Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : OD c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2025 TSS 756

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision relative à une demande de
permission de faire appel

Partie demanderesse : O. D.
Partie défenderesse : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 7 juillet 2025
(GE-25-1869)

Membre du Tribunal : Solange Losier
Date de la décision : Le 23 juillet 2025
Numéro de dossier : AD-25-488

Sur cette page

Décision

[1] La permission de faire appel est refusée. L’appel n’ira pas de l’avant.

Aperçu

[2] O. D. est le prestataire dans la présente affaire. Il a demandé des prestations d’assurance-emploi après avoir cessé de travailler.

[3] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a décidé qu’il ne pouvait pas recevoir de prestations d’assurance-emploi parce qu’il avait quitté volontairement son emploi sans justification. Elle a également décidé qu’il n’avait pas prouvé sa disponibilité pour travaillerNote de bas de page 1.

[4] La division générale est arrivée aux mêmes conclusions et a rejeté l’appel du prestataireNote de bas de page 2.

[5] Le prestataire demande maintenant la permission de faire appel. Il affirme que la division générale a commis des erreurs de droit et des erreurs de fait importantesNote de bas de page 3.

[6] Je rejette la demande de permission de faire appel parce que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succèsNote de bas de page 4.

Questions préliminaires

Le prestataire a présenté de nouveaux éléments de preuve

[7] Un nouvel élément de preuve est un élément de preuve dont la division générale n’était pas saisie lorsqu’elle a rendu sa décision. La division d’appel n’accepte généralement pas de nouveaux éléments de preuveNote de bas de page 5. En effet, la division d’appel n’est pas le juge des faits et son rôle n’est pas non plus d’instruire l’affaire de nouveau. Elle fait plutôt un examen de la décision de la division générale en se fondant sur les mêmes éléments de preuveNote de bas de page 6.

[8] Il y a quelques exceptions où de nouveaux éléments de preuve peuvent être permisNote de bas de page 7. Par exemple, je peux accepter de nouveaux éléments de preuve s’ils :

  • fournissent des renseignements généraux seulement;
  • mettent en lumière des conclusions tirées sans preuve à l’appui;
  • démontrent que le Tribunal a agi injustement.

[9] Le prestataire a présenté une capture d’écran du portail de son collège pour appuyer son argument selon lequel il était fondé à quitter son emploi et qu’il n’avait pas d’autre solution raisonnable que de démissionner. Il soutient que cet élément de preuve est important parce qu’il prouve qu’il suivait un programme d’études compressées de six sessions intensives consécutivesNote de bas de page 8. Il reconnaît que le document n’était pas disponible auparavant et qu’il n’a pas été présenté à la division générale.

[10] Je conclus que l’observation du prestataire (la capture d’écran du portail de son collège) est un nouvel élément de preuve que la division générale n’avait pas devant elle. Je reconnais que le prestataire veut fournir des renseignements supplémentaires, mais il s’agit de nouveaux éléments de preuve. Un appel à la division d’appel n’est pas une [traduction] « reprise » fondée sur les éléments de preuve mis à jour des audiences à la division générale.

[11] Je n’accepte pas le nouvel élément de preuve du prestataire parce qu’il ne s’agit pas de renseignements généraux, d’éléments qui mettent en lumière des conclusions tirées sans preuve à l’appui ou qui montrent que le Tribunal a agi injustement. Par conséquent, il ne satisfait à aucune des exceptions prévues. Je ne peux donc pas tenir compte des nouveaux éléments de preuve présentés par le prestataire au moment de rendre ma décision.

[12] Je note que le dossier contient l’horaire de cours du prestataire. La division générale était saisie de cette preuve. On y voit que sa première session d’études commençait en janvier 2025 et prenait fin en décembre 2026Note de bas de page 9.

Question en litige

[13] Est-il possible de soutenir que la division générale a commis des erreurs de droit ou de fait lorsqu’elle a tranché la question du départ volontaire et de la disponibilité?

Analyse

[14] Un appel peut aller de l’avant seulement si la division d’appel donne la permission de faire appelNote de bas de page 10. Je dois être convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succèsNote de bas de page 11. Cela signifie qu’il doit y avoir un motif défendable grâce auquel l’appel pourrait être accueilliNote de bas de page 12.

[15] Les moyens d’appel possibles à la division d’appel sont les suivantsNote de bas de page 13 :

  • la division générale a agi de façon injuste;
  • elle a outrepassé ses pouvoirs ou refusé de les exercer;
  • elle a commis une erreur de droit;
  • elle a fondé sa décision sur une erreur de fait importante.

[16] Le prestataire soutient que la division générale a commis des erreurs de droit et des erreurs de fait importantes, alors c’est sur cela que je vais me concentrer.

Je ne donne pas au prestataire la permission de faire appel

Le prestataire soutient que la division générale a commis des erreurs de droit et des erreurs de fait importantes

[17] Le prestataire affirme que la division générale a commis une erreur de droit dans son interprétation du départ volontaire au titre de l’article 29(c) de la Loi sur l’assurance-emploi. Il affirme que la division générale s’est concentrée sur d’autres solutions précises comme demander un congé de maladie et reporter ses études.

[18] Il soutient également que la division générale a mal appliqué la présomption de non-disponibilité et qu’elle l’a appliquée de façon trop rigide. Il affirme que la décision de la division générale était incompatible avec les décisions contraignantes de la Cour d’appel fédérale.

[19] Le prestataire soutient également que la division générale a commis une erreur de fait parce qu’elle a [traduction] « fondé sa décision sur des erreurs de fait graves sans tenir compte d’éléments de preuve essentiels ». Il soutient que la capture d’écran du portail du collège est importante (mais j’ai déjà décidé qu’il s’agissait d’un nouvel élément de preuve, et je ne l’ai pas acceptée).

[20] Le prestataire a appuyé sa position sur la jurisprudence suivante :

  • White c Canada (Procureur général), 2011 CAF 190Note de bas de page 14
  • Canada (Procureur général) c Laughland, 2003 CAF 129
  • Landry c Canada (Procureur général), 2008 CAF 6 [sic]
  • Page c Canada (Procureur général), 2023 CAF 169

Il est impossible de soutenir que la division générale a commis des erreurs de droit ou des erreurs de fait importantes

[21] Une erreur de droit peut survenir lorsque la division générale n’applique pas la bonne loi ou lorsqu’elle utilise la bonne loi, mais qu’elle la comprend mal ou qu’elle ne sait pas comment l’appliquerNote de bas de page 15.

[22] Il y a erreur de fait lorsque la division générale a [traduction] « fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissanceNote de bas de page 16 ».

[23] Il y avait deux questions juridiques en litigeNote de bas de page 17.

[24] Premièrement, la division générale devait décider si le prestataire avait quitté volontairement son emploi sans justification (ce qui a entraîné une exclusion du bénéfice des prestationsNote de bas de page 18). Deuxièmement, elle devait décider si le prestataire avait prouvé qu’il était capable de travailler et disponible à cette fin, mais incapable de trouver un emploi convenable (ce qui a entraîné une inadmissibilité aux prestationsNote de bas de page 19). Elle devait décider si le prestataire avait fait des démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi convenable.

[25] La loi prévoit qu’une personne est fondée à quitter volontairement son emploi si, compte tenu de toutes les circonstances, son départ était la seule solution raisonnable dans son casNote de bas de page 20.

[26] Une personne qui veut recevoir des prestations régulières doit démontrer qu’elle est capable de travailler et disponible à cette fin, mais incapable de trouver un emploi convenableNote de bas de page 21. De plus, elle doit prouver que ses démarches pour trouver un emploi étaient habituelles et raisonnablesNote de bas de page 22.

[27] La loi ne définit pas ce qu’elle veut dire par « disponible ». Dans une décision intitulée Faucher c Commission de l’emploi et de l’immigration du Canada, la Cour d’appel fédérale a fourni des orientations pour évaluer la disponibilité d’une personne pour le travail (c’est-à-dire qu’il y a trois facteurs à prendre en considération, qu’on appelle souvent les facteurs de la décision FaucherNote de bas de page 23).

[28] Dans sa décision, la division générale a correctement énoncé la loi sur le départ volontaire et la question de disponibilitéNote de bas de page 24.

[29] Elle a fait référence à la décision de la Cour d’appel fédérale dans l’affaire Page c Canada (Procureur général). La décision Page précise qu’il faut procéder à une analyse contextuelle pour établir si une personne a réfuté la présomption de non-disponibilitéNote de bas de page 25.

[30] La décision de la division générale montre qu’elle a tenu compte de la situation et du contexte particuliers du prestataire. Elle a accordé de l’importance à l’admission du prestataire selon laquelle il lui était [traduction] « absolument impossible d’aller à l’école et de travailler ». Elle a conclu qu’il n’avait pas réfuté la présomption de non-disponibilitéNote de bas de page 26.

[31] La division générale a ensuite examiné les trois facteurs de la décision Faucher énoncés dans la jurisprudence. Elle a conclu que le prestataire n’avait pas démontré qu’il était disponible pour travailler pendant ses études, qu’il n’avait fait aucune démarche pour trouver un emploi convenable, et qu’il avait établi des conditions personnelles qui limitaient ses chances de retourner travailler. Elle a également établi qu’il n’avait pas fait de démarches habituelles et raisonnables pour trouver du travailNote de bas de page 27. Il était donc inadmissible au bénéfice des prestations.

[32] La division générale a également correctement cité et appliqué la décision de la Cour d’appel fédérale dans l’affaire Canada (Procureur général) c White, en notant qu’elle devait tenir compte de toutes les circonstancesNote de bas de page 28. C’est exactement ce que la division générale a fait. Elle a examiné toutes les circonstances du prestataire et n’en a ignoré aucune.

[33] Le prestataire s’appuie également sur la décision Canada (Procureur général) c Laughland. Selon cette décision, un « motif valable » n’est pas la même chose qu’une « justificationNote de bas de page 29 ». La division générale n’a pas cité cette décision en particulier, mais elle a relevé la même proposition dans une autre affaire intitulée Imran c Canada (Procureur général), 2008 CAF 17Note de bas de page 30.

[34] Je n’ai pas pu trouver la décision Landry c Canada (Procureur général), 2008 CAF 6 citée par le prestataire. Cependant, j’ai trouvé une autre affaire portant le nom de « Landry » qui aborde les questions du départ volontaire et des prestations d’assurance-emploi. Les faits dans cette affaire étaient différents, donc ce n’était pas utileNote de bas de page 31.

[35] La division générale a également décidé que le prestataire avait quitté volontairement son emploi le 31 décembre 2024. Le prestataire n’a pas contesté cette conclusionNote de bas de page 32.

[36] Elle a examiné les raisons pour lesquelles le prestataire a quitté son emploi et la question de savoir si ses conditions de travail constituaient un danger pour sa santéNote de bas de page 33. Elle a établi que son horaire de travail ne nuisait pas à sa santé, mais plutôt qu’il avait quitté son emploi pour suivre un programme d’études à temps plein à compter du 6 janvier 2025Note de bas de page 34.

[37] La division générale a conclu que le prestataire avait d’autres solutions raisonnables que de quitter son emploi. Elle a dit qu’il aurait pu reporter son programme d’études et parler à son employeur de la possibilité de prendre un congé de maladie ou de recevoir des prestations de maladieNote de bas de page 35. Elle a jugé qu’il aurait pu continuer à travailler au lieu de faire des étudesNote de bas de page 36. Enfin, elle a conclu que le prestataire n’était pas fondé à quitter son emploi. Elle a dit qu’il avait d’autres solutions raisonnables. Le prestataire a donc été exclu du bénéfice des prestationsNote de bas de page 37.

[38] Je ne vois pas comment il serait possible de soutenir que la division générale a commis une erreur de droitNote de bas de page 38. Elle a correctement énoncé et appliqué les dispositions pertinentes pour chaque question juridique. Elle n’a pas mal appliqué ou mal interprété la loi. Sa décision était conforme à la jurisprudence sur le départ volontaire et la disponibilité pour le travail.

[39] Bon nombre des arguments que le prestataire a présentés à la division d’appel portent sur le fait qu’il commençait un programme d’études à temps plein et qu’il lui était impossible de travailler pendant ses études. Toutefois, pour recevoir des prestations régulières d’assurance-emploi, il doit prouver qu’il était capable de travailler et disponible à cette fin, mais incapable de trouver un emploi convenable. Il lui incombe également de prouver qu’il était fondé à quitter volontairement son emploi.

[40] La division générale est le juge des faits et elle était libre d’évaluer la preuve et de conclure que le prestataire n’était pas fondé à quitter son emploi et qu’il n’était pas disponible pour travailler. Cela importe peu que son programme d’études ait duré deux ans (six sessions), étant donné qu’il a admis qu’il ne cherchait pas de travail et qu’il n’était pas disponible pour travailler. Ses problèmes de santé ont été jugés comme ne constituant pas une justification.

[41] Les arguments du prestataire équivalent à un désaccord avec la décision et l’issue de la division générale. Cependant, je ne peux pas soupeser la preuve à nouveau pour tirer une conclusion différente qui est plus favorable pour le prestataire.

[42] Je ne vois pas non plus comment il serait possible de soutenir que la division générale a fondé sa décision sur une erreur de fait importanteNote de bas de page 39. Selon mon examen, les principales conclusions de la division générale sur la question du départ volontaire et de la disponibilité concordent avec la preuve au dossier.

Il n’y a aucune autre raison de donner au prestataire la permission de faire appel

[43] En plus des arguments du prestataire, j’ai aussi examiné le dossier et la décision de la division générale. Je n’ai trouvé aucun élément de preuve que la division générale aurait pu ignorer ou mal interpréterNote de bas de page 40.

Conclusion

[44] La permission de faire appel est refusée. Par conséquent, l’appel du prestataire n’ira pas de l’avant. Il n’a aucune chance raisonnable de succès.

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