Sécurité de la vieillesse (SV) et Supplément de revenu garanti (SRG)

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Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : LS c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2022 TSS 848

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de la sécurité du revenu

Décision

Partie appelante : L. S.
Représentante ou représentant : C. O.
Partie répondante : Ministre de l’Emploi et du Développement social

Décision portée en appel : Décision de révision rendue le 25 octobre 2021 par le ministre de l’Emploi et du Développement social (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Wayne van der Meide
Mode d’audience : Sur la foi du dossier
Date de la décision : Le 15 août 2022
Numéro de dossier : GP-22-39

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est accueilli.

[2] J’accorde à l’appelante une prorogation du délai pour demander au ministre de réviser sa décision.

Aperçu

[3] L’appelante a demandé le Supplément de revenu garanti (SRG) en mai 2019Note de bas page 1. Dans une lettre datée du 7 juillet 2020 (décision initiale), le ministre a accepté la demande de SRG de l’appelanteNote de bas page 2. La ministre a accepté le SRG à partir du 19 mars 2019. L’appelante n’est pas d’accord avec cette décision. Elle croit avoir droit au SRG avant le 19 mars 2019.

[4] L’appelante a demandé au ministre de réviser sa décision initiale (demande de révision)Note de bas page 3. La demande de révision est datée du 11 novembre 2020. Le timbre dateur indique qu’elle a été reçue le 18 novembre 2020. Dans sa demande de révision, l’appelante explique pourquoi elle a dépassé le délai de 90 jours.

[5] Dans une lettre datée du 25 octobre 2021 (lettre de décision de révision), le ministre a déclaré : [traduction] « Nous ne pouvons pas traiter votre demande de révision parce que le délai de 90 jours est écouléNote de bas page 4. »

Questions que je dois d’abord examiner

Pourquoi j’ai tranché cet appel sur la foi du dossier

[6] Il y a différentes façons de trancher un appel. Je peux tenir une audience. Je peux également trancher un appel sur la foi du dossier. Si je tranche un appel « sur la foi du dossier », cela signifie que je tranche l’appel en fonction des observations et des documents fournis au TribunalNote de bas page 5. Le Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale fournit des directives sur la façon de choisir entre ces deux options. Le processus que je choisis doit être juste, rapide, informel et le moins coûteux possibleNote de bas page 6. Rendre une décision sur la foi du dossier peut être approprié dans les cas suivants :

  • les questions en litige ne sont pas complexes;
  • il n’y a pas de lacunes ou de questions sans réponse au dossier;
  • la crédibilité n’est pas un enjeu central à l’appel.

[7] Les questions en litige ne sont pas complexes. Il y a suffisamment d’information au dossier pour que je puisse trancher la question en litige. Les décisions du ministre figurent au dossier, et l’appelante a présenté des observations écrites. Rien n’indique que la crédibilité est une question en litige dans cet appel. Il est juste et rapide de procéder ainsi. C’est aussi la façon la plus informelle et la moins coûteuse de procéder.

L’appelante avait 90 jours pour demander au ministre de réviser une décision

[8] Si une personne n’est pas d’accord avec la décision du ministre, elle a 90 jours pour demander au ministre de réviser sa décisionNote de bas page 7.

[9] Si une personne attend plus de 90 jours avant de demander au ministre de réviser sa décision, la demande de révision est considérée comme étant présentée en retard.

Ce que le ministre doit prendre en considération lorsqu’une demande de révision est présentée en retard

[10] Le ministre peut réviser une décision même si la demande de révision est présentée en retard. Toutefois, le ministre doit être convaincu :

  • qu’il existe une explication raisonnable à l’appui de la demande de prolongation du délai;
  • que la personne a manifesté l’intention constante de demander une révisionNote de bas page 8.

Le ministre doit exercer son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire

[11] La décision du ministre d’accueillir ou de rejeter une demande de révision présentée en retard est discrétionnaire. Le ministre doit exercer son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaireNote de bas page 9.

[12] Cela signifie que le ministre ne doit pas avoir fait l’une des choses suivantes :

  • agi de mauvaise foi;
  • a agi à des fins ou pour des motifs inappropriés;
  • a pris en compte un facteur non pertinent;
  • a ignoré un facteur pertinent;
  • agi de façon discriminatoireNote de bas page 10.

[13] Mon rôle n’est pas de décider si le ministre a pris la bonne décision. C’est plutôt de vérifier s’il a exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire. Bien qu’il incombe à l’appelante de s’assurer qu’elle répond aux critères pour la prorogation du délai pour demander une révision, c’est au ministre de démontrer qu’il a agi de façon judiciaireNote de bas page 11.

Ce que je dois décider

[14] Je dois d’abord décider si la demande de révision de l’appelante a été présentée en retard. Si c’est le cas, je dois décider si le ministre a exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire lorsqu’il a refusé à l’appelante une prorogation du délai pour demander une révision.

Motifs de ma décision

[15] La demande de révision de l’appelante a été présentée en retard. Le ministre n’a pas agi de façon judiciaire en refusant de donner à l’appelante plus de temps pour présenter sa demande. J’ai décidé que l’appelante pouvait obtenir une prorogation du délai.

[16] Voici les motifs qui expliquent ma décision.

La demande de révision de l’appelante a été présentée en retard.

[17] Dans sa demande de révision, l’appelante s’est fait poser la question suivante : [traduction] « Votre demande de révision est-elle présentée dans les 90 jours suivant la réception de la lettre de décision? » L’appelante a répondu « non »Note de bas page 12.

[18] J’accepte que l’appelante a reconnu qu’elle présentait sa demande de révision après le délai de 90 jours. Cela signifie que sa demande de révision a été présentée en retard.

Le ministre a exercé son pouvoir discrétionnaire de façon non judiciaire

[19] Le ministre n’a fourni aucune information sur la façon dont il a pris sa décision. La seule information que j’ai au sujet de ce qu’il a examiné, c’est la lettre de décision de révision. Dans cette lettre, le ministre a dit : [traduction] « Nous ne pouvons pas traiter votre demande de révision parce que le délai de 90 jours est écouléNote de bas page 13 » [mise en évidence par le soussigné].

[20] Cela m’indique que non seulement le ministre n’a pas tenu compte des facteurs pertinents, il n’a tenu compte d’aucun autre facteur que le fait que la demande de révision était en retard. En ne tenant pas compte des facteurs pertinents, le ministre n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire.

Qu’arrive-t-il lorsque le ministre n’exerce pas son pouvoir discrétionnaire judiciairement?

[21] Étant donné que j’ai conclu que le ministre n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire, je dois maintenant évaluer moi-même si l’appelante peut présenter sa demande de révision en retard. Si je conclus que oui, je dois renvoyer l’affaire au ministre en lui ordonnant d’accorder à l’appelante une prorogation du délai présenter sa demande de révision. Si, par contre, je conclus que l’appelante ne peut pas présenter sa demande en retard, je dois rejeter l’appel.

L’appelante a fourni une explication raisonnable pour le retard de sa demande

[22] Dans sa demande de révision, l’appelante a expliqué pourquoi la demande était en retardNote de bas page 14. Je vais maintenant paraphraser ses explications :

  • Son dernier emploi remonte à 1990, et c’était la première fois qu’elle gérait ses propres finances et ses ordinateurs.
  • Son mari essayait de l’aider, mais c’était un Américain et il ne comprenait pas les programmes du gouvernement canadien. Elle a également dit qu’il était décédé, sans spécifier quand.
  • Elle comptait également sur sa fille pour obtenir de l’aide, mais sa fille a déménagé loin d’elle en octobre 2020. Il a fallu du temps avant d’obtenir de l’aide.
  • Elle avait de la difficulté à imprimer des formulaires.
  • Elle avait des problèmes de santé.
  • Elle comprenait mal les différentes prestations.
  • Les conditions météorologiques étaient mauvaises.

[23] L’appelante n’a pas expliqué comment les conditions météorologiques ont contribué à son retard. Sans autre explication, j’estime que ce facteur ne constitue pas une explication raisonnable pour son retard.

[24] Toutefois, j’estime que tous les autres facteurs constituent des explications raisonnables pour son retard. Il est facile de comprendre comment ces circonstances pourraient retarder la présentation de sa demande de révision.

[25] Le même jour que l’appelante a présenté sa demande, celle-ci a également signé un formulaire intitulé « Consentement à communiquer des renseignements à une personne autoriséeNote de bas page 15 ». La personne nommée est sa fille. Cela m’indique qu’elle a vraiment eu besoin de l’aide de sa fille pour régler ses affaires et qu’elle a pris les mesures nécessaires pour obtenir l’aide dont elle avait besoin.

L’appelante a manifesté l’intention constante de présenter une demande de révision

[26] L’appelante croit avoir droit au SRG avant le 19 mars 2019. Elle a demandé au ministre de réviser sa décision initiale dès qu’elle l’a pu. Elle a signé un formulaire de consentement pour permettre à sa fille de l’aider. Lorsque sa demande de révision a été refusée, elle a porté cette décision devant le Tribunal.

Conclusion

[27] Le ministre n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire d’accepter ou non la demande de l’appelante de façon judiciaire. L’appelante a fourni une explication raisonnable pour son retard. Elle avait l’intention constante de demander une révision. Par conséquent, je lui accorde plus de temps pour présenter sa demande de révision. Le ministre doit réviser sa décision initiale.

[28] Par conséquent, l’appel est accueilli.

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