Sécurité de la vieillesse (SV) et Supplément de revenu garanti (SRG)

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Décision et motifs

Décision

[1] La permission d’en appeler est refusée.

Aperçu

[2] Le demandeur, R. R., né en 1950, est un ressortissant finlandais qui habite maintenant en Suède. En novembre 2015, il a demandé une pension de la Sécurité de la vieillesse (SV) au titre de l’Accord sur la sécurité sociale entre le Canada et la Suède, déclarant qu’il avait vécu au pays avec un permis de travail temporaire de juin 1987 à juillet 1989.

[3] Le défendeur, le ministre de l’Emploi et du Développement social, a exigé que le demandeur fournisse une preuve de son statut au Canada au cours de cette période. Il lui a aussi demandé de remplir un questionnaire ainsi qu’un formulaire de consentement à la divulgation de renseignements de Citoyenneté et Immigration Canada (CIC).

[4] Le demandeur a retourné ces documents au ministre, comme requis, avec des copies des documents suivants :

  • une lettre datée du 9 février 1987 que X, l’ancien employeur du demandeur, avait adressée à l’ambassade canadienne en Suède pour demander un transfert à sa filiale canadienne située dans la région de Montréal;
  • la demande d’autorisation de séjour temporaire au Canada présentée par le demandeur et datée du 25 février 1987;
  • une lettre datée du 14 juin 1989 dans laquelle la société Movers International confirme que l’employeur du demandeur avait retenu les services de la société pour déménager les biens du demandeur du Canada à la Finlande du 22 au 24 juin 1989.

[5] Dans une lettre datée du 24 janvier 2017, le ministre a rejeté la demande de pension de la SV parce que, selon lui, le demandeur n’avait pas fourni la preuve démontrant qu’il avait habité légalement au Canada. Après révision, le ministre a confirmé sa position, informant le demandeur qu’il devait fournir une copie certifiée du visa de résident temporaire (permis de travail) qui était valide le jour où il a quitté le Canada. Le ministre a précisé que CIC n’avait pas été en mesure de vérifier le statut du demandeur au Canada.

[6] Le demandeur a interjeté appel du refus du ministre à la division générale du Tribunal de la sécurité sociale. La division générale a tenu une audience par téléconférence et, dans une décision datée du 7 juillet 2019, elle a rejeté l’appel. Elle a conclu que le demandeur ne s’était pas acquitté du fardeau de la preuve de façon à démontrer qu’il avait déjà légalement résidé au pays. La division générale a précisément mentionné son défaut de présenter un visa de résident temporaire qui était valide le jour où il a quitté le Canada.

[7] Par la suite, le demandeur a demandé la permission d’en appeler à la division d’appel du Tribunal, alléguant que la division générale avait commis une erreur en rendant sa décision, plus particulièrement, en ignorant la preuve selon laquelle il avait travaillé pendant deux ans pour une multinationale au Canada. Le demandeur a laissé entendre que les autorités canadiennes de l’immigration auraient probablement poursuivi son employeur et l’auraient expulsé du pays s’il n’avait pas eu de statut juridique. Avec sa demande de permission d’en appeler, le demandeur a fourni une copie d’un relevé d’emploi indiquant qu’il avait été à l’emploi de X, située à X au Québec, du 1er juin 1987 au 23 juin 1989.

[8] Après avoir examiné les observations du demandeur conjointement au dossier, j’ai conclu qu’il ne convient pas dans cette affaire d’accorder la permission d’en appeler.

Questions en litige

[9] Aux termes de l’article 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (LMEDS), il n’existe que trois moyens d’appel à la division d’appel : la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle; elle a commis une erreur de droit; elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[10] Il ne peut être interjeté d’appel à la division d’appel sans permissionNote de bas de page 1, mais la division d’appel doit d’abord être convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succèsNote de bas de page 2. La Cour d’appel fédérale a conclu qu’une chance raisonnable de succès est comparable à une cause défendable en droitNote de bas de page 3.

[11] Je dois déterminer si le demandeur a une cause défendable selon les questions en litige suivantes :

Question en litige no 1 : La division générale a-t-elle ignoré des éléments de preuve?

Question en litige no 2 : La division d’appel peut-elle examiner de nouveaux éléments de preuve?

Analyse

Question en litige no 1 : La division générale a-t-elle ignoré des éléments de preuve?

[12] J’estime que cette observation n’est pas défendable.

[13] Il est important de se rappeler que le fardeau de la preuve incombe à la personne qui prétend avoir droit aux prestations de la SVNote de bas de page 4. Il appartient au demandeur de prouver qu’il est admissible aux prestations de la SV; il ne revient pas au ministre ou à la division générale de prouver que le demandeur n’y est pas admissible. Au moment où il a comparu devant la division générale, le demandeur avait eu plus de trois ans pour rassembler des éléments de preuve démontrant qu’il avait été un résident autorisé du Canada pendant deux ans au cours des années 1980.

[14] J’admets qu’il est difficile de prouver c qui remonte à plus de 30 ans. Malgré tout, le demandeur a déposé seulement trois éléments de preuve à l’appui de son prétendu statut de résident et, comme l’a souligné la division générale, aucun de ces éléments, à proprement parler, ne prouvait qu’il avait bel et bien habité au Canada ou qu’il l’avait fait en toute légalité. La raison pour laquelle CIC n’a trouvé aucune trace d’un visa au nom du demandeur n’est pas claire. Il se peut que le dossier ait été perdu; il est aussi possible qu’aucun visa n’ait été délivré au demandeur à cette époque. Peu importe la cause, il n’en demeure pas moins que le dossier ne contient aucune preuve manifeste du statut du demandeur de 1987 à 1989. À c titre, on ne peut pas affirmer que la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée qu’elle aurait « tirée de façon abusive ou arbitraire » ou « sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance ».

[15] Malgré cela, un élément me préoccupait lorsque j’examinais le dossier. Lorsqu’il a rejeté la demande du demandeur, le ministre a laissé entendre qu’une copie certifiée du visa de résident temporaire était nécessaire à la détermination du statut de résidence lorsqu’on demande des prestations de la SV. C’est inexact. En fait, on peut conclure à l’établissement du statut de résident non seulement grâce aux visas, mais aussi à l’aide d’autres preuves documentaires, comme les registres des biens, les baux, les relevés bancaires, les relevés de carte de crédit, les factures de services publics et les dossiers de l’impôt sur le revenu. Si la division générale avait fondé sa décision uniquement sur l’absence de visa, le demandeur aurait pu avoir une cause défendable selon laquelle on avait ignoré les éléments de preuve qu’il avait fournis. Cependant, la division générale a noté dans ses motifs qu’elle avait dûment tenu compte du témoignage du demandeur ainsi que de la documentation concernant son déménagement, mais que ni l’un ni l’autre n’était convaincant.

[16] Le demandeur peut être en désaccord avec l’interprétation de la preuve que la division générale a donnée, mais on doit à la division une certaine déférence à l’égard de son rôle de juge des faitsNote de bas de page 5. Dans le cas présent, la division générale a examiné tous les éléments de preuve portés à sa connaissance, y compris les lettres mentionnées plus haut ainsi que les déclarations orales et écrites du demandeur. Elle a conclu que, tout bien considéré, le demandeur n’avait pas réussi à prouver qu’il avait déjà légalement résidé au Canada.

Question en litige no 2 : La division d’appel peut-elle examiner de nouveaux éléments de preuve?

[17] La demande de permission d’en appeler du demandeur comprenait une copie de son relevé d’emploi datant des années 1980, qu’il disait avoir obtenu auprès de son ancien employeur. Cet élément de preuve n’a pas été soumis à la division générale lors de l’audience qui a eu lieu en juillet dernier. C’est la raison pour laquelle je ne peux pas le prendre en compte.

[18] Mon pouvoir est limité. La division d’appel est seulement autorisée à décider si les observations d’un demandeur ou d’une demanderesse s’inscrivent dans les moyens d’appel prévus à l’article 58(1) de la LMEDS et si l’un d’eux a une chance raisonnable de succès. Je n’ai pas la compétence nécessaire pour juger du fond de la demande de pension de la SV. Je ne peux pas réévaluer la preuve existante ni accepter de nouveaux éléments de preuve et substituer mon jugement à celui de la division générale.

[19] Toutefois, une avenue s’offre toujours au demandeur. Une fois qu’une audience a pris fin, il existe un mécanisme contraignant par lequel il est possible d’apporter des renseignements nouveaux ou supplémentaires. Un requérant ou une requérante peut demander à la division générale d’annuler ou de modifier sa décision à la lumière de faits nouveaux, mais la division doit le faire au plus tard un an après avoir prononcé la décision. La personne doit aussi démontrer que les prétendus faits nouveaux sont essentiels et qu’ils ne pouvaient être connus au moment de l’audience malgré l’exercice d’une diligence raisonnableNote de bas de page 6.

Conclusion

[20] Comme le demandeur n’a invoqué aucun des moyens d’appel prévus à l’article 58(1) de la LMEDS qui auraient conféré à l’appel une chance raisonnable de succès, la demande de permission d’en appeler est rejetée.

Représentant :

R. R., non représenté

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