Sécurité de la vieillesse (SV) et Supplément de revenu garanti (SRG)

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[TRADUCTION]

Citation : LL c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2022 TSS 523

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de la sécurité du revenu

Décision

Partie appelante : L. L.
Partie intimée : Ministre de l’Emploi et du Développement social

Décision portée en appel : Décision de révision rendue le 7 octobre 2020 par le ministre de l’Emploi et du Développement social (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Jean Lazure
Mode d’audience : Sur la foi du dossier
Date de la décision : Le 7 avril 2022
Numéro de dossier : GP-21-866

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté.

[2] L. L., l’appelante, n’a pas droit à une pension partielle au titre de la Loi sur la sécurité de la vieillesse.

Aperçu

[3] Le 3 mars 2015, le ministre a reçu la première demande de pension de la Sécurité de la vieillesse présentée par l’appelanteNote de bas page 1. Le ministre a reçu une deuxième demande le 1er novembre 2016Note de bas page 2.

[4] Il convient de noter que les deux demandes indiquaient que l’appelante ne résidait pas au Canada. Par conséquent, l’appelante avait besoin de 20 ans de résidence au Canada pour avoir droit à une pension de la Sécurité de la vieillesse.

[5] Après la présentation des demandes, le ministre et l’appelante ont correspondu pendant quelques mois. Le 24 août 2017, le ministre a envoyé une lettre à l’appelante pour lui donner le choix entre recevoir une pension partielle au taux de 31/40e ou revenir au Canada pour y résider pendant une année complèteNote de bas page 3. Le 6 septembre 2017, l’appelante a choisi la pension partielle, qui comprenait un paiement rétroactif de 18 077,88 $Note de bas page 4.

[6] Le ministre a toutefois changé d’avis. La pension de la Sécurité de la vieillesse n’a jamais été versée, pas plus que le paiement rétroactif. Le ministre a plutôt lancé une enquêteNote de bas page 5. Celle-ci a duré un certain nombre de mois. Il y a eu d’autres échanges entre le ministre et l’appelante.

[7] Le 14 mai 2019, le ministre a refusé de verser une pension de la Sécurité de la vieillesse à l’appelante parce qu’elle ne résidait plus au Canada depuis au moins 20 ansNote de bas page 6. Le 7 octobre 2020, après avoir révisé le dossier, le ministre a maintenu sa décisionNote de bas page 7. L’appelante a donc porté la décision du ministre en appel à la division générale du Tribunal.

Question en litige

[8] La Loi sur la sécurité de la vieillesse permet aux personnes qui demandent une pension de recevoir une pension partielle quand elles ne peuvent pas bénéficier d’une pleine pension. Si la personne ne réside pas au Canada, il faut qu’elle y ait déjà résidé pendant au moins 20 ans pour avoir droit à une pension partielleNote de bas page 8.

[9] Par conséquent, je dois décider si l’appelante a accumulé au moins 20 ans de résidence avant de demander une pension de la Sécurité de la vieillesse.

Motifs de ma décision

[10] Je juge que l’appelante n’a pas accumulé au moins 20 années de résidence au Canada avant de demander une pension de la Sécurité de la vieillesse.

[11] Les critères juridiques à appliquer pour déterminer la résidence sont énoncés dans la décision Canada (Ministre du Développement des ressources humaines) c DingNote de bas page 9. Je dois prendre en compte plusieurs facteurs pour savoir si les conditions de résidence sont remplies :

  • les liens prenant la forme de biens mobiliers;
  • les liens sociaux au Canada;
  • les autres liens fiscaux au Canada (assurance maladie, permis de conduire, bail, dossiers fiscaux, etc.);
  • les liens dans un autre pays;
  • la régularité et la durée des séjours au Canada ainsi que la fréquence et la durée des absences du Canada;
  • le mode de vie de la personne ou son établissement au Canada.

[12] L’appelante a la responsabilité de prouver qu’elle a résidé au CanadaNote de bas page 10.

La preuve documentaire déposée par l’appelante ne prouve pas qu’elle a résidé au Canada

[13] L’appelante a déposé les documents suivants :

  • une carte d’identité de l’immigration canadienne datant de mai 1963Note de bas page 11;
  • ses passeports grecs datant de 1963 à 1964, de 1970 à 1975, de 1981 à 1986, de 1993 à 1998 et de 2003 à 2008Note de bas page 12;
  • un permis de conduire grec valide de 1984 à 1994Note de bas page 13;
  • un laissez-passer pour prendre l’autobus à Montréal au mois d’août 1986Note de bas page 14;
  • une carte Santé de l’Ontario, valide d’octobre 1994 à janvier 1995Note de bas page 15;
  • un état des gains ouvrant droit à pension produit par Retraite Québec le 31 mars 2016, qui montre uniquement les gains de 1970 et de 1971Note de bas page 16;
  • une carte de l’hôpital Toronto East General and Orthopaedic HospitalNote de bas page 17;
  • une carte d’assurance socialeNote de bas page 18;
  • un certificat international de vaccinationNote de bas page 19.

[14] Malheureusement pour l’appelante, ces documents prouvent très peu de choses en ce qui concerne la résidence au Canada. En fait, certains nuisent davantage à la cause de l’appelante au lieu de l’aider.

[15] La carte d’identité de l’immigration canadienne prouve que l’appelante est arrivée au Canada le 9 mai 1963. Fait important, le document indique que la date de naissance de l’appelante est le 5 août 1939.

[16] Le ministre avait soulevé la question des différentes dates de naissance sur les deux demandes de l’appelante. En effet, sa première demande, reçue le 3 mars 2015, indiquait le 5 août 1939 comme date de naissance, tandis que sa deuxième demande, reçue le 1er novembre 2016, indiquait le 21 juillet 1939 comme date de naissance. L’appelante a déclaréNote de bas page 20 que la date de juillet était sa date de naissance, mais elle n’a jamais expliqué pourquoi il y avait une différence.

[17] L’appelante a envoyé les passeports au ministre à trois moments différents : en avril 2017Note de bas page 21, en juin 2018Note de bas page 22 et en juillet 2019Note de bas page 23. Je crois que cela montre que l’appelante souhaitait que le ministre s’appuie sur ces documents pour rendre une décision au sujet de la résidence et qu’elle veut maintenant que je fasse de même.

[18] Malheureusement, comme je l’ai déjà mentionné, ce sont des documents qui nuisent à la cause de l’appelante au lieu de l’aider. Comme le ministre l’a souligné, tous ces passeports sont grecs, ils ont apparemment été délivrés en Grèce et ils semblent tous indiquer la Grèce comme lieu de résidence de l’appelante.

[19] Les passeports révèlent un autre élément important : une note manuscrite située à côté d’un timbre permettant l’admission de l’appelante au Canada en juin 1993Note de bas page 24. On peut lire ceci : [traduction] « N’a pas vécu au Canada depuis 1973 ». À part cela, les passeports contiennent très peu de renseignements au sujet des allées et venues de l’appelante.

[20] Les passeports m’amènent à penser qu’il y a plus de chances que l’appelante résidait en Grèce et non au Canada durant les périodes où ils étaient valides, qui sont assez longues. Le permis de conduire grec mène à peu près à la même conclusion.

[21] Le certificat de vaccination semble provenir du U.S. Department of Health, Education, and Welfare [ministère américain de la Santé, de l’Éducation et du Bien-être social] et n’est d’aucune utilité pour l’appelante.

[22] Je juge que les autres documents déposés par l’appelante (laissez-passer d’autobus, carte d’assurance maladie, carte d’hôpital, carte d’assurance sociale, état des gains ouvrant droit à pension) sont trop peu nombreux et trop incohérents pour prouver qu’elle résidait au Canada.

[23] De plus, je juge que l’absence d’une bonne partie des documents qui servent habituellement à attester de la résidence au Canada est très révélatrice. Il n’y a aucun relevé de compte bancaire ou de carte de crédit et aucune déclaration de revenus. Rien ne prouve qu’elle a cherché à obtenir des soins de santé au Canada ou qu’elle avait une assurance maladie au Canada.

[24] Il n’y a pas de bail ni de preuve de propriété canadienne. En fait, le dossier montre que, selon la personne qui était propriétaire de l’immeuble situé à l’adresse où l’appelante disait habiter, l’appelante restait à cette adresse lorsqu’elle et sa famille quittaient la Grèce pour séjourner ici. Comme le fait remarquer le ministre, [traduction] « rien n’indique que l’appelante et sa famille aient jamais possédé ou loué un logement en Ontario ou au Québec pendant les périodes où elles se trouvaient au CanadaNote de bas page 25 ».

[25] Enfin, l’appelante n’a jamais déposé la liste de ses présences au Canada et de ses absences du Canada.

[26] Il convient de souligner que le ministre a demandé la plupart des documents mentionnés ci-dessus, mais l’appelante ne les a jamais produits. Elle a déposé une lettre du ministre à ce sujet et y a écrit à la main : [traduction] « vous pourriez vérifier par vous-mêmeNote de bas page 26 ».

[27] Toutefois, il revient à l’appelante de prouver sa résidence au Canada. Et je conclus selon la prépondérance des probabilités, qui est la norme de preuve applicable, que l’appelante ne s’est pas acquittée de cette responsabilité.

[28] Je conclus qu’aucun élément de preuve ne démontre que l’appelante a déjà établi sa résidence au Canada, encore moins pendant les 20 années dont elle a besoin pour pouvoir bénéficier d’une pension partielle de la Sécurité de la vieillesse.

Conclusion

[29] L. L., l’appelante, n’a pas droit à une pension partielle au titre de la Loi sur la sécurité de la vieillesse.

[30] Par conséquent, l’appel est rejeté.

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