Sécurité de la vieillesse (SV) et Supplément de revenu garanti (SRG)

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[TRADUCTION]

Citation : SS c Ministre de l’Emploi et du Développement social et PS, 2022 TSS 713

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de la sécurité du revenu

Décision

Partie appelante : S. S.
Partie intimée : Ministre de l’Emploi et du Développement social
Partie mise en cause : P. S.

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision datée du 19 août 2020 rendue par le ministre de l’Emploi et du Développement social (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Virginia Saunders
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience :

Le 10 février 2022
Le 12 mai 2022
Le 15 juin 2022

Personnes présentes à l’audience : Appelant
Date de la décision : Le 11 juillet 2022
Numéro de dossier : GP-20-1825

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté.

[2] L’appelant, S. S., n’a pas droit au calcul de son Supplément de revenu garanti (SRG) au taux applicable à une personne seule.

[3] Cette décision explique pourquoi je rejette l’appel.

Aperçu

[4] L’appelant a 76 ans. Il est marié à la mise en cause depuis 1975. Il a commencé à recevoir la pension de la Sécurité de la vieillesse (SV) et le SRG en septembre 2010.

[5] Le SRG de l’appelant a été calculé au taux applicable aux personnes mariées. J’expliquerai ce que cela signifie.

[6] Le SRG est versé aux pensionnés de la SV qui ont peu ou pas d’autres revenusNote de bas de page 1. Le ministre de l’Emploi et du Développement social (le ministre) établit si un pensionné y a droit pour chaque période de paiement de 12 moisNote de bas de page 2. Pour ce faire, il examine généralement le revenu du pensionné (tel qu’il est déclaré dans sa déclaration de revenus) pour l’année civile précédenteNote de bas de page 3.

[7] Si le pensionné a un époux, l’admissibilité au SRG est fondée sur le revenu combiné du coupleNote de bas de page 4. C’est ce qu’on appelle le taux applicable aux personnes mariées.

[8] Si le pensionné est séparé de son époux pendant une période continue d’au moins trois mois, son admissibilité au SRG est calculée comme s’il n’avait pas d’épouxNote de bas de page 5. C’est ce qu’on appelle le taux applicable aux personnes célibataires.

[9] En mars 2017, l’Agence du revenu du Canada a réévalué les revenus de 2014 de la mise en causeNote de bas de page 6. Son revenu de 2014 était désormais supérieur à celui que le ministre avait utilisé pour déterminer si l’appelant était admissible au SRG. Par conséquent, le ministre a décidé que l’appelant n’était pas admissible au SRG de juillet 2015 à juin 2016. L’appelant a dû rembourser les 4 230 $ qu’il avait reçus pendant cette période de paiementNote de bas de page 7.

[10] Après avoir reçu la décision du ministre, l’appelant a communiqué avec Service Canada. Il voulait que son SRG soit calculé au taux applicable aux personnes célibataires. Service Canada lui a remis un formulaire de déclaration solennelle à remplir.

[11] L’appelant a signé la déclaration solennelle en décembre 2017. Il a déclaré que lui et la mise en cause vivaient séparément depuis le 1er septembre 2015Note de bas de page 8. La mise en cause a fait une déclaration solennelle similaire en février 2020Note de bas de page 9. L’appelant prétend qu’ils sont encore séparés.

[12] Le ministre réfute que l’appelant et la mise en cause soient séparés. Il n’a pas voulu changer sa décision concernant le SRG de l’appelant en 2015-2016, et il continue de calculer le SRG de l’appelant au taux applicable aux personnes mariéesNote de bas de page 10.

[13] L’appelant a fait appel de la décision du ministre auprès de la division générale du Tribunal de la sécurité sociale.

Ce que l’appelant doit prouver

[14] Pour que l’appelant obtienne gain de cause, il doit prouver que lui et la mise en cause sont séparés depuis le 1er septembre 2015. L’appelant n’a pas prétendu qu’ils étaient séparés avant cette date.

[15] L’appelant doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’il doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable qu’il était séparé au sens de la Loi sur la sécurité de la vieillesse (la LSV).

Motifs de ma décision

[16] Je conclus que l’appelant n’a pas prouvé que lui et la mise en cause sont séparés depuis le 1er septembre 2015, ou pour toute période continue d’au moins trois mois depuis cette date.

[17] Voici les motifs de ma décision.

Signification du terme « séparé »

[18] Le ministre a fait valoir que les époux sont séparés dans les cas suivants :

  • ils vivent séparément d’un commun accord;
  • il y a une séparation légale;
  • l’un a abandonné l’autre selon la loi de la province où ils ont résidé ensemble en dernier lieuNote de bas de page 11.

[19] Cependant, ce n’est pas ce que dit la LSV. La LSV ne définit pas le terme « séparé ». Elle n’utilise pas non plus l’expression « séparé et vivre séparément ». Il n’existe pas de décisions de justice qui définissent les facteurs à prendre en compte pour décider si un couple marié est séparé au sens de la LSVNote de bas de page 12.

[20] Pour décider de la signification du terme « séparé » dans le cadre du présent appel, je dois examiner le sens ordinaire du mot et réfléchir à la manière dont il s’inscrit dans l’objet de la SV et l’intention du législateurNote de bas de page 13.

[21] « Séparé » sert généralement à décrire des gens ou des choses qui ne sont pas ensemble. Or, lorsque nous faisons référence à des personnes mariées qui sont séparées, cela implique généralement plus que cela. Nous voulons dire que les personnes ne sont pas ensemble parce qu’au moins l’une d’elle a décidé qu’elle ne voulait plus vivre ou être vue comme faisant partie d’un couple marié, et a agi en fonction de cette décision.

[22] Je conclus que le législateur a voulu que le terme ait également ce sens dans la LSV. Je suis arrivée à cette conclusion en examinant une règle similaire pour les conjoints de faitNote de bas de page 14. Comme pour les époux mariés, le SRG des conjoints de fait est calculé en tenant compte des deux revenus combinés. Si les personnes cessent d’être des conjoints de fait pendant plus de trois mois, leur SRG est calculé au taux applicable aux personnes célibataires.

[23] Je conclus que le législateur avait l’intention de traiter les couples en union libre et les couples mariés de la même manière. Cela signifie que les facteurs qui montrent que deux personnes ne sont plus des conjoints de fait sont les mêmes que ceux qui montrent qu’un couple marié est séparé.

[24] La LSV dispose qu’un conjoint de fait est « une personne qui vit avec [une] personne en cause dans une relation conjugaleNote de bas de page 15 ». Par extension, les époux ne sont pas séparés s’ils vivent dans une relation conjugale.

[25] Je vais maintenant expliquer pourquoi j’ai décidé que l’appelant et la mise en cause vivent dans une relation conjugale depuis septembre 2015.

Signification de l’expression « vivre dans une relation conjugale »

[26] Plusieurs décisions de justice expliquent ce que signifie le fait de vivre dans une relation conjugale. Bien que certaines de ces décisions concernent le Régime de pensions du Canada, elles sont pertinentes parce que le Régime de pensions du Canada définit le terme « conjoint de fait » de la même façon que la LSVNote de bas de page 16.

[27] Pour décider si l’appelant et la mise en cause vivent dans une relation conjugale, je ne juge pas de la qualité de leur relation. Au lieu de cela, je dois examiner des facteurs tels que les suivants au sujet des parties :

  • leurs modalités de vie et fait qu’elles partagent ou non le même lit;
  • leur arrangement financier;
  • le comportement que chacune a envers l’autre en privé et en public;
  • l’aide qu’elles s’apportent mutuellement à la maison;
  • l’image que la famille et la communauté ont de leur relationNote de bas de page 17.

[28] Tous ces facteurs ne doivent pas pointer vers l’existence d’une relation conjugale, et ils peuvent aussi le faire à des degrés divers. Je dois adopter une approche souple pour décider s’il existe une relation conjugaleNote de bas de page 18.

L’appelant vit dans une relation conjugale.

[29] Je conclus que l’appelant et la mise en cause vivaient dans une relation conjugale en septembre 2015, et qu’ils ont continué à le faire depuis. Cela signifie que l’appelant n’a pas prouvé qu’il était séparé pendant cette période.

[30] J’accepte la preuve que l’appelant a présentée pour montrer que lui et la mise en cause ont vécu à des adresses différentes de septembre 2015 jusqu’à un certain moment en 2018. J’accepte également que, depuis lors, la mise en cause vit à la même adresse que l’appelant, mais que chacun vit dans des parties différentes de la maison.

[31] Un couple peut cohabiter même s’il ne vit pas sous le même toit. Ils peuvent également être séparés même s’ils vivent toujours sous le même toitNote de bas de page 19.

[32] Bien que l’appelant et la mise en cause aient été et soient séparés physiquement, les autres éléments de preuve me donnent à penser qu’ils ont continué à vivre dans une relation conjugale.

[33] J’ai pris cette décision en tenant compte des facteurs qui suivent.

J’ai cru la majeure partie des propos de l’appelant

[34] J’ai cru la majeure partie des propos de l’appelant sur sa relation avec la mise en cause. La majeure partie de son histoire était plausible. Il a raconté la même histoire par écrit et en personne au cours de trois audiencesNote de bas de page 20. Il a dit la même chose à un enquêteur de Service Canada en octobre 2018Note de bas de page 21. Dans ses observations écrites, le ministre n’a pas laissé entendre que l’appelant ne disait pas la vérité. Le ministre n’a pas envoyé de représentant à l’audience pour contre-interroger l’appelant.

[35] Je n’ai pas cru certains des propos de l’appelant. J’en parlerai plus tard. Il s’agissait de points mineurs, et cela n’a pas eu d’incidence sur ma conclusion selon laquelle l’appelant a été sincère.

Comment l’appelant et la mise en cause vivent et se traitent l’un l’autre

[36] Les modalités de vie de l’appelant et de la mise en cause et la question de savoir s’ils partageaient le même lit laissent penser que la relation conjugale a cessé en septembre 2015. Cependant, comme je l’explique ci-dessous, ce ne sont pas les seuls facteurs dont je dois tenir compte.

[37] L’appelant m’a dit que lui et la mise en cause avaient cessé d’avoir des relations sexuelles quelques années avant 2015. Au début, c’était à cause de leur âge. Plus tard, la détérioration de la relation a également joué un rôle. L’appelant sentait qu’il n’y avait pas d’amour entre eux.

[38] L’appelant m’a dit que sa relation avec la mise en cause avait commencé à se détériorer en 2014 en raison du stress financier causé par le souhait de la mise en cause de construire une nouvelle maison. À l’époque, ils vivaient ensemble dans la maison familiale située à X à Edmonton. Ils ont créé une société avec leur fils. La société a acheté un terrain situé à X, à environ huit kilomètres. Ils ont commencé à construire une nouvelle maison.

[39] Ils avaient initialement prévu que l’appelant et la mise en cause vivraient dans la nouvelle maison avec leur fils. Puis leur fils a perdu son emploi. Il ne pouvait pas contribuer à payer les coûts de construction et a dit à ses parents qu’il n’emménagerait pas dans la nouvelle maison.

[40] L’appelant m’a dit qu’il n’était pas très impliqué dans le projet. Il ne pensait pas que c’était une bonne idée. Il s’inquiétait toujours de ce que cela coûterait. En revanche, la mise en cause était très enthousiaste. Elle voulait continuer à construire. Leur relation en a souffert.

[41] La construction de la nouvelle maison a été achevée en septembre 2015. La mise en cause y a emménagé avec tous ses biens. L’appelant m’a dit que la mise en cause pensait que leur fils suivrait, mais il ne l’a jamais fait. L’appelant demeurait à X. Il ne voulait rien avoir à faire avec la propriété située à X, car il estimait qu’ils n’en avaient pas les moyens. Cela lui a causé beaucoup de stress et de soucis financiers.

[42] L’appelant m’a dit qu’il n’avait pas la clé de la nouvelle maison. Il n’y est pas allé du tout après que les travaux de construction ont été finis. Il n’a pas vu la mise en cause à X pendant qu’elle vivait à X. Cependant, elle pouvait aller à X si elle le voulait parce qu’elle connaissait les codes du verrou de la maison principale et du verrou du garage. Elle a continué à recevoir du courrier à la boîte aux lettres communautaire pour X. L’appelant aussi.

[43] La famille a vendu X en mai 2018. L’appelant m’a dit qu’il n’avait rien à voir avec la vente et qu’il n’avait jamais vu le produit de la vente. La mise en cause a alors commencé des travaux de rénovation majeure à X. L’appelant a dû déménager au sous-sol en raison des travaux. La mise en cause est allée vivre chez un ami jusqu’à ce que les travaux soient terminés. Puis elle est retournée à X.

[44] L’appelant et la mise en cause vivent toujours à X. L’appelant m’a dit que la mise en cause vit dans la partie principale de la maison depuis qu’elle est revenue en 2018. L’appelant vit toujours dans le sous-sol.

[45] Le sous-sol dispose d’une entrée distincte accessible depuis le garage. On peut également y accéder par la partie principale de la maison. L’appelant a un réfrigérateur, une chambre et une salle de bains. Il a très peu de contacts avec la mise en cause. Il peut la croiser quand elle se rend au sous-sol pour faire la lessive. Elle cuisine parfois de la nourriture pour lui et la laisse sur le comptoir de la cuisine. Il l’apporte au sous-sol pour la manger.

[46] Si je ne considérais que cette partie de la relation entre l’appelant et la mise en cause, je serais tenté de dire qu’ils étaient séparés. Toutefois, je dois aussi tenir compte d’autres facteurs. Leur arrangement financier et leurs actions depuis septembre 2015 me donnent à penser qu’ils n’étaient pas séparés au sens exigé par la LSV.

L’arrangement financier entre l’appelant et la mise en cause

[47] L’arrangement financier montre que l’appelant et la mise en cause ont continué à vivre dans une relation conjugale après septembre 2015.

[48] Les dispositions à la banque et les autres aspects financiers n’ont pas changé de manière importante en septembre 2015 ou après. Ils ont continué à se présenter aux entreprises et aux organismes publics comme un couple marié vivant ensemble à X. L’appelant n’a cessé de le faire que lorsqu’il a compris que cela allait avoir une incidence sur son droit au SRG.

[49] Comptes bancaires : L’appelant et la mise en cause ont des comptes bancaires distincts. Cependant, l’appelant m’a dit qu’ils avaient également des comptes distincts avant septembre 2015. L’appelant a utilisé son compte pour déposer son chèque de paie. Ils avaient un compte commun qu’ils ont utilisé pour une ligne de crédit afin de financer la maison X. Ils ont remboursé la ligne de crédit après avoir vendu X en 2018. L’appelant a ensuite fermé le compte.

[50] De nombreux couples mariés ou en union libre ont des comptes distincts. D’autres ont des comptes joints. D’autres ont une combinaison des deux. Les dispositions bancaires de l’appelant avant et après septembre 2015 ne démontrent pas qu’il ne vivait plus dans une relation conjugale.

[51] Dépenses du ménage : Depuis septembre 2015, l’appelant et la mise en cause achètent leurs propres provisions. Ils divisent les autres dépenses. Si une facture est au nom de l’appelant, ce dernier la paiera. La mise en cause lui donnera de l’argent pour sa part ou paiera elle-même une dépense à peu près égale. Par exemple, l’appelant paie les taxes foncières, mais la mise en cause paie tous les frais d’entretien de la maison. Elle achète également des fournitures de jardinage et des plantes, bien que le jardinage soit le passe-temps de l’appelant, pas le sien.

[52] L’appelant m’a dit qu’il estime que cet arrangement est équitable. Ils ne tiennent pas une comptabilité exacte, parce qu’ils ne se parlent pas, et parce que lui pense que tout s’équilibre.

[53] J’ai du mal à accepter que l’appelant et la mise en cause ne se parlent pas du tout, surtout en ce qui concerne les questions financières. Cependant, qu’ils se parlent ou non, la façon désinvolte dont ils décident qui paie quoi et le degré de confiance qui intervient dans une telle organisation de leurs finances me donnent à penser que ni l’un ni l’autre n’avait l’intention d’interrompre leur relation en tant que couple marié ou d’y mettre fin, peu importe où la mise en cause vivait.

[54] Propriété des biens : Depuis septembre 2015, ni l’appelant ni la mise en cause n’ont entrepris de démarches pour diviser leurs biens. Cela inclut leurs principaux actifs : les maisons à X (jusqu’en 2018) et à X. L’appelant est resté actionnaire de la société familiale qui possédait X. Il m’a dit être le propriétaire de X.

[55] L’appelant m’a dit qu’il n’avait rien fait pour diviser les actifs parce qu’il ne pouvait pas se payer un avocat. Je trouve cela difficile à admettre. Il y avait des choses qu’il aurait pu faire gratuitement ou à peu de frais, comme changer les serrures de X. En outre, le coût de l’inaction aurait pu être important, car il restait responsable des taxes foncières de XNote de bas de page 22. L’appelant était préoccupé par ses finances. Il serait logique qu’il prenne des mesures pour se protéger si lui et la mise en cause étaient vraiment séparés.

[56] L’inaction de l’appelant est semblable à la manière informelle dont lui et la mise en cause ont réparti leurs dépenses. Cela montre qu’il était prêt à laisser les choses telles qu’elles étaient plutôt que de se séparer de la mise en cause et d’officialiser l’arrangement pour protéger ses intérêts financiers. Cela montre aussi qu’il considère toujours X comme la maison de la mise en cause.

[57] Je souligne que la mise en cause n’a pas pris de mesures non plus. Elle avait encore plus de raisons de le faire, car son nom ne figure pas sur le titre de propriété de X.

[58] Je souligne également que la mise en cause a continué à utiliser X comme adresse du domicileNote de bas de page 23. Elle a continué à y recevoir du courrier. À la vente de X, elle a commencé la rénovation de X et y est retournée vivre. Elle a toujours considéré la propriété comme son domicile, et l’appelant n’a rien fait pour montrer qu’il voir les choses différemment.

[59] Le fait que l’appelant et la mise en cause n’aient pris aucune mesure pour diviser leurs biens me dit qu’ils ne considéraient pas le déménagement de la mise en cause à X, ou le changement de leurs conditions de vie en 2018, comme une séparation ou la fin de leur relation conjugale.

[60] Prestations : L’appelant et la mise en cause recevaient tous deux des prestations de la SV en septembre 2015. Leur admissibilité étant basée sur leur état civil, ils étaient censés informer sans délai le ministre en cas de séparationNote de bas de page 24. L’appelant en a été avisé expressément dans une lettre de juillet 2015Note de bas de page 25.

[61] Ni l’appelant ni la mise en cause n’ont dit au ministre qu’ils s’étaient séparés avant de déposer leurs déclarations solennelles en décembre 2017 (l’appelant) et en février 2020 (la mise en cause). Au lieu de cela, en novembre 2016, la mise en cause a demandé à convertir son allocation de la SV en une pension de la SV. Le formulaire de demande donnait « marié » et « séparé » parmi les options possibles pour l’état civil. La mise en cause a dit qu’elle était mariéeNote de bas de page 26.

[62] J’ai accordé très peu de poids aux déclarations solennelles, qui sont incompatibles avec le reste des éléments de preuve. L’appelant n’a fait sa déclaration qu’après avoir appris qu’il n’était pas admissible au SRG en raison du revenu de la mise en cause. La mise en cause n’a fait la sienne que parce que l’appelant le lui a demandéNote de bas de page 27.

[63] Je ne pense pas que l’appelant n’était pas franc lorsqu’il a fait cette déclaration. Lui et la mise en cause étaient physiquement séparés, et il n’était pas déraisonnable pour lui de penser que cela équivalait à une séparation aux fins du SRG. Toutefois, compte tenu du fait qu’il n’a adopté ce point de vue que lorsqu’il a su que cela allait lui coûter de l’argent, je ne peux pas l’accepter comme élément de preuve étayant que lui et la mise en cause ont effectivement cessé de vivre dans une relation conjugale en septembre 2015, ou à tout moment après cela.

[64] Impôt sur le revenu : L’appelant a déclaré être marié dans ses déclarations de revenus de 2015, 2016 et 2017Note de bas de page 28. L’appelant m’a dit que c’est son comptable qui avait préparé ces déclarations, et donc qu’il n’était pas au courant. Toutefois, l’appelant ne peut pas utiliser cet argument comme une excuse. Il est responsable du contenu des déclarations. S’il pensait vraiment que la mise en cause et lui étaient séparés, il en aurait informé son comptable.

[65] Je reconnais que l’appelant a ensuite produit, pour les années 2015 à 2018, des déclarations dans lesquelles il a déclaré être séparéNote de bas de page 29. Cependant, il ne les a pas produites avant 2019. Ces déclarations, à l’instar de sa déclaration solennelle, ne me persuadent pas qu’il était réellement séparé durant ces années.

[66] Assurance automobile : En 2018, l’appelant a désigné la mise en cause sur son assurance automobileNote de bas de page 30. Il m’a dit que c’était nécessaire parce qu’ils vivent à la même adresse et ont donc accès à la clé de l’un et l’autre. Il m’a dit qu’ils étaient aussi nommés sur la même assurance les autres années, parce que la mise en cause n’a jamais changé d’adresse pendant qu’elle était à X. C’est peut-être vrai, mais il s’agit d’un autre aspect pour lequel l’appelant n’a pris aucune mesure pour se protéger financièrement de ce que pouvait faire la mise en cause. La conclusion la plus logique est qu’ils vivent toujours ensemble, dans une relation conjugale. Ils ne sont pas séparés.

[67] Aînés et logement en Alberta : En 2019 et 2020, le gouvernement de l’Alberta a mis à jour le dossier de l’appelant, le classant comme célibataire. En conséquence, il reçoit une aide financièreNote de bas de page 31. Cependant, l’appelant m’a dit que le classement reposait sur les renseignements fournis dans sa déclaration de revenus. Comme je l’ai expliqué précédemment, je n’accorde pas beaucoup de poids à ce que l’appelant a dit sur son état civil après mars 2017. En effet, depuis lors, il insiste sur le fait que lui et la mise en cause sont séparés, sans preuve suffisante à l’appui.

La perception qu’ont les membres de la famille et la communauté de la relation

[68] L’appelant m’a dit qu’il voyait la mise en cause occasionnellement à l’extérieur de la maison lors d’événements communautaires et familiaux, mais qu’ils n’y allaient pas en couple. Cela comprenait le mariage de leur fils en octobre 2018, lorsqu’ils se sont rendus ensemble en Colombie-Britannique en utilisant des billets achetés par leur fils. L’appelant a dit qu’ils sont restés chez leur fils, mais qu’ils n’ont pas dormi ensembleNote de bas de page 32.

[69] Toutefois, l’appelant n’a fourni aucune preuve montrant que les membres de sa famille ou de sa communauté pensent que lui et la mise en cause sont séparés. Il n’y a pas de lettres de membres de la famille ou d’amis. Personne n’a comparu comme témoin.

[70] La mise en cause n’est pas venue à l’audience. Elle n’a rien déposé pour contester le rapport d’un enquêteur sur une entrevue en octobre 2018. Selon ce rapport, la mise en cause a déclaré qu’elle et l’appelant étaient mariés et ne s’étaient jamais séparésNote de bas de page 33.

Résumé

[71] L’appelant n’a pas prouvé qu’il est plus probable qu’improbable que lui et la mise en cause se soient séparés en septembre 2015, ou à tout moment par la suite. Ils ont vécu à des adresses différentes et vivent maintenant dans des parties différentes de la même maison. Ils n’ont pas de relation sexuelle. Ils n’ont peut-être plus grand-chose en commun.

[72] Toutefois, ces facteurs sont contrebalancés par le fait qu’ils sont restés légalement mariés. Plus important encore, ils n’ont pris aucune mesure pour dénouer leurs finances et leurs obligations l’un envers l’autre. Ils ont une approche décontractée de leurs finances, ce qui témoigne d’un niveau de confiance que l’on a plus de chances de trouver dans une relation conjugale. Rien ne prouve qu’ils se soient présentés comme séparés aux membres de leur famille ou à la communauté. De plus, ils n’ont informé Service Canada ou l’Agence du revenu du Canada de leur séparation que lorsqu’ils ont pensé qu’il était dans leur intérêt financier de le faire.

Conclusion

[73] Je conclus que l’appelant n’était pas séparé en septembre 2015, ni à aucun moment par la suite.

[74] Par conséquent, l’appel est rejeté.

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