Sécurité de la vieillesse (SV) et Supplément de revenu garanti (SRG)

Informations sur la décision

Résumé :

L’appelant a été choisi pour l’inscription automatique à la pension de la Sécurité de la vieillesse (SV) à compter de mai 2020, soit le mois suivant son 65e anniversaire. Le ministre a affirmé avoir envoyé plusieurs lettres à l’appelant pour l’informer de son intention d’approuver automatiquement la pension de la SV, mais n’avoir reçu aucun avis de sa part pour l’aviser qu’il souhaitait retarder le début de sa pension. L’appelant a expliqué qu’il n’avait jamais reçu les lettres du ministre. Le versement de la pension de l’appelant a commencé en mai 2020. Cependant, en raison de l’impôt de récupération de la SV, l’Agence du revenu du Canada a retenu la totalité du montant. Par conséquent, l’appelant n’a reçu aucun versement et aucun dépôt n’a été effectué dans son compte bancaire. Il ne savait pas qu’il touchait la pension de la SV jusqu’à ce qu’il reçoive un feuillet T4A au début de l’année suivante. L’appelant a demandé au ministre d’annuler le versement de la pension. Le ministre a rejeté sa demande parce qu’elle avait été déposée après le délai de six mois autorisé pour l’annulation. L’appelant a fait appel de cette décision devant la division générale (DG) du Tribunal de la sécurité sociale.

La Loi sur la sécurité de la vieillesse (Loi sur la SV) permet l’annulation de la pension dans les six mois suivant la date où le service a débuté. L’appelant a fait une demande à cet effet le 29 mars 2021, c’est-à-dire plus de six mois après le début du service.

Il faut que les trois critères suivants soient remplis pour que le ministre verse la pension :
• La personne a droit à la pension au titre de l’article 3(1) ou 3(2) de laLoi sur la SV.
• Une demande a été présentée par cette personne ou en son nom et elle a été agréée (approuvée).
• Le paiement de la pension est rétroactif uniquement dans la mesure prévue par la Loi.

Le ministre peut dispenser une personne du deuxième critère. Toutefois, si c’est là son intention, il en doit aviser la personne par écrit. Il doit aussi lui fournir les renseignements sur lesquels il entend se fonder pour approuver le paiement de la pension. Selon l’appelant, en raison des lacunes du service de livraison du courrier, il n’a pas été avisé de l’intention du ministre de l’inscrire automatiquement à la pension de la SV. Il ne savait donc pas qu’il devait faire annuler l’inscription automatique. La DG a jugé que le témoignage de l’appelant concernant la livraison du courrier dans sa ville était crédible. Par conséquent, elle a conclu que l’appelant n’avait jamais été avisé de l’intention du ministre de le dispenser de l’obligation de présenter une demande. Ainsi, le ministre n’avait pas le pouvoir légal de commencer à verser la pension de la SV à l’appelant. Pour cette raison, la DG a conclu que l’appelant avait demandé l’annulation de la pension dans le délai prévu par la Loi sur la SV. L’appel a été accueilli.

Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : ED c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2022 TSS 721

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de la sécurité du revenu

Décision

Partie appelante : E. D.
Partie intimée : Ministre de l’Emploi et du Développement social

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision datée du 1er juin 2021 rendue par le ministre de l’Emploi et du Développement social (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Connie Dyck
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience : Le 30 juin 2022
Personnes présentes à l’audience :

Appelant

Date de la décision : Le 19 juillet 2022
Numéro de dossier : GP-21-1805

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est accueilli.

[2] L’appelant, E. D, est admissible à l’annulation de sa pension de la Sécurité de la vieillesse (SV). Cette décision explique pourquoi j’accueille l’appel.

Aperçu

[3] L’appelant a été sélectionné pour l’inscription automatique à la pension de la SV à compter de mai 2020, soit le mois suivant son 65e anniversaire. Le ministre de l’Emploi et du Développement social (le ministre) dit avoir envoyé plusieurs lettres à l’appelant pour l’informer de son intention de lui accorder automatiquement sa pension de la SV. Le ministre n’a reçu aucun avis de l’appelant indiquant le souhait de retarder le début du versement de sa pension de la SV.

[4] L’appelant dit ne pas avoir reçu les lettres du ministre. Le service de sa pension de la SV a commencé en mai 2020. Toutefois, en raison de l’impôt de récupération de la SV, l’Agence du revenu du Canada (ARC) a retenu la totalité de la somme. La somme mensuelle à recevoir était nulle, et il n’y a pas eu de dépôt sur son compte bancaire. Il ne savait pas qu’il recevait une pension de la SV jusqu’à ce qu’il reçoive un feuillet T4A au début de l’année suivante.

[5] L’appelant a demandé au ministre d’annuler le service de sa pension de la SV. Le ministre a refusé cette demande parce que le délai de six mois accordé pour l’annulation était écoulé. L’appelant interjette appel au Tribunal de la sécurité sociale (le Tribunal).

Question à l’audience

[6] L’appelant était la seule partie présente à l’audience. Il a présenté son témoignage et ses observations. J’ai ajourné l’audience pour décider si j’avais besoin d’autres observations de la part du ministre. J’ai conclu que non. Le ministre a donné sa position sur la question de savoir si l’appelant avait été informé de son intention d’approuver automatiquement le versement de sa pension de la SVNote de bas de page 1. Je pense avoir tous les renseignements utiles pour rendre une décision dans cet appel.

Question en litige

[7] Je dois décider si l’appelant a le droit d’annuler le service de sa pension de la SV après qu’il a commencé en mai 2020.

La demande d’annulation du service de la pension de la SV était tardive

[8] La Loi sur la sécurité de la vieillesse (la LSV) permet aux personnes d’annuler le service de leur pension au plus tard six mois après qu’il a commencéNote de bas de page 2. L’appelant a demandé l’annulation du service de sa pension de la SV le 29 mars 2021, soit après plus de six mois après qu’il a commencéNote de bas de page 3.

Le ministre doit notifier à l’appelant son intention de le dispenser de présenter une demande de SV

[9] Le ministre fait valoir que lorsque l’appelant a été sélectionné pour l’inscription automatique à la pension de la SV, il en a été avisé par courrier. Les lettres ont été envoyées en mai 2019, février 2020 et avril 2020Note de bas de page 4.

[10] L’appelant fait valoir qu’il n’a pas reçu ces lettres et qu’il n’a donc pas été informé que le service de sa pension de la SV commencerait en mai 2020.

[11] Il existe trois critères cumulatifs que le ministre doit respecter pour verser une pensionNote de bas de page 5.

  1. i. La personne y a droit aux termes du paragraphe 3(1) ou (2) de la LSV;
  2. ii. Une demande en ce sens a été faite par cette personne ou en son nom et la demande a été approuvée;
  3. iii. Le versement de la pension n’est rétroactif que dans la mesure prévue par la présente loi.

[12] Le ministre est autorisé à renoncer au deuxième critère. Cela signifie que le ministre avait le pouvoir d’inscrire automatiquement l’appelant à la pension de la SV.

[13] Toutefois, « [L]e ministre peut dispenser une personne de l’obligation de présenter une demande », mais il doit l’en aviser par écrit. Il doit également fournir à la personne les renseignements sur lesquels il entend se fonder pour approuver le versement d’une pensionNote de bas de page 6.

[14] Cela signifie que si les renseignements requis ne sont pas communiqués à la personne, le ministre ne peut dispenser cette personne de l’obligation de présenter une demande, et il ne peut pas payer une pension.

Le ministre n’a pas informé l’appelant

[15] Je conclus que, selon la prépondérance des probabilités, le ministre n’a pas avisé l’appelant de son intention de le dispenser de présenter une demande et il ne lui a pas fourni les renseignements sur lesquels il entendait se fonder. Par conséquent, le ministre n’avait pas l’autorité légale de verser la pension de la SV à l’appelant.

[16] L’appelant prétend que, en raison d’un mauvais service de livraison du courrier, il n’a pas reçu l’avis par lequel le ministre l’informait de son intention de l’inscrire automatiquement à la pension de la SV. Il ignorait donc qu’il était tenu de [traduction] « se retirer » de l’inscription automatique au service de la pension.

[17] Le ministre fait valoir que, bien que le service de livraison du courrier de l’appelant puisse être [traduction] « irrégulier », il n’appartient pas au ministre de prendre des dispositions à cet égard. Le ministre s’est fié à l’adresse postale fournie par l’appelant pour choisir où envoyer sa correspondance.

[18] La situation est unique en l’espèce. Le ministre a présumé que Postes Canada avait livré ses lettres à l’appelant et que celui-ci avait donc été avisé de l’intention du ministre de le dispenser de l’obligation de présenter une demande ainsi que des renseignements sur lesquels le ministre s’était fondé. Cependant, rien ne prouve que l’appelant a reçu les lettres.

[19] Selon le dictionnaire Oxford, « être avisé » s’entend du fait de [traduction] « prendre connaissance de ». Comme l’ARC a retenu la pension de la SV de l’appelant, celui-ci ne pouvait pas savoir qu’il la recevait. Je conclus qu’il est plus probable qu’improbable que l’appelant n’ait pas reçu les lettres de mai 2019, février 2020 et avril 2020. Par conséquent, il ne pouvait pas « prendre connaissance de » l’avis. J’ai pris cette décision en me fondant sur les éléments de preuve exposés ci-dessous.

[20] Le témoignage de l’appelant concernant la distribution du courrier dans sa municipalité est crédible. Il ne se contente pas de prétendre qu’il n’a pas reçu les lettres du ministre de mai 2019, février 2020 et avril 2020. Il a fourni un long historique qui prouve que le courrier n’est pas distribué ou reçu de manière régulière ou qu’il est distribué à la mauvaise adresse.

[21] Il a déclaré qu’il lui a fallu cinq mois pour recevoir une nouvelle carte de crédit après en avoir annulé une précédenteNote de bas de page 7. L’appelant affirme que le problème de distribution du courrier a été porté à l’attention de son député dans le passé. Il a également présenté les résultats de trois courts sondages menés auprès des habitants de X, au Manitoba (où il vit), qui confirment que le courrier est distribué en retard, pas du tout distribué ou distribué à la mauvaise adresseNote de bas de page 8.

[22] Il doit parcourir environ 30 à 40 kilomètres entre La Salle et Winnipeg pour envoyer par la poste un colis ou acheter des timbresNote de bas de page 9. Il a spécialement fait le déplacement à Winnipeg pour poster la lettre du 29 mars 2021 demandant l’annulation de sa pension de la SV. Il s’est également rendu une nouvelle fois à Winnipeg le 19 avril 2021 pour poster sa demande de révision, et ce, parce que le service postal local n’est pas fiableNote de bas de page 10.

[23] Le 1er juin 2021, le ministre a rendu une décision découlant de la révision, et il l’a communiquée par courrier à l’appelantNote de bas de page 11. Toutefois, là encore, l’appelant ne l’a pas reçue. Il n’a pris connaissance de la décision découlant de la révision que lorsqu’il a appelé Service Canada le 19 août 2021Note de bas de page 12. Cette fois, l’appelant pouvait faire un suivi en téléphonant à Service Canada, car il savait qu’une décision devait être rendue à la suite de la révision. Cependant, il ignorait qu’il serait automatiquement inscrit à la pension de la SV, de sorte qu’il n’aurait pas pu appeler Service Canada à ce sujet ou [traduction] « se retirer ».

[24] Le ministre a fait valoir que l’appelant a effectivement reçu sa lettre du 7 avril 2021 le 19 avril 2021Note de bas de page 13. L’appelant a confirmé cela à l’audience. Cependant, même cette lettre a été remise douze jours après sa mise à la poste. Quoi qu’il en soit, le fait que l’appelant a reçu une lettre ne prouve pas qu’il a reçu les lettres de mai 2019, février 2020 et avril 2020 l’informant de l’intention du ministre de procéder à l’inscription automatique.

[25] Par conséquent, l’appelant n’a jamais été informé de l’intention du ministre de le dispenser de l’obligation de présenter une demande. Cela signifie que le ministre n’avait pas l’autorité légale de commencer à verser la pension de la SV à l’appelant. Pour cette raison, je conclus que l’appelant a demandé l’annulation de la pension dans le délai prévu par la LSV.

Conclusion

[26] Je conclus que l’appelant est admissible à l’annulation de sa pension de la SV.

[27] Cela signifie que l’appel est accueilli.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.