Sécurité de la vieillesse (SV) et Supplément de revenu garanti (SRG)

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Décision et motifs

Décision

[1] L’appel est rejeté.

Aperçu

[2] L’appelant, A. M., est un bénéficiaire de la pension de la Sécurité de la vieillesse. En juin 2016, il a présenté trois demandes de Supplément de revenu garanti (SRG) aux termes de la Loi sur la sécurité de la vieillesse (Loi sur la SV) pour les périodes de paiement du 1er juillet 2014 au 30 juin 2015, du 1er juillet 2015 au 30 juin 2016 et du 1er juillet 2016 au 30 juin 2017.

[3] L’intimé, le ministre de l’Emploi et du Développement social (ministre), a approuvé la demande visant les deux dernières périodes de paiement, mais pas celle visant la première période, invoquant la période maximale de rétroactivité autorisée par la loi. L’intimé a informé l’appelant que la date d’entrée en vigueur du versement serait juillet 2015.

[4] L’appelant a interjeté appel de la décision du ministre auprès de la division générale du Tribunal de la sécurité sociale. Dans une décision datée du 28 février 2018, la division générale a sommairement rejeté l’appel parce qu’il n’avait aucune chance raisonnable de succès. La division générale a déterminé que le ministre avait agi conformément à la loi en limitant les versements rétroactifs de SRG de l’appelant.

[5] Le 13 avril 2018, l’appelant a interjeté appel du rejet sommaire de l’appel auprès de la division d’appel du Tribunal. Il a également présenté un exposé dans lequel il soulève les points ci-dessous.

  • Limiter la période de rétroactivité des demandes de SRG pénalise injustement le groupe le plus vulnérable de la société, à savoir les personnes âgées défavorisées. Cette mesure est également injustifiable parce qu’il n’y a aucune raison, administrative ou autre, pour imposer une telle restriction.
  • Cette iniquité est accentuée par le fait que l’information concernant les limites de paiement potentielles ne figure ni dans la demande de SRG ni dans la brochure explicative qui l’accompagne.
  • La division générale a adopté une approche excessivement formaliste dans l’application du droit en faisant fi de considérations telles que l’équité, le caractère raisonnable et la justice.
  • En appliquant mécaniquement les articles 11(7)a) et 28.1 de la Loi sur la SV, la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence.

[6] Le ministre n’a présenté aucune observation.

[7] Il n’est pas nécessaire de demander la permission d’interjeter appel aux termes de l’article 53(3) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS), car un rejet sommaire de la part de la division générale peut faire l’objet d’un appel de plein droit.

[8] J’ai déterminé qu’une audience de vive voix n’était pas nécessaire et que l’appel serait instruit sur le fondement du dossier documentaire pour les raisons suivantes :

  • le dossier ne présente aucune lacune et ne nécessite pas de clarification;
  • ce mode d’audience respecte l’exigence du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale, à savoir qu’il doit procéder de façon la plus informelle et expéditive que le permettent les circonstances, l’équité et la justice naturelle.

Questions en litige

[9] Les seuls moyens d’appel devant la division d’appel sont les suivants : la division générale a commis une erreur de droit, n’a pas observé un principe de justice naturelle, ou a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissanceNote de bas de page 1. La division d’appel peut rejeter l’appel, rendre la décision que la division générale aurait dû rendre, renvoyer l’affaire à la division générale pour réexamen ou modifier totalement ou partiellement la décision de la division généraleNote de bas de page 2.

[10] Les questions en litige dont je suis saisi sont les suivantes :

  1. Question en litige no 1 : La division générale a-t-elle appliqué le bon critère pour un rejet sommaire?
  2. Question en litige no 2 : La division générale a-t-elle commis une erreur en rendant sa décision?

Analyse

Question en litige no 1 : La division générale a-t-elle appliqué le bon critère pour un rejet sommaire?

[11] Je suis convaincu que la division générale a utilisé le mécanisme adéquat pour statuer sur l’appel de l’appelant. Au paragraphe 3 de sa décision, la division générale a invoqué l’article 53(1) de la Loi sur le MEDS en énonçant correctement la disposition législative qui lui permet de rejeter de façon sommaire un appel qui n’a aucune chance raisonnable de succès. Je reconnais cependant que le simple fait de citer la loi ne suffit pas si elle n’est pas correctement appliquée aux faits.

[12] La décision de rejeter un appel de façon sommaire repose sur un critère préliminaire. Il ne convient pas d’examiner l’affaire sur le fond en l’absence des parties, puis de conclure que l’appel ne peut pas réussir. Dans l’arrêt Fancy c CanadaNote de bas de page 3, la Cour d’appel fédérale a statué qu’une chance raisonnable de succès est comparable à une cause défendable en droit. La Cour s’est également penchée sur la question du rejet sommaire dans le contexte de son propre cadre législatif, et a conclu que le seuil relatif au rejet sommaire est élevéNote de bas de page 4. Elle doit aussi déterminer s’il est clair et évident sur la foi du dossier que l’appel est voué à l’échec. Il ne s’agit pas de déterminer si l’appel doit être rejeté après un examen des faits, de la jurisprudence et des arguments des parties. La question est plutôt de savoir si l’appel est voué à l’échec indépendamment des éléments de preuve et des arguments qui pourraient être présentés durant l’audience.

[13] En l’espèce, il est clair que l’appelant a présenté une demande de SRG seulement en juin 2016. La loi prévoit également que le paiement rétroactif du SRG, à la suite d’une demande approuvée, est limité à 11 mois. Les observations de l’appelant permettent de constater qu’il était au fait de l’exemption prévue à l’article 28.1 de la Loi sur la SV, même s’il ne prétendait pas être incapable de former ou d’exprimer son intention de demander le SRG.

[14] Pour rendre sa décision, la division générale a appliqué à juste titre un seuil élevé relativement au rejet sommaire, estimant que les arguments de l’appelant étaient [traduction] « voués à l’échec » en l’absence d’un fondement factuel ou juridique. Selon moi, la division générale avait le pouvoir de rejeter sommairement l’appel.

Question en litige no 2 : La division générale a-t-elle commis une erreur en rendant sa décision?

[15] Après examen de la décision, je suis convaincu que la division générale n’a pas manqué à un principe de justice naturelle ou commis une erreur de fait ou de droit. La division générale a examiné le dossier et a conclu que l’appelant, ayant présenté une demande de SRG en juin 2016, avait droit tout au plus à 11 mois de paiements rétroactifs. À la lumière des motifs soulevés par l’appelant, la division générale n’a constaté aucune cause défendable, et j’estime n’avoir aucun motif pour interférer avec son raisonnement.

[16] Bien que l’appelant puisse ne pas être d’accord avec l’analyse de la division générale, ma compétence pour lui offrir une réparation est limitée par les dispositions de l’article 58(1) de la Loi sur le MEDS. L’appelant n’a pas soutenu que la division générale avait commis une erreur de fait ou de droit, bien qu’il prétende être victime d’injustice. Dans ses observations, il précise que l’objet de sa colère n’est pas la division générale, mais plutôt la Loi sur la SV à proprement parler, et plus particulièrement la façon dont elle a été rédigée pour limiter le paiement rétroactif.

[17] Même si je suis sensible à la situation de l’appelant, j’ai l’obligation d’observer la Loi sur la SV, et il en est de même pour la division générale. L’appelant trouve cela injuste que des personnes âgées se voient refuser une prestation simplement parce qu’elles ont été retardées, pour des raisons compréhensibles, dans la présentation d’une demande, mais c’est le résultat que le Parlement a prescrit en adoptant la Loi sur la SV. La division générale ne pouvait pas simplement ignorer le libellé de la loi et ordonner une solution jugée équitable selon elle. Un tel pouvoir, connu sous le nom d’« équité », est traditionnellement réservé aux tribunaux, mais on l’utilisera généralement seulement s’il n’existe aucune réparation adéquate en droit. Dans l’arrêt Canada c Esler,Note de bas de page 5 par exemple, la Cour fédérale a renversé une tentative du prédécesseur de la division générale de prolonger la période de rétroactivité des prestations au titre de la Loi sur la SV au-delà de la limite prévue par la loi, en précisant que [traduction] « LeTribunal de révision est une pure création de la loi et, par conséquent, il ne jouit d’aucune compétence inhérente en équité qui lui aurait permis d’écarter la disposition législative claire du paragraphe 8(2) Note de bas de page 6 de la Loi et d’appliquer le principe d’équité pour accorder des prestations rétroactives au-delà de la limite prévue par la Loi ».

Conclusion

[18] Comme mentionné, selon l’article 11(7)a) de la Loi sur la SV, le premier mois au cours duquel l’appelant aurait pu recevoir le SRG était juillet 2015. L’appelant n’a pas démontré en quoi la division générale a commis une erreur en maintenant la décision du ministre de limiter le paiement rétroactif.

[19] L’appel est rejeté.

 

Façon de procéder :

Représentant :

Au dossier

A. M., non représenté

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