Sécurité de la vieillesse (SV) et Supplément de revenu garanti (SRG)

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Motifs et décision

Décision

L’appel est accueilli.

Introduction

[1] Le présent appel porte sur une décision de la division générale du Tribunal de la sécurité sociale (Tribunal) rendue le 25 août 2015, laquelle concluait que l’appelante n’était pas admissible à recevoir des versements rétroactifs du supplément de revenu garanti (SRG), outre ceux qu’elle avait déjà reçus de la part de l’intimé.

[2] La permission d’en appeler a été accordée le 23 janvier 2017 au motif que la division générale pourrait avoir erré en rendant sa décision.

Aperçu

[3] L’appelante est née en juin 1927. Sa demande de pension de la sécurité de la vieillesse (SV) a été approuvée et a pris effet en juillet 1992, et elle s’est ensuite qualifiée pour le SRG. Le 27 avril 2004, l’intimé a suspendu la pension de la SV de la demanderesse [sic], ainsi que les prestations qui y étaient liées, car il n’était pas en mesure de la trouver. Le 16 novembre 2004, l’intimé a envoyé une lettre au fils de la demanderesse [sic] (son représentant), dans laquelle on lui demandait de l’aide pour trouver sa mère. Le 6 décembre 2004, le représentant a avisé l’intimé par téléphone qu’il détenait une procuration pour l’administration des avoirs de sa mère et qu’il ferait parvenir la documentation prochainement. Cependant, il a fourni la procuration que le 29 juillet 2011, date à laquelle il a avisé l’intimé que sa mère avait perdu la capacité de régler des questions administratives et monétaires, et qu’elle vivait dans une maison de soins privée en Alberta. Le 26 octobre 2011, le représentant a présenté cinq demandes de SRG couvrant les périodes de paiement de 2007-2008 à 2011-2012.

[4] Le 8 décembre 2011, l’intimé a écrit au représentant et l’a avisé que la pension de la SV de sa mère avait été rétablie à compter d’avril 2004 et, par conséquent, elle recevrait les versements manquants rétroactivement jusqu’à cette date. Il a également avisé le représentant que les demandes de SRG pour les deux dernières années financières (à savoir 2010-2011 et 2011-2012) avaient été approuvées avec une date d’entrée en vigueur de paiement d’octobre 2010, soit 11 mois avant la date de réception des demandes. Les demandes de SRG pour les trois premières années financières (à savoir 2007-2008, 2008-2009 et 2009-2010) ont été rejetées parce qu’elles se rapportaient à des périodes de paiement qui précédaient de plus de 11 mois la réception des demandes.

[5] Dans une lettre datée du 6 janvier 2012, le représentant a demandé une révision à l’intimé. Le 20 juin 2012, l’intimé a maintenu sa décision et a expliqué que, bien qu’il comprenne que la demanderesse [sic] ne puisse pas s’occuper de ses affaires, son incapacité n’était plus significative, car son fils avait une procuration. Il était de sa responsabilité de gérer les prestations de sa mère en son nom.

[6] Le 9 octobre 2012, le représentant a interjeté appel de cette décision auprès de la division générale et soutenait que sa mère était en absence de capacité depuis 2003 et qu’elle ne pouvait pas savoir que ses versements de pension de la SV et du SRG avaient été suspendus.

[7] Dans sa décision du 25 août 2015, la division générale a rejeté l’appel, concluant que l’intimé avait correctement rétabli les versements du SRG de la demanderesse [sic] à compter de novembre 2010, conformément à l’alinéa 11(7)a) de la Loi sur la sécurité de la vieillesse (LSV). La division générale a également estimé qu’il n’y avait pas suffisamment d’éléments de preuve pour établir, selon la prépondérance des probabilités, que le critère relatif à l’incapacité avait été respecté.

[8] Le 27 novembre 2015, le représentant de l’appelante a présenté une demande de permission d’en appeler devant la division d’appel du Tribunal, soutenant que la division générale avait commis diverses erreurs. Après avoir examiné les allégations de l’appelante, j’ai conclu dans ma décision du 23 janvier 2017 qu’une cause défendable existait concernant la possibilité que la division générale aurait : i) omis d’observer un principe de justice naturelle quand elle a avisé le représentant de recueillir des éléments de preuve spécifiques à la période suivant l’audience; ii) mal interprété la preuve du représentant portant sur la capacité cognitive de sa mère depuis qu’elle vivait dans une maison de soins, surtout en ce qui concerne le rôle qu’elle a joué pour trouver sa procuration.

[9] Le 28 février 2017, l’intimé a présenté une lettre dans laquelle il consentait à ce que l’affaire soit renvoyée à la division générale pour qu’une nouvelle décision soit rendue par un membre différent.

[10] Après avoir reçu les réponses des parties, j’ai maintenant décidé qu’une audience de vive voix n’est pas nécessaire et que l’appel peut être instruit sur le fondement du dossier documentaire pour les raisons suivantes :

  1. Le dossier ne présente aucune lacune et ne nécessite pas de clarification.
  2. L’intimé a accepté qu’une nouvelle audience relative à la demande de pension d’invalidité [sic] de l’appelante soit instruite sur le fond.
  3. Ce mode d’audience respecte les exigences du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale (Règlement sur le TSS) voulant que l’instance se déroule de la manière la plus informelle et expéditive que les circonstances, l’équité et la justice naturelle permettent.

Droit applicable

LSV

[11] Le paragraphe 11(2) de laLSV prévoit que, sauf si le ministre a dispensé le pensionné de l’obligation de présenter une demande, le supplément n’est versé que sur demande du pensionné.

[12] Une fois que la personne satisfait aux exigences d’admissibilité pour la pension de la SV et pour le SRG, des règles relatives au versement des prestations s’appliquent. Aux termes du paragraphe 8(2) de la LSV et de l’alinéa 5(2)a) du Règlement sur la SV, la pension de la SV peut être versée de façon rétroactive au maximum 11 mois avant le mois au cours duquel l’intimé a reçu la demande de pension de la SV. Aux termes de l’alinéa 11(7)a) de la LSV, aucun SRG n’est versé pour tout mois antérieur de plus de 11 mois à celui au cours duquel l’intimé a reçu la demande de SRG. Aux termes de l’alinéa 11(7)b) de la LSV, aucun SRG n’est versé au pensionné pour tout mois pour lequel le pensionné ne peut recevoir de pension de la SV.

[13] L’article 28.1 de la LSV prévoit une exception à la règle de rétroactivité maximale portant sur le versement des prestations aux termes de la LSV. Cette disposition permet qu’une demande soit considérée comme ayant été présentée plus tôt qu’elle ne l’a été en réalité, s’il est possible de démontrer que la personne visée par la demande était incapable de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande de prestation. Les paragraphes 28.1(1) à (3) énoncent les exigences relatives à l’incapacité :

(1)  Dans le cas où il est convaincu, sur preuve présentée par une personne ou quiconque de sa part, qu’à la date à laquelle une demande de prestation a été faite, la personne n’avait pas la capacité de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande de prestation, le ministre peut réputer la demande faite au cours du mois précédant le premier mois au cours duquel le versement de la prestation en question aurait pu commencer ou, s’il est postérieur, le mois au cours duquel, selon le ministre, la dernière période pertinente d’incapacité de la personne a commencé.

[…]

(3) Pour l’application des paragraphes (1) et (2), une période d’incapacité est continue, sous réserve des règlements.

Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (LMEDS)

[14] Conformément au paragraphe 58(1) de la LMEDS, les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[15] Le paragraphe 59(1) de la LMEDS prévoit que la division d’appel peut rejeter l’appel, rendre la décision que la division générale aurait dû rendre, renvoyer l’affaire à la division générale pour réexamen conformément aux directives qu’elle juge indiquées, ou confirmer, infirmer ou modifier totalement ou partiellement la décision de la division générale.

Question en litige

[16] La division générale a-t-elle omis d’observer un principe de justice naturelle en rejetant les rapports de spécialistes pour la simple raison qu’ils ont été demandés par le représentant légal de l’appelante?

Observations

[17] Dans sa demande de permission d’en appeler, le représentant a soutenu que la division générale avait fondé sa décision sur plusieurs conclusions de fait erronées qui portaient sur les capacités cognitives de sa mère. La déclaration d’incapacité provenant du médecin de la demanderesse [sic] traitait directement des préoccupations de la division générale au sujet de sa capacité à former ou à exprimer l’intention de présenter une demande de prestations de SRG en temps opportun, comme on le mentionne aux paragraphes 30 à 33 de la décision. Au paragraphe 32 de sa décision, la division générale a écrit ce qui suit :

De plus, le Tribunal souligne que la preuve laisse entendre que l’appelante a fait preuve d’un fonctionnement cognitif au cours de la période en litige. Par exemple, le représentant de l’appelante a déclaré que l’appelante a trouvé le document de procuration en raison du fait que la résidence de soins familiaux en aurait besoin pour ses dossiers. Une copie du document a été ensuite envoyée au représentant de l’appelante, ce qui démontre une certaine compréhension de la nature du document et de la nécessité pour le fils de l’appelante d’en avoir une copie.

[18] Le représentant soutient que ce passage ne reflète pas fidèlement ce qu’il a décrit [traduction] « d’une manière générale » au cours de l’audience. En fait, ce n’est pas la demanderesse [sic] seule, mais celle-ci et le travailleur en soins de la famille qui ont cherché ensemble, à la demande du représentant, pour retrouver le document de procuration. Le besoin de vérification n’a été invoqué que plus tard, soit en août 2013. La découverte du document n’a pas démontré des capacités cognitives, comme le laissait entendre la division générale. De plus, une fois le document retrouvé, l’appelante n’a pas envoyé le document au représentant, puisqu’elle était incapable d’effectuer une telle tâche.

[19] Puis, le paragraphe 32 de la décision ne reflète pas les opérations réelles de la maison de soins de la demanderesse [sic] :

De plus, et probablement plus important encore, le représentant de l’appelante a déclaré que la procuration n’a pas été présentée à la résidence de soins familiaux lorsque l’appelante a été admise en juin 2003, ce qui laisse entendre que la résidence de soins familiaux ne jugeait pas nécessaire que l’appelante ait un procureur pour prendre les décisions à sa place, comme des décisions concernant le consentement à des traitements/examens médicaux ou des décisions de nature financière.

[20] Le représentant fait valoir que les procédures et les politiques de la maison de soins exigeaient en fait que le document de procuration soit conservé dans les dossiers. La demande n’avait pas été faite au moment de l’admission simplement en raison d’un oubli de la part de l’opérateur, et ce n’est que lors d’une vérification effectuée par les services de santé de l’Alberta que l’oubli a été remarqué. À cette époque, l’opérateur n’avait pas d’expérience en ce qui concerne les documents officiels exigés par le programme, mais il a corrigé les lacunes peu de temps après les avoir identifiées en 2013. De même, le paragraphe 32 ne reflète pas correctement la façon dont les questions financières de la demanderesse [sic] ont été gérées :

Finalement, le fait que le représentant de l’appelante n’était pas au courant jusqu’à un moment donné dans la première moitié de 2011 que les prestations de l’appelante n’avaient pas été rétablies est révélateur du fait que l’appelante ne dépend pas de son procureur pour gérer ses affaires financières.

[21] Le représentant affirme que les affaires financières de la demanderesse [sic] sont en réalité simples, car les versements et les paiements de factures sont automatisés et périodiques. Les exceptions étaient gérées avec le soutien de membres de la famille locaux, d’amis de confiance et de travailleurs agréés en santé. Le fait que sa procuration n’ait peut-être pas été utilisée n’indique pas que la demanderesse [sic] possédait un plus haut niveau de capacités cognitives, comme le suggéraient les commentaires de la division générale. Une telle situation démontre plutôt que son entourage lui venant en aide était digne de confiance et faisait preuve de minutie de manière constante.

[22] À la suite d’une enquête approfondie, l’intimé a reconnu l’incapacité de la demanderesse [sic], un fait qui a été reconnu par la division générale au paragraphe 19 de sa décision. Cette reconnaissance concorde également avec les éléments de preuve, y compris la déclaration d’incapacité selon laquelle la demanderesse [sic] n’était pas capable de former ou d’exprimer l’intention de présenter une demande. Puisqu’aucune des deux parties ne conteste cette question, celle-ci ne devrait pas être utilisée pour justifier le refus d’accorder les prestations à la demanderesse [sic].

[23] Le représentant soutient qu’il s’agit de manquements répétés de la part de diverses entités gouvernementales sur plus d’une décennie, et qu’ils ont mené au refus d’accorder un SRG à sa mère qui, indépendamment de sa volonté, a perdu ses capacités et était incapable de former ou d’exprimer l’intention de présenter une demande de prestations. Quand le représentant a essayé de faire entendre raison aux agents du bureau de la SV d’Edmonton, les deux agents ont tenté de justifier le refus de paiement en blâmant le représentant, soutenant qu’il avait la responsabilité de veiller au bien-être de sa mère. En agissant de la sorte, ils n’ont pas voulu admettre qu’ils étaient responsables d’avoir omis de communiquer avec la demanderesse [sic], malgré le fait qu’ils possédaient toutes les informations nécessaires pour le faire, et ils n’ont pas voulu reconnaître les erreurs aux registres qui les ont menés à omettre d’effectuer un suivi auprès du représentant. Bien que la division générale ait expressément rejeté le raisonnement de l’intimé en ce qui a trait à cette question (au paragraphe 29), elle a rejeté l’appel principalement parce qu’un formulaire désuet avait été fourni par Service Canada (au paragraphe 30). Il en a été ainsi malgré la diligence raisonnable du représentant – lorsqu’il s’est inquiété du fait que le formulaire n’était pas celui qu’il avait demandé, Service Canada lui a néanmoins confirmé qu’il s’agissait du bon formulaire à utiliser.

[24] Comme souligné, l’intimé a convenu que le traitement de l’appel par la division générale justifie une nouvelle audience sur le fond relativement à la demande de l’appelante pour une rétroactivité majorée de SRG.

Analyse

[25] L’appel du représentant porte sur deux formulaires qui provenaient de l’intimé et qui ont tous deux été remplis par le Dr Eugene Cahill, un omnipraticien qui a évalué la demanderesse [sic] : un certificat d’incapacité daté du 15 juin 2015 et une déclaration d’incapacité datée du 13 novembre 2015. Comme il a été indiqué dans sa décision, la division générale a exprimé sa préoccupation par rapport à l’absence de rapports médicaux à l’appui d’un argument d’incapacité présenté lors de l’audience orale du 28 mai 2015, et a donné l’occasion au représentant de recueillir davantage d’éléments de preuve, suggérant précisément qu’il obtienne une déclaration d’incapacité. Dans le délai de 30 jours, le représentant a fourni un certificat d’incapacité, puis la division générale a rendu sa décision, laquelle rejetait l’appel en partie parce que le « mauvais » formulaire avait été utilisé. Après que la décision de la division générale ait été rendue, le représentant a présenté des demandes identiques : l’une à la division générale pour annuler ou modifier sa décision en fonction de faits nouveaux, l’autre à la division d’appel pour demander la permission d’interjeter appel.

[26] Bien que le représentant soutienne que la déclaration d’incapacité traitait directement des préoccupations de la division générale au sujet de la capacité de sa mère de « former ou d’exprimer l’intention » de présenter une demande de SRG, il s’agit néanmoins d’un fait qui a été préparé et soumis uniquement après que la décision ait été rendue. L’on ne peut pas reprocher à la division générale de ne pas avoir tenu compte d’éléments de preuve qui ne lui ont pas été présentés parce que ceux-ci n’existaient pas.

[27] Cependant, je suis convaincu que la division générale a omis d’observer un principe de justice naturelle lorsqu’elle a avisé le représentant de recueillir des éléments de preuve spécifiques à la période suivant l’audience. Comme l’a expliqué le représentant lors de l’audience, la lettre datant du 20 juin 2012 l’a mené à croire que l’intimé admettait que sa mère était atteinte d’une incapacité, et par conséquent, il ne voyait pas la nécessité de recueillir des éléments de preuve médicale. La division générale a tenu compte de ce point, mais a rejeté l’argument de l’intimé selon lequel la division générale ne devait à la demanderesse [sic] aucun paiement rétroactif de SRG additionnel, puisque c’était le devoir du représentant de gérer ses affaires. La division générale a jugé que la capacité actuelle de la demanderesse [sic], peu importe si elle avait donné une procuration, était la réelle question en litige et a donné au représentant l’occasion de compléter le dossier. Toutefois, elle a également indiqué avoir une notion très spécifique de ce qui constitue un élément de preuve d’incapacité en vertu de l’article 28.1 :

[4] [...] Le membre du Tribunal a accordé 30 jours au représentant de l’appelante afin qu’il puisse présenter une preuve médicale et il lui a expliqué que la preuve médicale versée à l’appui d’un argument relatif à l’incapacité comprend généralement une déclaration d’incapacité, formulaire disponible par l’intermédiaire de l’intimé qui établit le critère juridique concernant l’incapacité afin que le professionnel de la santé remplissant le formulaire connaisse le critère à propos duquel il est en train de formuler un commentaire.

[…]

[30] [...] La seule preuve médicale présentée à l’appui de l’argument relatif à l’incapacité est le certificat d’incapacité qui a été rempli par le Dr Cahill. Malheureusement, il semble que le représentant de l’appelante a peut-être demandé au Dr Cahill de remplir le mauvais formulaire. Le formulaire pertinent relativement à un argument d’incapacité au titre de l’article 28.1 de la Loi sur la SV est la déclaration d’incapacité, et non un certificat d’incapacité.

[28] Bien que la division générale ait pris bonne note du fait que « l’absence d’un formulaire de déclaration d’incapacité en soi n’empêche pas de conclure qu’une personne souffre d’une incapacité », il ressort clairement de sa décision que l’omission du représentant de soumettre le « bon » formulaire nuit lourdement au cas de sa mère :

[32] Le Tribunal n’a aucune preuve médicale démontrant que l’appelante respecte le critère relatif à l’incapacité selon la définition fournie au paragraphe 28.1 de la Loi sur la SV. Autrement dit, la preuve médicale qui a été présentée au Tribunal n’aborde pas la question de savoir si l’appelante était incapable de former ou d’exprimer l’intention de présenter une demande.

[29] En l’espèce, la division générale semblait suggérer qu’elle accorderait peu d’importance ou aucune importance à tout élément de preuve médicale qui ne refléterait pas le libellé de l’article 28.1. Si le juge des faits a le pouvoir d’examiner la preuve comme il l’entend, la division générale s’en est tenue à une obligation d’équité plus élevée quand elle a informé le représentant qu’elle s’attendait à voir un formulaire précis. Au moment de la réception du « mauvais » formulaire, la division générale avait l’obligation morale de demander au représentant de fournir une explication ou même de lui donner plus de temps pour se procurer le « bon » formulaire, d’autant plus qu’on voit bien que l’intimé avait créé deux formulaires dont les titres sont très similaires et qui semblent servir des objectifs similaires. Mon raisonnement a aussi été influencé par une indication que le représentant, lequel ne semble pas connaître d’une manière approfondie les différents critères d’une incapacité, aurait possiblement été mal orienté par le personnel de Service Canada.

[30] Finalement, comme j’ai jugé que la division générale avait omis d’observer un principe de justice naturelle, il ne m’est pas requis de déterminer si elle a mal interprété les observations du représentant portant sur la capacité cognitive de l’appelante en tant que résidente d’une maison de soins de longue durée et si la preuve démontrait que l’appelante était capable de chercher sa procuration sans aide.

Conclusion

[31] Pour les motifs exposés précédemment, l’appel est accueilli.

[32] L’article 59 de la LMEDS énonce la réparation que la division d’appel peut accorder pour un appel. Pour prévenir toute crainte de partialité, il convient en l’espèce de renvoyer l’affaire à la division générale pour qu’une audience de novo soit tenue devant un membre différent de la division générale. J’avise également le Tribunal de supprimer du dossier la décision de la division générale datée du 25 août 2015.

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