car moins de deux mois s’étaient écoulés quand l’appelante a entrepris de chercher un emploi. Je crois également qu’il était raisonnable de la part de l’appelante de s’attendre initialement à être rappelée au travail, avant qu’il ne devienne évident que les mesures de confinement découlant de la COVID-19 allaient être maintenues plus longtemps que prévu.

[101] Autrement dit, l’appelante n’a pas eu besoin de chercher un autre emploi entre le 29 novembre 2020 et le début de janvier 2021 parce qu’elle attendait de voir si B allait la rappeler au travail. Et, compte tenu des circonstances, c’était un comportement raisonnable de sa part.

[102] J’estime par ailleurs que l’appelante a déployé suffisamment d’efforts pour trouver un emploi entre le début de janvier 2021 et le 29 juin 2021.

[103] Je juge que les efforts de l’appelante au cours de cette période étaient suffisants parce qu’elle a régulièrement fait différentes démarches pour tenter de trouver du travail. Elle a fait des démarches parfois en personne, d’autres fois en ligne, pour trouver un emploi alors que de nombreux employeurs ne pouvaient même pas ouvrir leur entreprise compte tenu des mesures de confinement liées à la COVID-19, et étaient encore moins disposés à embaucher. Elle a postulé des emplois convenables autant qu’elle le pouvait, compte tenu des circonstances extraordinaires du moment. Elle a également fait appel à son réseau pour tenter de dénicher un emploi convenable. Elle a obtenu une entrevue avec un employeur, mais ce dernier ne pouvait pas l’embaucher parce qu’il n’avait pas de travail à attribuer dans l’immédiat. À mon avis, ce qui précède démontre qu’elle a tenté de diverses façons de dénicher un emploi convenable pendant cette période.

[104] J’estime également que rien n’indique que l’appelante a refusé, à un moment ou à un autre, de répondre à la demande de la Commission de présenter les démarches qu’elle avait faites pour tenter de trouver un emploi. Au contraire, les propres dossiers de la Commission indiquent que celle-ci a dit à la représentante de l’appelante que les renseignements concernant les démarches de recherche d’emploi de l’appelante [traduction] « ne seraient peut-être pas nécessaires », et la Commission n’a pas soulevé de nouveau la questionNote de bas de page 38. À mon avis, il ressort de cette situation que la Commission a envoyé des messages contradictoires à l’appelante à propos de la nécessité de présenter ses démarches de recherche d’emploi pour prouver sa disponibilité. La situation révèle également que l’appelante n’a jamais ignoré une ordonnance de la Commission concernant la présentation de ses démarches de recherche d’emploi.

[105] Je reconnais que l’appelante n’a pas présenté de preuve écrite de ses efforts de recherche d’emploi.

[106] Je reconnais également que l’appelante n’était pas présente à l’audience et n’a pas témoigné à propos de ses démarches pour trouver un emploi.

[107] J’estime toutefois que l’appelante n’a pas besoin de présenter une preuve écrite de ses efforts de recherche d’emploi et qu’elle n’avait pas besoin non plus de témoigner à l’audience pour prouver qu’elle cherchait activement du travail pendant ses études secondaires. Les renseignements fournis par sa représentante avant et pendant l’audience m’ont convaincu qu’elle avait entrepris de chercher activement un emploi, et j’ai expliqué précédemment pourquoi j’accorde un poids important à ces renseignements en l’espèce.

[108] Les éléments de preuve provenant directement de l’appelante me convainquent également que cette dernière a régulièrement cherché un emploi pendant cette période. Sur chacun de ses formulaires sur les cours de formation, elle a indiqué qu’elle était disponible pour chercher un emploi et qu’elle s’était efforcée de faire des recherches depuis le début de ses coursNote de bas de page 39. À mon avis, ces éléments de preuve viennent appuyer les renseignements fournis par la représentante de l’appelante à propos des démarches de recherche d’emploi de l’appelante pendant ses études secondaires.

[109] Il m’apparaît donc évident que l’appelante a fait différentes démarches, et ce, de manière continue et soutenue, pour trouver un emploi pendant ses études secondaires et que ces efforts étaient précisément axés sur la recherche d’un emploi convenable.

[110] Dans l’ensemble, j’estime que l’appelante a démontré qu’elle a déployé des efforts suffisants pour trouver un emploi convenable au cours de sa période d’inadmissibilité.

[111] Ainsi, l’appelante satisfait au deuxième facteur Faucher.

Limitation indue des chances de retour sur le marché du travail

[112] À mon avis, l’appelante n’a pas établi de conditions personnelles limitant indûment ses chances de retour sur le marché du travail entre le 29 novembre 2020 et le 29 juin 2021.

[113] À l’audience, la représentante de l’appelante a affirmé que cette dernière avait commencé sa dernière année d’études secondaires (12e année) en septembre 2020 et que l’horaire de cours avait été modifié cette année-là. Du lundi au jeudi, elle alternait entre des cours en classe et des cours en ligne, et ses cours du vendredi se déroulaient en classe une semaine et en ligne la semaine suivante. C’est donc dire que ses heures de cours en classe étaient réduites de moitié par rapport à la normale. Ses cours en ligne prenaient fin plus tôt que ses cours en classe, soit vers 11 h, ce qui lui donnait plus de marge de manœuvre pour travailler ces jours-là.

[114] La représentante de l’appelante a également mentionné que cette dernière était disponible pour travailler à tout moment en dehors de ses heures de cours, en particulier l’après-midi et le soir. C’est ce qu’elle faisait lorsqu’elle travaillait à B et à G de septembre à novembre 2020, et ces heures de travail étaient courantes dans les secteurs où elle a orienté ses recherches d’emploi (restauration et commerce de détail) après avoir perdu ces deux emplois.

[115] Selon la Commission, le type d’emploi considéré comme convenable pour l’appelante à titre d’élève fréquentant l’école secondaire a indûment limité ses chances de retourner sur le marché du travail parce qu’elle avait [traduction] « une expérience de travail extrêmement limitée » et que les règles provinciales lui interdisaient d’abandonner ses étudesNote de bas de page 40.

[116] Je ne suis pas du même avis que la Commission.

[117] Selon moi, la scolarité de l’appelante ne constitue pas une condition personnelle qui a pu limiter ses chances de retourner sur le marché du travail.

[118] J’admets que l’appelante était en mesure de travailler en même temps que ses études et qu’elle a travaillé pendant qu’elle fréquentait l’école secondaire jusqu’à ce qu’elle perde ses emplois. Bien que je reconnaisse que l’appelante n’était pas présente à l’audience, j’ai déjà conclu que j’accordais un poids important aux renseignements fournis par sa représentante, laquelle a déclaré que l’appelante pouvait accepter, et a accepté, un emploi l’après-midi et le soir pendant sa dernière année d’études secondaires, vu l’horaire de cours modifié.

[119] À mon avis, l’horaire de cours de l’appelante était suffisamment flexible pour lui permettre d’être disponible pour travailler. Hormis le matin et l’après-midi les jours où ses cours se déroulaient en classe (soit 3 jours par semaine au plus), elle n’avait aucune autre restriction d’horaire pour le travail. J’ai également déjà conclu précédemment que l’appelante avait occupé régulièrement un emploi pendant ses études secondaires. D’après moi, on peut raisonnablement croire qu’un emploi convenable pour elle – donc un emploi dans la restauration ou la vente au détail – aurait été disponible pour elle en après-midi et le soir, surtout dans les restaurants qui souvent vont ouvrir tôt et fermer tard.

[120] Dans la décision Page, la Cour a affirmé qu’un étudiant ne doit pas nécessairement démontrer qu’il est disponible chaque jour ouvrable durant les heures régulières. Il peut être considéré comme disponible pour travailler même si sa disponibilité se limite à des heures irrégulièresNote de bas de page 41.

[121] Autrement dit, j’estime que l’appelante était disponible pour travailler malgré qu’elle fréquentait l’école. Même si elle ne pouvait pas légalement abandonner ses études, son horaire de cours modifié en 12e année lui permettait d’accepter un emploi convenable en dehors de ses heures de cours. Ainsi, ses études ne constituaient pas une condition personnelle limitant excessivement sa capacité à trouver un emploi.

[122] Je juge également que le fait que l’appelante ne pouvait pas légalement abandonner ses études ne constituait pas non plus une condition personnelle limitant sa capacité à trouver un emploi. Il s’agit d’une prescription de la loi sur laquelle elle n’a aucun contrôle, et non de quelque chose qu’elle a fait ou n’a pas fait et qui a compromis son retour sur le marché du travail. C’est pourquoi on ne peut pas dire qu’il s’agit d’une condition personnelle.

[123] En outre, je suis d’avis que l’appelante a postulé tous les emplois convenables pendant qu’elle fréquentait l’école secondaire.

[124] Comme il en a été question précédemment, j’estime que les emplois convenables pour l’appelante étaient ceux de même nature que ses emplois récents, c’est-à-dire le travail dans les restaurants et les commerces de détail.

[125] De même, comme il a été mentionné précédemment, j’estime que l’appelante a déployé suffisamment d’efforts pour trouver un emploi convenable pendant ses études secondaires. Elle m’a convaincu, grâce aux renseignements fournis par sa représentante, qu’elle a fait diverses démarches, et ce, de manière continue et soutenue, pour trouver un emploi dans la restauration ou la vente au détail pendant cette période.

[126] Donc, d’après moi, l’appelante n’a pas établi de condition personnelle l’empêchant de trouver un emploi convenable. Elle n’a pas restreint ses recherches d’emploi de manière à éviter des emplois qu’elle était en mesure d’occuper et qu’elle avait occupés auparavant. Au contraire, elle a postulé de tels emplois et aurait pu travailler pour les employeurs concernés tout en respectant son horaire de cours.

[127] Dans l’ensemble, j’estime que l’appelante n’a pas établi de conditions personnelles ayant indûment limité sa disponibilité au cours de sa période d’inadmissibilité.

[128] Ainsi, l’appelante satisfait au troisième facteur Faucher.

[129] Je conclus donc que l’appelante a démontré qu’elle était capable de travailler et disponible à cette fin entre le 29 novembre 2020 et le 29 juin 2021, mais qu’elle a été incapable d’obtenir un emploi convenable, parce qu’elle satisfait aux trois facteurs Faucher pour la période visée.

Donc, l’appelante était-elle capable de travailler et disponible à cette fin?

[130] D’après mes conclusions, j’estime que l’appelante a démontré qu’elle était capable de travailler et disponible à cette fin entre le 29 novembre 2020 et le 29 juin 2021, mais qu’elle a été incapable d’obtenir un emploi convenable.

[131] L’appelante a déjà reçu des prestations pour la période susmentionnée. Ma décision signifie qu’elle est admissible à ces prestations et qu’elle n’a donc pas à les rembourser.

[132] Selon moi, l’appelante pourrait également être admissible à toucher des prestations pendant plus de semaines au cours de la même période.

[133] La Commission a annoncé à l’appelante qu’elle cessait de lui verser des prestations au début de septembre 2021Note de bas de page 42. Mais, comme il en a été question précédemment, la Commission convient maintenant que l’appelante a prouvé sa disponibilité à partir du 30 juin 2021. Ainsi, selon les règles temporaires en place à l’époque pour l’AE (selon lesquelles un nombre d’heures assurables réduit permettait à l’appelante d’être admissible aux prestations), l’appelante pourrait être admissible à des semaines additionnelles de prestations après le début de septembre 2021.

[134] Cela dit, j’ai demandé à la Commission de communiquer sans délai avec l’appelante pour vérifier si elle était désormais admissible à des semaines additionnelles de prestations pour la période visée et, le cas échéant, d’amorcer le processus pour que ces prestations lui soient versées.

Conclusion

[135] L’appelante a démontré qu’elle était disponible pour travailler, au sens de la loi, du 29 novembre 2020 au 29 juin 2021.

[136] Elle n’est donc pas inadmissible au bénéfice des prestations d’AE pour cette période. Puisque ces prestations lui ont déjà été versées, elle n’a pas à les rembourser.

[137] Par conséquent, l’appel est accueilli.

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