Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : CB c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2025 TSS 455

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : C. B.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de révision (699742) rendue le 16 janvier 2025 par la Commission de l’assurance-emploi du Canada (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : John Rattray
Mode d’audience : En personne
Date de l’audience : Le 5 mars 2025
Personne présente à l’audience : Appelant
Date de la décision : Le 11 mars 2025
Numéro de dossier : GE-25-469

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Décision

[1] L’appel est rejeté. Je ne suis pas d’accord avec l’appelant.

[2] La Commission de l’assurance-emploi du Canada n’a pas prouvé que l’appelant a quitté son emploi de façon volontaire.

[3] Elle a toutefois prouvé qu’il a perdu son emploi en raison d’une inconduite (autrement dit, il a fait quelque chose qui lui a fait perdre son emploi). Par conséquent, l’appelant est exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploiNote de bas de page 1.

Aperçu

[4] L’appelant a perdu son emploi le 8 août 2024. Selon son employeur, l’appelant a quitté son emploi de façon volontaire parce qu’il ne s’est pas présenté au travail et il ne l’a pas avisé de son absence. La Commission a vérifié pourquoi l’appelant avait quitté son emploi. Elle a décidé qu’il avait volontairement quitté (c’est-à-dire choisi de quitter) son emploi sans justification. Par conséquent, elle ne pouvait pas lui verser de prestations.

[5] L’appelant n’est pas d’accord. Il affirme ne pas avoir quitté son emploi de façon volontaire. Il dit qu’on l’a plutôt mis à pied quand il est revenu au travail après avoir été malade pendant deux jours.

[6] Selon la Commission, l’appelant n’a pas communiqué avec son employeur avant de s’absenter du travail. Il n’a pas non plus répondu quand son employeur a tenté de le joindre. Elle dit que, même si l’appelant a été congédié, il a quitté son emploi de façon volontaire parce que le congédiement était la conséquence logique de sa conduite délibérée.

Questions en litige

[7] Comment l’emploi de l’appelant a-t-il pris fin?

[8] S’il a quitté son emploi de façon volontaire, son départ était-il fondé?

[9] S’il a été congédié, est-ce en raison de ce qu’il fait ou de la façon dont il s’est conduit? Si oui, sa conduite ou ses gestes constituent-ils une inconduite?

Analyse

[10] Tout d’abord, je dois vérifier si l’appelant a quitté son emploi de façon volontaire ou s’il a été renvoyé.

[11] Le départ volontaire et le congédiement pour inconduite sont tous deux visés par le même article de la Loi sur l’assurance-emploiNote de bas de page 2. Cela s’explique par le fait que les deux situations impliquent la perte d’un emploi à la suite d’un geste délibéré des prestataires. Il y a exclusion du bénéfice des prestations régulières d’assurance-emploi si les prestataires perdent leur emploi pour inconduite ou quittent volontairement leur emploi sans justification.

[12] Par conséquent, si je conclus que la présente affaire concerne un congédiement au lieu d’un départ volontaire, je ne m’écarte pas de la question que je dois trancher tant et aussi longtemps que la preuve appuie ma conclusion. En effet, la question à trancher est si l’appelant est exclu du bénéfice des prestations régulières d’assurance-emploi.

L’appelant a-t-il quitté son emploi de façon volontaire ou a-t-il été renvoyé?

[13] Je conclus que l’appelant n’a pas quitté son emploi de façon volontaire. Il a été congédié.

[14] Aux termes de la loi, si l’appelant avait le choix de rester ou de quitter son emploi, son départ est volontaireNote de bas de page 3. L’appelant et la Commission ne s’entendent pas sur la question de savoir si l’appelant avait un tel choix.

[15] Selon la Commission, l’appelant ne s’est pas présenté au travail les 6 et 7 août 2024. Elle explique que l’employeur a alors tenté de joindre l’appelant, mais que ce dernier n’a pas répondu. La Commission affirme que, par sa conduite, l’appelant a quitté son emploi de façon volontaire.

[16] À l’audience, l’appelant a livré un témoignage crédible. Il a témoigné de façon franche et cohérente. J’ai pu vérifier la validité de ses éléments de preuve en lui posant des questions.

[17] J’accepte son témoignage quand il dit qu’il n’a pas quitté son emploi de façon volontaire. Il raconte qu’il a été malade pendant deux jours. Il est ensuite retourné au travail. Il admet que, pendant qu’il était malade, il n’a pas communiqué avec son employeur parce que son forfait de téléphone prépayé était épuisé. Il n’avait pas l’intention de quitter son emploi. Quand il s’est présenté à son quart de travail, on l’a appelé au bureau de la personne qui le supervise et on l’a congédié. On ne lui a pas donné le choix.

[18] Pour les raisons que je viens de mentionner, je conclus que l’appelant n’avait pas le choix de rester ou de partir. Il a été renvoyé. Il n’a donc pas quitté son emploi de façon volontaire.

[19] Comme l’appelant n’a pas quitté son emploi de façon volontaire, je n’ai pas à vérifier s’il était fondé à quitter son emploi.

Inconduite

[20] Pour savoir si l’appelant a perdu son emploi en raison d’une inconduite, je dois décider deux choses. D’abord, je dois déterminer la raison pour laquelle il a perdu son emploi. Ensuite, je dois voir si la loi considère cette raison comme une inconduite.

Pourquoi l’appelant a-t-il perdu son emploi?

[21] Je conclus que l’appelant a perdu son emploi parce que, sans aviser son employeur, il ne s’est pas présenté au travail les 6 et 7 août 2024.

[22] L’employeur a dit à la Commission que l’appelant avait perdu son emploi parce qu’il a manqué trois quarts de travail sans téléphoner pour dire qu’il serait absent. On a considéré qu’il avait abandonné son emploi. Selon a Commission, l’appelant ne s’est pas présenté pour deux quarts de travail et il n’a pas avisé son employeur de son absence.

[23] L’appelant est d’accord avec la Commission. Il explique avoir perdu son emploi parce que, sans aviser son employeur, il ne s’est pas présenté à deux quarts de travail.

[24] Je conclus que l’appelant a travaillé le 2 août 2024, mais qu’il ne s’est pas présenté au travail les 6 et 7 août 2024. Je conclus aussi qu’il n’a pas dit à son employeur qu’il serait absent. Je tire ces conclusions parce que :

  • durant son témoignage, l’appelant a dit avoir travaillé le vendredi 2 août 2024;
  • le relevé d’emploi produit par l’employeur confirme que l’appelant a été payé pour le 2 août 2024Note de bas de page 4;
  • l’appelant a admis durant son témoignage qu’il n’avait pas avisé son employeur de son absence.

La raison du congédiement est-elle une inconduite au sens de la loi?

[25] La raison pour laquelle l’appelant a été congédié est une inconduite au sens de la loi. Il aurait dû savoir qu’il pouvait perdre son emploi à cause de ce qu’il a fait.

[26] Pour qu’il y ait inconduite au sens de la loi, il faut que la conduite soit délibérée. En d’autres termes, il faut qu’elle soit consciente, voulue ou intentionnelleNote de bas de page 5. L’inconduite, c’est aussi une conduite qui est si insouciante qu’elle est presque délibéréeNote de bas de page 6. Il n’est pas nécessaire que l’appelant ait eu une intention coupable (c’est-à-dire qu’il ait voulu faire quelque chose de mal) pour que son comportement soit une inconduite au sens de la loiNote de bas de page 7.

[27] Il y a inconduite si l’appelant savait ou aurait dû savoir que sa conduite pouvait l’empêcher de remplir ses obligations envers son employeur et que la possibilité de se faire renvoyer pour cette raison était bien réelleNote de bas de page 8.

[28] La Commission doit prouver que l’appelant a perdu son emploi en raison d’une inconduite. Elle doit en faire la preuve selon la prépondérance des probabilités. Autrement dit, elle doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable (il y a plus de chances) que l’appelant a perdu son emploi en raison d’une inconduiteNote de bas de page 9.

[29] Selon la Commission, ce sont les gestes délibérés de l’appelant qui ont mené à la cessation d’emploi. Qu’on appelle cela un départ volontaire ou une inconduite, ne pas se présenter au travail et ne pas communiquer avec son employeur pour lui annoncer son absence sont des gestes délibérés. Le 6 août 2024, l’appelant n’a pas répondu à son employeur, qui tentait de le joindre par texto et par téléphone. On a considéré cela comme un refus d’exécuter les services pour lesquels il avait été embauché.

[30] Voici ce que l’appelant a expliqué durant son témoignage :

  • Les 6 et 7 août 2024, il n’est pas allé travailler parce qu’il était malade.
  • Il n’a pas dit à son employeur qu’il était malade et qu’il ne rentrait pas travailler.
  • Avant, il téléphonait ou envoyait un message texte à la personne qui le supervise s’il allait arriver en retard au travail ou s’il était malade.
  • Le 8 août 2024, il est revenu au travail.
  • On l’a appelé au bureau de la personne qui le supervise et on lui a dit qu’il était congédié.
  • Il a montré à la personne qui le supervise qu’il avait une éruption sur la peau des bras. C’est ce qui l’avait empêché de travailler les 6 et 7 août 2024. On lui a quand même dit de partir.
  • Il n’a pas vu de médecin et il n’avait pas de billet médical pour justifier son absence.
  • Il dit que, le 6 août 2024, il n’a pas reçu les messages textes et les appels de la personne qui le supervise. Elle voulait savoir où il était. Il explique que son téléphone prépayé n’avait plus de minutes.
  • Il n’a pas vu les messages textes avant le 8 août 2024, après avoir été congédié et après avoir racheté des minutes.

[31] Quand on lui a demandé pourquoi il n’avait pas communiqué avec son employeur au sujet de sa maladie et de son absence du travail, l’appelant a répondu que c’était son erreur. Avant, il envoyait un message texte à la personne qui le supervisait pour lui dire qu’il était malade. Il joignait parfois la photo d’une enflure au genou ou au pied.

[32] Durant son témoignage, il a dit qu’il ignorait qu’il pouvait se faire congédier s’il ne se présentait pas au travail et ne téléphonait pas à son employeur pour dire qu’il était malade. Voici ce qu’il a dit :

  • Il ne savait pas qu’il y avait une politique sur les absences.
  • Il n’a reçu aucune orientation.
  • Il n’avait eu aucun avertissement préalable.
  • La personne qui le supervise lui disait de rentrer travailler même si son arthrite le faisait souffrir.
  • Il envoyait des photos de l’enflure au genou ou à la cheville.

[33] Je conclus qu’il y a eu inconduite parce que l’appelant a pris la décision de ne pas se présenter au travail et de ne pas aviser son employeur qu’il s’absentait les 6 et 7 août 2024. C’était un choix délibéré et un geste insouciant.

[34] J’accepte le témoignage de l’appelant au sujet de son téléphone prépayé qui n’avait plus de minutes, mais je juge que de ne rien faire pour aviser son employeur était délibéré et insouciant. Il aurait pu racheter des minutes ou demander à une personne du voisinage s’il pouvait emprunter son téléphone. Il aurait aussi pu se rendre au travail le 6 août 2024 pour expliquer qu’il était malade.

[35] Je juge qu’il savait qu’il était censé aviser son employeur s’il était malade ou s’il avait du retard. Je tire cette conclusion parce qu’il avait l’habitude de le faire. De plus, par le passé, l’employeur avait remis en question sa maladie : il lui disait de venir travailler malgré les symptômes d’arthrite dont l’appelant se plaignait. L’appelant avait alors décidé de fournir des preuves de sa maladie en envoyant des photos.

[36] Je considère que l’employeur acceptait les absences de l’appelant dans le passé parce que ce dernier lui donnait un préavis et, parfois, il fournissait la preuve qu’il était malade. Ne pas se présenter au travail pour deux quarts de travail sans aviser l’employeur était une escalade importante.

[37] J’accepte le témoignage de l’appelant, soit qu’il n’avait pas l’intention de faire quelque chose de mal. Il ne se sentait pas bien. Mais ne pas se présenter au travail sans avertissement l’a empêché de remplir ses obligations envers son employeur. L’appelant admet que c’était une erreur de ne pas aviser son employeur.

[38] Pour les raisons que je viens de mentionner, je conclus que l’appelant savait ou aurait dû savoir que ne pas se présenter au travail pendant deux jours sans en aviser son employeur pouvait entraîner son congédiementNote de bas de page 10. 

Somme toute, l’appelant a-t-il perdu son emploi en raison d’une inconduite?

[39] Compte tenu des conclusions que je viens de tirer, je juge que l’appelant a perdu son emploi en raison d’une inconduite.

Conclusion

[40] Je conclus que l’appelant n’a pas quitté son emploi de façon volontaire.

[41] Je conclus toutefois qu’il a perdu son emploi en raison d’une inconduite. Il est donc exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

[42] Par conséquent, l’appel est rejeté.

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