Sécurité de la vieillesse (SV) et Supplément de revenu garanti (SRG)

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Décision et motifs

Décision

[1] La demande de permission d’en appeler est rejetée.

Aperçu

[2] Le demandeur, A. A., est né en Ukraine en 1950. Pendant plus de 10 ans, il a vécu et travaillé en Pologne. Il a ensuite immigré au Canada et est arrivé en tant que résident permanent en janvier 2013.

[3] En février 2015, le demandeur a présenté une demande de pension en vertu de la Loi sur la sécurité de la vieillesse (Loi sur la SV). En décembre 2016, le défendeur, le ministre de l’Emploi et du Développement social du Canada, a rejeté la demande, car il a déterminé que le demandeur n’avait pas vécu au Canada pendant au moins 10 ans, tel que l’exige l’article 3(2) de la Loi sur la SV. Le ministre a aussi constaté que le demandeur avait continué de cotisé au régime de sécurité sociale de la Pologne pendant une partie de la période où il était au Canada et il était donc [traduction] « assujetti à la loi » de la Pologne en vertu de l’accord sur la sécurité sociale entre le Canada et la République de Pologne (accord Canada-Pologne). Le ministre a énoncé sa décision dans une lettre relative à la révision datée du 24 juillet 2017.

[4] Le demandeur a interjeté appel de la décision du ministre devant la division générale du Tribunal de la sécurité sociale. La division générale a tenu une audience par téléconférence, et dans sa décision datée du 30 novembre 2018, elle a rejeté l’appel, concluant que le ministre avait correctement interprété la Loi sur la SV et l’accord Canada-Pologne lorsqu’il a appliqué la loi aux faits.

[5] Le 1er mars 2019, le demandeur a présenté une demande de permission d’en appeler à la division d’appel en prétendant que la division générale avait commis diverses erreurs en rendant sa décision, dont les suivantes :

  • La division générale a rejeté l’appel même si le ministre n’a fourni aucuns [traduction] « calculs » pour appuyer son affirmation selon laquelle les périodes de résidence en Pologne et au Canada du demandeur se superposaient.
  • La division générale a favorisé le ministre en n’invitant pas un représentant de son ministère à l’audience, ce qui lui a ainsi évité d’avoir à justifier sa décision de ne pas accorder une pension de la SV au demandeur.
  • La division générale a refusé d’examiner une part importante des observations du demandeur.

[6] J’ai examiné la décision de la division générale par rapport au dossier dont il est question, et j’ai conclu que le demandeur n’a invoqué aucun motif qui pourrait conférer à son appel une chance raisonnable de succès.

Questions en litige

[7] L’article 58 de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS) prévoit seulement trois moyens d’appel devant la division d’appel : la division générale i) n’a pas observé un principe de justice naturelle; ii) a commis une erreur de droit; iii) a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance. Un appel peut seulement être instruit si la division d’appel accorde d’abord la permission d’en appelerNote de bas de page 1, mais la division d’appel doit avant cela être convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succèsNote de bas de page 2. La Cour d’appel fédérale a conclu qu’une chance raisonnable de succès est comparable à une cause défendable en droitNote de bas de page 3.

[8] Je dois déterminer, d’après les questions en litige suivantes, si le demandeur dispose d’une cause défendable :

Question en litige no 1 : La division générale a-t-elle fondé sa décision sur une conclusion erronée selon laquelle les périodes de résidence en Pologne et au Canada du demandeur se superposaient?

Question en litige no 2 : La division générale a-t-elle omis d’observer un principe de justice naturelle en favorisant le ministre?

Question en litige no 3 : La division générale a-t-elle omis d’examiner une part importante des observations du demandeur?

Analyse

Question en litige no 1 : La division générale a-t-elle fondé sa décision sur une conclusion erronée selon laquelle les périodes de résidence en Pologne et au Canada du demandeur se superposaient?

[9] Le demandeur n’est pas d’accord avec la décision de la division générale de refuser de lui accorder une pension partielle de la SV. Toutefois, il n’a jamais contesté les faits suivants :

  • le demandeur est devenu un résident permanent le 10 janvier 2013;
  • même lorsque le demandeur est déménagé au Canada, il a continué d’aller en Pologne pour enseigner dans une université polonaise à contrat;
  • les autorités polonaises ont ensuite informé le ministre que l’université avait cotisé au régime de sécurité sociale au nom du demandeur du 1er février 2002 au 16 septembre 2016.

[10] Les articles applicables de l’accord Canada-Pologne précisent ce qui suit :

[S]i une personne est assujettie à la législation de la République de Pologne pendant une période quelconque de présence ou de résidence sur le territoire du Canada, ladite période n’est pas considérée comme une période de résidence au Canada relativement à ladite personneNote de bas de page 4 [...]

[U]ne personne est considérée assujettie à la législation de la République de Pologne pendant une période de présence ou de résidence sur le territoire du Canada uniquement si ladite personne verse des cotisations obligatoires aux termes de ladite législation pendant ladite période en raison d’emploi ou de travail autonomeNote de bas de page 5.

Tout comme le ministre, la division générale a jugé que le demandeur était demeuré [traduction] « assujetti aux lois de la Pologne » en vertu de l’accord Canada-Pologne du 10 janvier 2013 au 16 septembre 2016. Ce faisant, la division générale a jugé que les cotisations du demandeur au régime de sécurité sociale de la Pologne avaient rendu ses années passées au Canada invalides aux fins de détermination de l’admissibilité conformément à la Loi sur la SV.

[11] Je ne constate pas de cause défendable concernant le fait que la division générale aurait commis une erreur dans la façon dont elle a appliqué les termes de l’accord Canada-Pologne aux circonstances du demandeur.

Question en litige no 2 : La division générale a-t-elle omis d’observer un principe de justice naturelle en favorisant le ministre?

[12] Le demandeur allègue que la division générale a agi de façon injuste en le questionnant à l’audience, mais en n’exigeant pas la même chose du ministre, qui n’a pas eu à expliquer la logique qu’il a utilisée pour lui refuser sa pension.

[13] Encore une fois, j’estime que cet argument ne donne pas lieu à une cause défendable.

[14] Premièrement, un résultat défavorable n’est pas en soi un indice d’injustice. En l’absence de preuve spécifique pour appuyer un manquement à la justice naturelle, des allégations vagues d’inconduite ne constituent pas un fondement suffisant pour un appel. 

[15] Deuxièmement, le dossier montre que la division générale a informé les deux parties de la tenue de l’audienceNote de bas de page 6. Toutefois, le ministre a exercé son droit de ne pas comparaître ou d’envoyer un représentant; un droit qu’avait aussi le demandeur.

[16] Finalement, la jurisprudence est claire en ce qui concerne le fait que le fardeau de la preuve incombe à la personne qui prétend être admissible aux prestations de la Sécurité de la vieillesse (prestations de la SV)Note de bas de page 7. Le demandeur doit prouver qu’il est admissible à une pension de la SV; le ministre ou la division générale ne sont pas responsables de prouver qu’il ne l’est pas. Quoi qu’il en soit, je constate que le ministre a offert des raisons écrites détaillées pour sa décision à plusieurs occasions; dans sa lettre de refus initiale, après révision, et une fois de plus peu de temps après l’audience de la division générale.

Question en litige no 3 : La division générale a-t-elle omis d’examiner une part importante des observations du demandeur?

[17] Le demandeur ne précise pas quelle part de ses observations a été ignorée, mais je constate que l’essentiel de son argument à la division générale était que l’université pour laquelle il travaillait en Pologne avait fait faillite. Il a affirmé que, même si l’université cotisait au régime de sécurité sociale en son nom, il n’était pas payé pour le travail qu’il faisait à l’universitéNote de bas de page 8.

[18] À la révision du dossier, je constate que la division générale n’a pas ignoré les circonstances entourant les cotisations du demandeur en Pologne; en fait, elle y a fait référence dans sa décision, même si elle leur a accordé peu de poids au bout du compte :

Il faisait des cotisations obligatoires selon le régime de sécurité sociale de la Pologne en raison d’emploi. On ne m’a donné aucune raison de douter des dossiers de ses cotisations détenus par le gouvernement polonais. Je ne suis pas persuadé que ces paiements ne s’appliquaient pas parce que l’université ne le payait pasNote de bas de page 9.

[19] En tant que juge des faits, la division générale a le droit d’apprécier la preuve comme elle l’entend dans les limites de l’article 58(1) de la Loi sur le MEDS. En concluant que le demandeur a fait des cotisations obligatoires au régime de sécurité sociale de la Pologne, la division générale a agi dans les limites de sa compétence pour tirer une conclusion fondée sur son évaluation de la preuve lui ayant été présentée. Ainsi, j’estime que ce moyen d’appel proposé n’a pas une chance raisonnable de succès, puisqu’il découle du fait que la division générale a décidé d’accorder moins d’importance à certains éléments de preuve d’une façon différente que ce que le demandeur juge adéquat. Dans l’arrêt Simpson c CanadaNote de bas de page 10, la Cour d’appel fédérale a tiré la conclusion suivante :

[...] le poids accordé à la preuve, qu’elle soit orale ou écrite, relève du juge des faits. Ainsi, une cour qui entend un appel ou une demande de contrôle judiciaire ne peut pas en règle générale substituer son appréciation de la valeur probante de la preuve à celle du tribunal qui a tiré la conclusion de fait contestée.

[20] Le demandeur prétend également avoir été victime d’un acte de malfaisance administrative et accuse le ministre et son ministère d’avoir délibérément retardé le traitement de sa demande afin de le priver de [traduction] « l’occasion d’être informé beaucoup plus tôt des périodes admissibles se superposant en Pologne et d’interrompre [son] lien d’emploi en Pologne ».

[21] Je ne constate pas non plus l’existence d’une cause défendable à cet égard. Une fois de plus, la division générale a abordé les observations du demandeur sur ce point dans sa décision et elle a constaté, à juste titre, qu’elle n’avait pas la compétence pour examiner des allégations d’avis erroné ou d’erreur administrativeNote de bas de page 11.

Conclusion

[22] Étant donné que le demandeur n’a pas déterminé l’existence de moyens d’appels prévus à l’article 58(1) de la Loi sur le MEDS qui conféreraient à l’appel une chance raisonnable de succès, la demande de permission d’en appeler est rejetée.

Représentant :

A. A., non représenté

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