Sécurité de la vieillesse (SV) et Supplément de revenu garanti (SRG)

Informations sur la décision

Contenu de la décision



Motifs et décision

Introduction

[1] L’appelant a présenté une demande de pension de la Sécurité de la vieillesse (SV) en novembre 2014 et l’intimé a approuvé sa demande pour qu’elle prenne effet en décembre 2013. L’appelant a présenté une demande de révision. Dans une lettre datée du 22 juin 2015, l’intimé l’a informé du maintien de sa décision initiale.

[2] L’appelant avait déjà présenté une demande de pension de la SV en mars 2011, et l’intimé lui avait demandé de fournir d’autres documents à l’appui de sa demande. Puisqu’il n’avait pas reçu les documents demandés, l’intimé a avisé l’appelant que le traitement de son dossier avait été interrompu et qu’il devrait présenter une nouvelle demande pour recevoir une pension de la SV. L’appelant n’a pas demandé de révision de cette décision.

[3] L’appelant a interjeté appel devant la division générale du Tribunal de la sécurité sociale du Canada (Tribunal) en juillet 2015. Il a demandé au Tribunal d’accueillir son appel parce qu’il avait présenté une première demande de pension de la SV en mars 2011, et il a demandé un paiement rétroactif en fonction de sa première demande.

[4] Le 31 mai 2016, la division générale a rejeté l’appel sommairement selon le motif que l’appelant avait reçu le paiement rétroactif maximum autorisé par la Loi sur la SV.

[5] L’appelant a déposé une demande de permission d’en appeler devant la division d’appel du Tribunal le 30 juin 2016. Ses motifs d’appel peuvent être résumés comme suit :

  1. Il a présenté une demande de pension de la SV en mars 2011 et a reçu l’instruction de fournir certains documents et renseignements.
  2. Il a fourni tous les documents et renseignements dont il disposait.
  3. Le traitement de cette demande a été interrompu en raison d’un manque de renseignements, il a demandé à ce que son traitement recommence, mais cette demande a été refusée, alors il a dû présenter une nouvelle demande.
  4. Il est injuste que la date de sa première demande ait été ignorée.
  5. Il est admissible aux prestations depuis l’âge de 65 ans, à compter de mars 2011.

[6] L’intimé n’a pas présenté d’observations à la division d’appel.

[7] Cet appel a été tranché sur la foi du dossier pour les motifs suivants :

  1. La question faisant l’objet de l’appel n’était pas complexe;
  2. Le membre de la division d’appel avait déterminé qu’il n’était pas nécessaire de tenir une autre audience;
  3. L’exigence du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale selon laquelle l’instance doit se dérouler de la manière la plus informelle et expéditive que les circonstances, l’équité et la justice naturelle permettent.

Question en litige

[8] La division d’appel doit décider si elle devrait rejeter l’appel, rendre la décision que la division générale aurait dû rendre, renvoyer l’affaire à la division générale, confirmer, infirmer ou modifier la décision rendue par la division générale.

Droit applicable et analyse

[9] L’appelant interjette appel de la décision de la division générale datée du 1er mai 2016 de rejeter sommairement son appel selon le motif qu’elle était convaincue qu’il n’avait aucune chance raisonnable de succès.

[10] Aucune permission d’en appeler n’est requise dans le cas des appels interjetés au titre du paragraphe 53(3) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (LMEDS), car un rejet sommaire de la part de la division générale peut faire l’objet d’un appel de plein droit. Comme il a été établi qu’il n’est pas nécessaire de tenir une autre audience, cet appel à la division d’appel sera instruit aux termes de l’alinéa 37a) du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale.

[11] Aux termes du paragraphe 58(1) de la LMEDS, les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[12] Les dispositions pertinentes sont les paragraphes 8(1) et 8(2) de la Loi sur la SV et le paragraphe 5(2) du Règlement sur la SV :

Critère juridique relatif aux rejets sommaires

[13] Le paragraphe 53(1) de la LMEDS permet à la division générale de rejeter sommairement un appel si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

[14] Selon le paragraphe 59(1) de la LMEDS, la division d’appel peut rejeter l’appel, rendre la décision que la division générale aurait dû rendre, renvoyer l’affaire à la division générale pour réexamen conformément aux directives qu’elle juge indiquées, ou confirmer, infirmer ou modifier totalement ou partiellement la décision de la division d’appel.

[15] En l’espèce, la division générale a correctement énoncé la disposition législative applicable pour justifier un rejet sommaire de l’appel en citant le paragraphe 53(1) de la LMEDS au paragraphe 3 de sa décision.

[16] Toutefois, il n’est pas suffisant de reprendre le libellé du paragraphe 53(1) de la LMEDS traitant des rejets sommaires si l’on n’applique pas cette disposition comme il se doit. Après avoir établi le fondement législatif, la division générale doit aussi préciser le critère juridique applicable puis appliquer le droit aux faits.

[17] La division générale a demandé si l’appel devrait être rejeté sommairement au paragraphe 2 de sa décision.

[18] Dans sa décision, la division générale n’indique pas le critère juridique qu’elle a appliqué pour conclure qu’il convenait de rejeter l’appel de façon sommaire.

La décision de la division générale

[19] Bien que la division générale n’ait pas énoncé le critère juridique qu’elle a appliqué, elle a cependant expliqué ce sur quoi elle s’est fondée pour rejeter l’appel de façon sommaire :

[15] Le droit d’interjeter appel devant le Tribunal d’une décision rendue conformément à la Loi sur la SV doit être accordé expressément par la loi. Le Tribunal ne peut entendre un appel que lorsqu’une demande de révision est présentée et suivie d’une décision découlant de la révision rendue en vertu de l’article 27.1 de la Loi sur la SV (Canada (Procureur Général) c. Bannerman, 2003 CFPI 208).

[16] Il semble que l’appelant n’ait pas présenté de demande de révision de la décision d’avril 2012 d’interrompre le traitement de sa demande de mars 2011. Une telle demande aurait dû être présentée à l’intimé dans un délai de 90 jours. Le dossier ne contient aucune demande de révision associée à une telle demande. Le Tribunal n’a pas la compétence requise pour examiner les mesures prises par l’intimé pour annuler la demande de mars 2011.

[17] La décision découlant de la révision qui a été déposée au Tribunal est datée du 22 juin 2015 et porte sur la demande présentée par l’appelant en novembre 2014. La seule question à trancher est celle visant à déterminer si l’appel de l’appelant portant sur la date d’entrée en vigueur des paiements à la suite de l’approbation accordée en novembre 2014 a une chance raisonnable de succès.

[18] La Loi sur la SV établit les dates d’entrée en vigueur pour l’approbation des demandes de pension de la SV, comme il a été décrit plus haut. Ces dates s’appliquent à la situation de l’appelant comme suit :

  1. a) Un an avant le jour où la demande de l’appelant a été reçue, c’est-à-dire le 5 novembre 2013.
  2. b) Le jour où l’appelant a eu 65 ans, c’est-à-dire le 21 mars 2011.
  3. c) Le jour où l’appelant est devenu admissible à la pension conformément à la Loi sur la SV, c’est-à-dire le 21 mars 2011.
  4. d) L’appelant a précisé par écrit qu’il souhaitait que sa pension entre en vigueur dès qu’il y est devenu admissible, en mars 2011.

[19] La dernière de ces dates est le 5 novembre 2013. Conformément au paragraphe 8(2) de la Loi sur la SV et au paragraphe 5(2) du Règlement, la date d’entrée en vigueur de l’approbation de la demande de l’appelant est le 5 novembre 2013.

[20] Conformément au paragraphe 8(1) de la Loi sur la SV, le paiement de la pension a commencé en décembre 2013, le mois suivant celui où la demande a été réputée approuvée.

[21] L’appelant a reçu les paiements rétroactifs maximums autorisés par la Loi sur la SV.

[22] Le Tribunal a été conçu par la législation et, en tant que tel, il n’a que les pouvoirs qui lui ont été conférés par la loi. Le Tribunal interprète et applique les dispositions telles qu’elles sont énoncées dans la Loi sur la SV. Le Tribunal ne peut appliquer les principes d’équité ou tenir compte de circonstances atténuantes, incluant toute circonstance présentée par l’appelant, pour accorder une plus grande rétroactivité de la pension de la SV que celle qui est prévue par la Loi sur la SV.

[23] Par conséquent, le Tribunal estime que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

[20] Puisque le membre de la division générale n’a pas précisé le critère juridique applicable aux rejets sommaires et n’a pas appliqué ce critère aux faits de l’affaire, la décision de la division générale est fondée sur une erreur de droit.

[21] Le critère juridique applicable aux rejets sommaires est la première question à laquelle il faut répondre. La question suivante serait celle visant à déterminer si une erreur de droit (ou un autre type d’erreur) a été commise dans la décision rendue par l’intimé sur les questions précises.

[22] En raison de l’erreur de droit commise par la division générale portant sur la question préliminaire du critère juridique applicable aux rejets sommaires, la division d’appel doit faire sa propre analyse et déterminer si elle doit rejeter l’appel, rendre la décision que la division générale aurait dû rendre, renvoyer l’affaire à la division générale, confirmer, infirmer ou modifier la décision : Housen c. Nikolaisen, [2002] RCS 235, 2002 CSC 33 au paragraphe 8, et paragraphe 59(1) de la LMEDS.

Critère juridique à appliquer pour un rejet sommaire

[23] Bien que la division générale ait erré en n’indiquant pas et en n’appliquant pas le critère juridique applicable, les paragraphes 15 à 22 de la décision rendue par la division générale sont corrects, et j’accepte les conclusions qui y sont présentées.

[24] L’appelant conteste les notions présentées au paragraphe 10 de la décision rendue par la division générale, qui touchent les conclusions tirées au paragraphe 16. Il soutient que l’intimé ne lui a jamais dit qu’il cesserait le traitement de la demande de 2011 ou qu’il avait 90 jours pour présenter une demande de révision de cette décision. Cependant, la lettre de décision d’avril 2012 explique que l’intimé avait cessé l’examen de son dossier et que l’appelant disposait de 90 jours pour demander une révision de la décision (GD2-60).

[25] Bien que l’expression « aucune chance raisonnable de succès » n’ait pas été définie davantage dans la LMEDS aux fins de l’interprétation du paragraphe 53(1) de cette loi, c’est une notion qui est utilisée dans d’autres domaines du droit et qui a fait l’objet de décisions antérieures de la division d’appel.

[26] Il semble se dégager trois tendances des décisions antérieures de la division d’appel à l’égard des appels relatifs à des rejets sommaires prononcés par la division générale :

  1. a) J. S. c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2015 TSSDA 715, C. D. c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2015 TSSDA 594, M. C. c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2015 TSSDA 237, J. C. c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2015 TSSDA 596. Le critère juridique suivant a été appliqué : Est-il évident et manifeste, sur la foi du dossier, que l’appel est voué à l’échec, peu importe les éléments de preuve ou les arguments qui pourraient être produits à l’audience? Ce critère est énoncé dans les arrêts de la Cour d’appel fédérale Lessard-Gauvin c. Canada (PG), CAF 147, Sellathurai c. Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile), 2011 CAF 1, et Breslaw c. Canada (PG), 2004 CAF 264.
  2. b) AD-15-236 (C. S. c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2015 TSSDA 974), AD-15-297 (A. P. c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2015 TSSDA 973) et AD-15-401 (A. A. c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2015 TSSDA 1178). Dans ces décisions, la division d’appel s’est demandée s’il y avait une « question donnant matière à procès » et s’il y avait un fondement quelconque à la demande en qualifiant les causes d’« absolument sans espoir » et de « faibles » pour déterminer s’il était approprié de rejeter l’appel de façon sommaire. Dès qu’il existe un fondement factuel suffisant à l’appui de l’appel et que le résultat n’est pas « manifestement clair », il n’est pas opportun de rendre une décision de rejet sommaire. Une cause faible n’appellerait pas de décision sommaire puisqu’elle comporte nécessairement l’évaluation du fond du litige et l’examen et l’appréciation des éléments de preuve.
  3. c) AD-15-216 (K. B. c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2015 TSSDA 929). Dans cette décision, la division d’appel n’a pas formulé de critère juridique précis et a seulement invoqué le paragraphe 53(1) de la LMEDS.

[27] J’estime que l’application des deux critères que j’ai énoncés aux paragraphes 26a) et 26b) de la présente décision mène au même résultat en l’espèce, à savoir que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès. Il est évident et manifeste à la lecture du dossier que l’appel est voué à l’échec, peu importe les éléments de preuve ou arguments qui pourraient être présentés lors d’une audience. Il est également évident qu’il ne s’agit pas ici d’une affaire au fondement « faible », mais bien d’une affaire « sans aucun espoir » de succès, une évaluation du bien-fondé de l’affaire ou un examen de la preuve n’étant pas requis en l’espèce.

[28] Ni la division générale ni la division d’appel du Tribunal ne peut entendre un appel, à l’exception des circonstances où une demande de révision a été présentée suivie d’une décision découlant de la révision, peu importe les circonstances.

[29] Le principal argument de l’appelant est qu’il est injuste que le traitement de la demande de pension de la SV qu’il a présentée en 2011 ait cessé et qu’il ait dû en présenter une nouvelle en 2014 parce que l’intimé a refusé de reprendre le traitement de la demande présentée en 2011. Malheureusement, l’appelant n’a pas demandé de révision de la décision d’arrêter le traitement de cette demande. Il a été avisé de cette décision par l’entremise d’une lettre le 23 avril 2012, et cette lettre précisait que, s’il contestait la décision, il avait 90 jours pour demander une révision. La division générale a conclu qu’il ne cherchait pas de révision de la décision d’avril 2012. En effet, aucune demande de révision de cette décision n’a été déposée au dossier.

[30] La seule demande de révision que la division générale pourrait examiner est une demande relative à la demande présentée par l’appelant en 2014.

[31] Les dispositions pertinentes sont les paragraphes 8(1) et 8(2) de la Loi sur la SV et le paragraphe 5(2) du Règlement sur la SV :

[32] L’appelant a reçu les paiements rétroactifs maximums autorisés par la Loi sur la SV.

[33] Après avoir examiné l’avis d’appel de l’appelant et ses observations, le dossier de la division générale, la décision rendue par la division générale ainsi que les décisions précédentes rendues par la division d’appel relatives aux rejets sommaires, et après avoir appliqué le critère juridique pertinent aux rejets sommaires, je rejette l’appel

Conclusion

[34] L’appel est rejeté.

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