Sécurité de la vieillesse (SV) et Supplément de revenu garanti (SRG)

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Motifs et décision

Introduction

[1] L'appelante a présenté une demande de pension de la Sécurité de la vieillesse (SV) en novembre 2012. Elle a atteint l'âge de 65 en avril 2011 et elle a seulement présenté une demande de pension en novembre 2012 parce qu'elle avait mal compris les règles concernant les demandes de pension de la SV.

[2] L'intimé a approuvé la pension à partir de novembre 2011 le début des versements en décembre 2011.

[3] L’appelante a présenté une demande de révision de la décision de l'intimé. L'intimé a informé l'appelante, au moyen d'une lettre datée du 26 juillet 2013, qu'elle maintenait sa décision originale de refuser des versements rétroactifs supplémentaires au-delà d'une période de 11 mois. La décision découlant de la révision faisait état, entre autres, que le [traduction] « versement de prestations rétroactives de la Sécurité de la vieillesse (SV) peut être fait au plus 11 mois à partir de la date où la demande a été reçue [...] ».

[4] L’appelante a interjeté appel devant la division générale du Tribunal de la sécurité sociale du Canada en octobre 2013. Elle a demandé que le Tribunal accueille l'appel parce qu'elle ne savait pas qu'elle pouvait toucher une pension de la SV alors qu'elle travaillait encore et qu'elle a présenté une demande de pension seulement lorsque son ami l'a informé qu'elle pouvait toucher ces prestations.

[5] Le 17 février 2016, la division générale a rejeté l'appel de façon sommaire au motif que l'appelante avait reçu la rétroactivité maximale autorisée par la Loi sur la sécurité de la vieillesse (Loi sur la SV) et que le [traduction] « Tribunal ne peut pas appliquer les principes d'équité ou tenir compte de circonstances atténuantes, comme un malentendu ou des difficultés financières, pour accorder une rétroactivité supérieure à ce qui est prévu par la Loi sur la SV ».

[6] L'appelante a présenté une lettre le 20 octobre 2016 dans laquelle elle déclare souhaiter interjeter appel de la décision de la division générale. Le Tribunal a traité ce document comme étant un avis d'appel incomplet devant la division d'appel du Tribunal. Au moyen d'une lettre datée du 28 octobre 2016, le Tribunal a précisé les renseignements requis afin de compléter l'avis d'appel.

[7] L'appelante a répondu au moyen d'une lettre reçue par le Tribunal le 3 novembre 2016, accompagnée d'une copie de la décision de la division générale et d'un affidavit faisant état de ses motifs d'appel. L'appelante a également présenté une lettre reçue le 9 décembre 2016 qui fait état de motifs d'appel supplémentaires.

[8] Les motifs d’appel de l'appelante peuvent être résumés de la façon suivante :

  1. elle travaillait comme cuisinière et elle était peu familière avec la procédure pour présenter une demande de pension de la SV;
  2. elle a été informée à tort par des collègues qu'elle ne pouvait pas présenter une demande pour cette pension alors qu'elle travaillait;
  3. il s'est écoulé 17 mois avant qu'elle se rende compte qu'elle pouvait présenter une demande;
  4. sa demande de pension a été approuvée, mais elle a seulement reçu des paiements rétroactifs pour une période de 11 mois;
  5. elle n'a rien reçu de la part de l'intimé pour l'informer qu'elle était admissible à une pension de la SV à l'âge de 65 ans;
  6. la perte de six mois de pension lui cause de grandes difficultés;
  7. la division générale a commis des erreurs prévues au paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l'Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS).

[9] L’intimé n’a pas présenté d’observations à la division d’appel. Ses observations devant la division générale figurent dans le dossier d'appel et comprennent les arguments suivants :

  1. la Loi sur la SV prévu une période maximale d'un an relativement aux versements rétroactifs;
  2. la demanderesse a présenté une demande de pension de la SV le 23 novembre 2012, et, par conséquent, conformément à l'alinéa 8(2)a) de la Loi sur la SV, la date la plus antérieure à laquelle la demande pouvait être approuvée était un an avant la date où la demande a été présentée, à savoir le 23 novembre 2011;
  3. la date la plus antérieure de prise d'effet du versement était décembre 2011, soit le mois suivant la date d'approbation conformément au paragraphe 8(1) de la Loi sur la SV.

[10] L'appel a été instruit sur la foi du dossier pour les motifs suivants :

  1. le membre de la division d’appel a jugé qu’il n’était pas nécessaire de tenir une autre audience;
  2. l’exigence du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale selon laquelle l’instance doit se dérouler de la manière la plus informelle et expéditive que les circonstances, l’équité et la justice naturelle permettent.

Question en litige

[11] La division d'appel doit décider si elle devrait rejeter l’appel, rendre la décision que la division générale aurait dû rendre, renvoyer l’affaire à la division générale, confirmer, infirmer ou modifier la décision.

Droit applicable et analyse

[12] L’appelante interjette appel d’une décision datée du 17 février 2016 dans laquelle la division générale a rejeté l'appel de façon sommaire au motif qu'elle était convaincue que l'appel n'avait aucune chance raisonnable de succès.

[13] Aucune permission d’en appeler n’est requise dans le cas des appels interjetés au titre du paragraphe 53(3) de la Loi sur le MEDS, car un rejet sommaire de la part de la division générale peut faire l’objet d’un appel de plein droit. Comme il n’est pas nécessaire de tenir une autre audience, cet appel dont est saisie la division d’appel sera instruit conformément à l’alinéa 37a) du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale.

[14] Aux termes du paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS, les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[15] Les dispositions pertinentes concernant la SV sont les paragraphes 5(1), 8(1) et 8(2) de la Loi sur la SV et le paragraphe 5(2) du Règlement sur la sécurité de la vieillesse (Règlement sur la SV).

Critère juridique relatif au rejet sommaire

[16] Le paragraphe 53(1) de la Loi sur le MEDS permet à la division générale de rejeter sommairement un appel si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

[17] Selon le paragraphe 59(1) de la Loi sur le MEDS, la division d’appel peut rejeter l’appel, rendre la décision que la division générale aurait dû rendre, renvoyer l’affaire à la division générale pour réexamen conformément aux directives qu’elle juge indiquées, ou confirmer, infirmer ou modifier totalement ou partiellement la décision de la division générale.

[18] En l’espèce, la division générale a énoncé la disposition législative applicable pour justifier un rejet sommaire de l’appel en invoquant, au paragraphe 3 de sa décision, le paragraphe 53(1) de la Loi sur le MEDS.

[19] Toutefois, il n’est pas suffisant de citer le libellé du paragraphe 53(1) de la Loi sur le MEDS traitant des rejets sommaires si l’on n’applique pas cette disposition comme il se doit. Après avoir établi le fondement législatif, la division générale doit aussi préciser le critère juridique applicable, puis appliquer le droit aux faits.

[20] Au paragraphe 2 de sa décision, la division générale a demandé [traduction] « si l'appel devrait être rejeté de façon sommaire ».

[21] Dans sa décision, la division générale ne précise pas le critère juridique qu’elle a appliqué pour conclure qu’il convenait de rejeter l’appel de façon sommaire.

Décision de la division générale

[22] Bien que la division générale n’ait pas énoncé le critère juridique qu’elle a appliqué, elle a cependant expliqué ce sur quoi elle s’est fondée pour rejeter l’appel de façon sommaire :

[13] La Loi sur la SV établit les limites relatives au versement de la pension, comme il est décrit ci-dessus. Ces dates s’appliquent à la situation de l’appelante comme suit :

  1. a) un an avant le jour où la demande de l’appelante a été reçue, c’est-à-dire le 23 novembre 2011;
  2. b) le jour où l’appelante a eu 65 ans, c’est-à-dire le 13 avril 2011;
  3. c) le jour où l’appelante est devenue admissible à la pension conformément à la Loi sur la SV, c’est-à-dire le 13 avril 2011;
  4. d) l'appelante a précisé à l'écrit qu'elle souhaitait voir sa pension commencer à partir du moment où elle y était admissible; le mois précédant immédiatement son admissibilité était mars 2011.

[14] La dernière de ces dates est le 23 novembre 2011. Conformément au paragraphe 8(2) de la Loi sur la SV et au paragraphe 5(2) du Règlement sur la SV, la date d’entrée en vigueur de l’approbation de la demande de l’appelante était novembre 2011. Conformément au paragraphe 8(1) de la Loi sur la SV, le paiement de la pension a commencé en décembre 2011, soit le mois suivant celui où la demande a été réputée approuvée.

[15] L’appelante a reçu les paiements rétroactifs maximums autorisés par la Loi sur la SV.

[16] Le Tribunal a été conçu par la législation et, en tant que tel, il n’a que les pouvoirs qui lui ont été conférés par la loi. Le Tribunal interprète et applique les dispositions telles qu’elles sont énoncées dans le RPC. Il ne peut pas appliquer les principes d'équité ou tenir compte de circonstances atténuantes, comme un malentendu ou des difficultés financières, pour accorder une rétroactivité supérieure à celle prévue par la Loi sur la SV.

[17] Par conséquent, le Tribunal estime que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès

[23] Étant donné que le membre de la division générale n’a pas précisé le critère juridique applicable à un rejet sommaire et n’a pas appliqué ce critère aux faits de l’affaire, la décision de la division générale est fondée sur une erreur de droit.

[24] Le critère juridique applicable au rejet sommaire est la première question à laquelle il faut répondre. La question suivante serait celle visant à déterminer si une erreur de droit (ou un autre type d’erreur) a été commise dans la décision rendue par l’intimé sur les questions précises.

[25] En raison de l’erreur de droit commise par la division générale portant sur la question préliminaire du critère juridique applicable aux rejets sommaires, la division d’appel doit faire sa propre analyse et déterminer si elle doit rejeter l’appel, rendre la décision que la division générale aurait dû rendre, renvoyer l’affaire à la division générale, confirmer, infirmer ou modifier la décision : Housen c. Nikolaisen, [2002] RCS 235, 2002 CSC 33 au paragraphe 8, et paragraphe 59(1) de la Loi sur le MEDS.

Critère juridique à appliquer pour un rejet sommaire

[26] Même si la division générale a commis une erreur du fait qu’elle n’a ni précisé ni appliqué le critère juridique applicable, les paragraphes 13 à 16 de sa décision sont justes, et je suis d’accord avec les conclusions qui y figurent.

[27] L'appelante conteste le fait qu'elle n'a pas reçu six mois de pension de la SV. Elle a l'impression que cela lui est dû parce qu'elle est devenue admissible à l'âge de 65 ans.

[28] Bien que l’expression « aucune chance raisonnable de succès » n’ait pas été définie plus avant dans la Loi sur le MEDS aux fins de l’interprétation du paragraphe 53(1) de cette loi, il s'agit d'une notion qui est utilisée dans d’autres domaines du droit et qui a fait l’objet de décisions antérieures de la division d'appel.

[29] Il semble exister trois catégories de jurisprudence quant aux décisions précédemment rendues par la division d’appel relativement à des appels concernant des rejets sommaires par la division générale :

  1. J.S. c. Commission de l'assurance-emploi du Canada, 2015 TSSDA 715; C.D. c. Commission de l'assurance-emploi du Canada, 2015 TSSDA 594; M.C. c. Commission de l'assurance-emploi du Canada, 2015 TSSDA 237; J.C. c. Ministre de l'emploi et du Développement social, 2015 TSSDA 596. Le critère juridique suivant a été appliqué : Est-il évident et manifeste, sur la foi du dossier, que l’appel est voué à l’échec, peu importe les éléments de preuve ou les arguments qui pourraient être produits à l’audience? Ce critère est énoncé dans les arrêts de la Cour d’appel fédérale Lessard‑Gauvin c. Canada (Procureur général), CAF 147, Sellathurai c. Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2011 CAF 1, et Breslaw c. Canada (Procureur général), 2004 CAF 264.
  2. C.S. c. Ministre de l'Emploi et du Développement social, 2015 TSSDA 974; A.P. c. Ministre de l'Emploi et du Développement social, 2015 TSSDA 973; A.A. c. Ministre de l'Emploi et du Développement social, 2015 TSSDA 1178. Dans ces décisions, la division d’appel s’est demandée s’il y avait une « question donnant matière à procès » et s’il y avait un fondement quelconque à la demande en qualifiant les causes d’« absolument sans espoir » et de « faibles » pour déterminer s’il était approprié de rejeter l’appel de façon sommaire. Dès lors qu’il existe un fondement factuel suffisant à l’appui de l’appel et que le résultat n’est pas « manifestement clair », il n’est pas opportun de rendre une décision de rejet sommaire. Il ne conviendrait pas non plus de rejeter de façon sommaire un appel dont le fondement est faible, car un tel appel suppose forcément d’évaluer le fond de l’affaire, et d’examiner et d’apprécier la preuve produite.
  3. K.B. c. Ministre de l'Emploi et du Développement social, 2015 TSSDA 929. Dans cette décision, à l'exception de la citation du paragraphe 53(1) de la Loi sur le MEDS, la division d'appel n'a pas fait référence à un critère juridique.

[30] J’estime que l’application des deux critères que j’ai énoncés aux paragraphes 29 a) et b) de la présente décision mène au même résultat en l’espèce, à savoir que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès. Il est évident et manifeste, au vu du dossier, que l’appel est voué à l’échec, peu importe les éléments de preuve ou arguments qui pourraient être présentés lors d’une audience. Il est également évident qu’il ne s’agit pas ici d’une affaire au fondement « faible », mais bien d’une affaire « sans aucun espoir » de succès, une évaluation du bien-fondé de l’affaire ou un examen de la preuve n’étant pas requis en l’espèce.

[31] Ni la division générale ni la division d'appel du Tribunal ne peut modifier les dispositions législatives de la Loi sur la SV.

[32] Selon la Loi sur la SV, la période maximale pour les versements rétroactifs est d'un an. Aucune pension de la SV ne peut être approuvée à une date antérieure aux 12 mois précédant la date de réception de la demande, et le versement peut commencer au plus tôt le mois suivant la date de la demande.

[33] L'application des paragraphes 5(1), 8(1) et 8(2) de la Loi sur la SV et le paragraphe 5(2) du Règlement sur la SV sont déterminants dans le cadre de l'appel.

[34] L’appelante a reçu les paiements rétroactifs maximums autorisés par la Loi sur la SV.

[35] Après avoir examiné l’avis d’appel, les observations de l’appelante, la correspondance, les observations des parties, le dossier et la décision de la division générale, et les décisions précédemment rendues par la division d’appel relativement à des rejets sommaires, et après avoir appliqué le critère juridique applicable à un rejet sommaire, je rejette l'appel.

Conclusion

[36] L’appel est rejeté.

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