Sécurité de la vieillesse (SV) et Supplément de revenu garanti (SRG)

Informations sur la décision

Résumé :

La demanderesse a fait une demande d’allocation de survivant sous le Programme de la sécurité de la vieillesse au ministre de l’Emploi et du Développement social (le ministre) à la suite du décès de son ex-conjoint. Le ministre a refusé sa demande et la division générale a rejeté son appel, parce que la demanderesse n’était pas une « survivante » au sens de la Loi sur la sécurité de la vieillesse, car elle s’est divorcée 14 avant le décès de son ex-conjoint en mai 2019. Le ministre et la division générale ont tenu compte du jugement de divorce prononcé par la Cour supérieure du Québec le 30 avril 2004.

La demanderesse a fait appel de la décision de la division générale en dehors du délai applicable. La division d’appel a refusé la demande de la demanderesse relative à une prorogation de délai puisque l’appel était voué à l’échec. La demanderesse a par la suite demandé à la Cour fédérale de réviser la décision de la division d’appel.

La Cour fédérale a déterminé que la décision de la division d’appel de rejeter la demande de prorogation de la demanderesse était fondée sur l’application des facteurs énumérés dans la loi et élaborés dans la décision de la Cour fédérale dans Canada (Ministre du Développement des Ressources humaines) c Gattellaro, 2005 CF 883. La détermination que la division générale ainsi que la division d’appel n’avaient pas la compétence pour accorder à la demanderesse l’ordonnance qu’elle recherche est raisonnable. La demande de contrôle judiciaire a été rejetée.

Contenu de la décision

Citation : JM c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2022 TSS 10

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision relative à une prorogation de délai

Partie demanderesse : J. M.
Partie défenderesse : Ministre de l’Emploi et du Développement social

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 8 juin 2021 (GP-20-740)

Membre du Tribunal : Jude Samson
Date de la décision : Le 10 janvier 2022
Numéro de dossier : AD-21-426

Sur cette page

Décision

[1] La prorogation (prolongation) du délai pour présenter une demande à la division d’appel est refusée. L’appel n’ira pas de l’avant.

Aperçu

[2] J. M. est la demanderesse dans ce dossier. Elle a présenté une demande d’allocation au survivant au titre du programme de la Sécurité de la vieillesse. À l’appui de sa demande, la demanderesse soutient qu’elle était la femme de Y. B. au moment de son décès.

[3] Le ministre de l’Emploi et du Développement social a refusé la demande d’allocation de la demanderesse. Selon le ministre, le mariage entre la demanderesse et le défunt s’était terminé par un divorce. Par conséquent, la demanderesse n’avait pas droit à l’allocation. À l’appui de sa décision, le ministre invoque un jugement de divorce prononcé le 30 avril 2004 par la Cour supérieure du QuébecNote de bas de page 1.

[4] La demanderesse a porté la décision du ministre en appel auprès de la division générale du Tribunal. Celle-ci a rejeté l’appel.

[5] La demanderesse veut maintenant faire appel de la décision de la division générale auprès de la division d’appel. Cependant, sa demande à la division d’appel a été déposée en retard. La demanderesse a donc besoin d’une prolongation de délai pour présenter sa demande.

[6] Pour les raisons qui suivent, je refuse la demande de prolongation de la demanderesse.

Questions en litige

[7] Dans cette décision, je réponds aux questions suivantes :

  1. a) La demande à la division d’appel a-t-elle été présentée en retard?
  2. b) Si oui, est-ce que je dois prolonger le délai pour déposer la demande?

Analyse

La demande a été présentée en retard

[8] La décision de la division générale est datée du 8 juin 2021. La demanderesse déclare l’avoir reçue vers le 17 juin 2021Note de bas de page 2.

[9] La demande de la demanderesse était due 90 jours plus tard, soit le 15 septembre 2021Note de bas de page 3. Toutefois, la division d’appel n’a reçu la demande que le 30 novembre 2021.

[10] Par conséquent, la demande à la division d’appel de la demanderesse a été soumise en retard. Je dois accorder une prolongation de délai pour que l’appel aille de l’avant.

Je ne prolonge pas le délai pour déposer la demande

[11] Pour décider s’il faut prolonger le délai ou non, je dois examiner les facteurs suivants :

  1. a) Y avait-il une intention persistante de poursuivre la demande?
  2. b) Le retard a-t-il été raisonnablement expliqué?
  3. c) La prolongation du délai porte-t-elle préjudice à l’autre partie?
  4. d) La cause est-elle défendableNote de bas de page 4?

[12] L’importance de chaque facteur peut varier selon le cas. Je dois avant tout décider si la prolongation du délai est dans l’intérêt de la justiceNote de bas de page 5.

La demanderesse répond aux trois premiers facteurs

[13] La demanderesse déclare avoir expédié une première demande à la division d’appel dans les 90 jours suivant la réception de la décision de la division générale. Toutefois, cette première demande n’a jamais été reçue.

[14] La demanderesse a fait un suivi avec le Tribunal et le problème a été révélé. La demanderesse a donc demandé une deuxième copie des papiers nécessaires, que la division d’appel a reçus, dûment remplis, le 30 novembre 2021.

[15] Dans cette situation, je suis convaincu que la demanderesse avait l’intention persistante de poursuivre sa demande et qu’elle a fourni une explication raisonnable pour le retard.

[16] De plus, compte tenu du retard relativement court et de l’accessibilité aux documents pertinents, j’estime que la capacité du ministre à se défendre ne serait pas indûment amoindrie si une prolongation du délai était accordée.

La demanderesse n’a pas une cause défendable en appel

[17] En évaluant ce facteur, je dois tenir compte du rôle restreint que la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS) assigne à la division d’appel. Plus précisément, la division d’appel peut intervenir à l’égard d’une décision de la division générale seulement s’il est établi qu’au moins l’une des erreurs pertinentes a été commiseNote de bas de page 6.

[18] Dans sa demande à la division d’appel, la demanderesse soutient que la division générale n’a pas respecté l’équité procédurale et qu’elle a commis des erreurs de compétence, de droit, et de fait.

[19] Les arguments de la demanderesse touchent surtout à la façon dont la division générale a tenu compte du jugement de divorce prononcé par la Cour supérieure du Québec. Dans sa situation, la demanderesse maintient que le jugement « n’a pas raison d’être »Note de bas de page 7. Elle demande au Tribunal d’invalider ce jugement.

[20] Je suis sensible aux arguments de la demanderesse. Toutefois, j’estime qu’ils sont voués à l’échec.

[21] En effet, la demanderesse reproche à la division générale de ne pas avoir remis en cause la validité du jugement de divorce. Cependant, le Tribunal n’a pas le pouvoir de modifier ou d’annuler un jugement de la Cour supérieure du Québec.

[22] La demanderesse a présenté une demande de prestation en vertu d’une loi canadienne. Et aux fins de la loi canadienne, le jugement de la Cour supérieure du Québec déclare que le mariage de la demanderesse avec le défunt a pris fin en 2004. Le Tribunal est tenu de respecter ce jugement jusqu’à ce qu’il soit modifié ou annulé par une cour québécoise.

[23] Bien que je sois sensible aux difficultés qu’elle vivait à l’époque, la demanderesse a participé aux procédures devant la Cour supérieure du Québec. Alors, si elle voulait s’opposer à l’octroi d’un jugement de divorce, elle aurait dû soulever ses arguments à ce moment-là.

[24] En ce qui concerne l’équité procédurale, j’ai écouté l’enregistrement audio de l’audience. J’avoue que le membre de la division générale a fait beaucoup d’interventions. Cependant, j’estime que les interventions du membre étaient pertinentes et faites d’une façon respectueuse.

[25] De plus, les points supplémentaires que la demanderesse aurait voulu soulever portent toujours sur l’invalidation du jugement de divorceNote de bas de page 8. Mais comme je viens de l’expliquer, le Tribunal ne peut pas se prononcer sur cette question.

[26] Dans une certaine mesure, les arguments de la demanderesse m’invitent également à réévaluer la preuve d’une façon plus favorable à sa causeNote de bas de page 9. Toutefois, dans l’absence d’une erreur pertinente, cela ne fait pas partie du rôle de la division d’appelNote de bas de page 10.

[27] Enfin, je souligne le fait que plusieurs réparations demandées par la demanderesse ne relèvent pas de la compétence du TribunalNote de bas de page 11. Notamment, celles qui portent sur le jugement de divorce et le règlement de la succession du défunt.

[28] J’ai quand même examiné le dossier et étudié la décision faisant l’objet de l’appel afin d’évaluer si la division générale aurait pu mal interpréter ou mal examiner les éléments de preuve pertinentsNote de bas de page 12. Toutefois, j’estime que la division générale a tenu compte des éléments de preuve pertinents.

[29] Bien que trois des facteurs ci-dessus militent en faveur de la prolongation du délai d’appel, j’ai également évalué ce que pourrait nécessiter l’intérêt de la justice. À cet égard, je reconnais que le refus de prolonger le délai d’appel signifie que la cause de la demanderesse se termine ici. Cependant, je dois également considérer dans quelle mesure il serait dans l’intérêt de la justice de permettre l’instruction d’un appel qui est voué à l’échec.

[30] En somme, j’accorde un poids particulier au facteur de la cause défendableNote de bas de page 13.

[31] Après avoir tenu compte des facteurs susmentionnés et de l’intérêt de la justice, j’estime qu’il faut refuser de prolonger le délai de la demanderesse pour déposer sa demande à la division d’appel.

Conclusion

[32] Je refuse à la demanderesse une prolongation de délai pour présenter sa demande à la division d’appel. Par conséquent, l’appel n’ira pas de l’avant.

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