Sécurité de la vieillesse (SV) et Supplément de revenu garanti (SRG)

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Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : FF c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2024 TSS 1652

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de la sécurité du revenu

Décision

Partie appelante : F. F.
Partie intimée : Ministre de l’Emploi et du Développement social
Représentante ou représentant : Neil Wood

Décision portée en appel : Décision de révision du ministre de l’Emploi et du Développement social datée du 20 décembre 2023 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Carol Wilton
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 5 novembre 2024
Personnes présentes à l’audience : Appelant
Représentant du ministre
Date de la décision : Le 25 novembre 2024
Numéro de dossier : GP-24-494

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est accueilli.

[2] L’appelant, F. F., est admissible à une augmentation de sa pension de la Sécurité de la vieillesse. Le versement commence en décembre 2011. Cette décision explique pourquoi j’accueille l’appel.

Aperçu

[3] L’appelant est né en Égypte en novembre 1946. Il a émigré au Canada. En 1983, il a commencé à cotiser au Régime de pensions du Canada. En juin 2011, il a demandé une pension de la Sécurité de la vieillesse. Dans sa demande, il a indiqué avoir travaillé à titre de missionnaire au service de X de juin 1999 à mars 2008Note de bas de page 1.

[4] En décembre 2011, le mois suivant son 65e anniversaire, le ministre a approuvé la demande de pension de la Sécurité de la vieillesse de l’appelant au taux de 16/40, en fonction de ses 16 années au CanadaNote de bas de page 2.

[5] L’appelant a déclaré qu’en plus du temps qu’il a passé au Canada, il a travaillé pendant huit ans comme missionnaire, du 14 juin 1999 au 31 mars 2008 Note de bas de page 3. De 1999 à 2005, il a travaillé pour un organisme sans but lucratif à Chypre. De 2005 à 2008, il a travaillé en Égypte, mais il recevait un salaire provenant des mêmes gens que lorsqu’il vivait à Chypre. De plus, du 1er juin 2008 au 31 janvier 2011, il a travaillé chez X, qui est un organisme chrétien sans but lucratif Note de bas de page 4.

[6] Le Canada a conclu un accord de sécurité sociale avec Chypre.

[7] Selon l’appelant, aux fins de sa pension de la Sécurité de la vieillesse, on devrait ajouter le temps pendant lequel il a travaillé à Chypre à ses années de travail au Canada. Il affirme ne jamais avoir cotisé au régime de sécurité sociale de Chypre.

[8] Selon le ministre, l’appelant a bel et bien cotisé au régime de sécurité sociale de Chypre. C’est pourquoi les années qu’il a passées à travailler à l’étranger ne peuvent pas entrer dans le calcul de ses années de résidence au Canada aux fins de la pension de la Sécurité de la vieillesse. L’appelant devrait présenter une demande aux autorités compétentes du régime de sécurité sociale de Chypre pour le versement d’une pension de vieillesse en fonction de ses années passées à travailler là-bas.

Ce que l’appelant doit prouver

[9] Pour gagner son appel, l’appelant doit prouver qu’il est admissible à une augmentation de sa pension de la Sécurité de la vieillesse en fonction de ses années de travail comme missionnaire à l’étranger.

Questions que je dois examiner en premier

Demande de révision de l’appelant

[10] En juin 2011, l’appelant a demandé une pension de la Sécurité de la vieillesse et un Supplément de revenu garantiNote de bas de page 5.

[11] Le délai habituel pour demander la révision d’une décision du ministre est de 90 jours. Cependant, la Loi sur la Sécurité de la vieillesse permet au ministre de modifier ce délaiNote de bas de page 6. Si la partie appelante met plus de 90 jours à présenter une demande de révision, le ministre doit être convaincu qu’il existe une explication raisonnable justifiant la demande de prolongation du délai et que la personne a manifesté l’intention constante de demander la révisionNote de bas de page 7.

[12] Si la demande de révision parvient au ministre après 365 jours suivant celui où la partie appelante est avisée de la décision initiale, le ministre doit être convaincu que la demande a une chance raisonnable de succès. Le ministre doit également être convaincu qu’une période plus longue pour demander une révision ne causerait de préjudices à aucune des partiesNote de bas de page 8.

[13] Le ministre a reçu la demande de révision de l’appelant le 1er mai 2023Note de bas de page 9. Le ministre a examiné la demande et envoyé une lettre de décision de révision en janvier 2024Note de bas de page 10. Il a maintenu sa décision de refuser à l’appelant une augmentation de sa pension de la Sécurité de la vieillesse. Je considère que le ministre savait que la demande de révision était en retard et qu’il a décidé d’aller de l’avant malgré tout. Le ministre a accordé une prolongation du délai de présentation de la demande.

Une seule question en litige

[14] À la fin de l’audience, les parties étaient d’accord sur tous les éléments, sauf sur la question de savoir si l’impôt sur le revenu que l’appelant a payé à Chypre le rendait admissible à des prestations de sécurité sociale là-basNote de bas de page 11. Il n’y avait aucune preuve écrite à ce sujet dans les documents portés à ma connaissance.

[15] Le ministre aurait pu demander au gouvernement de Chypre des renseignements sur l’admissibilité de l’appelant aux prestations de vieillesse de ce pays. Il ne l’a pas fait. Le ministre a plutôt proposé à l’appelant de faire une demande de prestations à Chypre. L’appelant ne l’a pas fait, car il est certain de ne pas remplir les conditions d’admissibilité. Entre autres emplois, il a dirigé le bureau des affaires de son organisme à Chypre, et était donc en mesure de savoir ce à quoi il était admissible.

Motifs de ma décision

[16] Une personne réside au Canada si elle établit sa demeure et vit ordinairement dans une région du CanadaNote de bas de page 12. Les versements de la pension de la Sécurité de la vieillesse sont calculés en fonction des années de résidence au Canada.

[17] Dans certaines circonstances, lorsqu’une personne qui réside au Canada s’absente du pays, on considère que cette absence n’interrompt pas sa résidence au Canada. Cela comprend les absences d’une personne qui travaille à titre de missionnaire membre d’un groupe ou d’un organisme religieuxNote de bas de page 13.

[18] Il arrive qu’une personne qui réside dans un autre pays cotise au régime de sécurité sociale à l’étranger. S’il y a un accord de sécurité sociale entre ce deuxième pays et le Canada, une personne résidant au Canada peut recevoir des prestations de sécurité sociale de ce deuxième pays après son retour ici. Si elle le fait, elle ne peut pas, par exemple, recevoir également une pension de la Sécurité de la vieillesse du Canada pour la même période. (Afin d’éviter la double rémunération.) De plus, la personne ne sera pas considérée comme résidente du Canada pendant la période au cours de laquelle elle a vécu à l’étranger et a cotisé au régime de sécurité sociale d’un autre paysNote de bas de page 14.

[19] Une personne qui a établi sa résidence au Canada, mais qui travaille comme missionnaire dans un autre pays, doit revenir au Canada dans les six mois suivant la fin de son emploi à l’étranger. Autrement, on considèrera que sa résidence a été interrompue par son séjour à l’étrangerNote de bas de page 15.

Ce que l’appelant dit de son séjour à Chypre

[20] L’appelant a déclaré avoir travaillé à Chypre à titre de missionnaire presbytérien au service d’un organisme appelé X du 14 juin 1999 au 31 mars 2008. Il a ensuite travaillé en Égypte, également à titre de missionnaire. Pendant cette période, lorsqu’il se trouvait en Égypte, il supervisait également le bureau de l’organisme à Chypre. Il s’y rendait deux fois par mois. Son salaire provenait des mêmes gens que lorsqu’il travaillait à Chypre.

[21] L’appelant a maintenu catégoriquement qu’en tant qu’employé d’un organisme sans but lucratif, il n’a pas cotisé au régime d’assurance sociale chypriote.

[22] De juin 2008 à janvier 2011, l’appelant a travaillé en Égypte pour un autre organisme religieux appelé XNote de bas de page 16. Il a déclaré qu’il a également effectué du travail missionnaire là-bas. Il était directeur des affaires de l’organisation. Il a aussi supervisé des missionnaires qui donnaient des cours sur la Bible en Afrique du Nord.

[23] En février 2011, le gouvernement canadien a conseillé à l’appelant de revenir au Canada en raison de troubles civils en ÉgypteNote de bas de page 17. L’appelant réside au Canada depuis février 2011.

Ce que dit le représentant du ministre

[24] Le représentant du ministre a accepté le fait que l’appelant a travaillé à titre de missionnaire de juin 1999 à janvier 2011. Le représentant était d’accord pour dire que la question de savoir si l’appelant a travaillé pour un organisme missionnaire canadien ou non était sans importance. Il a accepté le fait que l’appelant est revenu au Canada dans un délai de six mois après la fin de sa période d’emploiNote de bas de page 18.

[25] Il reste à savoir si l’appelant a cotisé au régime de sécurité sociale chypriote afin d’être admissible au versement d’une pension de vieillesse de Chypre pour les années où il a versé des cotisations, le cas échéant.

[26] Le ministre était d’avis que l’appelant avait un nombre suffisant d’années de cotisations, sans tenir compte du temps qu’il a passé à l’étranger de 1999 à 2008, pour atteindre le nombre minimum de 10 ans qui permet de toucher une pension partielle de la Sécurité de la vieillesseNote de bas de page 19.

[27] Le ministre a une division des opérations internationales, qui envoie des demandes à des pays étrangers pour se renseigner, entre autres choses, sur les prestations de ces pays auxquelles une partie appelante pourrait être admissible. Le représentant du ministre a déclaré qu’on n’avait pas envoyé de demande de ce genre à Chypre au nom de l’appelant.

Mes constatations

[28] Je considère qu’il est plus probable que le contraire que l’appelant a été missionnaire à Chypre et en Égypte de 1999 à 2008. J’estime également qu’il est plus probable qu’improbable qu’il n’est pas admissible à une pension de vieillesse de Chypre. Il connaissait le régime de sécurité sociale de Chypre. S’il croyait être admissible à une pension de vieillesse de ce pays, il semble probable qu’il en aurait fait la demande.

[29] L’appelant est revenu au Canada au début de 2011, dans un délai de six mois après la fin de sa période de travail missionnaire à Chypre et en Égypte.

[30] Comme le ministre n’a fourni aucun élément de preuve selon lequel l’appelant a cotisé au régime de sécurité sociale de Chypre, je conclus que ce dernier est admissible à la pension de la Sécurité de la vieillesse pour la période qui va de juin 1999 à janvier 2008.

Début du versement de la pension

[31] En plus des versements de pension de la Sécurité de la vieillesse qu’il reçoit depuis 2011, l’appelant est admissible à une somme en fonction du temps au cours duquel il a travaillé à Chypre de 1999 à 2008. Le versement devrait commencer le mois suivant la date à laquelle il est réputé avoir présenté sa demande. Cela correspond à novembre 2011, soit le mois précédant le début du versement de sa pension de la Sécurité de la vieillesseNote de bas de page 20.

[32] Le séjour de l’appelant à Chypre et en Égypte a duré du 14 juin 1999 au 31 mars 2008. Cela correspond à 8 ans, 9 mois et 17 jours. En plus de ce qu’il a déjà reçu pour ses quelque 16 années au Canada, l’appelant est admissible au versement de la pension de la Sécurité de la vieillesse pour 8 ans, 9 mois et 17 jours, rétroactivement à décembre 2011.

Conclusion

[33] Je conclus que l’appelant est admissible à une augmentation de sa pension de la Sécurité de la vieillesse.

[34] Par conséquent, l’appel est accueilli.

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