Sécurité de la vieillesse (SV) et Supplément de revenu garanti (SRG)

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Introduction

[1] Le 9 janvier 2019, j’ai conclu que la demanderesse ne résidait pas au Canada après le 30 novembre 1997 (décision initiale), aux fins de la pension de la Sécurité de la vieillesse. La décision initiale a fait suite à une audience vidéo qui a eu lieu le 4 janvier 2019. La décision initiale a tenu compte des observations et des documents déposés par les deux parties, ainsi que de la preuve orale.

[2] Le 4 juillet 2019, la demanderesse a déposé une demande d’annulation ou de modification de la décision initiale en vertu de l’article 66 de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS). Elle a présenté de nouveaux documents à l’appui de sa demande. Elle a également interjeté appel de la décision initiale de la division d’appel du Tribunal. Cependant, jusqu’à ce que je rende une décision sur cette demande, son appel auprès de la division d’appel est « en suspens ».

Questions en litige

[3] Je ne peux annuler ou modifier la décision initiale que sous certaines conditions. Je ne peux le faire que si la demanderesse présente un fait nouveau et essentiel qui ne pouvait être connu au moment de l’audience initiale malgré l’exercice d’une diligence raisonnableNote de bas page 1. Elle doit prouver qu’un fait nouveau et essentiel existe et qu’elle n’aurait pas pu le découvrir au moment de l’audience initiale en faisant preuve d’une diligence raisonnable. Elle doit prouver cela selon la « prépondérance des probabilités ». Autrement dit, cela doit être « plus probable qu’improbable ».

[4] Je dois trancher les deux questions suivantes :

  1. La preuve de la demanderesse établit-elle l’existence d’un fait nouveau et essentiel qui ne pouvait être connu au moment de l’audience malgré l’exercice d’une diligence raisonnable?
  2. Si tel est le cas, quelle est l’incidence de ce fait sur les conclusions tirées dans la décision initiale?

Preuve présentée à l’appui de la demande

[5] La demanderesse a présenté les documents suivants à l’appui de sa demande :

  1. L’affidavit de R. Z. souscrit le 22 février 2018Note de bas page 2;
  2. Les documents de la Banque Royale et les entrées provenant d’un livret bancaire pour la période du 15 février 2002 au 25 juillet 2003Note de bas page 3;
  3. La liste des locataires (non datée) de xNote de bas page 4;
  4. Les prescriptions de la demanderesse pour diverses dates en 1999, en 2003 et en 2006Note de bas page 5;
  5. Les photos (non datées) des dents de la demanderesseNote de bas page 6.

[6] La demanderesse a également joint une lettre d’accompagnement aux documents cités ci-dessus. Cependant, sa lettre porte principalement sur les raisons pour lesquelles elle n’est pas d’accord avec la décision initiale. Sauf de la façon expressément énoncée dans la présente décision, sa lettre ne porte pas sur la question dont je suis saisi en l’espèce. La demanderesse a également présenté une lettre en réponse à mes questions écrites au sujet des documents énumérés ci-dessusNote de bas page 7.

Analyse

La preuve prouve-t-elle l’existence d’un fait nouveau et essentiel qui ne pouvait être connu au moment de l’audience malgré l’exercice d’une diligence raisonnable?

[7] Le critère énoncé à l’article 66(1)(b) de la Loi sur le MEDS a trois volets.

[8] Premièrement, la demanderesse doit présenter un fait nouveau.

[9] Deuxièmement, le fait doit être essentiel. Un fait est considéré comme essentiel s’il avait pu avoir une incidence sur l’issue de l’audience initialeNote de bas page 8.

[10] Finalement, il ne faut pas que le fait ait pu avoir été découvert grâce à l’exercice d’une diligence raisonnable. L’exercice d’une diligence raisonnable consiste à prendre les mesures qu’une personne raisonnable prendrait afin de trouver des éléments de preuve à l’appui de sa cause. L’idée est qu’une personne qui présente une demande d’annulation ou de modification d’une décision ne peut pas se fonder sur la preuve qu’elle a présentée lors de l’audience initiale. Une partie demanderesse doit donc fournir des éléments de preuve à l’appui des mesures qu’elle a prises (si elle en a prises) avant la tenue de l’audience initiale afin de trouver des éléments de preuve à l’appui du fait qu’elle tente maintenant de prouver. Elle doit également expliquer pourquoi elle ne pouvait pas présenter des éléments de preuve à l’appui de ce fait lors de l’audience initialeNote de bas page 9.

1) L’affidavit de R. Z. souscrit le 22 février 2018

[11] R. Z. est le fils de la demanderesse. Il vit en Floride et a souscrit l’affidavit près d’un mois et demi après que la décision initiale a été rendue. L’affidavit porte sur une propriété qui appartenait à la demanderesse en Floride.

[12] J’ai demandé à la demanderesse si elle aurait pu découvrir l’information (ou les faits) contenue dans l’affidavit avant la tenue de l’audience grâce à l’exercice d’une diligence raisonnable, mais elle n’a pas fourni de réponse à cette questionNote de bas page 10. Je tiens à noter que R. Z. aurait pu fournir des éléments de preuve à l’audience initiale, mais qu’il n’y a pas assisté. Dans une décision de 2005 à caractère persuasif, la Commission d’appel des pensions a soutenu qu’elle ne pouvait pas considérer des témoignages provenant de membres de la famille comme étant des « faits nouveaux », car ces personnes auraient pu être facilement disponibles pour témoigner lors de l’audience initialeNote de bas page 11. La demanderesse aurait également eu connaissance des questions abordées dans l’affidavit, car les observations du ministre datées de mars 2018 faisaient référence à plusieurs reprises à la propriété qui lui appartenait en FlorideNote de bas page 12. Le ministre a présenté ces observations plus de neuf mois avant la date de l’audience initiale. La demanderesse a répondu à ces observations plus de quatre mois avant la date de l’audience initialeNote de bas page 13.

[13] J’estime que si la demanderesse avait pris des mesures raisonnables avant la tenue de l’audience initiale, par exemple en s’adressant à des témoins potentiels, elle aurait pu découvrir tout fait nouveau étayé par l’affidavit. Cela signifie qu’elle ne satisfait pas au troisième volet du critère prévu à l’article 66(1)(b) de la Loi sur le MEDS.

2) Les documents de la Banque Royale

[14] Les documents de la Banque Royale existaient au moment où l’audience a eu lieu. Toutes les entrées avaient plus de 15 ans à ce moment-là. J’ai demandé à la demanderesse si elle aurait pu découvrir l’information contenue dans les documents de la Banque Royale avant la tenue de l’audience grâce à l’exercice d’une diligence raisonnable, mais elle n’a pas répondu à cette questionNote de bas page 14.

[15] J’estime que ces documents auraient dû être en la possession de la demanderesse, ou auraient dû, du moins, lui être facilement accessibles avant l’audience. Par conséquent, j’estime que la demanderesse aurait pu découvrir tous les faits étayés par les documents de la Banque Royale avant la tenue de l’audience, et ce, grâce à l’exercice d’une diligence raisonnable. Cela signifie qu’elle n’a pas satisfait au troisième volet du critère.

3) La liste des locataires de X

[16] Il s’agit d’une liste des locataires de l’avenue X à Montréal. J’ai demandé à la demanderesse si elle aurait pu découvrir l’information contenue dans la liste des locataires avant la tenue de l’audience, et ce, grâce à l’exercice d’une diligence raisonnable, mais elle n’a pas répondu à cette questionNote de bas page 15. Bien qu’aucune date n’apparaisse sur ce document, la demanderesse a déclaré avoir demandé au propriétaire d’inclure son nom dans la liste, car cela aurait pu avoir une incidence sur la décision initialeNote de bas page 16. Elle a fait cette demande à peu près au même moment où elle a présenté la demande en l’espèceNote de bas page 17. Cela signifie que le propriétaire a ajouté son nom à la liste après la date de l’audience initiale : son nom n’aurait pas figuré sur cette liste au moment de l’audience initiale.

[17] Le « fait » que la demanderesse veut démontrer grâce à la liste des locataires est qu’elle était locataire attitrée à l’avenue X. Cependant, la preuve de sa location se trouvait déjà dans le dossier du Tribunal avant la tenue de l’audience. Cette preuve comprenait des lettres du propriétaire à la demanderesse, ainsi qu’un bail au nom de la demanderesseNote de bas page 18. Dans ses observations présentées avant l’audience, elle a même admis que le fait d’avoir son nom sur la liste des locataires n’était pas une véritable priorité pour elle; elle ne pensait pas que c’était importantNote de bas page 19. Par conséquent, j’estime qu’elle aurait pu découvrir tout fait étayé par la liste des locataires avant la tenue de l’audience initiale grâce à l’exercice d’une diligence raisonnable. Cela signifie qu’elle n’a pas satisfait au troisième volet du critère. De plus, le « fait » ne semble pas être nouveau : le bail et les lettres du propriétaire avaient déjà permis d’établir sa location.

4) Les prescriptions

[18] Les prescriptions existaient au moment de la tenue de l’audience. Elles avaient toutes plus de 10 ans à ce moment-là. J’ai demandé à la demanderesse si elle aurait pu découvrir l’information contenue dans les prescriptions avant la tenue de l’audience grâce à l’exercice d’une diligence raisonnable, mais elle n’a pas répondu à cette questionNote de bas page 20.

[19] J’estime que la demanderesse aurait pu découvrir les prescriptions avant la tenue de l’audience grâce à l’exercice d’une diligence raisonnable. Ces documents auraient dû être en sa possession, ou auraient dû, du moins, lui être facilement accessibles. Par conséquent, j’estime que la demanderesse aurait pu découvrir tout fait étayé par les prescriptions avant la tenue de l’audience, grâce à l’exercice d’une diligence raisonnable. Cela signifie qu’elle n’a pas satisfait au troisième volet du critère.

5) Les photos des dents de la demanderesse

[20] Il est difficile de savoir si les photos des dents de la demanderesse existaient au moment de l’audience. J’ai demandé à la demanderesse si elle aurait pu découvrir l’information que révélaient les photos de ses dents avant la tenue de l’audience, grâce à l’exercice d’une diligence raisonnable, mais elle n’a pas répondu à cette questionNote de bas page 21.

[21] En soumettant les photos de ses dents, la demanderesse a affirmé qu’elle voulait montrer qu’une personne ayant [traduction] « suffisamment d’argent » n’aurait pas de dents comme les siennesNote de bas page 22. Cependant, elle aurait pu découvrir ce fait avant l’audience grâce à l’exercice d’une diligence raisonnable. En fait, elle a attiré l’attention sur ses dents au cours de l’audienceNote de bas page 23. Par conséquent, les photos de ses dents ne révèlent pas un fait qui ne pouvait pas être connu avant l’audience initiale grâce à l’exercice d’une diligence raisonnable. Cela signifie qu’elle n’a pas satisfait au troisième volet du critère. Le « fait » révélé par les photos de ses dents ne semble pas non plus être « nouveau », puisqu’elle en a fait mention lors de l’audience initiale.

Résumé des conclusions

[22] Aucun des éléments de preuve de la demanderesse ne satisfait au troisième volet du critère prévu à l’article 66(1)(b). En d’autres termes, elle n’a pas démontré que les faits étayés par ses éléments de preuve n’auraient pas pu être découverts au moment de l’audience initiale grâce à l’exercice d’une diligence raisonnable. De plus, au moins deux des faits ne peuvent pas être considérés comme « nouveaux ». Par conséquent, je ne suis pas tenu d’examiner si tous les faits sont nouveaux ou essentiels. La demanderesse doit satisfaire aux trois volets de l’article 66(1)(b) pour avoir gain de cause.

[23] Il est possible que la demanderesse soit déçue de l’issue de la présente affaire. Cependant, le critère relatif à l’annulation ou à la modification d’une décision est rigoureuxNote de bas page 24, et la preuve qu’elle a présentée ne satisfait pas à ce critère. Elle a également interjeté appel de la décision initiale auprès de la division d’appel, où ses préoccupations concernant la décision initiale peuvent encore être évaluées.

Quelle est l’incidence de tout fait nouveau et essentiel sur la décision initiale?

[24] Puisque j’ai conclu que la preuve de la demanderesse ne prouvait pas l’existence d’un fait nouveau et essentiel qui n’aurait pas pu être découvert lors de l’audience initiale grâce à l’exercice d’une diligence raisonnable, je n’ai pas besoin de répondre à cette question.

Conclusion

[25] La demande d’annulation ou de modification est rejetée.

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