Sécurité de la vieillesse (SV) et Supplément de revenu garanti (SRG)

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Décisions

[1] La permission d’en appeler à la division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale est accordée, et l’appel est accueilli.

Introduction

[2] Le 26 mars 2015, la division générale du Tribunal de la sécurité sociale (« le Tribunal ») a rendu sa décision concernant l’appel de l’intimé à l’encontre de la décision découlant du réexamen et selon laquelle on lui refuse une pension de la Sécurité de la vieillesse (SV). La division générale a soutenu que l’intimé était admissible à une pension à un taux de 10/40e prenant effet en juillet 2010. Le demandeur demande la permission d’appeler de la décision (« la demande »).

Motif de la demande

[3] Le demandeur allègue que la division générale a commis une erreur de droit dans son calcul de la date du début du versement de la pension de la SV à l’intimé. Il soutient que, si l’alinéa 5(2)c) du Règlement sur la sécurité de la vieillesse est correctement appliqué, la date de début exacte est juin 2010.

[4] Le demandeur affirme aussi que la division d’appel devrait accorder la permission d’en appeler et, conformément à l’article 59 de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (« la Loi »), rendre la décision que la division générale aurait dû rendre, c’est‑à‑dire déterminer que le versement de la pension de la SV devait commencer en juin 2010.

Questions en litige

[5] La division d’appel du Tribunal doit,

  1. déterminer si l’appel a une chance raisonnable de succès;
  2. si elle décide d’accorder la permission d’en appeler, trancher l’appel en question. De plus, la division d’appel doit déterminer s’il convient, en l’espèce, qu’elle exerce le pouvoir qui lui est conféré au titre de l’article 59 de la Loi et qu’elle rende la décision que la division générale aurait dû rendre.

Droit applicable

[6] La demande de permission d’appeler d’une décision de la division générale du Tribunal constitue l’étape préliminaire d’un appel interjeté devant la division d’appelFootnote 1. Pour accorder une permission d’en appeler, la division d’appel doit être convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succèsFootnote 2. Dans les arrêts Canada (Ministre du Développement des ressources humaines) c. Hogervorst, 2007 CAF 41, et Fancy c. Canada (Procureur général), 2010 CAF 63, la Cour d’appel fédérale a déclaré qu’une chance raisonnable de succès correspond à une cause défendable.

[7] La Loi prévoit seulement trois moyens d’appel. Ceux‑ci sont ainsi énoncés à l’article 58 de la Loi :

  1. (1) un manquement à un principe de justice naturelle;
  2. (2) la division générale a commis une erreur de droit;
  3. (3) la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissanceFootnote 3.

[8] Avant de rendre la décision d’accorder la permission d’en appeler, la division d’appel doit d’abord conclure, dans le cas où l’affaire fera l’objet d’une audience, ce qui suit :

  1. (a) au moins un des motifs de la permission d’en appeler se rapporte à un des moyens d’appel;
  2. (b) l’appel a une chance raisonnable de succès si ce moyen d’appel est invoqué.

[9] Pour les motifs énoncés ci‑après, la division d’appel est convaincue que si la permission est accordée, le présent appel aura une chance raisonnable de succès.

Analyse

[10] La question faisant l’objet de l’appel lors de l’audience devant la division générale consistait à déterminer si l’intimé avait habité suffisamment longtemps au Canada pour être admissible à une pension de la SV. L’intimé a présenté sa demande de pension de la SV le 10 juin 2010. Le demandeur a toutefois fait valoir que, du 28 mai 2000 au 4 mai 2011, l’intimé avait habité dans son pays d’origine la plupart du temps et qu’il n’était donc pas admissible à une pension de la SV. La division générale a cependant conclu que l’intimé avait satisfait aux exigences en matière de résidence pendant la période en question.

[11] Bien qu’il ne conteste pas la conclusion de la division générale, le demandeur soutient que la division générale a mal appliqué le droit, plus particulièrement l’alinéa 5(2)c) du Règlement sur la sécurité de la vieillesseFootnote 4. Les arguments du demandeur sont exposés dans les paragraphes suivants de ses observations :

  1. [Traduction]
    6. Puisque la division générale du Tribunal de la sécurité sociale a établi que l’intimé avait commencé à habiter au Canada le 28 mai 2000, cela signifie que, le 28 mai 2010, l’intimé satisfaisait à l’exigence en matière de résidence selon laquelle il devait avoir résidé au Canada depuis dix ans, conformément aux articles 3 à 5 de la Loi sur la sécurité de la vieillesse. Selon l’alinéa 5(2)c) du Règlement sur la sécurité de la vieillesse, la date d’agrément est celle à laquelle le demandeur est devenu admissible à une pension. Par conséquent, le demandeur soutient respectueusement que la division générale du Tribunal de la sécurité sociale a commis une erreur lorsqu’elle a établi que la date d’agrément de la demande de pension de la SV de l’intimé était le 10 juin 2010, au lieu du 28 mai 2010, soit la date à laquelle il était devenu admissible à une pension, aux termes de l’alinéa 5(2)c) du Règlement sur la sécurité de la vieillesse et des articles 3 à 5 de la Loi sur la sécurité de la vieillesse.
  2. 8. Conformément aux articles 3 à 5 de la Loi sur la sécurité de la vieillesse, le demandeur soutient respectueusement que la date d’agrément réputée de la demande de prestations de la SV est le 28 mai 2010 et non le 10 juin 2010. Compte tenu de cette date d’agrément réputée, la date de début de versement de la pension devrait être juin 2010 et non juillet 2010.

[12] La question porte essentiellement sur l’interprétation et l’application des dispositions qui régissent l’agrément d’une demande de pension de la SV. L’article 5 du Règlement sur la sécurité de la vieillesse est ainsi libellé :

  1. 5.(1) Sous réserve du paragraphe (2), lorsque le ministre :
    1. a) est convaincu qu’un demandeur est admissible à une pension selon les articles 3 à 5 de la Loi,
    2. b) agrée la demande après le dernier jour du mois au cours duquel elle a été reçue,
  2. l’agrément prend effet à celle des dates suivantes qui est postérieure aux autres :
    1. c) la date de réception de la demande,
    2. d) la date à laquelle le demandeur est devenu admissible à une pension selon les articles 3 à 5 de la Loi,
    3. e) la date indiquée par écrit par le demandeur.
  3. (2) Lorsque le ministre est convaincu que le demandeur visé au paragraphe (1) a atteint l’âge de 65 ans avant la date de réception de sa demande, l’agrément de celle‑ci prend effet à celle des dates suivantes qui est postérieure aux autres :
    1. a) la date qui précède d’un an celle de la réception de la demande,
    2. b) la date à laquelle le demandeur a atteint l’âge de 65 ans,
    3. c) la date à laquelle le demandeur est devenu admissible à une pension selon les articles 3 à 5 de la Loi;
    4. d) le mois précédant la date indiquée par écrit par le demandeur.

[13] Ensemble, les dispositions législatives précisent le moment auquel l’agrément d’une demande prend effet. Le demandeur soutient que, dans le cas de l’intimé, cette date se situe un mois avant celle établie par la division générale. La division générale a lu les dispositions législatives et elle est convaincue que le demandeur a soulevé une cause défendable.

[14] Par conséquent, la division d’appel accorde la permission d’en appeler.

Appel

[15] L’avocat du demandeur demande également à la division d’appel, si cette dernière décide d’accorder la permission d’en appeler, d’accueillir l’appel en fondant ses conclusions sur le dossier et d’exercer le pouvoir qui lui est conféré en vertu de l’article 59 de la Loi en rendant la décision que la division générale aurait dû rendre. L’intimé ne s’est pas opposé à l’argument du demandeur.

[16] Ayant conclu que le demandeur avait soulevé une cause défendable, la division d’appel est d’avis qu’il convient d’accueillir l’appel en l’espèce et d’exercer la compétence qui lui est conférée en vertu de l’article 59 de la Loi. La division d’appel est arrivée à cette conclusion en se fondant sur les dispositions législatives applicables, les circonstances de l’affaire et les positions respectives des parties. La division d’appel a également pris en considération le fait que cet appel résulte de la demande infructueuse que le demandeur a présenté à la division générale pour que celle‑ci publie un rectificatif modifiant la date du versement. Elle a également tenu compte du fait que le mandat du Tribunal consiste à procéder de la façon la plus informelle et la plus rapide possible, dans la mesure où les circonstances et les considérations d’équité et de justice naturelle le permettent.

Analyse

[17] L’article 3 de la Loi sur la sécurité de la vieillesse énonce les conditions à remplir pour être admissible à une pension. Elle décrit ainsi les conditions relatives à une pleine pension et à une pension partielle :

Pleine pension

  1. 3. (1) Sous réserve des autres dispositions de la présente loi et de ses règlements, la pleine pension est payable aux personnes suivantes :
  2. a) celles qui avaient la qualité de pensionné au 1er juillet 1977;
  3. b) celles qui, à la fois :
    1. (i) sans être pensionnées au 1er juillet 1977, avaient alors au moins vingt‑cinq ans et résidaient au Canada ou y avaient déjà résidé après l’âge de dix-huit ans, ou encore étaient titulaires d’un visa d’immigrant valide,
    2. (ii) ont au moins soixante‑cinq ans,
    3. (iii) ont résidé au Canada pendant les dix ans précédant la date d’agrément de leur demande, ou ont, après l’âge de dix‑huit ans, été présentes au Canada, avant ces dix ans, pendant au moins le triple des périodes d’absence du Canada au cours de ces dix ans tout en résidant au Canada pendant au moins l’année qui précède la date d’agrément de leur demande.
  1. Pension partielle
    3. (2) Sous réserve des autres dispositions de la présente loi et de ses règlements, une pension partielle est payable aux personnes qui ne peuvent bénéficier de la pleine pension et qui, à la fois :
  2. a) ont au moins soixante‑cinq ans;
  3. b) ont, après l’âge de dix-huit ans, résidé en tout au Canada pendant au moins dix ans mais moins de quarante ans avant la date d’agrément de leur demande et, si la période totale de résidence est inférieure à vingt ans, résidaient au Canada le jour précédant la date d’agrément de leur demande.

[18] L’article 8 de la Loi sur la sécurité de la vieillesse régit le versement de la pension de la SV. Elle prévoit entre autres ce qui suit :

  1. Premier versement
    8. (1) Le premier versement de la pension se fait au cours du mois qui suit l’agrément de la demande présentée à cette fin; si celle-ci est agréée après le dernier jour du mois de sa réception, l’effet de l’agrément peut être rétroactif au jour — non antérieur à celui de la réception de la demande — fixé par règlement.
  1. Exception
    (2) Toutefois, si le demandeur a déjà atteint l’âge de soixante-cinq ans au moment de la réception de la demande, l’effet de l’agrément peut être rétroactif à la date fixée par règlement, celle-ci ne pouvant être antérieure au jour où il atteint cet âge ni précéder de plus d’un an le jour de réception de la demande. 

[19] Puisque la division générale avait conclu que l’intimé satisfaisait aux exigences en matière de résidence et que, par conséquent, il était admissible à une pension partielle, elle était tenue d’appliquer les dispositions législatives qui régissent le premier versement, soit l’article 8 de la Loi sur la sécurité de la vieillesse et l’article 5 du Règlement sur la sécurité de la vieillesse. L’intimé est né au Pakistan en janvier 1937 et a atteint l’âge de 65 ans en 2002. Un demandeur est admissible à une pension de la SV à partir de l’âge de soixante‑cinq ans. Par contre, tel qu’il a été mentionné plus haut, l’intimé n’a pas présenté de demande de pension de la SV avant le 10 juin 2010, soit huit ans et quelques semaines après son 65e anniversaire de naissance. Enfin, sa demande a été agréée bien après le dernier jour du mois au cours duquel elle avait été reçue. Le demandeur soutient que la division générale aurait dû appliquer l’alinéa 5(2)c) du Règlement sur la sécurité de la vieillesse, mais qu’elle ne l’a pas fait. Compte tenu des faits de l’affaire, la division d’appel souscrit à cet argument.

[20] Selon le paragraphe 5(2) du Règlement sur la sécurité de la vieillesse, l’agrément d’une demande de pension de la SV prend effet à partir de celui de quatre événements distincts dont la date est postérieure aux autres. Premièrement, il y a la date qui précède d’un an celle de la réception de la demande. En ce qui concerne l’affaire de l’intimé, cette date est le 28 mai 2009. Deuxièmement, l’agrément pourrait prendre effet à la date à laquelle le demandeur a atteint l’âge de 65 ans. L’intimé n’était pas admissible à une pension à la date à laquelle il a atteint cet âge. Ensuite, l’agrément pourrait prendre effet à la date à laquelle le demandeur est devenu admissible à une pension selon les articles 3 à 5 de la Loi sur la sécurité de la vieillesse. La division générale a établi la résidence de l’intimé au Canada pendant la période en question. Elle a tranché la question en faveur de l’intimé en soutenant que ce dernier avait établi sa résidence au Canada pendant la période du 28 mai 2000 au 4 mai 2011. Étant donné que l’intimé avait immigré au Canada en mai 2000, son séjour au pays comptait au moins les dix années exigées. Par conséquent, lorsqu’on applique l’alinéa 3(2)b) de la Loi sur la sécurité de la vieillesse, l’intimé devient admissible à une pension partielle de la SV à compter de mai 2010. Enfin, l’agrément peut prendre effet le mois précédant la date indiquée par écrit par le demandeur. L’intimé n’a indiqué aucune date.

[21] Il semble évident qu’en établissant que la date de début de la pension de la SV de l’intimé était le 10 juin 2010, la division générale a appliqué la date à laquelle le demandeur a présenté la demande. Le demandeur souligne que la date de la demande de la pension de la SV ne constitue pas l’une des conditions énoncées à l’alinéa 5(2)c). La division d’appel souscrit à cet argument. La division générale a donc commis une erreur de droit. Compte tenu des faits, la date postérieure aux autres est celle à laquelle l’intimé est devenu admissible à une pension, selon les articles 3 à 5 de la Loi sur la sécurité de la vieillesse, c’est‑à‑dire la date à laquelle il a atteint l’âge de 65 ans et à laquelle il a aussi satisfait au critère de résidence de dix ans, soit le 28 mai 2010. Par conséquent, selon le paragraphe 8(1) de la Loi sur la sécurité de la vieillesse, la pension de la SV de l’intimé devrait commencer en juin 2010, et non en juillet 2010 comme l’avait établi la division générale.

Conclusion

[22] L’appel est accueilli.

Décision

[23] La division d’appel exerce sa compétence en vertu de l’article 59 de la Loi et rend la décision que la division générale aurait dû rendre. Par conséquent, la division d’appel décide, en application du paragraphe 8(1) de la Loi sur la sécurité de la vieillesse, que le versement d’une pension partielle de la SV à l’intimé doit commencer en juin 2010.

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