Assurance-emploi (AE)

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Citation : Commission de l’assurance-emploi du Canada c SC, 2025 TSS 536

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision relative à une demande de
permission de faire appel

Partie demanderesse : Commission de l’assurance-emploi du Canada
Représentante : Érélégna Bernard
Partie défenderesse : S. C.

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du
24 février 2025 (GE-22-2356)

Membre du Tribunal : Pierre Lafontaine
Date de la décision : Le 22 mai 2025
Numéro de dossier : AD-25-228

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Décision

[1] La permission de faire appel n’est pas accordée. L’appel n’ira pas de l’avant.

Aperçu

[2] Le 19 mars 2020, le défendeur (prestataire) a présenté une demande pour recevoir des prestations d’assurance-emploi, après avoir cessé de travailler le 16 mars 2020. Une période de prestations a été établie à compter du 15 mars 2020, afin que le prestataire puisse recevoir des Prestations d’assurance-emploi d’urgence (PU-AE). Une avance au montant de 2 000 $ en PU-AE lui a également été versée.

[3] La demanderesse (Commission) a par la suite réclamé l’avance de 2 000 $ versée au prestataire. Selon la Commission, le prestataire avait droit de recevoir 7 semaines mais il avait reçu 11 semaines de PU-AE. En désaccord, le prestataire a interjeté appel devant la division générale du Tribunal.

[4] Lors de l’audience, le représentant du prestataire a confirmé qu’il présentait une demande d’arrêt des procédures, une demande qu’il avait initialement présenté dans un courriel adressé à la division générale en date du 18 avril 2024, et réitéré lors des conférences de cas tenues les 31 mai 2024 et 1er novembre 2024.

[5] La division générale a déterminé qu’elle avait la compétence d’entendre la demande en arrêt des procédures présentée par le prestataire. Elle a cependant rejeté la demande du prestataire. La division générale a déterminé que le prestataire avait droit à 7 semaines de PUAE mais qu’il avait reçu 11 semaines de PUAE. Il a donc reçu 2 000 $ en trop. La division générale a conclu qu’il doit rembourser à la Commission la somme de 2 000 $.

[6] La Commission demande à la division d’appel la permission d’en appeler de la décision de la division générale. Elle fait valoir que la division générale n’avait pas la compétence d’entendre une demande d’arrêt des procédures.

[7] Je dois décider si on peut soutenir que la division générale a commis une erreur révisable qui confère à l’appel une chance raisonnable de succès.

[8] Je refuse la permission d’en appeler puisqu’aucun des moyens d’appel soulevés par la Commission confère à l’appel une chance raisonnable de succès.

Question en litige

[9] Est-ce que la Commission soulève, dans ses moyens d’appel, une erreur révisable qu’aurait commise la division générale et qui confère à l’appel une chance raisonnable de succès? 

Analyse

[10] La loi spécifie les seuls moyens d’appel d’une décision de la division générale. Ces erreurs révisables sont que :

  1. Le processus d’audience de la division générale n’était pas équitable d’une certaine façon.
  2. La division générale n’a pas tranché une question qu’elle aurait dû trancher. Ou encore, elle s’est prononcée sur une question sans pouvoir de le faire.
  3. La division générale a fondé sa décision sur une erreur de fait importante.
  4. La division générale a commis une erreur de droit dans sa décision.

[11] La demande de permission d’en appeler est une étape préliminaire à une audience sur le fond de l'affaire. C'est une première étape que la Commission doit franchir, mais le fardeau est ici inférieur à celui auquel elle devra rencontrer à l'audience de l'appel sur le fond. À l’étape de la demande permission d’en appeler, la Commission n’a pas à prouver sa thèse mais elle doit établir que son appel a une chance raisonnable de succès. En d’autres mots, elle doit établir que l’on peut soutenir qu’il y a eu erreur révisable sur laquelle l’appel peut réussir.

[12] La permission d’en appeler sera en effet accordée si je suis convaincu qu’au moins l’un des moyens d’appel soulevé par la Commission confère à l’appel une chance raisonnable de succès.

Est-ce que la Commission soulève, dans ses moyens d’appel, une erreur révisable qu’aurait commise la division générale et qui confère à l’appel une chance raisonnable de succès?

[13] La Commission soutient que la division générale n’avait pas la compétence de trancher la demande d’arrêt des procédures présentée par le prestataire.

[14] La Commission soutient que, même si elle a eu gain de cause en 1ere instance, la décision interlocutoire rendue par la division générale peut être portée en appel car l’article 55 de la Loi sur le ministère de l'emploi et du développement social (Loi sur le MEDS) prévoit que « Toute décision de la division générale peut être portée en appel devant la division d’appel par toute personne qui fait l’objet de la décision et toute autre personne visée par règlement ».

[15] Le 6 juin 2022, la Commission a maintenu sa décision initiale selon laquelle le prestataire avait reçu plus de PU-AE que ce à quoi il avait droit. En désaccord avec la décision révisée, le prestataire a interjeté appel de cette décision devant la division générale du Tribunal.Note de bas de page 1

[16] La division générale a déterminé qu’elle avait compétence pour entendre la demande en arrêt des procédures présentée par le prestataire. Elle a cependant rejeté la demande du prestataire. La division générale a déterminé que le prestataire avait droit à 7 semaines mais qu’il avait reçu 11 semaines de PUAE. Il a donc reçu 2 000 $ en trop. La division générale a conclu qu’il doit rembourser à la Commission la somme de 2 000 $.

[17] Le prestataire n’a pas demandé la permission d’en appeler à la division d’appel de la décision de la division générale du Tribunal.

[18] La loi prévoit que la division d’appel doit rejeter la demande de permission d’en appeler si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.Note de bas de page 2

[19] J’estime qu’il n’y a plus de litige actuel ni de différend concret entre les parties puisque la question en litige devant la division générale a été réglée. La division générale a conclu que le prestataire doit rembourser la somme de 2 000 $ de PU-AE versée en trop. Le prestataire n’a pas porté en appel la décision de la division générale.

[20] La demande d’arrêt des procédures qui a été rejetée par la division générale ne peut donc servir de fondement à un appel qui est par ailleurs théorique.Note de bas de page 3 Que la demande d’arrêt des procédures soit rejetée pour insuffisance de preuve ou pour défaut de compétence ne changera rien aux droits des parties.

[21] Le fait que la compétence du Tribunal à entendre une demande d’arrêt des procédures puisse continuer à être en litige dans d'autres affaires instruites par le Tribunal n'empêche pas cette question d’être théorique entre les parties.Note de bas de page 4

[22] Le Tribunal pourrait-il néanmoins exercer son pouvoir discrétionnaire pour entendre l’appel de la Commission ?

[23] L'exigence du débat contradictoire est l'un des principes fondamentaux de notre système juridique et elle tend à garantir que les parties ayant un intérêt dans l'issue du litige en débattent complètement tous les aspects. Tel que souligné précédemment, il semble que cette exigence ne puisse pas être remplie dans le présent dossier puisque le prestataire n’a pas fait appel la décision de la division générale et, malgré l’invitation du Tribunal, n’est pas intervenu devant la division d’appel pour débattre de la question de compétence.

[24] Il ne serait pas opportun pour le Tribunal de consacrer des ressources judiciaires à la présente affaire compte tenu des circonstances. Il serait préférable d'attendre et de trancher la question dans un véritable contexte contradictoire.

[25] Je note également que la question n’échappe pas à l’examen judiciaire puisque la division d’appel a déjà été appelé à trancher la question d’arrêt des procédures à plusieurs reprises lors de débats contradictoires.Note de bas de page 5

[26] En considérant ces facteurs, je ne vois pas comment la division d’appel pourrait exercer son pouvoir discrétionnaire afin d’entendre l’appel de la Commission.

[27] J’estime que la division générale n’a commis aucune erreur révisable lorsqu’elle a confirmé la décision révisée de la Commission rendue le 6 juin 2022, conformément aux pouvoirs qui lui conférés par l’article 54(1) de la Loi sur le MEDS. La preuve supporte la conclusion de la division générale sur la question en litige qui lui a été présentée, à savoir que le prestataire doit rembourser la somme de 2 000 $ de PU-AE versée en trop. Je suis d’avis que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

Conclusion

[28] La permission d’en appeler est refusée. L’appel n’ira pas de l’avant.

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