[TRADUCTION]
Citation : TP c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2025 TSS 493
Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi
Décision
Partie appelante : | T. P. |
Représentante ou représentant : | L. P. |
Partie intimée : | Commission de l’assurance-emploi du Canada |
Décision portée en appel : | Décision de révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada datée du 6 février 2025 (communiquée par Service Canada) |
Membre du Tribunal : | Marc St-Jules |
Mode d’audience : | Téléconférence |
Date de l’audience : | Le 3 avril 2025 |
Personnes présentes à l’audience : | Appelante Représentante de l’appelante |
Date de la décision : | Le 28 avril 2025 |
Numéro de dossier : | GE-25-465 |
Sur cette page
Décision
[1] L’appel est rejeté. Le Tribunal n’est pas d’accord avec l’appelante.
[2] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a prouvé que l’appelante a perdu son emploi en raison d’une inconduite (autrement dit, parce qu’elle a fait quelque chose qui lui a fait perdre son emploi). Par conséquent, l’appelante est exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploiNote de bas de page 1.
Aperçu
[3] L’appelante a perdu son emploi. Son employeur a déclaré qu’elle a été congédiée parce qu’elle est arrivée en retard au travail, malgré avoir été avisée par écrit que si cela se produisait, elle serait congédiée.
[4] La Commission a examiné les informations et a conclu que l’appelante était exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi parce qu’elle avait perdu son emploi en raison d’une inconduite.
[5] L’appelante et sa représentante ne sont pas d’accord. Elles soutiennent que le dernier avertissement écrit était injustifié, donc qu’il ne faudrait pas en tenir compte. Elles soutiennent également que l’appelante a demandé avant le début de son quart de travail la permission d’arriver en retard, mais que l’employeur a attendu que le quart de travail commence pour lui répondre. Par conséquent, l’appelante ne pouvait pas être à l’heure. Les autres arguments seront abordés ci-dessous.
Questions que je dois examiner en premier
La division d’appel a renvoyé le dossier
[6] C’est la deuxième fois que la division générale est saisie du présent appel. L’appelante n’était pas d’accord avec la décision initiale de la division générale et a convaincu la division d’appel que la division générale avait omis d’assurer l’équité de la procédure. La division d’appel a renvoyé l’affaire à la division générale pour qu’une ou un autre membre la réexamine.
[7] L’appel m’a été assigné. J’ai tenu une nouvelle audience. La présente décision découle de cette audience.
La question de la partialité
[8] La représentante a déclaré qu’elle craignait que les membres du Tribunal ne soient partiaux en tant qu’employés du gouvernement. C’est aussi quelque chose qui avait été communiqué par écrit à la division d’appel : [traduction] « Tous les membres travaillent pour le gouvernement pour économiser de l’argent en refusant de verser des prestations d’assurance-emploi. Un membre osera-t-il contester la décision d’un autre membre? C’est douteux, même si la justice l’exigeNote de bas de page 2 ».
[9] Les allégations de partialité sont graves. Elles remettent en question l’intégrité du Tribunal et de ses membresNote de bas de page 3. La partie appelante doit prouver qu’elle a fait l’objet de partialité; ses soupçons ne suffisent pasNote de bas de page 4. L’allégation ne peut être faite à la légère, elle ne peut reposer sur des soupçons, des conjectures, des insinuations ou des impressions de l’appelante.
[10] Le critère juridique permettant d’établir l’existence de partialité est rigoureux : « Il faut plutôt se demander à quelle conclusion en arriverait une personne bien renseignée qui étudierait la question en profondeur, de façon réaliste et pratique. Croirait-elle que, selon toute vraisemblance, [le ou la membre de la division générale], consciemment ou non, ne rendra pas une décision juste?Note de bas de page 5 »
[11] Je reconnais que mon salaire est payé par le gouvernement. Je juge que cet argument n’est pas convaincant.
[12] Les membres du Tribunal sont présumés impartiaux. Si je suivais l’argument de l’appelante, il faudrait en conclure que les membres du Tribunal ne sont jamais en mesure de rendre une décision impartiale. On pourrait invoquer le même argument au sujet des juges dans les tribunaux officiels.
[13] Les décisions de la division générale peuvent être portées en appel à la division d’appel. Certains appels sont rejetés, d’autres sont accueillis. Cela renforce l’idée qu’un simple soupçon ne peut suffire à démontrer la partialité.
[14] J’ai également pris la décision de ne pas me récuser en me fondant sur cet argument. Il revient à la division générale de rendre la décision. Si j’acceptais l’argument de la prestataire, il faudrait en conclure que tous les autres membres de la division générale sont partiaux et par conséquent il serait inutile d’assigner le présent appel à quelqu’un d’autre.
[15] Je conclus qu’une personne raisonnable ne conclurait pas que chaque membre du Tribunal a un parti pris.
L’appelante a assisté à l’audience
[16] Avant l’audience, la représentante a affirmé qu’il se pourrait que l’appelante ne veuille pas assister à l’audience. On a demandé au Tribunal si l’appelante devait assister à l’audience.
[17] Une lettre a été envoyée en réponseNote de bas de page 6. Cette lettre précisait que bien que la présence à l’audience ne soit pas obligatoire, cela pourrait être à son avantage, car seule l’appelante a une connaissance directe des événements en question.
[18] Comme je ne savais pas pourquoi la représentante posait cette question, j’ai proposé de tenir l’audience tôt le matin ou en début de soirée. De plus, la possibilité d’écouter la première audience a été offerte. L’important est que l’appelante ait la possibilité de présenter ses arguments.
[19] La représentante a assisté à l’audience au complet. Par l’entremise de la représentante, on a proposé à l’appelante d’assister brièvement à l’audience afin de répondre aux questions pertinentes pour trancher l’appel.
[20] On a téléphoné à l’appelante pendant l’audience, puis elle a témoigné. Je juge que l’appelante n’a subi aucun préjudice, car on l’a informée que la présence à l’audience était facultative et on lui a proposé d’autres options : elle pouvait assister à l’audience à différents moments ou écouter l’enregistrement de l’audience initiale.
Documents envoyés après l’audience
[21] J’ai accepté les documents que l’appelante a envoyés après l’audienceNote de bas de page 7, car ils comprennent des arguments semblables à ceux présentés à l’audience. Ils ont aussi clarifié ce qui a été dit à l’audience.
[22] Je juge que cela ne porterait pas préjudice à l’autre partie, car ce sujet a été abordé à l’audience et la Commission a choisi de ne pas répondre. La Commission avait jusqu’au 16 avril 2025 pour répondre. Elle n’a toujours pas répondu en date d’aujourd’hui, le 28 avril 2025.
Écouter l’enregistrement de l’audience initiale
[23] Comme c’est la deuxième fois que le présent appel est porté devant la division générale, j’ai accès à l’enregistrement audio de l’audience initiale. D’habitude, je n’écoute pas ces enregistrements-làNote de bas de page 8. Je le fais dans la présente affaire parce que j’aimerais que l’appelante fournisse son propre témoignage, et qu’on évite tout biais qui pourrait découler de l’écoute de l’audience précédente.
[24] J’estime que c’est approprié, car une partie appelante peut se sentir nerveuse, et le fait d’écouter l’audience initiale lui permet de mieux comprendre le processus et de se préparer pour les prochaines audiences.
[25] Toutefois, comme l’appelante était réticente à assister à l’audience, je voulais m’assurer d’avoir tous les renseignements et le témoignage qu’elle voulait fournir au cas où elle serait absente. J’ai donc demandé à l’appelante et à sa représentante si elles accepteraient que j’écoute l’enregistrement de l’audience initiale.
[26] Les deux ont accepté que je le fasse. Par conséquent, l’audience initiale a été prise en compte dans la présente décision. Je juge que cela ne porte pas préjudice à l’appelante, car j’ai écouté l’audience avec son consentement et celui de sa représentante. Comme la Commission n’a pas assisté à l’une ou l’autre des audiences, je juge qu’elle n’a pas subi de préjudice non plus.
La représentante a témoigné
[27] J’ai accordé une grande marge de manœuvre à la représentante au cours de son témoignage. De toute évidence, elle avait une bonne compréhension des faits. Il ressort clairement des observations qu’elle a rédigé bon nombre des arguments avec l’aide de l’appelante.
[28] La représentante avait une connaissance directe d’une conversation avec l’employeur. Cependant, cette conversation a eu lieu après le congédiement de l’appelante.
Question en litige
[29] L’appelante a-t-elle perdu son emploi en raison d’une inconduite?
Analyse
[30] Pour répondre à la question de savoir si l’appelante a perdu son emploi en raison d’une inconduite, je dois décider deux choses. D’abord, je dois décider pourquoi l’appelante a perdu son emploi. Ensuite, je dois décider si la loi considère ce motif comme une inconduite.
Pourquoi l’appelante a-t-elle perdu son emploi?
[31] Je conclus que l’appelante a perdu son emploi parce que l’employeur estimait qu’elle était arrivée en retard au travail, et ce, après avoir reçu un avertissement.
[32] L’appelante soutient que la nouvelle superviseure ne l’aimait pas et qu’on l’a congédiée parce qu’on ne l’appréciait plus à sa juste valeurNote de bas de page 9.
[33] Je ne suis pas convaincu. Il se peut très bien qu’elle ait été congédiée pour un autre motif. Le congédiement est lié au retard.
[34] Je conclus que c’est la raison pour laquelle elle a été congédiée. L’appelante convient qu’elle était en retard ce jour-là. J’estime que cet incident a entraîné directement son congédiement.
La raison du congédiement de l’appelante est-elle une inconduite au sens de la loi?
[35] La raison du congédiement de l’appelante est une inconduite au sens de la loi.
[36] Pour être considérée comme une inconduite au sens de la loi, la conduite doit être délibérée. Cela signifie que la conduite était consciente, voulue ou intentionnelleNote de bas de page 10. L’inconduite comprend également une conduite qui est si insouciante qu’elle est presque délibéréeNote de bas de page 11. Pour qu’il y ait inconduite au sens de la loi, il n’est pas nécessaire que l’appelante ait eu une intention coupable (c’est-à-dire qu’elle ait voulu faire quelque chose de mal)Note de bas de page 12.
[37] Il y a inconduite si l’appelante savait ou aurait dû savoir que sa conduite pouvait l’empêcher de remplir ses obligations envers son employeur et qu’il y avait une réelle possibilité qu’elle soit congédiée pour cette raisonNote de bas de page 13.
[38] La Commission doit prouver que l’appelante a perdu son emploi en raison d’une inconduite. La Commission doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’elle doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable que l’appelante a perdu son emploi en raison de son inconduiteNote de bas de page 14.
[39] La Commission affirme qu’il y a eu inconduite parce que l’appelante avait reçu plusieurs avertissements concernant ses retardsNote de bas de page 15. Son dernier avertissement indiquait qu’elle risquait d’être congédiée si elle arrivait en retard une autre fois. L’appelante aurait dû savoir qu’elle risquait d’être congédiée après avoir reçu ce dernier avertissement.
[40] L’appelante affirme qu’il n’y a pas eu d’inconduite pour les raisons suivantes :
- Le dernier avertissement n’était pas valide. On ne devrait pas pouvoir invoquer légalement cette lettreNote de bas de page 16. Les absences étaient hors de son contrôleNote de bas de page 17.
- La superviseure n’a pas informé le gestionnaire régional que les incidents de février étaient justifiésNote de bas de page 18.
- Il était sous-entendu qu’une personne pouvait arriver en retard s’il y avait une autre personne au magasin. La superviseure avait accepté le retard d’une collègue qui avait un rendez-vous dans un salon de manucureNote de bas de page 19.
- Le fait de signer le dernier avertissement ne signifie pas qu’elle a accepté son contenuNote de bas de page 20. L’appelante affirme qu’elle n’aurait pas dû signer la lettre, car ses absences étaient justifiéesNote de bas de page 21.
- L’employeur n’a pas répondu à sa demande d’arriver en retardNote de bas de page 22.
- Elle a une lettre de recommandation d’une ancienne superviseureNote de bas de page 23.
- Le conflit personnelNote de bas de page 24.
- L’employeur doit donner l’occasion de fournir des explicationsNote de bas de page 25.
- L’appelante n’a jamais eu l’occasion de s’améliorerNote de bas de page 26.
- L’employeur n’avait aucune politique écrite sur les retardsNote de bas de page 27.
- Bien qu’elle ait été informée qu’elle risquait d’être congédiée, elle n’y croyait pasNote de bas de page 28.
- Aucune mesure disciplinaire plus sévère n’a été envisagée. La lettre mentionne seulement que les mesures pouvaient aller jusqu’au congédiementNote de bas de page 29.
- L’appelante s’est assurée que sa collègue serait au travail à l’heureNote de bas de page 30. Par conséquent, il n’était pas nécessaire qu’elle soit aussi là pour 9 h.
- Elle a discuté avec d’autres personnes qui conviennent que le congédiement était injustifiéNote de bas de page 31.
[41] Je vais aborder chacun de ces éléments et expliquer pourquoi je ne suis pas convaincu. J’examinerai ensuite si le critère relatif à l’inconduite a été rempli.
Le dernier avertissement n’était pas valide
[42] Je juge que cet argument n’est pas convaincant. Il n’en demeure pas moins que le dernier avertissement a bel et bien été donné. Il indique clairement que le prochain incident pourrait entraîner son congédiement.
[43] Pour évaluer l’inconduite, je dois tenir compte de ce que l’appelante a fait ou a omis de faire. En effet, la jurisprudence bien établie indique que je ne dois pas tenir compte de la conduite de l’employeurNote de bas de page 32.
[44] Ce n’était pas la première fois qu’elle était en retard. Une preuve documentaire montre qu’elle a reçu un avertissement en novembre 2023Note de bas de page 33, lequel précise qu’elle avait déjà reçu un avertissement concernant ses retards et qu’un 3e serait émis.
[45] Après cet avertissement de novembre, la lettre d’avertissement de février mentionne qu’elle en est à son 7e retardNote de bas de page 34. Elle pouvait arriver en retard de 6 minutes ou de 4 heures.
[46] La représentante a déclaré que tous les retards étaient justifiés et que seulement deux des retards avaient été occasionnés par la circulation. Malgré cela, l’employeur a décidé d’émettre cette lettre d’avertissement. Les deux retards en raison de la circulation étaient peut-être suffisants en soi pour justifier la lettre. Encore une fois, je ne peux pas me prononcer sur la conduite de l’employeur.
La superviseure n’a pas informé le gestionnaire régional que les incidents de février étaient justifiés
[47] Je juge que cet argument n’est pas convaincant. Je reconnais que les deux semaines de février ont certainement été traumatisantes pour l’appelante. Sa mère suivait des traitements contre le cancer et avait besoin de son soutien, ses chiens sont morts et elle devait suivre un traitement contre les poux. Pour cette raison, l’appelante croit fermement que ses retards étaient justifiés. Cependant, il y a eu 7 retards. Lors de l’audience initiale, l’appelante a déclaré que la [traduction] « plupart » étaient justifiés. Lors de la deuxième audience, sa représentante a soutenu qu’ils étaient peut-être tous justifiés, sauf les deux qui ont été occasionnés par la circulation.
[48] Je reconnais que si la superviseure n’a pas communiqué cette information au gestionnaire, le résultat aurait pu être différent. Cependant, il y a des retards, comme ceux dus au trafic, qui ne sont pas justifiés. La jurisprudence établit clairement qu’il incombe à l’employé d’arriver à l’heure au travailNote de bas de page 35.
[49] Je ne peux pas ignorer le fait que l’appelante a été avisée qu’elle devait arriver à l’heure à l’avenir. L’employeur n’a pas congédié l’appelante lorsque ses chiens sont morts ou lorsqu’elle était en retard à cause de problèmes de mécanique. Ce sont les actions subséquentes de l’appelante qui ont entraîné son congédiement. L’appelante a eu l’occasion d’agir différemment. Elle l’a fait pendant une semaine, mais elle a ensuite ignoré les avertissements.
Il était sous-entendu qu’une personne pouvait arriver en retard s’il y avait une autre personne au magasin.
[50] Je juge que cet argument n’est pas convaincant. Je reconnais que la superviseure a peut-être accepté qu’une collègue arrive en retard parce qu’elle avait un rendez-vous dans un salon de manucure. Je ne connais pas les circonstances entourant cette question. Voici ce qui aurait pu se produire :
- Cette employée a peut-être fait une demande bien à l’avanceNote de bas de page 36.
- L’employeur a peut-être examiné sa charge de travail avant de donner son approbation.
- Contrairement à l’appelante, sa collègue a peut-être reçu une approbation.
- Cette employée n’a peut-être jamais reçu d’avertissements.
[51] L’appelante a dit lors de l’audience initiale que ce n’est que la dernière superviseure qui exigeait que deux employés soient au magasin à l’ouverture à 9 h. Il lui semblait donc raisonnable de penser que si on prenait des mesures pour qu’au moins un employé soit présent à l’ouverture, tout irait bien. De toute évidence, la superviseure était plus stricte. Mais, je dois examiner la conduite de l’appelante. La superviseure voulait que l’appelante arrive à l’heure au travail; voilà pourquoi elle a reçu un avertissement lorsqu’elle ne l’a pas fait.
Par le passé, une personne qui avait 5 à 10 minutes de retard n’était pas vraiment en retard.
[52] Je juge que cet argument n’est pas convaincant pour deux raisons. La première est l’avertissement de novembre. Cet avertissement indique clairement que l’appelante devrait arriver 10 minutes plus tôt pour être prête pour le début de son quart de travail. La deuxième raison est que l’appelante a pris la décision unilatérale d’arriver au moins 30 minutes en retard. Son texto indique qu’elle prévoyait arriver vers 9 h 45.
[53] L’appelante a déclaré qu’elle est bel et bien arrivée environ 30 minutes en retard. Cela s’est produit même si elle a abrégé son rendez-vous. Autrement dit, dans le meilleur des cas, elle arrivait 30 minutes en retard. C’est beaucoup plus long que les retards de 5 à 10 minutes qui avaient été tolérés par le passé.
Le fait de signer le dernier avertissement ne signifie pas qu’elle a accepté son contenu. L’appelante affirme qu’elle n’aurait pas dû signer la lettre, car ses retards étaient justifiés.
[54] Je juge que cet argument n’est pas convaincant. L’appelante a convenu qu’elle était en retard. Elle convient que le dernier avertissement précisait que son prochain retard pourrait entraîner son congédiement, mais elle ne [traduction] « croyait pas que ce serait le cas ».
[55] Elle soutient que plusieurs raisons justifiaient ses retards, et que celles-ci échappaient à son contrôle. Je conviens qu’il s’agit d’événements malheureux, mais l’appelante reconnaît avoir été informée qu’elle risquait d’être congédiéeNote de bas de page 37.
[56] L’appelante a fourni une citation de Bill Stein, Études juridiques, qui soutient que la signature n’était qu’une reconnaissance. Cependant, une autre partie de la citation fait valoir que la signature confirme la réception de l’avertissementNote de bas de page 38.
[57] Je comprends que l’appelante n’est pas d’accord avec le contenu de la lettre, il est toutefois indéniable qu’elle l’a bel et bien reçue.
L’employeur n’a pas répondu à sa demande d’arriver en retard
[58] Je juge que cet argument n’est pas convaincant. À l’appui de cet argument, l’appelante a fourni une citation tirée du Guide de la détermination de l’admissibilité (chapitre 7, section 7.3.1.4.). Celle-ci prévoit que la Commission doit obtenir la preuve du fait que l’employeur n’a pas donné la permission et que l’employé a bien compris que la permission avait été refusée.
[59] Toutefois, la section 7.3.1 du Guide mentionne également que les employeurs ont le droit de s’attendre à ce que les employés se présentent au travail à l’heure. Il est important de noter que le Guide n’a pas force de loi. Je dois appliquer la loi et c’est ce que j’ai fait dans mon analyse.
[60] L’appelante a envoyé un texto à sa superviseure vers minuit au sujet du rendez-vous et a demandé si elle pouvait arriver plus tard au travail. Son quart de travail devait commencer à 9 h du matin.
[61] Elle a présumé que sa superviseure accepterait sa demande, car la précédente superviseure avait l’habitude d’accepter et de simplement modifier l’horaire en conséquenceNote de bas de page 39. L’appelante affirme qu’elle ne s’entendait pas bien avec sa superviseure. Elle a présumé qu’elle accepterait son retard, malgré leur différend.
[62] Je conviens que l’employeur n’a pas donné la permission. Malgré cela, l’appelante a fait le choix de se rendre à son rendez-vous chez l’esthéticienneNote de bas de page 40. Dans le texto qu’elle a envoyé, elle a expressément demandé si c’était correct. L’appelante n’a pas reçu la permission d’arriver en retard.
Lettre de recommandation
[63] Je juge que cet argument n’est pas convaincant. Je reconnais que l’ancienne superviseure de l’appelante l’apprécierait beaucoup.
[64] Cela ne change rien au fait qu’elle est arrivée au travail en retard malgré l’avertissement de novembre 2023 (lequel comprend une référence à un avertissement antérieur) et celui de février 2024.
Conflit personnel
[65] Je juge que cet argument n’est pas convaincant. Je ne peux ignorer que l’appelante était en retard, c’est indéniable. Elle savait que l’employeur encourageait son assiduité. Elle avait reçu un avertissement à ce sujet en novembre 2023, soit avant l’embauche de sa superviseure. Cette dernière a été embauchée environ six semaines plus tard.
[66] Cela signifie que l’employeur jugeait que l’assiduité de l’appelante posait problème avant l’arrivée de sa nouvelle superviseure.
L’employeur doit donner l’occasion de fournir des explications
[67] Je juge que cet argument n’est pas convaincant. Je dois examiner l’inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploi. L’appelante avait été clairement avisée que son prochain retard pourrait entraîner son congédiement. Je reconnais qu’elle n’avait pas reçu de réponse. Malgré cela, elle a choisi d’arriver en retard.
[68] L’appelante a décidé délibérément d’arriver en retard. Le caractère délibéré de cette décision rejoint le critère prévu par la Loi sur l’assurance-emploi.
Elle n’a jamais eu l’occasion de s’améliorer
[69] Je juge que cet argument n’est pas convaincant. L’appelante a reçu un avertissement en novembre 2023. Cet avertissement fait référence à un avertissement antérieur. Je reconnais que je n’ai pas remis en question cet avertissement antérieur. Cependant, je ne dispose d’aucun élément de preuve qui me ferait douter de l’existence de cet avertissement émis avant novembre 2023.
[70] L’appelante a admis que l’employeur essayait d’encourager son assiduité. Elle a eu l’occasion de s’améliorer, mais n’en a pas profité.
L’employeur n’avait aucune politique écrite sur les retards
[71] Je juge que cet argument n’est pas convaincant. La Loi sur l’assurance-emploi n’exige pas que l’employeur fournisse ce document. Dans cette affaire, il y a des avertissements clairs. Je sais que l’appelante n’est pas d’accord avec la lettre de février 2024, mais elle reconnaît l’avoir reçue. La lettre signale clairement que le congédiement est une possibilité.
Bien qu’elle ait été informée qu’elle risquait d’être congédiée, elle n’y croyait pas.
[72] Je juge que cet argument n’est pas convaincant.
[73] L’appelante a déclaré qu’elle avait compris qu’on voulait encourager son assiduitéNote de bas de page 41. Après avoir reçu l’avertissement, elle est arrivée à l’heure au travail pendant une semaineNote de bas de page 42. Toutefois, cela ne change rien au fait que peu après l’appelante est arrivée en retard encore une fois. Elle avait déjà reçu des avertissements en février 2024 et en novembre 2023.
[74] Je suis surpris que l’appelante n’ait pas compris que le licenciement était une possibilité. La lettre l’indiquait clairement.
Aucune mesure disciplinaire plus sévère n’a été envisagée. La lettre mentionne seulement que les mesures pouvaient aller jusqu’au congédiement.
[75] Je juge que cet argument n’est pas convaincant.
[76] L’avertissement de février 2024 indique clairement que le congédiement était une possibilité. L’employeur a choisi cette voie, car c’est son droit. Encore une fois, je dois examiner la conduite de l’appelante, non celle de l’employeur.
L’appelante s’est assurée que sa collègue serait au travail à l’heure
[77] Je juge que cet argument n’est pas convaincant. L’employeur avait prévu que le quart de travail de l’appelante commence à 9 h. L’employeur a organisé l’horaire ainsi, ce n’est pas une heure arbitraire. Le fait que l’appelante se soit assurée que sa collègue serait disponible et à l’heure est une bonne chose, mais cela n’enlève rien au fait que l’appelante devait y être aussi. L’appelante savait qu’elle devait être présente à 9 h au magasin, mais elle a pris la décision unilatérale de courir un risque.
Elle a discuté avec d’autres personnes qui conviennent que le congédiement était injustifié
[78] Je juge que cet argument n’est pas convaincant. Je dois examiner tous les éléments de preuve portés à ma connaissance à la lumière de la Loi sur l’assurance-emploi. Je ne sais pas si tous les faits ont été communiqués aux autres personnes. Je n’ai pas connaissance de l’analyse effectuée ni de la jurisprudence prise en considération.
Le critère relatif à l’inconduite a été rempli
[79] Je n’accorde pas plus de crédibilité à une partie plutôt qu’à l’autre dans la présente affaire. L’appelante semblait crédible et a livré son témoignage sans hésitation sous affirmation solennelle. Le problème est que même si je crois son témoignage, le critère relatif à l’inconduite a été rempli.
[80] Il est indéniable que l’appelante a agi de façon délibérée et qu’elle aurait dû savoir que son retard pouvait entraîner son congédiement. Cette analyse est fondée sur les éléments suivants :
- Elle a envoyé un texto à sa superviseure vers minuit concernant son quart de travail qui commençait à 9 h le lendemain matin. Elle savait qu’elle devait travailler.
- Elle s’est entendue avec une collègue. Elle savait qu’elle devait travailler.
- Elle a décidé de ne pas se présenter au travail à l’heure sans avoir obtenu la permission de le faire. Elle a agi délibérément.
- Son avertissement de février 2024 mentionne clairement que le congédiement est une possibilité. Même si l’appelante ne croyait pas qu’elle serait congédiée, elle aurait certainement dû savoir que c’était possible.
Conclusion
[81] La Commission a prouvé que l’appelante a perdu son emploi en raison d’une inconduite. Par conséquent, l’appelante est exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.
[82] Par conséquent, l’appel est rejeté.