Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : DR c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2025 TSS 458

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision relative à une demande de
permission de faire appel

Partie demanderesse : D. R.
Partie défenderesse : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 18 mars 2025 (GE-25-315)

Membre du Tribunal : Janet Lew
Date de la appelante : Le 1er mai 2025
Numéro de dossier : AD-25-263

Sur cette page

Décision

[1] La permission de faire appel est refusée. L’appel n’ira pas de l’avant.

Aperçu

[2] La permission de faire appel est refusée. L’appel ne sera pas instruit.

Aperçu

[3] Le demandeur, D. R. (prestataire), demande la permission de faire appel de la décision de la division générale. La division générale a conclu que le prestataire avait démissionné le 7 août 2024 et qu’il n’était pas fondé à quitter son emploi. Elle a conclu que son départ n’était pas la seule solution raisonnable dans son cas. Par conséquent, le prestataire a été exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

[4] Le prestataire nie avoir démissionné. Il soutient que la division générale a commis des erreurs de droit et de fait. Plus précisément, il affirme que la division générale n’a pas tenu compte de la décision Pham v Qualified Metal Fabricators Ltd.Note de bas de page 1 ni appliqué cette décision à son cas. Il soutient également que la division générale a mal interprété la preuve. Il affirme que la division générale n’a pas compris que son ancien employeur avait réémis son relevé d’emploi, confirmant qu’il l’avait effectivement congédié de façon déguisée.

[5] Avant que l’appel puisse aller de l’avant, je dois décider s’il a une chance raisonnable de succèsNote de bas de page 2. Avoir une chance raisonnable de succès équivaut à avoir une cause défendable. Si l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès, l’affaire est closeNote de bas de page 3.

[6] Je ne suis pas convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès. Par conséquent, je n’accorde pas au prestataire la permission d’aller de l’avant avec l’appel.

Questions en litige

[7] Voici les questions en litige :

  1. a) Est-il possible de soutenir que la division générale a commis une erreur de droit en omettant d’appliquer les principes juridiques énoncés dans la décision Pham?
  2. b) Est-il possible de soutenir que la division générale a mal interprété la preuve concernant le relevé d’emploi modifié?

Analyse

Je ne donne pas au prestataire la permission de faire appel

[8] La permission d’en appeler est refusée si la division d’appel est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès. Il y a une chance raisonnable de succès s’il est possible que la division générale ait commis une erreur de compétence, de procédure, de droit ou un certain type d’erreur de faitNote de bas de page 4.

[9] Pour ce type d’erreurs de fait, il faut que la division générale ait fondé sa décision sur une erreur commise de façon abusive ou arbitraire, ou sans tenir compte des éléments de preuve portés à sa connaissanceNote de bas de page 5.

Le prestataire n’a pas de cause défendable selon laquelle la division générale a commis une erreur de droit en omettant d’appliquer les principes énoncés dans la décision Pham

[10] Le prestataire n’a pas de cause défendable selon laquelle la division générale a commis une erreur de droit en omettant d’appliquer les principes énoncés dans la décision Pham.

[11] Le prestataire soutient que la division générale aurait dû appliquer les principes de la décision Pham. Comme elle ne l’a pas fait, il soutient qu’elle a commis une erreur de droit lorsqu’elle a décidé qu’il avait quitté son emploi après que son employeur l’a rappelé au travail le 7 août 2024. Au moment du rappel au travail, le prestataire avait été mis à pied depuis avril 2024.

[12] Le prestataire a intenté une poursuite contre son ancien employeur pour congédiement déguisé. L’affaire a été réglée. L’une des modalités du règlement exigeait que son employeur produise un relevé d’emploi modifié pour confirmer que l’emploi du prestataire [traduction] « avait pris fin en raison d’un manque de travailNote de bas de page 6 ».

[13] Le prestataire soutient que, selon la décision Pham, une mise à pied temporaire est en fait un congédiement. Il nie donc qu’il aurait pu quitter son emploi si son employeur l’avait d’abord congédié. Autrement dit, il affirme qu’il n’était plus employé lorsque son employeur l’a rappelé au travail. Il fait également valoir qu’une fois que son employeur l’a mis à pied, il n’avait plus le droit légal de le rappeler puisqu’il n’était plus employéNote de bas de page 7.

[14] Le prestataire s’appuie sur les paragraphes 28 à 30 de la décision Pham pour établir qu’une mise à pied temporaire est un congédiement (déguisé). Ces paragraphes se lisent comme suit :

[traduction]
[28] Le congédiement déguisé peut être établi soit i) par le non-respect par l’employeur d’une clause essentielle du contrat de travail, soit ii) par un comportement de l’employeur qui établit qu’il n’a plus l’intention d’être lié par le contrat de travail [citation omise].

[29] En l’absence d’une clause expresse ou implicite contraire dans un contrat de travail, une mise à pied unilatérale par un employeur est une modification substantielle du contrat de travail de l’employeur qui constitue un congédiement déguisé : [citation omise].

[39] Dans de tels cas, l’employé a le droit immédiat de présenter une demande pour congédiement déguisé : [citation omise].

[15] La décision Pham a examiné si un juge de la requête avait commis une erreur en accordant un jugement sommaire lorsqu’il a rejeté une demande pour congédiement injustifié. Dans cette affaire, la Cour d’appel de l’Ontario a également examiné les questions de consentement implicite et de consentement dans le contexte d’une mise à pied.

[16] La Cour d’appel a accueilli l’appel de M. Pham et a annulé le jugement sommaire, après avoir conclu qu’il y avait une question en litige selon laquelle l’employeur l’avait mis à pied involontairement et l’avait donc congédié de façon déguisée. La Cour d’appel a renvoyé l’affaire à la Cour supérieure pour qu’elle soit jugée afin de décider si M. Pham avait été congédié à tort.

[17] L’affaire Pham s’est clairement penchée sur la question du congédiement déguisé. Toutefois, l’affaire ne portait pas sur l’article 29(b.1) de la Loi sur l’assurance-emploi, qui définit le moment où survient un départ volontaire.

[18] Comme la division générale l’a souligné, elle n’avait ni la compétence ni le pouvoir de décider si l’employeur du prestataire l’avait congédié de façon déguisée de son emploiNote de bas de page 8. La division générale a également souligné que la question du congédiement déguisé est une question différente de celle du départ volontaireNote de bas de page 9. Comme la Cour d’appel fédérale l’a confirmé dans une autre affaire, un décideur outrepasse son rôle lorsqu’il commence à examiner s’il y a eu un congédiement déguiséNote de bas de page 10.

[19] L’affaire Pham n’était pas pertinente dans le cas du prestataire devant la division générale, car la décision ne portait pas sur la Loi sur l’assurance-emploi et sur l’article 29(b.1) en particulier. La décision Pham a traité d’une question sur laquelle la division générale n’a aucune compétence.

[20] Par conséquent, je ne suis pas convaincue qu’il est possible de soutenir que la division générale a commis une erreur de droit lorsqu’elle n’a pas tenu compte des principes énoncés dans la décision Pham,et qu’elle ne les a pas appliqués. La division générale n’avait tout simplement pas le pouvoir d’examiner si le prestataire avait fait l’objet d’un congédiement déguisé.

[21] Malgré cela, le prestataire soutient que la preuve démontre que son employeur l’avait congédié de son emploi. Il dit que la division générale a mal interprété cet élément de preuve. Je vais maintenant examiner cet argument.

Le prestataire n’a pas de cause défendable selon laquelle la division générale a mal interprété la preuve concernant le relevé d’emploi modifié

[22] Le prestataire n’a pas de cause défendable selon laquelle la division générale a mal interprété (n’a pas compris) la preuve concernant le relevé d’emploi modifié.

[23] Au paragraphe 12 de sa décision, la division générale a écrit :

L’employeur a déposé un relevé d’emploi modifié le 21 août 2024, disant que l’appelant ne revenait pas. La raison pour laquelle le relevé d’emploi a été produit était la même pour les deux relevés d’emploi que l’employeur a produits : [traduction] « Manque de travail/Fin de contrat/Fin de saison A ». L’employeur avait produit le relevé d’emploi modifié dans le cadre d’un règlement de la poursuite intentée par l’appelant contre l’employeur pour congédiement déguisé.

[24] Le prestataire soutient que la division générale a mal interprété ces éléments de preuve. Il fait valoir que le relevé d’emploi précise qu’il a été congédié.

[25] Contrairement au relevé d’emploi initial, qui disait que la date de retour au travail du prestataire était inconnue, le relevé d’emploi modifié précisait que le prestataire ne retournerait pas au travail. Le prestataire soutient que cette différence démontre que son employeur l’avait congédié.

[26] Il affirme donc que la division générale aurait dû conclure que son employeur l’avait congédié de façon déguisée en raison d’un manque de travail.

[27] Cependant, contrairement aux arguments du prestataire, et malgré le règlement de sa poursuite contre l’employeur, le relevé d’emploi modifié ne précise pas expressément que l’employeur du prestataire l’avait congédié.

[28] Tout au plus, le relevé d’emploi modifié précisait qu’il avait été produit par l’employeur pour la raison suivante : « Manque de travail/Fin de contrat/Fin de saison ». Par conséquent, il était important que la division générale examine tous les éléments de preuve, et pas seulement le relevé modifié.

[29] La division générale a d’abord examiné ce que disait le relevé d’emploi modifié. La description que la division générale a faite de ce qui figurait dans le relevé d’emploi modifié reflète fidèlement la preuveNote de bas de page 11. En effet, la preuve du prestataire appuie la raison que l’employeur a donnée, soit qu’il y avait un manque de travail :

  • Dans sa demande de prestations, le prestataire a expliqué qu’il ne travaillait plus en raison d’un manque de travail. Le formulaire de demande précise qu’un manque de travail peut comprendre une fermeture en raison de la COVID-19, une mise à pied, et une fermeture de bureau en raison d’une fin de contrat ou d’une fin de saisonNote de bas de page 12.
  • Dans la demande de prestations, le prestataire aurait pu déclarer qu’il avait été congédié, mais il n’a pas coché cette optionNote de bas de page 13.
  • Lorsque le prestataire a parlé à l’intimée, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, il aurait dit que son employeur l’avait mis à pied temporairement en avril, mais qu’il n’était pas d’accord. Il estimait que son employeur aurait dû lui donner un préavis approprié ou lui verser une indemnité de départNote de bas de page 14.
  • Dans sa demande de révision, le prestataire a écrit qu’il était prêt à retourner au travail. Cependant, il s’attendait à ce que son employeur le paye à partir du moment où il l’avait mis à piedNote de bas de page 15.
  • Dans le message texte que l’employeur a envoyé au prestataire le 22 avril 2024, il l’a informé qu’il allait le mettre à pied pour une courte période. Il a également précisé qu’il avait l’intention de lui donner un préavis d’une semaine avant de le rappeler au travail. L’employeur a décrit cela comme une mise à pied temporaire. Il a expliqué qu’il lui envoyait un relevé d’emploi pour qu’il puisse demander des prestations d’assurance-emploiNote de bas de page 16. Le prestataire a répondu qu’il n’acceptait pas la mise à pied temporaire. Il voulait que son employeur lui verse une indemnité de départ et qu’il mette fin à son emploiNote de bas de page 17.

[30] La Commission a également discuté avec l’employeur. Celui-ci a dit à la Commission qu’il avait mis le prestataire à pied temporairement. Il avait également mis à pied d’autres membres du personnel, parce qu’il n’avait pas de travail à leur offrirNote de bas de page 18.

[31] Le prestataire assimile la mise à pied à un congédiement déguisé. Comme je l’ai mentionné plus haut, la division générale n’a pas le pouvoir de décider si le prestataire a fait l’objet d’un congédiement déguisé. Cependant, elle pouvait examiner si le prestataire avait été congédié.

[32] La division générale ne s’est pas fondée uniquement sur le relevé d’emploi modifié pour établir si le prestataire avait démissionné ou s’il avait été congédié. La division générale a examiné tous les éléments de preuve, y compris les échanges entre le prestataire et son employeur.

[33] La division générale a conclu que le prestataire avait l’intention de démissionner si l’employeur ne répondait pas à ses demandes d’indemnité de départ et de congédiement. La division générale a conclu que la demande du prestataire démontrait qu’il comprenait qu’il avait toujours une relation d’emploi avec l’employeur, même après avoir reçu un avis de mise à pied.

[34] La division générale a également conclu que, même après que l’employeur a refusé ses demandes, le prestataire n’a pas fait de démarches à ce moment-là pour démissionner. En même temps, l’employeur n’a pas mis fin à la relation d’emploi. Autrement dit, la division générale a conclu que la relation d’emploi se poursuivait.

[35] La division générale a également conclu que lorsque l’employeur a rappelé le prestataire en août 2024 pour qu’il revienne au travail, le prestataire a demandé d’être payé pour toute la période de la mise à pied. La division générale a établi que la demande du prestataire démontrait qu’il y avait toujours une relation d’emploi. En l’absence d’une relation continue, la division générale a conclu que le prestataire ne pouvait pas et n’aurait pas demandé d’être payé pour toute la période où il avait été mis à pied.

[36] Après avoir examiné les autres éléments de preuve, la division générale a conclu que l’emploi du prestataire s’est poursuivi jusqu’au 7 août 2024. C’est à ce moment-là qu’il a choisi de ne pas retourner au travail après avoir été rappelé par son employeur.

[37] La preuve appuyait raisonnablement les conclusions de la division générale. Pour cette raison, je ne suis pas convaincue qu’il soit possible de soutenir que la division générale a mal interprété le relevé d’emploi modifié.

Conclusion

[38] L’appel n’a aucune chance raisonnable de succès. La permission de faire appel est donc refusée. Par conséquent, l’appel n’ira pas de l’avant.

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