[TRADUCTION]
Citation : Commission de l’assurance-emploi du Canada c AC, 2025 TSS 806
Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel
Décision
| Partie appelante : | Commission de l’assurance‑emploi du Canada |
| Représentante : | Nikkia Janssen |
| Partie intimée : | A. C. |
| Décision portée en appel : | Décision de la division générale datée du 3 avril 2025 (GE-24-3744) |
| Membre du Tribunal : | Solange Losier |
| Mode d’audience : | Vidéoconférence |
| Date de l’audience : | Le 24 juin 2025 |
| Personnes présentes à l’audience : | Représentante de l’appelante Intimée |
| Date de la décision : | Le 5 août 2025 |
| Numéro de dossier : | AD-25-287 |
Sur cette page
Décision
[1] Il est fait droit à l’appel de la Commission de l’assurance-emploi du Canada. La division générale a commis des erreurs de compétence. L’affaire est renvoyée à la division générale pour réexamen.
Aperçu
[2] A. C. est la prestataire. Elle a demandé des prestations d’assurance-emploi lorsqu’elle a cessé de travailler. Une période de prestations a été établie et antidatée au 26 mars 2023.
[3] La Commission a reçu un relevé d’emploi modifié indiquant que la prestataire avait reçu une indemnité de départ de son employeurNote de bas de page 1. Après avoir examiné ses talons de paie, elle a constaté qu’elle avait également reçu une paie de vacancesNote de bas de page 2. Elle a conclu que la prestataire avait reçu une rémunération qui devait être répartie à sa demande. Celle-ci a donné lieu à un avis de dette pour versement excédentaireNote de bas de page 3.
[4] La division générale a accueilli l’appel de la prestataire. Elle a conclu que la Commission n’avait pas exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire lorsqu’elle a réexaminé la demande. Elle a remplacé la décision de la Commission par sa propre décision et a jugé que la demande ne devrait pas être réexaminéeNote de bas de page 4.
[5] La Commission a fait appel devant la division d’appel et a soutenu que la division générale avait commis des erreurs de compétence et de droitNote de bas de page 5.
[6] J’ai conclu que la division générale a commis des erreurs de compétence, de sorte que je renvoie l’affaire pour réexamen.
Questions préliminaires
La prestataire a obtenu plus de temps après l’audience pour présenter des arguments écrits.
[7] À l’audience de la division d’appel, la prestataire a déclaré qu’elle n’avait pas eu l’occasion d’examiner tous les documents au dossier, y compris les arguments écrits de la Commission. Pour cette raison, elle a expliqué qu’elle n’était pas tout à fait prête à répondre à certains des arguments de la Commission à l’audience.
[8] J’ai demandé à la prestataire si elle avait reçu tous les documents, y compris les arguments de la Commission avant l’audience. La prestataire a confirmé qu’elle avait obtenu tous les documents, mais a dit que son fils ne les lui avait pas entièrement traduits.
[9] Par souci d’équité, j’ai accordé à la prestataire un délai supplémentaire après l’audience de la division d’appel pour examiner les documents au dossier et les arguments écrits de la Commission et pour fournir des arguments écrits en réponse. La prestataire m’a dit qu’elle trouverait quelqu’un pour l’aider à traduire et à préparer ses arguments écrits.
[10] La Commission ne s’est pas opposée à ce que la prestataire présente des arguments écrits après l’audience, mais elle a demandé la possibilité d’y répondre.
[11] Après l’audience, j’ai envoyé à la prestataire une lettre décrivant les instructions dont il a été question à l’audience. La date limite pour présenter des arguments écrits postérieurs à l’audience était le 8 juillet 2025Note de bas de page 6. J’ai également demandé à la Commission de fournir une réponse d’ici le 16 juillet 2025.
[12] Les parties ont répondu dans les délais prévus et elles ont partagé leurs arguments entre ellesNote de bas de page 7.
Questions en litige
[13] Les questions en litige dans le présent appel sont les suivantes :
- a) La division générale a-t-elle commis des erreurs de compétence ou de droit?
- b) Dans l’affirmative, comment l’erreur ou les erreurs devraient-elles être corrigées?
Analyse
[14] Une erreur de compétence signifie que la division générale ne s’est pas prononcée sur une question qu’elle devait trancher ou s’est prononcée sur une question qu’elle n’avait pas le pouvoir de trancherNote de bas de page 8.
[15] Une erreur de droit peut se produire lorsque la division générale n’applique pas les bonnes dispositions législatives ou lorsqu’elle utilise les bonnes dispositions législatives, mais saisit mal ce qu’elles signifient ou la manière de les appliquerNote de bas de page 9.
[16] L’un ou l’autre de ces types d’erreurs me permettrait d’intervenir dans la décision de la division généraleNote de bas de page 10.
La division générale a commis une erreur de compétence parce qu’elle n’a pas traité de la question de l’appel tardif
[17] La Commission soutient que la division générale a commis une erreur de compétence parce qu’elle devait d’abord décider si l’appel de la prestataire a été déposé tardivementNote de bas de page 11.
[18] La prestataire fait valoir que la division générale n’a commis aucune erreur. Elle ajoute qu’on ne lui a pas parlé de la question de l’appel tardif et qu’elle n’a pas été soulevée à l’audience de la division générale. Quoi qu’il en soit, elle soutient que son appel devant la division générale n’était pas tardif.
[19] Le dossier montre que la Commission a pris deux décisions distinctes en vertu de l’article 112 de la Loi sur l’assurance-emploi (c’est ce qu’on appelle une « décision de révision ») :
- décision de révision datée du 21 novembre 2023 sur la question de la « rémunération »Note de bas de page 12;
- décision de révision datée du 17 octobre 2024 sur la question de la « prolongation de la période de prestations »Note de bas de page 13.
[20] Le dossier montre également que le Tribunal a reçu l’appel de la prestataire devant la division générale le 9 novembre 2024Note de bas de page 14.
[21] La compétence de la division générale découle d’une décision de révision qui est portée en appel devant le TribunalNote de bas de page 15. La loi prévoit qu’un appel d’une décision doit être intenté devant la division générale selon la forme et la manière prescrites et dans les 30 jours suivant la date à laquelle il est communiqué à une personneNote de bas de page 16.
[22] La division générale peut accorder plus de temps, mais on ne peut jamais faire appel plus d’un an après la date à laquelle la décision de révision a été communiquée à cette personneNote de bas de page 17.
[23] Dans sa décision, la division générale n’a pas abordé la question de l’appel tardif ni tiré de conclusions sur la question de savoir si l’appel de la prestataire a été déposé tardivement.
[24] Je conclus que la division générale n’a pas exercé sa compétence parce qu’elle n’a pas traité d’une question qu’elle était censée régler. Elle devait trancher la question de l’appel tardif avant de décider si la Commission avait exercé son pouvoir discrétionnaire de manière judiciaire lorsqu’elle a réexaminé la demandeNote de bas de page 18.
La division générale a commis une erreur de compétence parce qu’elle n’a pas traité de la question de la prolongation de la période de prestations.
[25] La Commission soutient que la division générale a commis une autre erreur de compétence parce qu’elle n’a pris aucune décision concernant la question de la prolongation de la période de prestations, mais qu’elle a été portée en appelNote de bas de page 19.
[26] La prestataire réitère que la division générale n’a commis aucune erreur dans sa décision.
[27] Je conclus que la division générale n’a pas exercé sa compétence ni tranché la question de la prolongation de la période de prestationsNote de bas de page 20. Il s’agissait d’une décision de révision qui a été portée en appel devant le Tribunal, de sorte que la division générale était censée s’en occuperNote de bas de page 21.
La Commission a présenté d’autres arguments au sujet d’autres erreurs susceptibles de révision
[28] La Commission a souligné que la décision de la division générale semble incomplèteNote de bas de page 22. Je suis d’accord avec la Commission. Dans la section « Aperçu » de sa décision, les faits pertinents n’ont pas été insérés par la division généraleNote de bas de page 23.
[29] La Commission a également présenté d’autres arguments au sujet d’autres erreurs de droit et de compétence, mais il n’est pas nécessaire que je les examine parce que j’ai déjà trouvé deux erreurs qui me permettent d’intervenirNote de bas de page 24.
Réparation des erreurs
[30] Il existe deux options pour corriger une erreur commise par la division générale. Je peux renvoyer l’affaire à la division générale pour réexamen ou rendre la décision qu’elle aurait dû rendreNote de bas de page 25.
[31] Si les parties ont eu une chance équitable de présenter exhaustivement leur preuve devant la division générale, il serait normalement approprié de rendre la décision en se fondant sur le dossier dont la division générale était saisie. Toutefois, si le dossier était incomplet d’une façon ou d’une autre, il serait approprié de renvoyer l’affaire à la division générale pour réexamen.
[32] La Commission soutient que la division d’appel devrait annuler la décision de la division générale et renvoyer l’affaire à la division générale pour réexamenNote de bas de page 26. La prestataire n’a indiqué aucune préférence pour l’une ou l’autre des options.
[33] Je conclus que l’affaire devrait être renvoyée à la division générale pour réexamen. Le dossier est incomplet. La division d’appel ne peut accepter de nouveaux éléments de preuve, sauf pour des exceptions limitéesNote de bas de page 27. La prestataire n’a pas eu l’occasion de présenter à la division générale des arguments sur la question de l’appel tardif et la prolongation de la période de prestations. Elle devrait avoir l’occasion de le faire.
[34] Si la division générale le juge approprié, elle pourrait envisager d’organiser une conférence préparatoire avec les parties (et un interprète) pour discuter et exposer les questions pertinentes faisant l’objet de l’appelNote de bas de page 28.
Conclusion
[35] L’appel de la Commission est accueilli. La division générale a commis des erreurs de compétence parce qu’elle n’a pas traité de la question de l’appel tardif et de la question de la prolongation de la période de prestations. L’affaire est renvoyée à la division générale pour réexamen.