Sécurité de la vieillesse (SV) et Supplément de revenu garanti (SRG)

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Motifs et décision

Introduction

[1] La division générale (DG) du Tribunal de la sécurité sociale du Canada (Tribunal) a accueilli l’appel de l’intimé. La DG avait déterminé que :

  1. L’intimé était incapable de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande de pension de la sécurité de la vieillesse (SV) avant le 31 août 2011; et
  2. L’intimé a satisfait le critère d’incapacité énoncé dans la Loi sur la sécurité de la vieillesse (LSV), qu’il était incapable de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande de prestation entre 2001 et 2011 et que son incapacité était continue jusqu’en 2011.

Historique du dossier

[2] Le demandeur a reçu une demande de pension de la SV de l’intimé en août 2011.

[3] Le demandeur a accordé à l’intimé une pleine pension à partir du mois de juillet 2010, soit 11 mois avant la date de sa demande.

[4] L’intimé, par son représentant, a demandé un réexamen de cette décision dû à son incapacité de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande de la pension de la SV avant le 31 août 2011. Le demandeur a maintenu sa décision initiale.

[5] L’intimé a interjeté appel de cette décision devant le Bureau du Commissaire des tribunaux de révision (le « BCTR ») et son appel a été transféré au Tribunal en avril 2013.

[6] L’audience tenue par la DG a eu lieu par téléconférence le 6 octobre 2015. La DG a rendu sa décision le 26 mars 2016.

[7] Le demandeur a déposé une demande de permission d’en appeler (Demande) devant la division d’appel (DA) le 27 juin 2016, dans les délais prescrits.

[8] Le demandeur, dans sa Demande, souligne :

  1. Que la DG a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance;
  2. En ce qui concerne l’application de l’article 28.1 de la LSV, la période d’incapacité du prestataire doit être continue;
  3. L’intimé a appliqué pour une pension de SV en son nom; il était capable de former une intention de déposer une demande le 25 août 2011;
  4. Par conséquent, les paragraphes 28.1(2) et (3) de la LSV s’appliquent;
  5. Le fardeau d'établir une incapacité sous article 28.1 de la LSV incombe à la personne qui l'allègue; et
  6. Il existe de la preuve convaincante au dossier que l'intimé a formé l'intention d'exercer diverse activités et qu'il a pris des décisions quant à d'autres choix qui se présentaient à lui, particulièrement durant la période entre son 65ièmc anniversaire en mai 2007 et avant de faire sa demande pour une pension de la SV en août 2011. Toutefois, la DG n'a pas tenu compte de cette preuve dans ses motifs.

[9] Le Tribunal a envoyé une copie de la Demande à l’intimé et son représentant par lettre en date du 4 juillet 2016. Le représentant de l’intimé ne l’a pas reçu et une deuxième copie lui a été envoyée. Il l’a reçu le 22 août 2016.

Questions en litige

[10] Est-ce que l’appel a une chance raisonnable de succès?

La loi et l’analyse

[11] Tel qu’il est stipulé aux paragraphes 56(1) et 58(3) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, « il ne peut être interjeté d’appel à la division d’appel sans permission » et la division d’appel « accorde ou refuse cette permission ».

[12] Le paragraphe 58(2) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social prévoit que « la division d’appel rejette la demande de permission d’en appeler si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès. »

[13] Conformément au paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. (a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. (b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. (c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[14] Le Tribunal accorde la permission d’en appeler s'il est satisfait que le demandeur a démontré au moins un des moyens d’appel ci-dessus mentionnés et le Tribunal est satisfait qu’un des moyens a une chance raisonnable de succès.

[15] Pour ce faire, le Tribunal doit être en mesure de déterminer, conformément au paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, s’il existe une question de droit, de fait ou de compétence ou relative à un principe de justice naturelle dont la réponse pourrait mener à l’annulation de la décision attaquée.

[16] L’argument du demandeur est basé sur la LSV, plus particulièrement l’article 28.1.

[17] Les paragraphes 28.1(1) à (4) de la LSV s’appliquent aux demandes de prestations où la capacité de la personne est en question.

[18] Le 25 août 2011, l’intimé a déposé une demande pour une pension de la SV en son nom. En septembre 2011, sa demande a été approuvée (par le demandeur) et on lui a accordé une pleine pension de SV débutant en juillet 2010. Par la suite, l’intimé a demandé des prestations pour la période de juin 2007 (le mois suivant son 65ièmc anniversaire) jusqu’à août 2010. Cette demande n’a pas été approuvée.

[19] En octobre 2012, l’intimé a autorisé un représentant légal pour agir relativement à sa demande de prestations de la SV pour la période de juin 2007 jusqu’à août 2010. Il a demandé un réexamen du dossier.

[20] Après réexamen, le demandeur a maintenu sa décision et a avisé que « le ministère ne pouvait accorder de prestations … précédant 11 mois de la réception de la demande ». La lettre de la décision, datée du 22 janvier 2013, a expliqué que l’état du prestataire ne correspondait pas à la définition « d’incapacité continue » aux termes de l’article 28.1 de la LSV.

[21] L’intimé a interjeté appel de cette décision. L’appel a été transféré au Tribunal en avril 2013. L’intimé a eu gain de cause devant la DG du Tribunal.

[22] La décision de la DG note, entre autres :

[13] La question en litige est de déterminer si l’appelant était incapable de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande de pension de la SV entre 2001 et 2011 selon l’article 28.1 de la LSV. L’incapacité doit être continue.

[17] Le Tribunal détermine donc, selon la preuve au dossier et les témoignages, que l’appelant était incapable de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande avant le 31 août 2011. Plus précisément, le Tribunal s’appuie sur la déclaration d’incapacité signée le 20 octobre 2011 par le Dr Groulx, indiquant que l’appelant souffre de troubles cognitifs depuis le 14 juin 2001 et de dépression chronique associée à l’alcoolisme chronique. Le Dr Groulx a traité l’appelant depuis le début de son incapacité. Il a répondu dans l’affirmative à la question « est-ce que l’état du requérant le rend/a rendu incapable de former ou d’exprimer son intention de faire une demande? ». Il ajoute que la condition de l’appelant s’est améliorée en 2011 et qu’il était en mesure de faire sa demande de prestations. Selon les témoignages de l’épouse de l’appelant et de son fils, il semble que les activités de l’appelant entre 2001 et 2011 sont limitées à être en état d’ébriété, et que c’est l’épouse de l’appelant qui s’occupe de la maison familiale, des finances et des médicaments de l’appelant avec l’aide de son fils puisque l’appelant ne gère rien et ne paye pas l`hypothèque ou autre. Selon les témoignages, l’appelant est incapable de gérer ses affaires et les affaires de la famille, surtout à partir de 2007.

[18] En conclusion, le Tribunal détermine que l’appelant a satisfait le critère d’incapacité énoncé dans la LSV, qu’il était incapable de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande de prestation entre 2001 et 2011 et que son incapacité était continue jusqu’en 2011.

[23] Le demandeur cite les causes Sedrak c. Canada, 2008 CAF 86, Canada c. Kirkland, 2008 CAF 144, Canada c. Danielson, 2008 CAF 78, Canada c. Y.C., CP26648, J.F. c. Ministre RSDC 2014 TSSDA 34 et Ministre RSDC c. R.T., 2015 TSSDA 514. Il soutient que le fait que l’intimé a déposé une demande de pension en août 2011 démontre qu’il avait la capacité au sens de la LSV. De plus, il y avait de la preuve médicale au dossier entre 2007 et 2011 des activités de l’intimé et de sa capacité de relater sa condition personnelle aux divers professionnels de santé et une absence complète de preuve médicale au dossier pendant cinq ans durant la période en question. Par conséquent, l’incapacité de l’intimé n’a pas été continue de mai 2007 à août 2011.

[24] De façon alternative, le demandeur soutient que l’intimé était sobre en août 2008 et que s’il y avait incapacité en 2007, l’incapacité s’est terminée en août 2008. Pour bénéficier de l’application du paragraphe 28.1(2) de la LSV, il devait présenter sa demande au plus tard en août 2009, mais il ne l’a présentée qu’en août 2011.

[25] Je note que la DG n’a pas fait mention de l’absence de preuve médicale au dossier pour plusieurs années pendant la période en question ni de la documentation médicale au dossier autre que la déclaration d’incapacité du Dr. Groulx en octobre 2011. Quoique la DG ne doit pas référer à chaque élément de preuve au dossier, il est possible de conclure à une erreur de fait lorsque le décideur de fait omet de mentionner et d’analyser de la preuve importante.

[26] Je note aussi que la DG a fait référence à la LSV et l’affaire Slater c. Canada (Procureur général), 2008 FCA 375. Toutefois, la décision ne fait pas référence à la jurisprudence citée par le demandeur dans la Demande.

[27] Après révision du dossier d’appel, de la décision de la DG et des arguments du demandeur, je conclus que :

  1. Le demandeur a soulevé une question relative à une erreur de droit – l’application de la jurisprudence au sujet de l’incapacité et de l’article 28.1 de la LSV – dont la réponse pourrait mener à l’annulation de la décision attaquée; et
  2. Le demandeur a soulevé une question relative à une conclusion de fait (tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance) dont la réponse pourrait mener à l’annulation de la décision attaquée.

[28] L’appel a une chance raisonnable de succès relativement à une erreur de droit, une erreur de fait ou une erreur mixte de droit et de fait.

Conclusion

[29] La permission d’en appeler est accordée.

[30] Cette décision sur la permission d’interjeter appel ne présume pas du résultat de l’appel sur le fond de l’affaire.

[31] J’invite les parties à présenter des observations sur les questions suivantes : si une audience est appropriée; si oui, le mode de l'audience; ainsi que des observations sur le fond de l’appel.

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