Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : JK c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2025 TSS 782

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : J. K.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (717111) datée du 11 mars 2025 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Edward Houlihan
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 6 mai 2025
Personne présente à l’audience : Appelante
Date de la décision : Le 2 juin 2025
Numéro de dossier : GE-25-1103

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Décision

[1] L’appel est rejeté. Je ne suis pas d’accord avec l’appelante.

[2] L’appelante a présenté sa demande de révision en retard. La Commission de l’assurance-emploi du Canada a exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire lorsqu’elle a refusé de prolonger le délai accordé à l’appelante pour demander une révision.

Aperçu

[3] L’appelante a demandé des prestations d’assurance-emploi le 14 février 2021. Elle a présenté une deuxième demande de prestations le 7 août 2022.

[4] L’appelante a commis une erreur dans cette demande concernant sa date de naissance. Cette erreur a été corrigée le 19 janvier 2023, lorsqu’elle a déposé son certificat de naissance auprès de la Commission.

[5] La Commission a décidé d’infliger une pénalité et de donner un avis de violation à l’appelante le 4 août 2023. Cette décision lui a été envoyée le 4 août 2023, mais elle affirme ne jamais l’avoir reçue.

[6] L’appelante dit que le premier avis qu’elle a reçu était un avis de dette daté du 29 septembre 2023. Elle a demandé à la Commission des précisions sur cette dette.

[7] La Commission a envoyé par courrier à l’appelante à sa nouvelle adresse une copie de sa décision le 20 octobre 2023.

[8] Le 3 février 2025, l’appelante a demandé à la Commission de réviser sa décision. Elle a expliqué qu’elle croyait que le problème du trop-payé de prestations était une erreur. Elle affirme avoir tenté à plusieurs reprises de régler la situation.

[9] L’appelante déclare avoir eu des difficultés pour accéder à son dossier auprès de la Commission en raison de la confusion concernant sa véritable date de naissance. Elle dit avoir vécu des problèmes personnels très difficiles et de graves difficultés financières pendant cette période.

[10] La Commission a décidé que la demande de révision de l’appelante était en retard. Elle avait 30 jours pour demander une révision. La Commission a refusé de réviser sa décision du 20 octobre 2023.

[11] La Commission affirme que l’appelante n’avait pas d’explication raisonnable justifiant son retard à présenter sa demande de révision. Elle n’avait pas non plus manifesté l’intention constante de demander une révision entre le 20 octobre 2023 et le 3 février 2025.

[12] La Commission déclare également qu’elle a exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire (qu’elle a agi de façon équitable) lorsqu’elle a rejeté la demande de l’appelante visant à prolonger le délai de 30 jours pour demander une révision.

[13] L’appelante fait appel de la décision de la Commission de rejeter sa demande de révision.

Questions en litige

[14] La demande de révision de l’appelante était-elle en retard?

[15] Dans l’affirmative, la Commission a-t-elle exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire lorsqu’elle a refusé de donner à l’appelante plus de temps pour demander une révision?

[16] Si la décision de la Commission n’a pas été rendue de façon judiciaire, faut-il accorder à l’appelante une prolongation de délai pour demander une révision?

Analyse

[17] Lorsque la Commission rend une décision au sujet des prestations d’assurance-emploi, la loi permet de demander la révision de cette décision. Cependant, la demande doit être présentée à la Commission dans les 30 jours suivant la date où la décision a été communiquéeNote de bas de page 1.

[18] Une demande de révision présentée après 30 jours est en retard.

[19] La Commission a le pouvoir discrétionnaire d’accorder plus de temps pour demander une révisionNote de bas de page 2. Il y a cependant des exigences à remplir pour obtenir plus de tempsNote de bas de page 3.

[20] Lorsqu’une demande de révision est en retard, la Commission doit examiner deux questions :

  • La personne a-t-elle une explication raisonnable pour son retard?
  • La personne a-t-elle manifesté l’intention constante de demander une révision malgré son retardNote de bas de page 4?

[21] Lorsqu’une demande de révision est reçue plus de 365 jours après la communication de la décision, la Commission doit examiner deux autres questions :

  • La demande de révision a-t-elle une chance raisonnable de succès?
  • L’autorisation du délai supplémentaire pour présenter une demande de révision porterait-elle un préjudice à la Commission ou à une partieNote de bas de page 5?

[22] Un pouvoir discrétionnaire n’est pas exercé de façon judiciaire si la personne qui rend la décision a agi de mauvaise foi, a agi dans un but ou pour un motif irrégulier, a pris en compte un facteur non pertinent, a ignoré un facteur pertinent ou a agi de façon discriminatoireNote de bas de page 6.

[23] Si la Commission n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire de manière appropriée, je peux rendre la décision qu’elle aurait dû rendre en me fondant sur les exigences du Règlement sur les demandes de révisionNote de bas de page 7.

Question en litige no 1 : La demande de révision de l’appelante était-elle en retard?

[24] Je conclus que la demande de révision de l’appelante est en retard.

[25] Selon la jurisprudence, la Commission doit démontrer que la décision a été communiquée à l’appelanteNote de bas de page 8.

[26] La Commission déclare avoir envoyé sa décision à l’appelante le 4 août 2023Note de bas de page 9. L’appelante affirme n’avoir jamais reçu la décisionNote de bas de page 10.

[27] La Commission a envoyé une copie de sa décision à l’appelante par la poste le 20 octobre 2023Note de bas de page 11. L’appelante affirme avoir reçu cette copie quelques jours plus tardNote de bas de page 12.

[28] La date exacte à laquelle l’appelante a reçu la décision n’est pas connue. Il me semble raisonnable de tenir compte d’un délai de 10 jours entre la date à laquelle la Commission a posté la décision et la date à laquelle l’appelante l’a reçue.

[29] J’estime que l’appelante a reçu la décision au plus tard le 30 octobre 2023.

[30] L’appelante avait 30 jours à compter de la date à laquelle la décision lui a été communiquée pour demander une révision. Cela signifie qu’elle devait présenter sa demande au plus tard le 30 novembre 2023.

[31] L’appelante a présenté sa demande de révision le 3 février 2025Note de bas de page 13, soit avec plus de 30 jours de retard. La Commission affirme que l’appelante a présenté sa demande de révision avec 442 jours de retardNote de bas de page 14.

[32] Je conclus que la demande de révision est en retard de 432 jours. La différence provient du fait que j’ai tenu compte d’un délai de 10 jours pour la livraison par la poste de la communication à l’appelante.

[33] L’appelante a présenté sa demande de révision avec plus de 365 jours de retard.

Question en litige no 2 : La Commission a-t-elle exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire lorsqu’elle a refusé de donner à l’appelante plus de temps pour demander une révision?

[34] J’estime que la Commission a agi de façon judiciaire lorsqu’elle a exercé son pouvoir discrétionnaire et refusé d’accorder à l’appelante une prolongation de délai pour demander une révision.

[35] La Commission a vérifié si l’appelante avait une explication raisonnable pour son retard et si elle avait manifesté l’intention constante de demander une révision.

[36] La Commission affirme que l’appelante a été informée du trop-payé de prestations à la fin du mois de septembre 2023. L’appelante a pris connaissance de sa décision à la fin d’octobre 2023, lorsqu’une copie de celle-ci lui a été envoyée à son adresseNote de bas de page 15.

[37] L’appelante a attendu au 3 février 2025 pour demander une révision.

[38] L’appelante soutient qu’une fois informée de sa dette, elle a immédiatement communiqué avec son spécialiste en déclarations de revenus pour savoir ce qui s’était passé avec sa demande de prestations, car c’était lui qui avait rempli les formulaires en son nomNote de bas de page 16.

[39] L’appelante a fait un suivi auprès de son spécialiste en déclarations de revenus en mars 2024. Cependant, elle n’a pas fait d’autres démarches de suivi avant le 3 février 2025, date à laquelle elle a demandé une révisionNote de bas de page 17.

[40] L’appelante affirme avoir eu de graves difficultés financières pendant cette période. Elle a commencé un nouvel emploi en octobre 2023, qui lui permettait tout juste de subvenir à ses besoins. Elle espérait que le trop-payé était une erreur administrativeNote de bas de page 18.

[41] L’appelante avait également acheté un condominium sur plan qui était désormais prêt à être occupé. Elle devait payer des frais d’utilisation de 4 700 $ par mois. Elle a dû s’endetter pour payer ces frais et a finalement vendu le condominium en juillet 2024Note de bas de page 19.

[42] L’appelante affirme que ces difficultés financières ne lui ont pas laissé le temps de s’occuper de ses problèmes liés à l’assurance-emploiNote de bas de page 20.

[43] L’appelante a également rencontré des difficultés personnelles. Elle a fait une fausse couche traumatisante qui l’a affectée physiquement et émotionnellementNote de bas de page 21.

[44] Elle a rompu ses fiançailles, a perdu son emploi en mars 2025 et a dû retourner vivre à TorontoNote de bas de page 22.

[45] L’appelante affirme que la date de naissance erronée figurant dans ses formulaires l’a empêchée d’accéder à son dossier auprès de Service Canada et de régler son trop-payéNote de bas de page 23.

[46] Toutefois, la Commission soutient que la date de naissance erronée a été corrigée auprès de Service Canada le 19 janvier 2023, soit neuf mois avant que l’appelante ne soit informée de sa décisionNote de bas de page 24.

[47] L’appelante admet qu’elle n’était pas atteinte d’une maladie l’empêchant de demander une révision. Elle dit qu’elle était débordée par ses problèmes personnelsNote de bas de page 25.

[48] La Commission déclare que l’appelante a agi en octobre 2023 en communiquant avec son spécialiste en déclarations de revenus. Elle a fait un suivi avec lui en mars 2024, mais elle n’a pas fait d’autres démarches de suivi jusqu’à ce qu’elle demande une révision le 3 février 2025.

[49] La Commission a reconnu que l’appelante avait eu des difficultés financières et de santé d’octobre 2023 à novembre 2024, mais estime que celles-ci ne justifiaient pas un retard de plus de 400 joursNote de bas de page 26.

[50] La Commission a décidé que l’appelante n’avait pas fourni d’explication raisonnable justifiant sa demande de prolongation de délai pour demander une révision.

[51] La Commission a également estimé que l’appelante n’avait pas manifesté l’intention constante de demander une révision d’octobre 2023 à février 2025.

[52] La Commission a limité son évaluation de la possibilité d’accorder une prolongation de délai aux exigences de l’article 1(1) du Règlement sur les demandes de révision.

[53] La Commission affirme que comme la demande de révision de l’appelante était en retard de plus de 365 jours, les quatre exigences des articles 1(1) et 1(2) du Règlement sur les demandes de révision doivent être satisfaites pour qu’une prolongation de délai puisse lui être accordée.

[54] La Commission ayant conclu que l’appelante ne remplissait pas les exigences de l’article 1(1), elle n’avait pas à examiner les exigences de l’article 1(2) du Règlement sur les demandes de révisionNote de bas de page 27.

[55] Rien dans la preuve ne démontre que la Commission a tenu compte de renseignements non pertinents, qu’elle n’a pas tenu compte de renseignements pertinents, qu’elle a agi de façon discriminatoire, qu’elle a agi de mauvaise foi ou qu’elle a agi dans un but ou pour un motif irrégulier.

[56] Je conclus que la Commission a agi de façon judiciaire.

[57] Par conséquent, je n’ai pas le pouvoir d’intervenir dans sa décision de ne pas exercer son pouvoir discrétionnaire pour prolonger le délai de 30 jours accordé à l’appelante pour demander une révision de sa décision du 20 octobre 2023.

Conclusion

[58] L’appel est rejeté.

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