Sécurité de la vieillesse (SV) et Supplément de revenu garanti (SRG)

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Décision

[1] Le requérant n’est pas admissible à une date de rétroactivité antérieure des versements de supplément de revenu garanti (SRG).

Aperçu

[2] Le 4 novembre 2015, le ministre a reçu les demandes de SRG du requérant pour les périodes de paiement de juillet 2011 à juin 2012, de juillet 2012 à juin 2013, de juillet 2013 à juin 2014, de juillet 2014 à juin 2015, et de juillet 2015 à juin 2016. Le ministre a approuvé les demandes du requérant pour les périodes de paiement de juillet 2014 à juin 2015 et de juillet 2015 à juin 2016 à compter de décembre 2014, et a refusé les demandes pour les périodes de paiement de juillet 2011 à juin 2012, de juillet 2012 à juin 2013, de juillet 2013 à juin 2014, au stade initial ainsi qu’après révision. Le requérant a interjeté appel de la décision découlant de la révision devant le Tribunal de la sécurité sociale et a demandé la rétroactivité des paiements de SRG à juillet 2011 au motif qu’il n’avait pas la capacité de former ou d’exprimer l’intention de présenter une demande de SRG avant la date à laquelle il a présenté sa demande.

[3] Une fois qu’une personne satisfait aux exigences d’admissibilité pour le SRG, la Loi sur la sécurité de la vieillesse (Loi sur la SV) établit les règles pour le paiement du SRG. Aucun paiement de SRG ne peut être versé pour tout mois antérieur de plus de onze mois à celui au cours duquel l’intimé a reçu la demande de SRGNote de bas de page 1. Dans sa décision, le ministre a accordé au requérant la rétroactivité maximale de SRG permise par la Loi sur la SV.

[4] La Loi sur la SV prévoit une exception à la règle de rétroactivité maximale portant sur le versement des pensions aux termes de la Loi sur la SVNote de bas de page 2. Cette disposition permet à une demande d’être réputée avoir été présentée à une date antérieure à celle où elle a été déposée s’il est possible de démontrer que la personne visée par la demande était incapable de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande de prestations avant la date à laquelle la demande a été présentée. La période d’incapacité doit être continueNote de bas de page 3.

Question(s) en litige

[5] Le requérant était-il incapable de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande de SRG avant la date à laquelle les demandes ont été présentées?

[6] Dans l’affirmative, quand son incapacité a-t-elle commencé, et quelle période supplémentaire de rétroactivité devrait être accordée?

Analyse

Critère relatif à l’incapacité

[7] La capacité de former l’intention de faire une demande de prestations n’est pas de nature différente de la capacité de former une intention relativement aux autres possibilités qui s’offrent au demandeur. On ne doit pas donner au mot capacité un autre sens que son sens ordinaireNote de bas de page 4.

[8] Le critère législatif est précis et ciblé, en ce sens qu’il n’exige pas de prendre en compte la capacité de présenter, de préparer, de traiter ou de remplir une demande de prestations d’invalidité, mais seulement la capacité de former ou d’exprimer l’intention de faire une demandeNote de bas de page 5. Les activités de la partie requérante entre la date prétendue de début de l’invalidité et la date de la demande peuvent être pertinentes pour nous éclairer sur l’incapacité permanente de la partie requérante de former ou d’exprimer l’intention requise, et devraient donc être examinées.

[9] Les décisions de la Cour d’appel fédérale des notes de bas de page concernaient les dispositions relatives à l’incapacité du Régime de pensions du Canada (RPC)Note de bas de page 6. Le libellé de l’article 28.1 de la Loi sur la SV est identique aux dispositions relatives à l’incapacité du RPC. La Cour fédérale a déterminé que le critère relatif à l’incapacité énoncé dans la Loi sur la SV est le même que celui énoncé dans le RPCNote de bas de page 7.

Le requérant n’était pas incapable de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande de SRG avant la date à laquelle les demandes ont été présentées.

[10] Le requérant, âgé actuellement de soixante-dix-neuf ans, vit seul depuis que son épouse et lui ont divorcé en 2002. Il a conclu des conventions et des contrats de location avec des entreprises de services publics à son nom uniquement, a payé le loyer lorsqu’il était exigible, de même que les factures, y compris ses comptes de services publics lorsqu’il les recevait, à même son compte bancaire depuis 2002. Le requérant a déclaré faire ses propres courses et ses propres repas depuis 2002. Il détient son propre compte bancaire et il est la seule personne à pouvoir faire des chèques ou retirer de l’argent du compte.

[11] Le requérant possède un permis de conduire sans restriction, qu’il a obtenu de nombreuses années avant 2002, il possède toujours sa propre voiture, qu’il conduit tous les jours. On lui a demandé s’il était préoccupé par la circulation dense de la région de Toronto. Il a déclaré éviter les autoroutes pour parvenir à sa destination.

[12] Le requérant a affirmé dans son témoignage qu’il est capable et a toujours été capable de tout faire par lui-même. À cet égard, il n’a donné de procuration à personne concernant son domicile ou ses soins de santé. Il dit ne pas l’avoir fait parce qu’il est capable, et a toujours été capable, de prendre des décisions par lui-même concernant ses activités quotidiennes, notamment les opérations bancaires, le paiement des factures, et le renouvellement des assurances, des plaques d’immatriculation et de son permis de conduire. La fille du requérant a déclaré que son père a toujours été très indépendant et qu’il refuse qu’elle l’aide avec ses affaires.

[13] Le requérant a déclaré qu’il n’avait pas produit ses déclarations de revenus pour les années 2010 à 2014 en temps opportun, ce qui a eu comme conséquence que le SRG qu’il touchait depuis 2008 a cessé en date de juin 2011. Le requérant a dit ne pas avoir produit ses déclarations de revenus parce que les tarifs du comptable qui l’aidait depuis longtemps à préparer ses déclarations de revenus sont devenus trop élevés.

[14] Dans son avis d’appel au Tribunal daté du 25 avril 2017Note de bas de page 8, le requérant a mentionné qu’il était en désaccord avec la décision du ministre parce qu’il souffrait de déficiences mentales et physiques qui avaient des répercussions sur sa capacité à ce moment-là. Il a affirmé n’avoir jamais consulté de fournisseur de soins de santé mentale, à l’exception de son médecin de famille, pour quelque problème de santé mentale que ce soit. À cet égard, il n’a jamais été vu ni été traité par un psychologue, un psychiatre ou un conseiller ni admis à l’hôpital pour un problème de santé mentale. Le requérant a affirmé n’avoir jamais pris de médicament pour un problème de santé mentale. Il a reconnu avoir été triste pendant plusieurs années après que son épouse et lui ont divorcé en 2002.

[15] Mme K., la fille du requérant, a affirmé dans son témoignage que sa sœur et elle sont proches du requérant depuis que leur mère et lui ont divorcé en 2002. Elle a dit avoir vu ou parlé à son père au moins tous les deux jours depuis. Elle n’était pas au courant de l’état des prestations de SRG de son père jusqu’à ce qu’il lui montre sa décision de révision. Elle l’a aidé à remplir l’avis d’appel.

[16] Mme K. a déclaré que son père a commencé à présenter des signes de dépression après son divorce en 2002. Elle a dit que sa sœur et elle pensaient que leur père était juste triste en raison du divorce. Elle a dit que son père a eu de bonnes journées et de mauvaises journées depuis 2002. À cet égard, elle a noté qu’il a travaillé pendant de nombreuses années après que sa mère et lui ont divorcé. Les filles du requérant n’ont jamais pris de mesures pour acquérir le pouvoir juridique de gérer les affaires de leur père ou pour demander au curateur public de s’en charger, ce que j’estime comme une preuve tacite qu’elles n’ont jamais considéré leur père comme étant incapable de former l’intention de faire des choix, y compris pour ses affaires financières.

[17] La fille du requérant a reconnu que son père vit seul et assume ses frais de subsistance à l’aide de son propre compte bancaire depuis 2002, et qu’il n’a pas donné à quiconque une procuration pour s’occuper de son domicile ou de ses soins de santé. Elle a déclaré que le requérant veut tout faire par lui-même, mais qu’il a besoin d’aide. À cet égard, elle a noté qu’elle aide le requérant à remplir des formulaires de renouvellement de documents, y compris son permis de conduire et le renouvellement de ses plaques d’immatriculation.

[18] Le Dr Sasson, le médecin de famille du requérant depuis 1982, a noté dans un rapport daté du 28 octobre 2015Note de bas de page 9 que le requérant avait une excellente santé physique et mentale jusqu’en 2010 lorsqu’il a commencé à souffrir d’une dépression qui a affecté sa mémoire et sa capacité de concentration. Il a noté que le requérant était traité à l’aide d’antidépresseurs, et qu’il a fait des progrès graduels. À ce sujet, le requérant et sa fille ont affirmé que le requérant ne prenait pas les antidépresseurs prescrits par le Dr Sasson. Le Dr Sasson a rapporté que les symptômes du requérant ont fini par disparaître et qu’il a été en mesure de fonctionner normalement en juin-juillet 2014. Le Dr Sasson a demandé que l’information comprise dans les notes soit prise en compte dans l’évaluation de la capacité du requérant de se charger de ses affaires pendant la période 2010 à juillet 2015.

[19] Le Dr Sasson a rempli une Déclaration d’invalidité datée du 7 septembre 2016Note de bas de page 10. Le médecin a posé un diagnostic de dépression. Il a noté que l’état du requérant le rendait incapable de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande pendant la période s’échelonnant du 26 mars 2010 au 6 juillet 2015.

[20] Le Dr Sasson avait rempli antérieurement une Déclaration d’incapacité datée du 10 février 2010Note de bas de page 11 concernant la demande de pension de la SV d’avril 2009 du requérant. Il a noté que la dépression du requérant était chronique, avec des épisodes aigus récurrents. Ce dernier renseignement est conforme à la preuve de la fille du requérant selon laquelle son père a eu de bonnes journées et de mauvaises journées depuis que son épouse et lui ont divorcé en 2002.

[21] Le requérant a le fardeau de prouver que, selon la balance des probabilités, il était incapable de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande de SRG avant le jour où ses demandes ont été présentées. La Déclaration d’incapacité remplie par le Dr Sasson en 2016, qui mentionnait que l’état du requérant le rendait incapable de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande est incompatible avec la preuve du requérant et de sa fille. La preuve du requérant démontre qu’il a toujours été capable de gérer ses propres affaires, y compris de prendre des décisions relativement à son logement, aux opérations bancaires, aux courses, au travail, au paiement du loyer et des services publics, ainsi que des autres factures, et de remplir, bien que parfois avec de l’aide, la documentation concernant le renouvellement de son permis de conduire, de ses plaques d’immatriculation et de ses assurances. J’estime que le fait que le Dr Sasson, le médecin de famille de longue date du requérant, n’a jamais pris de mesures pour restreindre le droit de conduire du requérant démontre que le requérant n’était pas incapable de prendre les nombreuses décisions complexes qui sont requises pour conduire une voiture.

[22] D’après la preuve de la fille du requérant, le requérant a eu de bonnes journées et de mauvaises journées depuis 2002. La preuve du Dr Sasson démontre que l’état du requérant est chronique avec des épisodes aigus récurrents. J’accepte ces déclarations comme une preuve que l’incapacité du requérant, le cas échéant, n’est pas été continue. Les activités du requérant pendant la période s’échelonnant entre la date prétendue du début de l’invalidité et la date des demandes montrent clairement que le requérant avait la capacité de faire des choix, y compris de prendre des décisions définitives importantes, et de donner suite à ces décisions, ce qui à mon avis démontrait un niveau de capacité supérieur à celui qui est nécessaire pour former ou exprimer l’intention de faire une demande.

[23] J’estime que la preuve n’a pas démontré selon la prépondérance des probabilités que le requérant était incapable de former ou d’exprimer l’intention de faire des demandes de SRG avant la date à laquelle les demandes ont été présentées.

[24] Le Tribunal est créé par une loi et, par conséquent, mes pouvoirs sont limités à ceux que lui confère sa loi habilitante. Je dois interpréter et appliquer les dispositions telles qu’elles figurent dans la Loi sur la SV. Je suis lié par des décisions de la Cour fédérale et de la Cour d’appel fédérale. Je ne peux pas invoquer des principes d’équité ni considérer des circonstances atténuantes comme des difficultés financières pour accorder une rétroactivité supérieure à celle prévue par la Loi sur la SV.

[25] J’estime que le ministre a accordé au requérant la rétroactivité maximale de SRG permise par la Loi sur la SV.

Conclusion

[26] L’appel est rejeté.

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