Sécurité de la vieillesse (SV) et Supplément de revenu garanti (SRG)

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Motifs et décision

Aperçu

[1] L’intimé a reçu les demandes de pension de la Sécurité de la vieillesse (SV) et de Supplément de revenu garanti (SRG) au titre de la Loi sur la sécurité de la vieillesse (Loi sur la SV) de l’appelant, et les a estampillées en date du 16 octobre 2013. L’intimé les a rejetées initialement et après révision. L’appelant a interjeté appel de la décision découlant de la révision devant le Tribunal de la sécurité sociale.

[2] Pour être admissible à une pension de la SV, l’appelant doit satisfaire aux exigences énoncées dans la Loi sur la SV. Plus précisément, l’appelant doit avoir accumulé suffisamment d’années de résidence au Canada après l’âge de 18 ans. Le calcul des années de résidence est déterminé en fonction des circonstances particulières rattachées au cas de l’appelant.

[3] Cet appel a été instruit par vidéoconférence pour les raisons suivantes :

  1. plus d’une partie assistera à l’audience;
  2. un service de vidéoconférence est situé à une distance raisonnable de la résidence de l’appelant;
  3. les questions en litige sont complexes;
  4. il manque de l’information au dossier ou il est nécessaire d’obtenir des clarifications;
  5. le mode d’audience est le plus approprié pour clarifier des éléments de preuve contradictoires;
  6. ce mode d’audience est conforme à l’exigence du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale selon laquelle l’instance doit se dérouler de la manière la plus informelle et expéditive que les circonstances, l’équité et la justice naturelle permettent.

[4] Les personnes suivantes ont participé à l’audience :

Appelant : A. D.

[5] Le Tribunal a tranché que l’appelant n’est pas admissible à une pension de la SV pour les motifs énoncés ci-après.

Questions préliminaires

[6] L’appelant a apporté ses anciens passeports avec lui à l’audience. À la demande du Tribunal, il a présenté des copies de ses passeports au centre de Service Canada où il a assisté à l’audience par vidéoconférence. Le Tribunal a reçu les copies, authentifiées par un membre du personnel de Service Canada, les a partagées aux parties à la page GD7 et a donné jusqu’au 16 juin 2017 à l’intimé pour répondre. L’intimé n’a toujours pas répondu.

Preuve

[7] L’appelant est âgé de 68 ans et il a immigré au Canada le 21 septembre 1959. Dans sa demande de pension de la SV reçue le 16 octobre 2013, il a mentionné qu’il était marié; qu’il souhaitait que le versement de sa pension débute dès qu’il y serait admissible; qu’il voulait présenter une demande de SRG si sa demande de pension de la SV était approuvée; et qu’il est légalement citoyen canadien. Il souligne qu’il a résidé au Canada de septembre 1959 à juin 1979, entrecoupé d’une absence de juin 1979 à septembre 1980 alors qu’il vivait en Italie; depuis septembre 1980, il a voyagé à plusieurs reprises de l’Italie au Canada.

Documentée

[8] Le relevé d’emploi de l’appelant et le relevé de ses cotisations officielles de Service Canada daté du 14 septembre 2016 démontrent que l’appelant a cotisé au Régime de pension du Canada (RPC) de 1967 à 1976. Il se situait en deçà du seuil minimum de gains assurables en 1973 et il était travailleur indépendant de 1974 à 1976 inclusivement. Il n’a pas cotisé au RPC depuis 1976. En 1976, ses revenus étaient plus de 50 % inférieurs à ceux de 1975 (GD2-169).

[9] L’appelant a rempli un questionnaire remis par l’intimé. Il y mentionne qu’il a cessé de cotiser au RPC en 1976 puisqu’il a alors entamé sa carrière de chauffeur de taxi indépendant. Il souligne qu’il ne remplit pas de déclaration de revenus au Canada (GD2-16-21).

[10] Le 4 novembre 2014, l’intimé a écrit à l’appelant pour lui rappeler qu’il n’avait toujours pas envoyé les documents demandés et qu’il n’avait pas fourni de réponses complètes au questionnaire qu’il a rempli (GD2-26).

[11] Le 23 décembre 2014, l’appelant a présenté une deuxième demande de prestations de la SV et de SRG. Il a modifié ses renseignements relatifs à sa résidence et à sa période d’absence du pays comparativement à sa première demande en inscrivant qu’il réside au Canada depuis septembre 1959; qu’il s’est absenté du pays de février 1979 à septembre 1980 alors qu’il vivait en Italie; et qu’il réside au Canada depuis septembre 1980 (GD2-28).

[12] L’appelant a présenté une copie de son historique de voyage de Douanes et immigration Canada, et son historique de voyage de l’aéroport Pearson listant toutes ses arrivées du 1er août 2000 au 28 octobre 2014. Son dossier mentionne les entrées suivantes au Canada :

  • Le 19 mai 2005;
  • Le 15 février 2009;
  • Le 4 décembre 2009;
  • Le 2 octobre 2013 (GD2-70).

[13] L’appelant a présenté des copies de plusieurs passeports expirés et de son passeport actuel délivré en son nom comme suit :

  • Du 2 mai 1984 au 2 mai 1989, passeport délivré à Rome. Le document mentionne que l’appelant est né le 10 octobre 1949 et porte une étampe démontrant qu’il a été délivré à l’ambassade canadienne à Rome le 2 mai 1984; il ne comporte pas d’étampe d’entrée ou de sortie; et il est inscrit que la résidence permanente de l’appelant est le X, X, X, Italie (GD7-2-14);
  • Du 29 avril 1992 au 29 avril 1997, passeport délivré à Rome. Le document mentionne que l’appelant est né le 10 octobre 1949 et ne comporte pas d’étampe d’entrée ou de sortie; et la section pour inscrire la résidence permanente de l’appelant est vide (GD7-72-84);
  • Le certificat de naissance délivré en Italie mentionne que l’appelant est né le 10 janvier 1949. Le document a été signé le 7 avril 2016 et porte une étampe officielle des enregistrements civils de X, en Italie (GD2-98);
  • Du 30 juin 1997 au 30 juin 2002, passeport délivré à Rome. Le document mentionne que l’appelant est né le 10 janvier 1949 et ne comporte pas d’étampe d’entrée ou de sortie; et la section pour inscrire la résidence permanente de l’appelant est vide (GD7-41-53);
  • Du 21 novembre 2002 au 21 novembre 2007, passeport délivré à Rome. Le document mentionne que l’appelant est né le 10 janvier 1949 et porte une étampe de sortie d’Italie du 19 mai 2005 et une d’entrée en Italie du 16 juin 2005; il ne comporte pas d’autre étampe d’entrée ou de sortie; et la section pour inscrire la résidence permanente de l’appelant est vide (GD7-29-39);
  • Du 16 juin 2008 au 16 juin 2013, passeport délivré à Rome. Le document mentionne que l’appelant est né le 10 janvier 1949, et il porte plusieurs étampes de sortie de l’Italie du 15 février 2009, d’entrée en Italie du 18 mai 2009, de sortie de l’Italie du 4 décembre 2009 et d’entrée en Italie du 13 décembre 2009; et la section pour inscrire la résidence permanente de l’appelant est vide (GD7-16-28);
  • Du 4 septembre 2013 au 4 septembre 2018, passeport délivré à Rome. Le document mentionne que l’appelant est né le 10 janvier 1949, et il porte des étampes de sortie de l’Italie du 1er mai 2016, d’entrée en Italie du 10 août 2016, d’entrée en Italie du 8 décembre 2016 et de sortie d’Italie du 8 février 2017; et la section pour inscrire la résidence permanente de l’appelant est vide (GD7-54-71).

[14] Le 24 décembre 2014, le ministère de la Citoyenneté et de l’Immigration a émis un avis de vérification du statut qui mentionne que l’appelant est devenu résident permanent au Canada le 21 septembre 1959 et citoyen canadien le 1er mai 1974 (GD2-36).

[15] Le 19 mai 2015, l’appelant a rempli un questionnaire énonçant ses dates de résidence au Canada et d’absence du pays. Il y mentionne qu’il a vécu au Canada de son 18e anniversaire jusqu’en 1992, à l’exception de février 1979 à septembre 1980 où il vivait en Italie; de 1992 à 1998 où il vivait en Italie; de 1998 à 2000 où il vivait au Canada; de 2000 à mai 2005 où il vivait en Italie; de mai 2005 à 2006 où il vivait au Canada; de 2006 à octobre 2013 où il vivait en Italie et d’octobre 2013 jusqu’à ce jour où il vivait au Canada (GD2-42).

[16] Le 17 août 2015, l’appelant a rempli un questionnaire énonçant ses dates de résidence au Canada et d’absence du pays. Il y mentionne qu’il a vécu en Italie de 1949 à 1959 et au Canada de 1959 jusqu’à ce jour (GD2-64).

[17] L’appelant a présenté une copie de l’entente résidentielle de locataire datée du 1er juin 2014 (GD2-52-58) et une copie du relevé de compte en banque de CIBC mentionnant que le compte a été ouvert le 19 juin 2014 (GD2-47-51).

[18] Le 19 décembre 2015, l’intimé a écrit à l’appelant pour lui demander de plus amples renseignements afin de traiter la demande de révision. L’intimé a envoyé une liste de documents requis et un nouveau questionnaire à remplir par l’appelant (GD2-71).

[19] Le 27 janvier 2016, l’appelant a rempli le questionnaire (GD2-76-78), et soumis une copie de sa carte d’assurance-santé de l’Ontario valide du 24 octobre 2015 au 10 janvier 2021 (GD2-81) et de son permis de conduire de l’Ontario qui s’expirait le 8 janvier 1982 (GD2-83-84).

Témoignage oral

[20] L’appelant a témoigné pendant l’audience. Il affirme qu’il est immigré au Canada le 21 septembre 1959 à 10 ans et il a commencé ses études à Toronto. Il mentionne qu’il a fréquenté trois écoles à Toronto avant de décrocher pour aller sur le marché du travail; il a fourni des détails sur les trois écoles, ainsi que les raisons pour lesquelles il a changé d’école, dont le fait que ses parents ont déménagé dans une nouvelle maison. Il a décroché son premier emploi au marché Kensington. Il a donné des détails de ses emplois, y compris les adresses de chacun d’eux jusqu’à ce qu’il commence à travailler comme chauffeur de taxi indépendant. Il explique qu’il était simplement chauffeur indépendant, jamais propriétaire d’un taxi.

[21] L’appelant fait valoir qu’il a visité l’Italie à l’été 1969 avec sa mère et son frère cadet, et c’est lors de ce voyage qu’il a rencontré sa femme. Il mentionne qu’il a voyagé en Italie chaque été pour la visiter jusqu’en 1973, voyage au cours duquel il a passé huit mois en Italie et où il s’est marié le 14 octobre 1973.

[22] L’appelant fait valoir qu’il n’a jamais détenu de passeport italien. Lorsque le membre du Tribunal lui a fait remarquer qu’il a uniquement obtenu sa citoyenneté canadienne le 1er mai 1974, et que par conséquent, il devait donc posséder un passeport pour voyager du Canada à l’Italie avant cette date, ce dernier mentionne qu’il était inclus dans le passeport de sa mère.

[23] L’appelant mentionne qu’il n’a pas contribué au RPC après 1976, car il était chauffeur de taxi indépendant jusqu’en 1979 et qu’il n’a pas travaillé depuis. Il souligne que sa femme n’aimait pas le climat glacial canadien et qu’elle est retournée en Italie. Il affirme qu’il a accompagné sa femme en Italie, puis qu’il est revenu sans jamais travailler. Il ignore quel était le statut d’immigration de sa femme au Canada. Il mentionne qu’elle pouvait entrer au Canada puisqu’ils se sont mariés en 1973 lorsqu’ils sont retournés au Canada après leur mariage. Il affirme qu’on a accordé à son épouse une permission d’entrer au pays à son arrivée à l’aéroport en provenance de l’Italie en 1973, et qu’elle n’a jamais présenté d’autre demande afin d’obtenir un statut d’immigration et obtenu de numéro d’assurance sociale.

[24] Lorsqu’interrogé à propos de son emploi de 1976 à 2013, l’appelant a mentionné qu’une fois qu’il a cessé de travailler comme chauffeur de taxi, il est allé vivre chez ses parents. Il affirme ceci : [traduction] « J’ai vécu avec mes parents pendant longtemps, des années. » Puis, il mentionne que son père est décédé en 1981. Il souligne que ses parents et ses frères et sœurs le soutenaient, et qu’il n’a jamais travaillé de nouveau puisqu’il était déprimé en ce sens qu’il se foutait de tout. Il mentionne que sa famille l’a soutenu au Canada de 1979 à 2013, et qu’il reçoit maintenant des prestations d’assurance sociale de l’Ontario; il paye donc une pension à son frère pour sa chambre et l’accueil. Il affirme que sa mère est décédée en 2009 et qu’il n’offre aucun soutien à son épouse ou à ces enfants.

[25] L’appelant mentionne qu’il a trois garçons, tous nés en Italie. Il se rappelle aisément des dates de naissance de ses enfants; l’aîné est né le 15 avril 1979, tandis que les jumeaux ont vu le jour le 4 juin 1986. Il souligne qu’il est allé vivre en Italie en 1992 et qu’il est retourné au Canada en 1998. Puis, il est retourné en 2000 pour célébrer le nouveau millénaire. En l’interrogeant davantage, on apprend qu’il est parti vivre en Italie de décembre 1999 à mai 2005. À son retour au Canada, il est resté jusqu’en 2006 avant de repartir en Italie jusqu’en octobre 2013, à l’exception de deux visites en 2009 alors que sa mère était malade et qu’elle est décédée. Il mentionne que son épouse est venue le visiter au Canada en 1999.

[26] L’appelant n’a pas été en mesure de répondre s’il se souvient avoir vécu avec sa famille en Italie alors que ses garçons grandissaient. Il mentionne qu’il ne peut pas se remémorer de ses enfants lorsqu’ils étaient enfants, ou d’avoir fait des activités avec eux lors de leur jeunesse, à l’exception de quelques visites occasionnelles à la plage. Il affirme s’être séparé de sa femme en 1990. Il souligne qu’en Italie, il vivait chez ses garçons puisqu’ils possèdent un appartement avec leur grand-mère. Puis, il mentionne qu’il a vécu avec sa femme et ses enfants de 1992 à 1998. Il ne peut se remémorer s’il vivait en Italie de 1980 à 1992, mais il consent que cela soit possible puisque ses jumeaux sont nés en juin 1986.

[27] L’appelant mentionne qu’il n’a pas rempli de déclaration de revenus au Canada depuis 1976 et qu’il n’en présente pas non plus en Italie, et qu’il n’a pas travaillé au Canada ou en Italie depuis 1976. Il souligne que son épouse possédait une boutique de vêtements, à laquelle il n’a jamais travaillé, et que cette dernière soutenait la famille.

[28] L’appelant affirme qu’il est retourné au Canada en provenance d’Italie en 1998, puis qu’il y est retourné en 2000 pour célébrer le nouveau millénaire. Après réflexion, il consent qu’il vivait en Italie de décembre 1999 à mai 2005. Puis, il est retourné vivre au Canada de mai 2005 jusqu’en 2006, avant de repartir en Italie jusqu’en octobre 2013 et de présenter une demande de prestations de la SV et d’assurance sociale de l’Ontario. Il souligne que depuis son retour au Canada en octobre 2013, il n’a visité l’Italie qu’une seule fois en 2006 pendant deux mois.

Observations

[29] L’appelant soutient qu’il est admissible à une pension de SV pour les raisons suivantes :

  1. Il est citoyen canadien et toute sa famille vit au Canada depuis 1959;
  2. Il a été obligé de présenter une demande d’aide sociale ce qu’il a jugé humiliant;
  3. Le stress engendré par l’attente d’approbation de sa pension l’a de nouveau rendu malade et déprimé;
  4. Il se considère comme Canadien et on devrait lui accorder sa pension.

[30] L’intimé considère que l’appelant n’est pas admissible à une pension de la SV pour les raisons suivantes :

  1. L’appelant ne s’est pas acquitté du fardeau de la preuve qui lui incombait en démontrant que son mode de vie au Canada y est suffisamment enraciné et établi pour satisfaire aux exigences relatives à la résidence pour être admissible à la pension de la SV.

Analyse

Exigences relatives à la résidence

[31] L’exigence générale pour toucher une pleine pension de vieillesse prévue à l’alinéa 3(1)c) de la Loi sur la SV est d’avoir résidé au Canada pendant 40 ans après l’âge de 18 ans. Toutefois, l’alinéa 3(1)b) de la Loi sur la SV énonce les critères que doit remplir toute personne pour être admissible à la pleine pension de SV sans avoir résidé pendant 40 ans au Canada. Il est ainsi libellé :

[32] 3. (1) Sous réserve des autres dispositions de la présente loi et de ses règlements, la pleine pension est payable aux personnes suivantes :

  1. b) celles qui, à la fois :
    1. (i) sans être pensionnées au 1er juillet 1977, avaient alors au moins vingt-cinq ans et résidaient au Canada ou y avaient déjà résidé après l’âge de dix-huit ans, ou encore étaient titulaires d’un visa d’immigrant valide,
    2. (ii) ont au moins soixante-cinq ans,
    3. (iii) ont résidé au Canada pendant les dix ans précédant la date d’agrément de leur demande, ou ont, après l’âge de dix-huit ans, été présentes au Canada, avant ces dix ans, pendant au moins le triple des périodes d’absence du Canada au cours de ces dix ans tout en résidant au Canada pendant au moins l’année qui précède la date d’agrément de leur demande.

[33] Si une personne n’est pas admissible à la pleine pension de SV, elle peut être admissible à une pension partielle aux termes du paragraphe 3(2) de la Loi sur la SV. Pour avoir droit à une pension partielle, la personne doit avoir résidé au Canada pendant au moins 10 ans et être résident le jour précédant la date d’agrément de sa demande. Si la personne ne résidait pas au Canada le jour précédant la date d’agrément de sa demande, elle doit avoir résidé au Canada pendant au moins 20 ans. Les paragraphes 3(2) à 3(5) énoncent ce qui suit :

  1. 3. (2) Sous réserve des autres dispositions de la présente loi et de ses règlements, une pension partielle est payable aux personnes qui ne peuvent bénéficier de la pleine pension et qui, à la fois,
    1. (a) ont au moins soixante-cinq ans,
    2. (b) ont, après l’âge de dix-huit ans, résidé en tout au Canada pendant au moins dix ans, mais moins de quarante ans avant la date d’agrément de leur demande et, si la période totale de résidence est inférieure à vingt ans, résidaient au Canada le jour précédant la date d’agrément de leur demande.
  2. (3) Pour un mois donné, le montant de la pension partielle correspond aux n/40 de la pension complète, n étant le nombre total — arrondi conformément au paragraphe (4) — d’années de résidence au Canada depuis le dix-huitième anniversaire de naissance jusqu’à la date d’agrément de la demande.
  3. (4) Le nombre total d’années de résidence au Canada est arrondi au chiffre inférieur.
  4. (5) Les années de résidence postérieures à l’agrément d’une demande de pension partielle ne peuvent influer sur le montant de celle-ci.

[34] Si une personne n’a pas résidé au Canada pendant au moins 20 ans, le paragraphe 9(3) de la Loi sur la SV prévoit que la cessation de résidence au Canada, qu’elle survienne avant ou après l’ouverture du droit à pension, entraîne la suspension des versements après le sixième mois qui suit la fin du mois où elle est survenue. Dans tous les cas, les versements peuvent reprendre à compter du mois où le pensionné réside de nouveau au Canada.

[35] Quant aux personnes qui ont déjà établi leur résidence au Canada, leur résidence est protégée par le paragraphe 21(4) du Règlement sur la sécurité de la vieillesse du fait que les absences temporaires du pays n’interrompent pas la période de résidence. Il affirme :

  1. 21. (4) Lorsqu’une personne qui réside au Canada s’absente du Canada et que son absence
    1. (a) est temporaire et ne dépasse pas un an,
    2. (b) a pour motif la fréquentation d’une école ou d’une université, ou
    3. (c) compte parmi les absences mentionnées au paragraphe (5),

cette absence est réputée n’avoir pas interrompu la résidence ou la présence de cette personne au Canada.

[36] Enfin, le paragraphe 21(1) du Règlement sur la sécurité de la vieillesse établit la différence entre la « résidence » et la « présence » aux fins de l’admissibilité à la pension de SV et prévoit ce qui suit :

  1. 21. (1) Aux fins de la Loi et du présent règlement,
    1. (a) une personne réside au Canada si elle établit sa demeure et vit ordinairement dans une région du Canada; et
    2. (b) une personne est présente au Canada lorsqu’elle se trouve physiquement dans une région du Canada.

[37] L’appelant doit prouver, selon la prépondérance des probabilités, que son mode de vie au Canada y est suffisamment enraciné et établi pour le rendre admissible au statut de résident permanent canadien pendant la période en question. L’intimé a conclu que l’appelant n’a pas présenté suffisamment d’éléments de preuve concernant sa résidence tant au Canada qu’en Italie pour rendre une décision en se fondant sur les faits.

[38] La question de la résidence est une question mixte de fait et de droit qui relève davantage des faits que du droit. La décision relative à la résidence doit être rendue en tenant compte de toutes les circonstances et non uniquement sur les intentions d’une personne (Canada (MDRH) c. Ding, 2005 CF 76; et Canada (MDRH) c. Chhabu, 2005 CF 1277).

[39] Dans l’arrêt Canada (Ministre du Développement des Ressources Humaines) c. Ding, 2005 CF 76, la Cour fédérale a énoncé les facteurs suivants pour déterminer si l’appelant établit sa demeure et vit ordinairement dans une région du Canada. Cette liste n’est pas exhaustive :

  1. a) liens prenant la forme de biens mobiliers, tels que les biens-fonds, les entreprises, les meubles, une automobile, compte de banque, et carte de crédit;
  2. b) liens sociaux au Canada (par exemple la participation dans les organismes professionnels);
  3. c) autres liens (tels que l’assurance-maladie, le permis de conduire, le loyer, le bail, l’hypothèque, les relevés d’impôts fonciers, les polices d’assurance, les contrats, les déclarations de passeport, déclarations de revenus provinciales ou fédérales);
  4. d) liens dans un autre pays;
  5. e) régularité et durée du séjour au Canada, ainsi que fréquence et durée des absences du Canada;
  6. f) mode de vie de l’intéressé, ou la question de savoir si l’intéressé vivant au Canada y est suffisamment enraciné et établi.

[40] Le critère juridique applicable en matière de résidence comporte un aspect factuel substantiel et la décision quant au lieu ou aux lieux où réside l’intéressé dépend des faits particuliers de l’affaire (R. c. Laurin, 2008 CAF 58).

[41] L’admissibilité de l’appelant à une pension de la SV, qu’elle soit pleine ou partielle, et au SRG est tributaire à la détermination de la durée des périodes de résidence de l’appelant au Canada, s’il y a lieu, de 1976 à aujourd’hui. L’alinéa 21(1)a) de la Loi sur la SV prévoit qu’une personne réside au Canada si elle établit sa demeure et vit ordinairement dans une région du Canada.

[42] Le Tribunal a examiné minutieusement toute la preuve documentaire dont il a été saisi, le témoignage de l’appelant au cours de l’audience, les observations orales présentées par l’appelant et les observations écrites de l’intimé.

[43] Le Tribunal n’est pas convaincu que l’appelant s’est acquitté du fardeau de la preuve qui lui incombait en démontrant qu’il était résident du Canada à tout moment après 1976. L’appelant a témoigné et présenté des déclarations écrites et orales, qui en termes simples, ne sont pas appuyées par la preuve documentaire. Son témoignage n’est pas fiable puisqu’il est incohérent tant dans son ensemble qu’avec la preuve documentaire à un tel point qu’il ne peut être considéré comme convaincant ou irréfutable à aucun moment. Le Tribunal conclut que l’appelant n’est même pas admissible à une pension de la SV partielle au moment où il a d’abord présenté une demande de prestations. La preuve présentée ne démontre pas que l’appelant comptait 10 ans de résidence au Canada après l’âge de 18 ans ni qu’il était résident lorsqu’il a présenté sa demande de prestations. Le Tribunal estime que l’appelant ne s’est pas acquitté du fardeau de la preuve qui lui incombait en démontrant suffisamment de périodes de résidence pour être admissible à une pension de la SV.

[44] Le Tribunal est convaincu que l’appelant a résidé au Canada pendant 9 ans, soit du 10 janvier 1967, date de son 18e anniversaire, jusqu’en 1976, année où il a cessé de contribuer au RPC et où il a rempli sa dernière déclaration de revenus au Canada. La date exacte ne peut être déterminée en fonction de la preuve présentée par l’appelant. L’appelant prétend qu’en 1979, il a accompagné son épouse en Italie lorsqu’elle a décidé de retourner vivre dans son pays d’origine. La candeur démontrée par l’appelant en fournissant ces renseignements pourrait révéler une absence de dates précises. L’appelant a cessé de contribuer au RPC en 1976. Il a aussi cessé de remplir des déclarations de revenus au Canada en 1976. Il mentionne qu’il a cessé de contribuer au RPC en 1976 puisqu’il est devenu travailleur indépendant après cette date. Le relevé d’emploi de l’appelant confirme que ses gains en 1974, 1975 et 1976 provenaient d’un emploi indépendant. En 1976, ses revenus étaient plus de 50 % inférieurs à ceux de 1975. Le Tribunal estime qu’il est plus probable qu’improbable que l’appelant a quitté le Canada en 1976. Il conclut aussi qu’au moment où l’appelant a quitté le pays pour accompagner son épouse en Italie, il n’était plus résident au Canada.

[45] La documentation au dossier de l’appelant ainsi que les renseignements recueillis dans les passeports de l’appelant soumis lors de l’audience démontrent que tous les passeports ont été délivrés à Rome. L’appelant n’a pas fourni de copies des passeports expirés avant le passeport délivré à Rome le 2 mai 1984. L’appelant a témoigné qu’il n’a jamais détenu de passeport italien. Le Tribunal estime cela improbable puisque l’appelant a témoigné qu’il a voyagé plusieurs fois en Italie de 1969 à 1973, bien qu’il soit uniquement devenu citoyen canadien le 1er mai 1974. Il est raisonnable de conclure que l’appelant était capable de voyager internationalement avant le 1er mai 1974 puisqu’il détenait un passeport délivré sous son ancienne citoyenneté, soit italienne. Il n’aurait pas pu voyager outre-mer du Canada à l’Italie sans passeport valide.

[46] Les passeports expirés de l’appelant démontrent des périodes au cours desquelles il n’a pas renouvelé son passeport dès son expiration. Les passeports expirés ne comportent aucune étampe d’entrée ou de sortie d’Italie jusqu’en mai 2005. Il n’a pas renouvelé son passeport expiré le 2 mai 1989 avant le 29 avril 1992. Cela porte à croire qu’il est demeuré en Italie pendant au moins 6 mois avant mai 1989, et ce, jusqu’au 29 avril 1992. Ce fait est en directe opposition avec son observation selon laquelle il a commencé à vivre en Italie en 1992 et qu’il y est resté jusqu’en 1998.

[47] Les nombreuses déclarations, tant écrites qu’orales, émises par l’appelant en appui de sa demande de pension de la SV concernant sa présence au Canada à partir de 1976, ne sont pas corroborées par les renseignements recueillis dans les passeports expirés et actuels et par la copie de son historique de voyage de Douanes et immigration Canada de l’aéroport Pearson listant toutes ses arrivées du 1er août 2000 au 28 octobre 2014.

[48] Les passeports de l’appelant semblent être estampés systématiquement à chaque entrée et sortie par le ministère italien de l’Immigration. Ces étampes concordent avec les données de l’historique de voyage de Douanes et immigration Canada recueillies après le 1er août 2000, date à laquelle les dossiers ont commencé à être conservés.

[49] Les passeports expirés dont la période de validité vont du 2 mai 1984 au 21 novembre 2007 montrent une sortie du pays le 19 mai 2005 et une entrée le 16 juin 2005, et aucune autre étampe d’entrée ou de sortie. L’historique de voyage de Douanes et immigration Canada liste toutes les entrées au Canada depuis août 2000. On y confirme que l’entrée au Canada du 19 mai 2005 est la seule de la période s’échelonnant d’août 2000 à mai 2005. Son passeport démontre qu’il s’est envolé de l’Italie le 19 mai 2005 et qu’il y est retourné le 16 juin 2005, bien qu’il mentionne qu’il est resté au Canada jusqu’en 2006.

[50] Les étampes sur les passeports et l’historique de voyage de Douanes et immigration Canada confirment que l’appelant a voyagé deux fois au Canada en 2009, soit l’année de décès de sa mère selon son témoignage. Il est demeuré au Canada du 15 février au 18 mai 2009, alors qu’il a mentionné que sa mère était malade; puis il est revenu au Canada du 4 au 13 décembre 2009, à la suite du décès de sa mère selon son témoignage. La seule autre entrée au Canada inscrite à l’historique de voyage de Douanes et immigration Canada est survenue le 2 octobre 2013.

[51] Les passeports démontrent que l’appelant était en Italie pour renouveler son passeport pendant plusieurs dates auxquelles il aurait prétendu être au Canada. Le passeport actuel de l’appelant démontre qu’il a visité l’Italie du 1er mai au 10 août, et du 8 décembre 2016 au 8 février 2017. L’appelant affirme qu’il s’est rendu en Italie à deux reprises depuis 2013 chaque fois pour une durée de deux mois.

[52] À ce jour, l’appelant n’a pas été en mesure de produire de la documentation démontrant sa résidence au Canada depuis 1976, soit au moment où il a cessé de contribuer au RPC. Ces trois dernières déclarations d’impôts datent de 1974, 1975 et 1976 alors qu’il était travailleur indépendant. Ces renseignements appuient son témoignage selon lequel il a travaillé pendant trois ans en tant que chauffeur de taxi indépendant. Les dates sont aussi conséquentes avec son ancien historique d’emploi. Le Tribunal estime que le relevé d’emploi de l’appelant est la source la plus fiable pour déterminer l’année à laquelle il a cessé de travailler à titre de chauffeur de taxi indépendant, et conclut que l’appelant a cessé de travailler au Canada en 1976.

[53] L’appelant a des liens importants en Italie, dont son épouse et ses trois enfants, qui y ont vécu continuellement depuis leur naissance; l’appelant y a aussi vécu la majeure partie de sa vie. Le Tribunal reconnaît que l’appelant a aussi des liens forts au Canada, dont ses frères et sœurs, des nièces et neveux; toutefois, ses liens avec ses enfants sont plus puissants. Il a témoigné qu’il est maintenant séparé de son épouse. Il n’a pas été en mesure de donner de détails sur les moments de la séparation. Les liens de l’appelant au Canada, autre que sa famille, sont transitoires, au mieux, et ne constituent pas un mode de vie suffisamment enraciné et établi. La fréquence et la durée des absences de l’appelant au Canada démontrent son intention d’établir sa résidence en Italie et la preuve produite ne démontre pas qu’il a abandonné le mode de vie italien au profit du Canada.

[54] Le Tribunal estime que l’appelant ne s’est pas acquitté du fardeau de la preuve qui lui incombait en démontrant qu’il était résident du Canada à tout moment après 1976 et en incluant la date de présentation de sa demande de pension de la SV. Le Tribunal conclut aussi que depuis le 2 octobre 2013, l’appelant a prouvé sa présence au Canada, sans toutefois démontrer que ses liens et son mode de vie au Canada sont suffisamment enracinés et établis pour y élire résidence au sens de la Loi sur la SV au détriment de ses liens très enracinés en Italie et de ses enfants qui continuent d’y vivre.

[55] Le Tribunal n’est pas en mesure d’examiner les ententes internationales entre l’Italie et le Canada rendrait l’appelant admissible à une pension canadienne ou italienne puisque l’appelant a refusé de présenter des éléments de preuve relatifs à sa résidence en Italie.

Conclusion

[56] Le Tribunal conclut que l’appelant n’est pas admissible à une pension de la SV.

[57] L’appel est rejeté.

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