Sécurité de la vieillesse (SV) et Supplément de revenu garanti (SRG)

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Motifs et décision

Décision

La permission d’en appeler est accordée.

Introduction

[1] La demanderesse demande la permission d’en appeler de la décision de la division générale (DG) du Tribunal de la sécurité sociale (TSS) qui a refusé d'accorder une prorogation du délai d'appel.

Contexte

[2] La demanderesse satisfait au critère pour recevoir une pension de la Sécurité de la vieillesse (SV) et touche un supplément de revenu garanti (SRG). En octobre 2011, le défendeur l'a informée qu'il avait réévalué son droit au SRG en fonction de l'existence de renseignements qui ne lui avaient pas été dévoilés auparavant et selon lesquels son époux touchait une pension d'un régime de retraite privé. Le défendeur a donc conclu qu'il avait versé à la demanderesse un trop payé de 4735$ et a entamé des procédures pour récupérer le montant.

[3] Dans une lettre du 17 septembre 2012, le défendeur a rejeté la demande de révision de la demanderesse. Le 12 mars 2014, la demanderesse a déposé, auprès de la DG, un appel incomplet à l'encontre de la décision découlant de la révision. En réponse à cette démarche, le TSS lui a demandé de fournir les renseignements manquants. La demanderesse a complété son appel le 27 juin 2014.

[4] Dans une décision rendue le 22 janvier 2016, la DG a conclu que la demanderesse avait déposé son appel en retard et a refusé de proroger le délai pour interjeter appel. Ce faisant, la DG a conclu que le délai d'un an prévu au paragraphe 52(2) de la Loi sur le ministre de l'Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS) ne s’appliquait pas aux demandeurs qui ont été avisés d'une décision découlant de la révision avant le 1er avril 2013. Cependant, la DG a conclu que l'absence d'une cause défendable l'emportait sur toute autre considération.

[5] La demanderesse a présenté une demande de permission d’en appeler devant la division d’appel (DA) du TSS le 13 avril 2016, dans les délais prévus à l’alinéa 57(1)b) de la Loi sur le MEDS.

Question en litige

[6] Pour accueillir cette demande, je dois être convaincu que l’appel a une chance raisonnable de succès.

Droit applicable

Loi sur le ministère de l'Emploi et du Développement social

[7] Aux termes de l'alinéa 52(1)b) de la Loi sur le MEDS, qui est entré en vigueur le 1er avril 2013, un appelant dispose de 90 jours pour interjeter appel à la DG. Cette dernière peut allouer à l'appelant plus de temps conformément au paragraphe 52(2), mais en aucun cas l'appelant ne peut interjeter appel plus d'un an après le jour auquel la décision découlant de la révision lui a été communiquée.

[8] Conformément aux paragraphes 56(1) et 58(3) de la Loi sur le MEDS, on ne peut interjeter appel devant la DA sans permission, et la DA accorde ou refuse cette permission. Le paragraphe 58(2) de la Loi sur le MEDS prévoit que la division d'appel rejette la demande de permission d’en appeler si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

[9] Conformément au paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS, les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) La division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence.
  2. b) Elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) Elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[10] La demande de permission d’en appeler est une étape préliminaire à une audition au fond de l'affaire. C'est un premier obstacle que la demanderesse doit franchir, mais il est inférieur à celui auquel elle devra faire face à l'audience de l'appel sur le fond. À l’étape de la demande de permission d’en appeler, la demanderesse n’a pas à prouver sa thèse.

[11] Par ailleurs, la Cour d’appel fédérale a conclu que la question de savoir si une partie a une cause défendable en droit revient à se demander si elle a une chance raisonnable de succès sur le plan juridique - Canada (MDRH) c. Fancy c. Canada (PG).Note de bas de page 1

Gattellaro

[12] Pour déterminer s’il convient d’accorder une prorogation du délai d’appel, un tribunal administratif doit soupeser les quatre facteurs énoncés dans l’affaire Canada (MDRH) c. GattellaroNote de bas de page 2.

  1. (a) Le demandeur fait preuve d’une intention constante de poursuivre l’appel;
  2. (b) Le retard a été raisonnablement expliqué;
  3. (c) La cause est défendable;
  4. (d) La prorogation du délai ne cause pas de préjudice à l’autre partie.

[13] Le poids à accorder à chacun des critères énumérés dans la décision Gattellaro peut varier et, dans certains cas, différents critères peuvent s’avérer pertinents. La considération primordiale est celle de savoir si l’octroi d’une prorogation de délai serait dans l’intérêt de la justice - Canada (Procureur général) c. LarkmanNote de bas de page 3.

Loi sur la sécurité de la vieillesse

[14] L'article 11 de la Loi sur la sécurité de la vieillesse (LSV) prévoit que le bénéficiaire d'une pension de la sécurité de la vieillesse qui réside au Canada peut recevoir le paiement d'un SRG mensuel. L'article 13 prévoit que le revenu d'un pensionné, déterminé aux termes de la Loi de l'impôt sur le revenu, servira à déterminer le montant du SRG.

[15] Le paragraphe 28(2) de la LSV prévoit que :

Lorsque l’appelant prétend que la décision du ministre touchant son revenu ou celui de son époux ou conjoint de fait, ou le revenu tiré d’une ou de plusieurs sources particulières, est mal fondée, l’appel est, conformément aux règlements, renvoyé pour décision devant la Cour canadienne de l’impôt. La décision de la Cour est, sous la seule réserve des modifications que celle-ci pourrait y apporter pour l’harmoniser avec une autre décision rendue aux termes de la Loi sur la Cour canadienne de l’impôt sur un appel pertinent à celui interjeté aux termes de la présente loi devant le Tribunal de la sécurité sociale, définitive et obligatoire et ne peut faire l’objet que d’un recours prévu par la Loi sur les Cours fédérales.

Observations de la demanderesse

[16] Dans sa demande de permission d’en appeler, la demanderesse a déclaré qu'elle n'avait jamais cherché à recevoir de l'argent auquel elle n'avait pas droit. Elle avait l'impression que tout le processus était injuste et s'est demandé pourquoi le défendeur avait attendu six mois avant de l'informer que son revenu familial était trop élevé.

Analyse

[17] Après avoir examiné la décision de la DG qui va à l'encontre de la loi et du dossier, je suis d'avis que cet appel a une chance raisonnable de succès.

[18] La DG a conclu que le délai maximal d'un an prévu au paragraphe 52(2) de la Loi sur le MEDS ne s'appliquait pas aux demandeurs qui ont été avisés, avant le 1er avril 2013, d'une décision découlant d'une révision. Pour en arriver à cette conclusion, la DG a tenu compte des règles d'interprétation d’un texte de loi, plus précisément de la règle voulant qu’une loi ne doive pas être interprétée comme ayant une application rétroactive. Je souscris à ce raisonnement et je ne crois pas, en l'espèce, qu'on devrait empêcher la demanderesse de poursuivre son appel simplement parce qu'elle a mis 18 mois à le compléter.

[19] Cependant, je suis convaincu que la cause de la demanderesse est défendable, que la division générale a commis une erreur de droit puisqu'elle n'a pas appliqué correctement l'affaire Gattellaro en refusant d'accorder une prorogation du délai d'appel. Bien que la DG ait cité les quatre critères de l'affaire Gattellaro dans sa décision, elle s'est abstenue de traiter de trois de ces critères, laissant ainsi croire que l'inexistence d'une cause défendable avait décidé de l'affaire.

[20] Il semble que la DG ait confondu son absence de compétence au sujet de l'examen du revenu et une absence de cause défendable. La DG a conclu à juste titre que le paragraphe 28(2) de la LSV l'empêchait d’évaluer le revenu d’un demandeur. Cependant, on peut dire qu'il ne s'agit pas d'un élément déterminant pour savoir si on doit accorder la prorogation du délai d'appel. En l'espèce, le refus de la prorogation de délai a effectivement privé la demanderesse de tout droit d'appel devant la Cour canadienne de l'impôt.

Conclusion

[21] La permission d’en appeler est accordée. J’invite les parties à déposer leurs observations sur la pertinence de tenir une nouvelle audience et, si une telle audience s’avère nécessaire, sur le type d’audience qui convient.

[22] Cette décision accordant la permission d’en appeler ne présume aucunement du résultat de l’appel sur le fond du litige.

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