Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : SK c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2025 TSS 699

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision

Partie appelante : S. K.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada
Représentante ou représentant : Isabelle Thiffault

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 11 mars 2025
(GE-25-463)

Membre du Tribunal : Janet Lew
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience : Le 27 juin 2025
Personnes présentes à l’audience : Appelant
Représentante de l’intimée
Date de la décision : Le 30 juin 2025
Numéro de dossier : AD-25-260

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est accueilli. La division générale n’a pas abordé l’un des principaux arguments du prestataire et elle a ignoré certains éléments de preuve. Je renvoie donc l’affaire à la division générale pour réexamen.

Aperçu

[2] L’appelant, S. K. (le prestataire), fait appel de la décision de la division générale.

[3] Le prestataire a demandé des prestations d’assurance-emploi le 11 septembre 2024. Il voulait que sa demande soit traitée comme s’il l’avait présentée plus tôt, soit le 9 juin 2024.

[4] La division générale a établi que pour pouvoir traiter la demande de prestations du prestataire comme s’il l’avait présentée plus tôt, le prestataire devait démontrer qu’il avait un motif valable justifiant son retard à faire sa demande pendant toute la période du retard.

[5] Toutefois, la division générale a jugé que le prestataire n’avait pas démontré qu’il avait un motif valable pour son retard à présenter sa demande de prestations. Elle a conclu qu’il n’avait pas fourni une explication acceptable selon la loi. Par conséquent, la division générale a conclu que la demande du prestataire ne pouvait pas être traitée comme si elle avait été présentée plus tôt.

[6] Le prestataire soutient qu’il avait un motif valable justifiant son retard. Plus précisément, il affirme qu’il avait des circonstances exceptionnelles pour expliquer son retard. Il avait des [traduction] « responsabilités de soignant ». Il devait s’occuper de sa fille et de son épouse. Il fait donc valoir qu’il a agi comme une personne raisonnable et prudente l’aurait fait dans sa situation en s’occupant de sa fille. Il soutient que la division générale a commis des erreurs de droit et de fait en ne tenant pas compte de sa situation et en n’admettant pas qu’il avait un motif valable pour son retard.

[7] Le prestataire soutient que la division d’appel devrait accueillir son appel et conclure qu’il avait un motif valable pour son retard. Pour cette raison, il dit que sa demande devrait être traitée comme si elle avait été faite le 9 juin 2024. Il affirme qu’il y a suffisamment d’éléments de preuve au dossier pour démontrer qu’il devait s’occuper de sa famille.

[8] L’intimée, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, est d’accord avec le prestataire sur le fait que la division générale a commis une erreur. Elle affirme que la division générale n’a pas expliqué pourquoi elle n’a pas considéré la situation familiale du prestataire comme une circonstance exceptionnelle pendant toute la période du retard, soit du 9 juin 2024 au 11 septembre 2024.

[9] Toutefois, la Commission soutient que la réparation appropriée consiste à renvoyer l’affaire à la division générale pour réexamen. Elle affirme qu’il y avait peu d’éléments de preuve concernant la situation familiale du prestataire et que le dossier est incomplet et ambigu.

[10] La Commission affirme également qu’en général, la division d’appel ne peut pas examiner de nouveaux éléments de preuve. Bien qu’il y ait des exceptions à cette règle générale, la Commission soutient qu’elles ne s’appliquent pas dans la présente affaire.

Question en litige

[11] Comme la Commission convient que la division générale a commis une erreur, la seule question en litige est de savoir comment je dois corriger cette erreur.

Analyse

[12] La division d’appel peut intervenir dans les décisions de la division générale si celle-ci a commis une erreur de compétence, de procédure, de droit ou certains types d’erreurs de faitNote de bas de page 1.

[13] Pour ces types d’erreurs de fait, il faut que la division générale ait fondé sa décision sur cette erreur et qu’elle ait commis l’erreur de façon abusive ou arbitraire, ou sans tenir compte des éléments de preuve portés à sa connaissance Note de bas de page 2.

La division générale n’a pas abordé les arguments du prestataire et elle a ignoré certains éléments de preuve

[14] La division générale n’a pas abordé les arguments du prestataire et elle a ignoré certains éléments de preuve.

[15] Le prestataire a soutenu à la division générale qu’il avait des circonstances exceptionnelles, en partie parce qu’il devait s’occuper de sa fille et de son épouse invalide. La division générale a pris note de ces éléments de preuve et des arguments du prestataire.

[16] Toutefois, il ne semble pas que la division générale ait tenu compte de la situation familiale du prestataire lorsqu’elle a analysé s’il avait un motif valable pour son retard. Comme la Commission l’affirme, la division générale aurait dû expliquer pourquoi elle n’avait accordé aucune importance à cette question ni à aucun élément de preuve concernant la situation familiale du prestataire lorsqu’elle a examiné s’il avait un motif valable. Il s’agit d’une erreur de droit ainsi que d’une conclusion de fait erronée, tirée sans tenir compte de tous les éléments.

Correction de l’erreur

[17] La division d’appel peut soit rendre la décision que la division générale aurait dû rendre, soit renvoyer l’affaire à la division générale pour réexamen.

[18] Le prestataire soutient que la preuve démontre qu’il était le principal fournisseur de soins et que son épouse et sa fille avaient besoin de ses soins et de son attention, de sorte qu’il n’a pas été en mesure de présenter une demande avant septembre 2024. Il s’appuie sur les éléments suivantsNote de bas de page 3 :

  • Avis d’appel (GD2-6) – Le prestataire a écrit qu’il avait des responsabilités familiales et qu’il s’occupait d’un membre de sa famille malade.
  • Dossier de révision (GD3-36) – Le document de renseignements supplémentaires précise que le prestataire a déclaré avoir quitté son emploi pour s’occuper d’une personne malade. Il a affirmé qu’il était le principal fournisseur de soins pour sa fille de 11 ans. Personne ne l’aidait et il n’avait pas de soutien de sa famille en Ontario, alors ils ont déménagé. Il a expliqué que l’état de santé de son épouse s’aggravait et qu’il avait décidé de déménager pour être plus proche de sa belle-famille. Il a dit qu’il devait aller chercher sa fille à l’école. Il a aussi affirmé qu’il aidait sa fille et son épouse à s’établir en les amenant à diverses entrevues.
  • GD5-3 – Le prestataire a déclaré qu’il est le principal responsable de sa famille.
  • GD6-2 – Au cours d’un appel téléphonique avec Service Canada, le prestataire a affirmé qu’il continuait de fournir des soins de base à son épouse, qui est invalide, et à sa fille de 11 ans, qui a des problèmes de santé importants.
  • Observations supplémentaires de la Commission au Tribunal de la sécurité sociale (GD7-2) – La Commission a noté que le prestataire avait déclaré qu’il s’occupait de son épouse et de sa fille.
  • Décision de la division générale (AD1A-7, au paragraphe 24) – La division générale a pris note de la preuve du prestataire selon laquelle il avait déménagé dans une autre province et que sa fille de 11 ans et son épouse invalide comptaient sur lui pour leur fournir des soins. Pour aider sa famille à s’établir, il devait notamment trouver des soins médicaux pour son épouse.

[19] Le prestataire a également décrit l’état de santé de sa fille et le type de soins qu’il lui a prodiguésNote de bas de page 4. Il affirme que c’est parce qu’il était tellement préoccupé par les soins à donner à son épouse et à sa fille qu’il a tardé à présenter sa demande de prestations.

[20] La Commission fait valoir que ces éléments de preuve sont insuffisants et que le dossier demeure incomplet et ambigu.

[21] La Commission soutient également que la preuve concernant l’état de santé de la fille du prestataire et le type de soins qu’il a fournis à sa fille constituent de nouveaux éléments de preuve que la division d’appel ne peut pas accepter. Bien qu’il y ait des exceptions à la règle générale selon laquelle la division d’appel ne peut pas examiner de nouveaux éléments de preuve, la Commission soutient qu’elles ne s’appliquent pas dans la présente affaire.

[22] Même si certains des éléments de preuve que le prestataire a fournis dans sa demande à la division d’appel pourraient aider à démontrer qu’il avait un motif valable pour son retard, il s’agit de nouveaux éléments de preuve que je ne peux pas examiner. Exceptionnellement, la division d’appel peut examiner de nouveaux éléments de preuve, mais les circonstances nécessaires pour ce faire n’existent pas dans la présente affaireNote de bas de page 5.

[23] En renvoyant cette affaire, la division générale peut examiner en détail la situation familiale du prestataire, qui concerne à la fois son épouse et sa fille. L’examen pourrait comprendre l’établissement de la nature et de l’étendue des soins que le prestataire devait fournir à son épouse et à sa fille, car cela pourrait démontrer comment et pourquoi le prestataire n’a pas été en mesure de présenter une demande plus tôt. Le prestataire peut déposer des documents supplémentaires, comme des dossiers médicaux ou d’autres dossiers, pour appuyer sa demande. Il peut aussi convoquer des témoins, s’il en a.

Conclusion

[24] L’appel est accueilli. La division générale n’a pas abordé l’un des principaux arguments du prestataire selon lequel il avait un motif valable pour son retard en raison de circonstances familiales. Elle n’a pas tenu compte de ces éléments de preuve dans son analyse, mais ils auraient pu avoir une certaine incidence sur l’issue de l’affaire.

[25] Je renvoie l’affaire à la division générale pour réexamen afin qu’elle puisse examiner la question concernant la situation familiale du prestataire en ce qui a trait à savoir s’il avait un motif valable pour son retard.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.