Sécurité de la vieillesse (SV) et Supplément de revenu garanti (SRG)

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Introduction

[1] Les appelants sont des époux.  Ils ont chacun fait une demande de pension aux termes de la Loi sur la sécurité de la vieillesse en 2012.  Cette pension leur a été accordée et les versements devaient débuter onze mois avant la date de la demande correspondante, soit en mars 2011.  Ils ont tous deux demandé que l’on commence à leur verser cette pension lorsqu’ils auraient atteint l’âge de 65 ans en 2006.  Ils ont aussi affirmé qu’ils n’avaient pas été en mesure de nourrir ni d’exprimer l’intention de demander la pension avant le moment où ils l’ont effectivement fait.

[2] L’intimé a rejeté la demande de versements rétroactifs additionnels faite par les appelants, tant au début qu’après la révision de cette demande.  Les appelants ont chacun interjeté appel de la présente décision auprès du bureau du Commissaire des Tribunaux de révision.  Le 1er avril 2013, les appels ont été renvoyés à la division générale du Tribunal de la sécurité sociale aux termes de la Loi sur l’emploi, la croissance et la prospérité durable. Le 28 mars 2015, la division générale a rejeté les appels de façon sommaire dans des décisions distinctes.

[3] Les appelants en ont appelé des décisions de la division générale.  Ils ont soutenu que les dispositions de la Loi sur la sécurité de la vieillesse (LSV) portant sur l’incapacité étaient inéquitables, qu’aucun prestataire ne pouvait nourrir ni exprimer l’intention de demander la pension s’il n’était pas au courant de son existence, que Monsieur S. M. était devenu incapable en raison d’une maladie et que Mme V. M. était elle aussi devenue incapable dans la mesure où elle se fiait à Monsieur S. M. pour obtenir des renseignements sur cette pension, que Service Canada ne s’est pas acquitté de son obligation attestée de les informer de l’existence de cette pension, et qu’il était à la fois répréhensible et contraire à la justice naturelle de leur avoir refusé cette pension à une époque où ils étaient tenus de la demander et alors que cette exigence fut par la suite éliminée dans une version modifiée de la loi en cause.

[4] L’intimé a soutenu que la norme de contrôle applicable à la décision de la division générale liée aux présents appels était celle du caractère raisonnable, et que les décisions en cause étaient raisonnables et ne contenaient aucune erreur de droit. À ce titre, les appels devraient être rejetés.

[5] Les appels ont été jugés sur la foi des documents écrits déposés auprès du Tribunal et après avoir tenu compte de ce qui suit :

  1. a) La complexité de la question portée en appel;
  2. b) Le fait que la crédibilité des parties ne figure pas parmi les questions principales;
  3. c) Le fait qu’il est nécessaire, aux termes du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale, de veiller à ce que l’instance se déroule de la manière la plus informelle et la plus expéditive possible dans les circonstances en cause et en conformité avec les principes de l’équité et de la justice naturelle;
  4. d) Aucun fait n’a été contesté.

Jonction d’appels

[6] L’article 13 du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale prévoit la jonction d’appels.  Il y est indiqué que le Tribunal peut, de sa propre initiative, joindre deux appels si ces derniers soulèvent des questions de droit ou de fait qui leur sont communes, et qu’une telle mesure ne risque pas de causer d’injustice aux parties.  En l’espèce, les parties sont des époux, et ils ont présenté un argument conjoint aux fins de leurs appels.  Les deux appelants ont présenté les mêmes arguments en appel et les faits non contestés liés à chaque cas étaient aussi les mêmes.  Que je sache, aucune injustice ne serait causée par la jonction de ces appels. Par conséquent, ils ont été jugés conjointement.

Norme de contrôle

[7] Les appelants n’ont pas présenté d’observations sur la norme de contrôle qui devrait être appliquée à la décision de la division générale en l’espèce. L’intimé a affirmé que la norme de contrôle applicable est celle du caractère raisonnable.  Le jugement qui fait jurisprudence en la matière est Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick 2008 CSC 9. Dans ce cas, la Cour suprême du Canada a conclu que lors du contrôle d’une décision sur des questions de fait, des questions mixtes de droit et de fait et des questions de droit portant sur la loi habilitante du tribunal, la norme de contrôle est celle de la décision raisonnable, soit si la décision du tribunal fait partie d’un ensemble de dénouements potentiels acceptables qui pourraient être défendus dans le contexte des faits et des principes de droit en cause. Les questions de compétence, d’ordre constitutionnel et de droit qui sont importantes pour le système judiciaire dans son ensemble doivent être examinées suivant la norme du bien-fondé. Ces appels font intervenir des questions mixtes de fait et de droit, et la norme de contrôle est donc celle du caractère raisonnable.

Les appels

[8] La Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social régit le fonctionnement du Tribunal.  En vertu du paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (LMEDS), les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[9] Pour que leur appel soit accueilli, il faut donc que les appelants présentent un moyen d’appel prévu à cet article de la LMEDS et qui rendrait les décisions de la division générale déraisonnables.

[10] Les appelants ont présenté plusieurs arguments pour fonder leurs appels.  Premièrement, ils ont affirmé que les dispositions de la LSV portant sur l’incapacité étaient inéquitables, et qu’il était virtuellement impossible pour un prestataire d’obtenir tout autre versement rétroactif de la pension de la LSV en s’appuyant sur ces dispositions.  Même si cela est peut-être le cas, cet argument ne renvoie à aucune erreur qu’aurait commise la division générale.  Dans la décision de la division générale, le critère juridique relatif à l’incapacité et décrit dans la LSV est correctement énoncé et appliqué aux faits non contestés liés aux présents cas. Il est aussi indiqué dans la décision de la division générale, à juste titre, que toute incapacité déclarée doit être associée au prestataire, de sorte que Mme V. M. ne pourrait pas invoquer l’incapacité déclarée de Monsieur S. M. aux fins de la présente affaire (voir Statton c. Canada (Procureur général) 2006 CAF 370).

[11] De plus, il est correctement indiqué dans la décision de la division générale que le Tribunal de la sécurité sociale est un tribunal établi par une loi.  Son pouvoir se limite à celui que lui confère cette loi.  Ce pouvoir n’englobe pas la capacité de rendre des décisions fondées sur des motifs d’ordre humanitaire ou des circonstances atténuantes. La division générale n’a pas erré à cet égard.

[12] Les appelants ont aussi soutenu qu’ils n’ont pas pu nourrir ni exprimer l’intention de demander la pension puisqu’ils ne savaient pas que celle-ci était offerte.  La Cour fédérale a déclaré de façon claire que dans le cas d’un prestataire qui n’était pas au courant de la disponibilité de la pension, cela ne saurait justifier que l’on décide de prolonger le versement de cette pension de manière rétroactive. La division générale n’a commis aucune erreur lorsqu’elle a tenu compte de ce principe.

[13] La LSV prévoit certaines mesures de redressement pour le prestataire s’il a été privé de prestations en raison des interventions de Service Canada.  La décision de la division générale établit avec justesse que le pouvoir d’accorder une telle mesure de redressement ne relève pas du Tribunal.  La division générale a donc agi de façon raisonnable en n’accordant aucune mesure de redressement pour ce motif-là.

[14] La division générale n’a pas erré non plus lorsqu’elle en est arrivée à la conclusion que Service Canada n’avait aucune obligation légale d’informer les personnes de leur droit à des prestations. Encore une fois, le Tribunal a été créé en vertu d’une loi et il n’est pas habilité à rectifier une déficience liée à la conduite de Service Canada, ni à imposer une pénalité pour le motif que l’on n’a pas fourni suffisamment de renseignements au prestataire.  Même si cela peut sembler radical, ce moyen d’appel ne recoupe aucun de ceux prévus à l’article 58 de la LMEDS, et il ne peut donc pas être pris en considération par la division d’appel du Tribunal.

[15] Les appelants ont soutenu, enfin, qu’on avait agi de manière répréhensible et contraire au principe de la justice naturelle en refusant de leur accorder des versements rétroactifs, puisqu’ils ont demandé la pension à une époque où ils étaient tenus de le faire et alors que cette exigence fut par la suite éliminée dans une version modifiée de la loi en cause.   La décision de la division générale ne contient aucune erreur susceptible de contrôle en ce qui a trait à l’examen de cet argument.

[16] Les principes de la justice naturelle visent à garantir que les parties à une affaire ont la possibilité de présenter intégralement leur cas, d’être informées de la position de la partie adverse et de se défendre contre elle; et que la décision sera rendue par un décideur impartial en fonction des faits et du droit.  Les appelants n’ont pas laissé entendre qu’ils n’avaient pas eu la possibilité de présenter leur cas, d’être informés de la position de la partie adverse et de se défendre contre elle; ou que la division générale ne s’était pas montrée impartiale ou encore qu’elle n’avait pas rendu sa décision de façon appropriée. La décision ne révèle aucun manquement à un principe de justice naturelle.  Par conséquent, l’appel ne peut être accueilli sur la foi de cet argument.

[17] L’intimé a soutenu que la première étape du processus de contrôle de la décision de la division générale consistait à déterminer si ladite division générale avait déterminé quel était le critère juridique approprié et si elle l’avait appliqué avant de rejeter sommairement les affirmations des appelants.  Après avoir examiné la décision, je suis convaincue que tel est le cas.  L’article 53 de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (la LMEDS) prévoit que la division générale doit rejeter l’appel de façon sommaire si elle est convaincue qu’il n’a aucune chance raisonnable de succès.  Pour ce qui est des présents appels, les faits s’y rapportant ne sont pas contestés.  Les dispositions de la LSV sont aussi très claires en ce qui a trait au montant de rétroactivité pouvant être versé à un prestataire à l’égard d’une telle pension. La division générale en est raisonnablement arrivée à la conclusion que les appelants avaient demandé une pension aux termes de la LSV longtemps après qu’ils y étaient admissibles, que les montants rétroactifs maximums prévus par la LSV leur ont été versés en sus de cette pension et que leurs revendications n’avaient aucune chance raisonnable de succès.

[18] Après avoir pris en considération les arguments des parties ainsi que les décisions de la division générale, je suis convaincue que ces décisions étaient raisonnables.

Conclusion

[19] Les appels sont rejetés pour les raisons énoncées plus haut.

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