Sécurité de la vieillesse (SV) et Supplément de revenu garanti (SRG)

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[TRADUCTION]

Citation : CW c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2025 TSS 816

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de la sécurité du revenu

Décision interlocutoire

Partie appelante : C. W.
Partie intimée : Ministre de l’Emploi et du Développement social
Représentante et représentant : Rebekah Ferriss et Yanick Belanger

Décision portée en appel : Décision de révision datée du 25 mars 2024 rendue par le ministre de l’Emploi et du Développement social (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Shannon Russell
Mode d’audience :
Date de la décision : Le 1er août 2025
Numéro de dossier : GP-24-1173

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Décision interlocutoire

[1] L’appelante, C. W., a déposé un avis de contestation fondée sur la Charte canadienne des droits et libertés. Son avis est conforme à l’article 1(1) du Règlement de 2022 sur le Tribunal de la sécurité sociale.

Aperçu

[2] La présente décision interlocutoire sert à décider si l’avis de l’appelante est conforme à l’article 1(1) du Règlement de 2022.

[3] À titre d’information, l’appelante a demandé l’Allocation au survivant en février 2023. Dans sa demande, elle a déclaré que son époux est décédé en août 1986. C’était une erreur, car le certificat de décès indique que son époux est décédé en août 1996. Quoi qu’il en soit, l’appelante a mentionné qu’elle s’est remariée en février 2001 et qu’elle a divorcé en décembre 2010 Note de bas de page 1.

[4] Le ministre de l’Emploi et du Développement social a rejeté la demande initialement et après révision. Le ministre a expliqué qu’il ne pouvait pas approuver la demande parce que l’appelante s’est remariée après le décès de son époux, alors elle ne correspondait pas à la définition de « survivant » Note de bas de page 2.

[5] L’appelante a fait appel de la décision de révision du ministre devant la division générale du Tribunal de la sécurité sociale.

[6] Après avoir déposé son appel au Tribunal, l’appelante a soulevé des arguments en vue de contester la Charte. Elle a déposé son avis de contestation en avril 2025 Note de bas de page 3.

Avis exigé

[7] Le Règlement de 2022 exige qu’une personne dépose un avis pour faire une contestation fondée sur la Charte.

[8] Voici l’article 1(1) du Règlement de 2022 :

  1. 1(1) La partie qui veut contester la validité, l’applicabilité ou l’effet, sur le plan constitutionnel, d’une disposition du Régime de pensions du Canada, de la Loi sur la sécurité de la vieillesse, de la Loi sur l’assurance-emploi, de la partie 5 de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social ou des règles ou règlements pris en vertu de l’une ou l’autre de ces lois, dépose auprès du Tribunal un avis dans lequel elle énonce ce qui suit :
  2. a) la disposition visée;
  3. b) les faits substantiels à l’appui de la contestation;
  4. c) un résumé du fondement juridique de la contestation.

[9] Je vais expliquer en quoi consistent les éléments requis.

a) la disposition visée

[10] L’avis doit préciser la disposition qui sera contestée.

[11] Le Tribunal a seulement compétence (c’est-à-dire le pouvoir) pour examiner une contestation constitutionnelle liée à un article précis de l’une des lois qu’il applique. Autrement dit, il ne peut pas se pencher sur une contestation constitutionnelle liée à une décision du ministre ou à une loi qui n’est pas citée à l’article 1(1).

[12] La partie appelante doit être en mesure de nommer dès le départ la loi et l’article qu’elle veut contester.

b) les faits substantiels à l’appui de la contestation

[13] L’avis doit préciser les faits substantiels à l’appui de la contestation. Il s’agit d’une nouvelle exigence. Auparavant, le Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale n’exigeait pas que la partie fournisse les faits substantiels.

[14] Les faits substantiels sont importants parce qu’on ne peut pas trancher une question relative à la Charte sans une bonne compréhension du contexte factuel qui a mené à la violation présumée des droits de la partie appelante Note de bas de page 4.

[15] Pour satisfaire à cette exigence, la partie appelante doit énoncer, avec assez de précision, les éléments constitutifs de chacun des moyens de droit soulevé Note de bas de page 5.

c) un résumé du fondement juridique de la contestation

[16] Enfin, le Règlement de 2022 exige que la partie appelante fournisse un résumé du fondement juridique qu’elle a l’intention de présenter. Il s’agit aussi d’une nouvelle exigence. Auparavant, le Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale exigeait seulement que la partie appelante fournisse « toutes observations à l’appui de la question soulevée Note de bas de page 6 ».

[17] Certaines personnes qui ont rendu des décisions dans le passé ont cru que le mot « toutes » voulait dire que les observations étaient optionnelles. Cependant, si des observations étaient présentées, elles devaient se rapporter à la question et être pertinentes. Elles devaient être assez précises pour permettre à tout le moins de percevoir les grandes lignes d’un argument fondé sur la Charte Note de bas de page 7.

[18] La modification apportée au Règlement de 2022 signifie que l’appelante doit fournir un résumé du fondement de la contestation qu’elle a l’intention de présenter. Ce n’est pas optionnel. Et ce fondement doit être juridique. Autrement dit, il doit être formulé conformément aux critères juridiques applicables qui ont été établis par la jurisprudence.

Ce que dit l’avis de l’appelante

[19] Dans son avis, l’appelante déclare qu’elle a l’intention de contester l’article 19 de la Loi sur la sécurité de la vieillesse, qui repose sur la définition de « survivant » de l’article 2. Elle explique que cette définition restreint l’admissibilité à l’Allocation au survivant aux personnes qui ne se sont pas remariées ou qui n’ont pas été dans une union de fait après le décès d’une épouse ou d’un époux. Elle affirme que cette restriction porte atteinte à ses droits garantis par les articles 7 et 15(1) de la Charte.

Ce que le ministre dit au sujet de l’avis de l’appelante

[20] Le ministre affirme que l’appelante a bien énoncé les dispositions qu’elle veut contester et qu’elle a exposé les faits substantiels à l’appui de sa contestation. Toutefois, selon le ministre, l’avis ne répond pas à l’exigence de l’article 1(1)(c) du Règlement de 2022, car l’appelante n’a fourni aucun argument qui a une chance raisonnable de succès. Le ministre souligne que la division d’appel du Tribunal a récemment précisé que le résumé du fondement juridique doit contenir un argument qui a une chance raisonnable de succès Note de bas de page 8.

Analyse

[21] L’avis de l’appelante est conforme à l’article 1(1) du Règlement de 2022. Je vais examiner chacune des trois exigences de cet article.

I - L’avis est-il conforme à l’article 1(1)(a) du Règlement de 2022?

[22] L’appelante affirme qu’elle conteste l’article 19 de la Loi sur la sécurité de la vieillesse, qui repose sur la définition de « survivant » de l’article 2 Note de bas de page 9.

[23] L’article 19 porte sur les allocations en général. Il n’est pas question de l’Allocation au survivant. Par conséquent, l’article 19 n’est pas pertinent dans l’appel.

[24] C’est l’article 21 de la Loi sur la sécurité de la vieillesse qui énonce les conditions d’admissibilité à l’Allocation au survivant. C’est cet article qui comprend le mot « survivant ».

[25] Quoi qu’il en soit, l’appelante a cité à juste titre l’article 2 de la Loi sur la sécurité de la vieillesse et a fait référence précisément à la définition de « survivant » de cet article.

[26] Quand on lit l’avis de l’appelante au complet, on voit qu’il porte en réalité sur la façon dont le mot « survivant » est défini. L’article 2 définit le terme « survivant » comme une personne dont l’épouse ou l’époux ou la conjointe ou le conjoint de fait est décédé et qui n’est pas, depuis ce décès, devenue l’épouse ou l’époux ou la conjointe ou le conjoint de fait d’une autre personne.

[27] L’appelante a précisé que sa contestation s’inscrit dans le contexte de l’admissibilité à l’Allocation au survivant.

[28] Par conséquent, son avis est conforme à l’article 1(1)(a) du Règlement de 2022. L’appelante conteste la définition de « survivant » de l’article 2 de la Loi sur la sécurité de la vieillesse, qui est à la base de l’article 21.

II - L’avis est-il conforme à l’article 1(1)(b) du Règlement de 2022?

[29] L’avis est conforme à l’article 1(1)(b), et le ministre le reconnaît.

[30] L’appelante a expliqué « qui a fait quoi et quand ». Elle a fourni les faits à l’appui de l’injustice présumée. Et ces faits concordent avec les éléments de sa contestation fondée sur la Charte.

[31] Voici quelques faits substantiels que l’appelante a fournis :

  • Son premier époux est décédé le 2 août 1996.
  • Elle s’est remariée le 17 février 2001.
  • Son deuxième mariage s’est terminé par un divorce en 2010.
  • Elle ne reçoit aucune pension alimentaire ni prestation financière découlant de son deuxième mariage.
  • Elle a demandé l’Allocation au survivant en février 2023. Elle remplissait l’exigence relative au revenu parce que celui-ci était de 16 143 $, ce qui est bien moins que le seuil établi.
  • Sa demande a été rejetée parce qu’elle s’était remariée.
  • Le rejet de sa demande l’a rendue incapable de subvenir à ses besoins essentiels, ce qui met sa santé et sa sécurité financière à risque.
  • Actuellement, elle compte sur une banque alimentaire et sur l’Adult Health Benefit de l’Alberta pour l’aider à payer ses ordonnances et ses services dentaires.
  • Elle ne peut pas se permettre d’acheter les suppléments dont elle a besoin pour empêcher l’inflammation causée par sa maladie auto-immune.

[32] L’appelante mentionne d’autres faits et ressources sur lesquels elle a l’intention de s’appuyer, comme :

  • des statistiques de 2022 de Statistique Canada sur le taux d’insécurité alimentaire au Canada;
  • des preuves selon lesquelles la pauvreté est liée à des taux plus élevés de maladies chroniques chez les personnes âgées;
  • des études qui révèlent que les coûts rattachés à la santé, comme les services de repas et le transport, sont exclus des mesures de la pauvreté;
  • des données qui montrent que les veuves qui ont eu plus d’un mariage vivent souvent dans la précarité financière;
  • des statistiques sur l’écart de pension entre les sexes;
  • des statistiques sur l’écart salarial entre les sexes.

III - L’avis est-il conforme à l’article 1(1)(c) du Règlement de 2022?

[33] L’avis est conforme à l’article 1(1)(c). Je vais commencer par examiner l’argument de l’appelante fondé sur l’article 7 de la Charte.

Argument fondé sur l’article 7 de la Charte

Objet de l’article 7 de la Charte

[34] L’article 7 prévoit ce qui suit :

Chacun a droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne; il ne peut être porté atteinte à ce droit qu’en conformité avec les principes de justice fondamentale.

[35] Pour évaluer un argument fondé sur l’article 7, il faut se poser deux questions. Premièrement, y a-t-il une atteinte à l’un des trois droits garantis? Deuxièmement, l’atteinte est-elle conforme aux principes de justice fondamentale Note de bas de page 10?

Ce que dit l’appelante

[36] L’appelante affirme que son droit à la sécurité a été violé. Elle fait valoir que la définition restreinte du mot « survivant » menace sa sécurité, puisque cette définition la met à risque de pauvreté (obstacle à la sécurité financière) et de problèmes de santé (obstacle au bien-être).

[37] L’appelante reconnaît que les tribunaux font preuve de prudence quant à l’extension de l’article 7 à des droits purement économiques. Cependant, elle dit que certaines décisions donnent à penser que l’article 7 peut protéger une personne d’un acte de l’État qui compromet sa sécurité Note de bas de page 11. De plus, elle fait référence à une décision intitulée PHS Community Services Society Note de bas de page 12 pour avancer qu’une loi peut enfreindre l’article 7 si elle crée un risque pour la santé en empêchant l’accès à des soins.

[38] En ce qui concerne les principes de justice fondamentale, l’appelante affirme que la règle qui consiste à refuser l’Allocation au survivant aux personnes qui se sont remariées est arbitraire et repose sur l’hypothèse qu’un remariage assure la sécurité financière Note de bas de page 13. L’appelante ajoute que la règle est trop générale, car elle s’applique à toutes les veuves qui ont eu plus d’un mariage sans tenir compte des circonstances particulières.

Ce que dit le ministre

[39] Le ministre affirme que l’argument de l’appelante fondé sur l’article 7 n’a aucune chance raisonnable de succès, car cet article ne garantit pas le droit à la sécurité financière Note de bas de page 14. La sécurité de la personne, c’est la protection contre tout préjudice psychologique et physique causé par l’État Note de bas de page 15. La sécurité de la personne n’englobe aucun droit économique et n’impose pas non plus à l’État l’obligation positive de garantir la sécurité financière Note de bas de page 16. Le ministre est d’avis que l’appelante n’a présenté aucun argument ou n’a pas laissé entendre qu’elle présenterait un argument qui ébranlerait cette approche à propos de l’article 7 et son application Note de bas de page 17.

Mes conclusions sur l’argument fondé sur l’article 7

[40] Je reconnais que la division d’appel du Tribunal a récemment établi que l’article 1(1)(c) du Règlement de 2022 exige qu’une personne fournisse le résumé d’un fondement juridique (pour appuyer sa contestation constitutionnelle) qui a une chance raisonnable de succès Note de bas de page 18.

[41] Cependant, dans l’affaire que la division d’appel a examinée récemment, le prestataire tentait de soulever un argument incompatible avec une décision de la Cour suprême du Canada. Le prestataire s’appuyait sur des principes constitutionnels non écrits comme la règle de l’imprécision pour invalider des articles de la Loi sur l’assurance-emploi. La division d’appel a conclu que la division générale n’avait pas commis d’erreur lorsqu’elle s’était appuyée sur une décision de la Cour suprême selon laquelle des principes constitutionnels non écrits ne peuvent pas servir de fondement pour invalider une loi Note de bas de page 19.

[42] Dans l’affaire dont je suis saisie, l’appelante ne tente pas de soulever un argument au sujet d’un aspect de la loi que les tribunaux interprètent fermement. Elle soulève un argument au sujet d’un aspect de la loi sur lequel les tribunaux ne sont pas tout à fait catégoriques (les droits économiques) Note de bas de page 20. Elle soulève aussi un argument (l’accès aux soins de santé) qui, selon la jurisprudence, entre dans le champ d’application de l’article 7 Note de bas de page 21.

[43] L’appelante peut avoir de la difficulté à faire valoir son point de vue au sujet de l’article 7. Cependant, cela ne veut pas dire qu’elle ne répond pas à l’exigence de l’article 1(1)(c) du Règlement de 2022. Elle a mentionné les droits qui lui sont garantis, a résumé son argument selon lequel le refus d’une allocation aux personnes qui se sont remariées est contraire aux principes de justice fondamentale et a fait référence à ce que la Cour suprême a expliqué au sujet des droits économiques et de l’article 7 de la Charte.

Argument fondé sur l’article 15(1) de la Charte

Objet de l’article 15(1) de la Charte

[44] L’article 15(1) prévoit ce qui suit :

La loi ne fait acception de personne et s’applique également à tous, et tous ont droit à la même protection et au même bénéfice de la loi, indépendamment de toute discrimination, notamment des discriminations fondées sur la race, l’origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, le sexe, l’âge ou les déficiences mentales ou physiques.

[45] Pour prouver qu’il y a violation de l’article 15(1), une personne doit démontrer que la loi contestée :

  1. 1. crée, à première vue ou de par son effet, une distinction fondée sur un motif énuméré ou analogue;
  2. 2. impose un fardeau ou nie un avantage d’une manière qui a pour effet de renforcer, de perpétuer ou d’accentuer le désavantage Note de bas de page 22.

[46] Il ne suffit pas que la personne démontre que la loi crée une distinction. La personne doit démontrer que la distinction est fondée sur un motif énuméré ou analogue (semblable).

Ce que dit l’appelante

[47] Si je comprends bien, l’appelante soutient que la définition de « survivant » occasionne une discrimination fondée sur l’état matrimonial parce que cette définition crée une distinction entre les personnes survivantes qui se sont remariées et celles qui ne se sont pas remariées après le décès d’une épouse ou d’un époux.

[48] L’appelante soutient aussi que cette distinction occasionne une discrimination fondée sur le sexe parce qu’elle touche les femmes de façon disproportionnée. En effet, les femmes sont plus susceptibles de devenir veuves en raison de leur espérance de vie plus longue, et leurs revenus sont plus faibles que ceux des hommes.

[49] Au sujet de la deuxième partie du critère relatif à l’article 15(1), l’appelante fait valoir que la définition de « survivant » perpétue le stéréotype de la dépendance des femmes, à savoir qu’une autre épouse ou un autre époux subviendra financièrement aux besoins de la veuve. L’appelante ajoute que le refus de l’Allocation au survivant renforce les tendances historiques de vulnérabilité économique des femmes.

Ce que dit le ministre

[50] Le ministre affirme que l’argument de l’appelante fondé sur l’article 15(1) n’a aucune chance raisonnable de succès, car cette dernière n’a pas clairement montré qu’il y avait une distinction fondée sur le sexe ou l’état matrimonial, comme l’exige la première partie du critère relatif à l’article 15(1).

[51] Selon le ministre, les arguments de l’appelante exposent un désavantage systémique qui touche les femmes en général. Le ministre explique que ce n’est pas suffisant pour démontrer que la loi elle-même crée une distinction.

[52] Le ministre s’appuie sur la décision Weatherley de la Cour d’appel fédérale Note de bas de page 23. Dans cette affaire, la requérante contestait la constitutionnalité de la disposition du Régime de pensions du Canada selon laquelle une personne peut recevoir une seule pension de survivant. La requérante affirmait que la disposition occasionnait une discrimination fondée le sexe. Le ministre fait remarquer que la Cour d’appel fédérale a déclaré que des éléments de preuve concernant le désavantage général des femmes par rapport aux hommes ne suffisaient pas pour démontrer le lien requis entre la disposition contestée et la distinction présumée. Le ministre ajoute que la requérante dans l’affaire Weatherley a retiré son argument précédent concernant la discrimination fondée sur son état matrimonial (elle avait invoqué le fait d’être deux fois veuve) et que la Cour d’appel fédérale a dit que c’était une sage décision de sa part Note de bas de page 24.

Mes conclusions

[53] Le résumé du fondement juridique de l’appelante satisfait à l’exigence de l’article 1(1)(c) du Règlement de 2022.

[54] L’appelante a expliqué la distinction présumée et ce sur quoi elle s’appuie. Elle a aussi résumé les arguments qu’elle a l’intention de présenter sur la façon dont la loi contestée perpétue les stéréotypes et les désavantages historiques.

[55] Dans l’affaire Weatherley, l’observation de la Cour d’appel fédérale concernant le retrait de l’argument sur « le fait d’être deux fois veuve » a été formulée dans un contexte précis. La Cour d’appel fédérale a précisé que ce motif particulier n’était pas reconnu comme un motif analogue et que la requérante n’avait pas fourni assez d’éléments de preuve pour appuyer la reconnaissance de ce motif Note de bas de page 25. Dans la présente affaire, l’appelante n’invoque pas de distinction fondée sur un motif analogue comme « le fait d’être deux fois veuve » ou même quelque chose comme « le fait d’être veuve et divorcée ». Elle s’appuie, de façon plus générale, sur le motif analogue déjà reconnu de l’état matrimonial.

[56] Je reconnais que la Cour d’appel fédérale a établi dans l’affaire Weatherley que des éléments de preuve concernant le désavantage général des femmes par rapport aux hommes ne suffisaient pas pour démontrer le lien requis entre la disposition contestée et la distinction présumée. Toutefois, dans l’affaire Weatherley, la Cour d’appel fédérale évaluait la preuve que la requérante avait déposée à l’appui de son argument fondé sur l’article 15(1). Je rappelle que la présente affaire en est seulement aux premières étapes d’une contestation fondée sur la Charte. Je n’ai pas encore d’éléments de preuve à évaluer. Il serait inapproprié de ma part de conclure que l’avis de l’appelante ne satisfait pas à l’article 1(1)(c) du Règlement de 2022 simplement parce que l’appelante pourrait déposer des éléments de preuve trop généraux.

Conclusion

[57] L’avis de contestation de l’appelante est conforme à l’article 1(1) du Règlement de 2022. Dans la prochaine étape du processus, l’appelante pourra déposer son dossier de contestation fondée sur la Charte. Je vais tenir une conférence préparatoire sous peu. À ce moment-là, je vais fixer la date limite pour la réception du dossier de l’appelante.

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